Vous vous souvenez que Retro Gamekyo avait proposé une série de cinq tests afin de raconter le début de l'épopée de la PC-Engine ? C'était il y a déjà un bon moment. Je me suis dis qu'il était temps d'aborder à nouveau le sujet et compléter un petit peu les informations que nous avons déjà vues ensemble, car le projet PC-Engine reste probablement un des plus intéressants et passionnants de toute l'industrie du jeu vidéo, proposant un véritable florilège d'anecdote en tout genre !
Si vous ne vous souvenez pas de ce que nous avions vu auparavant, je vous conseille fortement de relire les cinq articles suivant dans cet ordre (cliquez sur les titres pour accéder aux tests):
Dans le test de The Kung-Fu, nous avions abordé la nécessité d'avoir des jeux vitrines capables de démontrer la puissance du hardware d'une machine nouvellement créée. Le line-up de lancement de la PC-Engine avait un but bien précis. Pour résumer : Shanghai devait montrer les capacités de la console a afficher des caractères d'écriture japonais lisibles et nets contrairement au pixel floutés de sa rivale la Famicom (en plus du fait que le mah-jong, même en jeu vidéo est un loisir extrêmement populaire chez nos amis nippons, succès commercial assuré). Bikkuriman World devait proposer un jeu de plate-forme tout public reprenant un célèbre concept de jeu d'arcade (Wonder Boy in Monster Land de SEGA) qui avait déjà eu un grand succès au Japon. The Kung-Fu était la baffe graphique de la console, quand bien même son gameplay était plus que limité. Katô Chan et Ken Chan était comme Bikkuriman World un jeu tout public s'appuyant sur deux vedettes de la télévision japonaise ultra populaires afin de donner à la console un poids lourd commercial. Et enfin, Victory Run était là encore une vitrine technologique de choix mais qui, contrairement à The Kung-Fu proposait un gameplay véritable et du challenge.
C'était une stratégie bien rodée, les jeux présentés ci-dessous ont tous eu leur petit succès et avaient marqués le pays à leur époque. Mais il en fallait plus pour déstabiliser Nintendo et la reine Famicom/NES, cela, NEC et Hudson le savait.
Un des fers de lance de la communication de NEC pour imposer sa PC-Engine était de dire que celle-ci était plus puissante que n'importe laquelle de ses rivales. Et c'était absolument vrai, l'écart hardware entre la PC-Engine (sorti en 1987) et la Famicom (sorti en 1983) était indécent. La console à l'abeille était même plus puissante que la Master System sorti en 1985 ! De plus, son système de ''Core Kôsô'' qui consistait à implanter des périphériques autour de la console pour lui ajouter un tas de fonctionnalité et lire de nouveaux formats de jeux lui donnait un côté très sophistiqué. Les passionnés d'informatique et les geek en puissance avaient de quoi être charmés, la PC-Engine était une machine qui inspirait puissance et luxe pour un prix toutefois très abordable.
Ainsi, pour bien souligner, une fois encore que la PC-Engine était une bête de puissance, Hudson a décidé de s'attaquer à l'Arcade. Dans les années 80, contrairement à aujourd'hui, les révolutions technologiques, notamment graphiques provenaient de l'Arcade où les hardware des bornes étaient bien supérieurs aux consoles de salon. On ne compte plus les portages ratés de l'Arcade vers les consoles de salon car celle-ci n'avaient pas la puissance nécessaire pour retranscrire fidèlement le jeu de base (niveaux en moins, sons de qualité médiocre, sprites moins détaillés, chutes de frame-rate, jeux de couleurs plus fades, les tares de ce type de portage sont nombreuses). Quoi de mieux alors que de sélectionner le grand hit d'Arcade du moment : R-Type !
Lorsque Irem, le créateur de R-Type cède les droits à Hudson pour développer une version du jeu sur leur PC-Engine, la console n'est pas encore sortie mais déjà le constructeur promet un portage très fidèle et impressionnant. En 1987, il est inconcevable de retrouver à 100% l'expérience d'un jeu Arcade à la maison, les meilleurs exemples dans le domaine étant Out Run et Space Harrier de SEGA (Master System), mais cela n'était pas parfait. Puis, bien vite, les premières comparaisons tombent et c'est le choc, le portage PC-Engine s'avère identique à son modèle Arcade, c'est une prouesse graphique sans précédent. Les journalistes jurent qu'en ayant joué aux démo que Hudson leur avaient envoyés, ils avaient retrouvés la fluidité du jeu d'origine sur la petite console blanche à carte.
Hudson avait réussi son coup, à nouveau, et avait démontré à quel point sa console était fabuleuse et puissante, s'offrant par la même occasion une exclusivité temporaire de choix en la présence d'un très bon shoot them up, le fameux R-Type (si vous n'avez toujours pas compris que ce jeu fait l'objet d'un retro test aujourd'hui, prenez un gros café bien fort pour vous réveiller ).
Cependant, ce coup d'éclat eut un coût. En effet, les ingénieurs d'Hudson se rendent compte que pour intégrer tous les niveaux de R-Type, au nombre de 8, une seule HuCARD ne suffit pas (pour rappel, les HuCARD sont les cartes où sont stockés les jeux, semblables à des cartes téléphoniques prépayées, bien plus petites que des cartouches donc). Un dilemme se posent alors à leur conscience. Garder la qualité du jeu quitte à supprimer des niveaux par manque de place mémoire ; ou conserver l'intégralité du jeu quitte à le rendre moins beau que d'origine et tanpi pour la fidélité. L'un comme l'autre, cela ruinerait la stratégie de NEC et d'Hudson et leur promesse de retrouver un jeu à l'exact identique dans le salon des joueurs tomberait à l'eau.
Chez Hudson, la question fait grand débat, mais les paroles de Toshinori Oyama, jeune programmeur de génie devenu chef de projet, nous aident à y voir plus clair dans l'état d'esprit de la firme : « R-Type faisait partie de notre stratégie pour démontrer la puissance de notre hardware. Nous voulions donc, coûte que coûte, réaliser un portage parfait de la version Arcade ! Mais comme cela ne tenait pas sur une seule HuCARD, un employé a alors dit ''et si on coupait le jeu en deux ?''. Son idée fut adoptée à l'unanimité ! Nous prenions le risque de vendre moins de copies mais c'était indispensable pour que les gens se souviennent de notre console. »
C'est ainsi qu'est décidé de scinder le jeu en deux. La première partie, R-Type I comprend les quatre premiers niveaux. La seconde partie, R-Type II comprend les quatre derniers niveaux. Cependant, on note là une petite roublardise de la part d'Hudson qui choisi d'appeler les jeux R-Type I et II alors que sur leur écran titre, il est bien spécifié "part one" et "part two". Ainsi, les joueurs pensant pouvoir acheter un tout nouveau jeu de la saga de shoot them up de Irem se ruent sur la seconde HuCARD disponible quelques mois après la sortie de la première, le 3 Juin 1988. Le véritable R-Type II ne sortira en Arcade qu'en 1989. Un ingénieux système de mot de passe permet aux joueurs, lorsqu'ils terminent la première partie de transposer leur score et leur avancé pour débuter la seconde moitié du jeu. Quoiqu'il en soit, le portage demande beaucoup d’énergie à une équipe minuscule de développement : cinq personnes à peine. En seulement quatre mois de dures labeurs, le projet arrive à son terme, c'est un record pour un jeu de cette envergure et Oyama de préciser : « L'équipe qui s'occupait du portage était super motivée. Je me souviens que certain ont même emportés des kits de développement pour continuer à travailler chez eux pendant les traditionnelles fêtes de fin d'année. ».
Pari réussi, R-Type sur PC-Engine est un des hits de 1988, salué unanimement, la légende est née. Mais qu'en est-il réellement ? Qu'est-ce que R-Type ? Après cette longue introduction, nous allons enfin nous intéresser au cœur du sujet, le jeu !
R-Type, c'est la réponse cinglante d'Irem à Konami et son Gradius sorti en 1985. Fondamentalement, R-Type est un shoot them up horizontal qui se permet d'ajouter quelques éléments perso à la recette de Gradius en terme de jouabilité, et en sus qui se part d'un univers graphique unique pour son époque. Très largement inspiré de l'univers biomécanique de H.R. Giger (décidément, après BioMetal, les shmup aiment bien s'inspirer de ce monsieur...), R-Type ose, est audacieux dans ses choix visuels et offre une claque technique sans précédent. Son vaisseau, le Type R (d'où le nom du jeu) dispose d'un design qui en fera un des véhicules de jeu vidéo les plus connus de l'histoire, se démarquant de son ainé au design plus traditionnel dans Gradius.
En 2120, le Forerunner, un navire d'exploration spatial rentre sur Terre après 18 ans de voyage. Il ramène à son bord une forme de vie particulière baptisée Bydo, un organisme qui permet de concentrer une quantité phénoménale d'énergie. Évidemment, la race humaine se sert immédiatement de Bydo pour fabriquer des armes de nouvelle génération dotées d'un pouvoir de destruction extrême. Un laboratoire est spécialement construit près de Jupiter afin de mener toutes les expériences sans aucun frein de la part de l'opinion publique. L'aventure tourne au drame et la station spatiale est totalement détruite, à la place se trouve une brèche spatio-temporelle alimentée par l'énergie Bydo. En parallèle de cela, le 7ème modèle de vaisseau spatial de la gamme R, le R7 est créé et envoyé pour résoudre le problème. Seulement voilà, un étrange phénomène se passe et l'énergie de Bydo fusionne avec le système du vaisseau. Des tas d'expériences sont à nouveaux commandées sur le vaisseau afin de manipuler au mieux cette nouvelle arme inconnue des humains. Le vaisseau dispose désormais d'une sorte de volonté qui lui est propre et que les scientifiques appellent la Force (oué, comme dans Star Wars). On découvre que l'enveloppe matérielle du vaisseau peut-être détruite, mais pas la Force qui le commande, comme une entité immuable et indestructible. Le R9 est créé pour accueillir un pilote (car jusqu'à présent les vaisseaux de la gamme R étaient automatisés) et c'est en 2162 que l'Empire Bydo fait son apparition aux abords du système solaire...
Comme vous pouvez le constater, les gens d'Irem se sont amusés à doter leur shmup d'un petit background somme toute assez détaillés étant donné que je me suis permis de sauter quelque point de la chronologie de R-Type (on parle de l'an 2120, 2162 etc, mais d'autres années sont évoquées). Ça vaut ce que ça vaut dans un shoot them up, mais c'est mon habitude d'aborder tous les éléments d'un jeu lorsque je le test (scénario, gameplay, graphismes, sons, durée de vie) autant que possible.
R-Type se joue comme un shmup horizontal tout à fait classique à la seule différence qu'il propose une feature qui lui est propre, comme évoqué plus haut : la Force. Autrement appelé le pod, la nacelle, le module ou tout un tas d'autres noms plus ou moins officiels selon les versions. Module sphérique que le joueur peut accrocher et décrocher à sa guise sur l'avant et l'arrière du vaisseau. Séparé de celui-ci, il est encore capable de tirer et d'être tracté vers son maître grâce à un rayon électromagnétique en appuyant sur le second bouton du pad. Subtilité à la profondeur insoupçonnée, c'est ce qui donne de la saveur au gameplay de R-Type, indubitablement. Seuls les joueurs expérimentés du soft d'Irem sont capables de se rendre compte à quel point le module donne de l'importance au gameplay.
Sa première utilisation, celle qui servira à la majorité des joueurs, sera la position frontale. Mais il peut aussi servir d'arme de jet, de contact, de bouclier et d'inverseur de tir, tout cela disponible dans différents niveau de puissance. De quoi faire face correctement aux ennemis qui arrivent de tout part, y compris dans votre dos ! Cela occulterait presque le reste de votre arsenal qui comporte trois types d'armes supplémentaires : un rayon qui rebondit sur les murs, un tir en forme de spirale très puissant et un autre qui lèche les parois du décor. Pour finir, le tir normal peut être chargé pour désintégrer tout sur son passage. Ah, mais j'ai failli oublier les bonus de vitesse et de résistance du vaisseau à glaner ci et là lorsque vous explosez vos adversaires.
Bref, le gameplay offre des options riches et variés, on dispose d'un armement étonnant et foisonnant, le système de module est addictif et intuitif en plus d'être tout à fait original car jamais vu auparavant. Sa difficulté épouvantable n'a d'égal que son statut de jeu culte. Si les quatre premiers niveaux sont abordables, la seconde partie du jeu se corse sévèrement avec un point culminant dans le stage 6. Terriblement exigu, l'environnement de ce décors semblable à l'intérieur électronique d'un ordinateur ne laisse au joueur qu'une marge de manœuvre infime. Le déplacement de son vaisseau, la jonglerie entre les attaques adverses et les obstacles du décors sont infiniment ardus. La seule solution que j'ai trouvé afin de franchir ce niveau diabolique étant justement de ne pas me goinfrer de bonus de vitesse cité plus haut afin de garder le contrôle de mon appareil. À noter qu'un boss à la fin de ce niveau déjà suffisamment atroce de difficulté a été rajouté par rapport à la version Arcade d'origine.
Et dire qu'un mot de passe spécifique permet, une fois R-Type partie deux terminé de recommencer au début du jeu en mode ''difficile'', comme si ce qu'on avait traversé n'était que le mode ''normal'' alors qu'à partir du level 5, on commence à s'arracher les cheveux par touffe entière.
Comme dit plus haut, les graphismes et l'univers visuel de R-Type contribuent pour beaucoup à son succès. Si dans le vaste monde des shoot them up, nous avons dut souvent faire face aux dragons, tentacules, monstres anthropomorphiques et autres créatures plus ou moins réalistes, R-Type ne déroge pas à la règle. À ceci prêt que les designer d'Irem ont pris le bestiaire classique des shmup susmentionné, l'ont écorché, dénaturé et maudit pour donner naissance aux bestioles horrifiques de leur production. Le film de science-fiction Alien, et plus encore l'artiste ayant créé l'apparence de cette créature mythique du septième art ont visiblement eu une influence primordiale sur le design de R-Type.
L'armada de Bydo est vaste et varié. Tout le panel d'horreur est représenté, des monstres petits et rapides qui vous foncent dessus, des robots qui rétrospectivement me font beaucoup penser à Cybernator (Konami/NCS Corp, SNES, 1992), des créatures hybrides biomécaniques, des serpents cybernétiques, des aliens branchés de partout par d'énormes tuyauteries probablement destinées à les suralimenter en énergie afin de vous balancer des rayons laser dantesques...
C'est à un univers glauque et malfaisant que nous avons à faire, une véritable vision de cauchemar venue d'une galaxie différente et lointaine de la notre. Le directeur artistique du jeu s'en ai donné à cœur joie pour concevoir un univers audacieux mais aussi malsain. C'est en voyant les canons à l'étrange allure phallique du boss-vaisseau du niveau 3 ; ou le boss du niveau 2, une sorte de grosse boule de chair recouverte de vagins crachant des monstres serpentins que vous vous rendrez compte à quel point l'ambiance graphique de R-Type est unique et infernale. R-Type dispose d'une identité visuelle qui lui est propre, c'est ce qui fait qu'on le reconnaît facilement dans les salles d'Arcade enfumées, bondées de jeu du même genre, et c'est sa force.
D'un point de vue purement technique, R-Type est clairement le mètre étalon des shoot them up en 1987. Les sprites des boss en particuliers sont énormes, occupant bien souvent la moitié de l'écran et parfois s'étalant sur plusieurs écrans pour des combats en plusieurs phases. Impressionnant ! Comme expliqué longuement au début du test, le R-Type de la PC-Engine, première console à recevoir le portage (et la seule à proposer un produit d'une telle qualité, d'une telle fidélité) est retranscrit à l'identique, c'est bluffant. Néanmoins, il convient de préciser certaines choses d'ordre technique sur cette conversion.
En effet, la résolution de base du jeu d'Arcade était de 384x256 (384 pixels de long par 256 pixels de haut) et celle de la version PC-Engine est de 336 par 224. Le format reste le même, la proportion entre longueur et hauteur est la même (3:2) mais pour compenser les 32 pixels de haut qui sont indubitablement manquants, les programmeurs de chez Hudson ont eu l'idée d'insérer une petite bande noire en haut de l'écran. Comme les bandes noires des films lorsqu'on les visionnent sur une télévision 50 hertz en somme, si pour nous autres européens ça ne change pas grand chose puisqu'on est habitués à se genre de format, en réalité ça ne change rien pour les autres non plus car la bande noire s'intègre plutôt bien. Néanmoins, il reste 48 pixels de long à combler et qui ne l'ont pas été. Dommage, en sachant que cela coupe une toute petite partie de l'écran qui parfois masque certains détails graphiques (notamment sur le boss du premier level : Krell, une sorte fœtus d'alien écorché à vif branché dans le dos par des câbles, un détail très représentatif de l'inspiration artistique hybride entre mécanique et organique). Autrement, la PC-Engine présente de très modestes ajustements de couleurs mais en revanche gagne en fluidité par rapport à la version Arcade, même avec plusieurs ennemis à l'écran.
Encore une fois, et malgré les petits détails évoqués sur la technique, la conversion reste d'une qualité fantastique, la PC-Engine accueille très clairement la meilleure version console de R-Type et pour un soft de 1988, NEC et Hudson réussisse haut la main le pari de démontrer toute la puissance de leur hardware. La Famicom de Nintendo est vieille et incapable de suivre, la Master System de SEGA est déjà obsolète elle aussi face à cela, même si elle est sortie un peu avant la PC-Engine. On suppose que l'arrivé de R-Type (et d'autres jeux) a eut son effet puisque la console prend régulièrement la première place des charts au Japon entre sa sortie initiale, le 30 octobre 1987 et le 4 décembre 1988, jour de la parution du PC-Engine CD-ROM² (extension à brancher sur la console d'origine afin de lire des CD-ROM pouvant comporter 540mb de données. De quoi concevoir des jeux bien plus évolués graphiquement avec notamment des scènes d'animation et des musiques orchestrales, certes d'un peu moins bonne qualité sonore que plus tard sur Playstation par exemple, mais tout de même saisissante pour 1988 ).
Du son, parlons-en, justement. La version Arcade présentait des sonorités stridentes comme des sortes de parasitages électriques, absents de la version PC-Engine. Dans l'ensemble, les sons sont moins aiguës et donc plus agréables à la longue. La musique s'accorde parfaitement avec les décors sombres et glauques comme dans le level 2 où la lenteur du rythme contribue à la tension très palpable. R-Type s'assure une ambiance unique et saisissante autant par ses graphismes détaillés et son bestiaire remarquable que par sa bande-son au diapason de ce qu'on voit à l'écran.
Considérable coup marketing de la part d'Hudson pour sa console, R-Type est un jeu à la raison d'être singulière. Un an après sa sortie japonaise, il sortira aux USA sur une seule et même HuCARD, NEC ayant fabriqué des supports de plus grande capacité entre temps (entre 1987 et 1991, on passe de 2 mégabits à 8 mégabits pour des jeux comme PC Genjin III ou Aldynes). Si la pratique de séparer le jeu en deux pour vendre les deux cartes au prix d'un jeu unique est douteuse, on ne peut raisonnablement pas occulter l'obstacle technologique qui a imposé ce choix à Hudson.
Mis cela de côté, R-Type reste un jeu légendaire, figure de prou d'un genre en plein essor en 1987. Son gameplay est si bien calibré que même après avoir buté dix fois sur le même boss, on ne parvient pas à en vouloir à sa difficulté complètement dingue. Indémodable, offrant une expérience unique, avec un gameplay qui deviendra l'exemple à suivre dans les années suivant sa sortie. Irem montre avec brio qu'ils ont un savoir faire en game design épatant, eux qui trois ans auparavant avait déjà conçu l'excellent Kung-Fu Master.
À Retro Gamekyo, on aime bien la découverte, et vous savez à quel point il y a des petites perles à découvrir dans le monde du retro gaming. Aussi, pour le centième test du groupe, je voulais, pour une fois, taper dans le lourd, le très lourd, le légendaire. Bref, je pensais m'attarder sur quelque chose comme Final Fantasy VI, Super Mario World, Tekken, Castlevania II ou encore Resident Evil. Puis en y réfléchissant, en analysant tout ce que j'avais déjà fais depuis la création du groupe, il m'est venu à l'esprit que cela faisait longtemps qu'on avait pas abordé le sujet des daubes vidéoludiques. Parce que bien malheureusement, le retro gaming n'est pas épargné. Et même si aujourd'hui on peut se permettre de sélectionner plus facilement à quoi on veut jouer et ainsi éviter les déconvenues, à l'époque, sans l'Internet tout-puissant, ce n'était pas si simple.
Ceci étant dit, certaines (beaucoup ?) daubes vidéoludiques se reniflaient à des kilomètres, rien qu'en voyant la jaquette, on pouvait la plupart du temps se rendre compte que le jeu qu'on tenait dans les mains n'était pas digne de confiance. Et Fighting Fury sur Playstation 2 est clairement de cette catégorie de jeu pour qui on ne débourserai même pas deux balles.
Basé sur la série de manga populaire au Japon Grappler Baki, Fighting Fury est sorti en 2000 dans son pays d'origine, et prêt de trois ans plus tard en Europe sans prendre la peine de passer par la case USA. C'est louche, et que ce soit en 2000 ou en 2003, le jeu accusait un retard technique flagrant.
Le scénario ? Et bien si il est très peu évoqué dans le jeu, on peu éventuellement se baser sur celui du manga qui est le suivant. Baki Hanma est un jeune garçon de treize ans. Mais malgré son âge peu avancé il possède des capacités physiques incroyables (et le gamin combat des cartels criminels à lui seul, il tatane des grands maitres en art-martiaux toute la journée etc, vous croyez que chasser les Pokémon légendaires à dix ans à peine c'était abusé ? Venez jouer à Fighting Fury ! ). Rien d’étonnant à cela : il est le fils naturel de Yujiro Hanma, « l’être le plus fort du monde » aussi appelé « l’Ogre ». Baki a ainsi été éduqué toute sa jeunesse pour devenir le plus fort, et marcher sur les traces de son père. Ce destin hors du commun l'amène à chercher sans cesse de nouveaux défis, un nouveau combat à mener, un nouvel adversaire à terrasser. Nombreux sont les guerriers qui croiseront sa route. Mais Baki n’a qu’une chose en tête : vaincre Yujiro Hanma.
Ainsi, pour les connaisseurs, nous retrouvons dans le jeu bon nombre de figure emblématique du manga tel que Doppo Orochi, alias le mangeur de tigre, alias le dieu de la guerre, alias le plus grand karaté-ka vivant (ils ont tous des surnoms grandiloquents proprement ridicules dans le même genre, c'est très cheapos...) ou encore Kaoru Hanayama, le boss des Yakuza. L’œuvre de base étant particulièrement stéréotypée, peu intéressante voir carrément de mauvais goûts (à se demander comment la série a duré si longtemps. Dans le même genre, préférez Hajime no Ippo, Ashita no Joe ou encore Tough), elle fournit donc un matériaux de base très pauvre pour faire un jeu.
Les personnages sont des clichés sur pattes avec très peu de charisme et son souvent dépeint de façon très grossière. En vrac, on peut citer un vulgaire karaté-ka clone de Sagat de Street Fighter (le fameux Doppo Orochi), un lutteur professionnel au design aussi étudié que celui des jouets pour enfants bas de gamme (un caleçon orange, un cigare au bec, et vous obtenez Mount Toba) ou encore un athlète au traits efféminés mais à l'attitude parfaitement hautaine et détestable, véritable ersatz sans saveur de Vega (toujours Street Fighter) nommé Shinobu Kureha.
Pour faire simple, tous les combattants ou presque sont vêtus d'un caleçon de sport type lutteur/catch, très kitsch, ou d'un dogi de judo/karaté-ka. D'autant qu'il n'y a aucune représentante féminine dans le roster, uniquement du muscle saillant, du poil et de la sueur virile à l'excès. Autant dire que niveau originalité, c'est de l'ordre du zéro pointé. Je ne le répèterais jamais assez, mais c'est d'un mauvais goûts phénoménal. On est loin des personnages iconiques de jeux de combat tels que Ryu, Kyo Kusanagi, Kazuya Mishima, Lei Wulong, Terry Bogard et autre Akira Yuki.
D'un point de vue gameplay, je ne sais pas si c'est parce que les développeurs sont des baltringues incompétentes, ou si c'est parce qu'ils ont voulus se la jouer réaliste, mais les personnages sont lourds et lents à en mourir d’ennui devant sa télévision. Au départ, on se dit que c'est pas grave, qu'il faut certainement jouer sur le timing et éviter d'y aller bourrin, comme dans un Virtua Fighter qui lui aussi a des combattants lourds mais avec lequel on ressent fortement la puissance des coups. Puis au bout de cinq minutes où on constate la pauvreté du gameplay, on se dit que finalement, Fighting Fury n'est rien de plus que le cousin trisomique du Virtua Fighter susnommé.
Les écueils du gameplay sont nombreux et significatifs d'un manque d'ambition, de finition, d'intelligence et de talent.
Les combos sont pauvres et peu nombreux, en plus d'être très peu excitants visuellement parlant. Les coups sont donnés avec prêt d'une seconde de latence, si bien que cela donne une sensation très bizarre de mollesse et d'imprécision, on en est réduit à bourriner le plus possible et prier de passer au travers des coups de l'adversaire, que de toute façon on peut difficilement prévoir tant la latence pose un handicap sur le rythme des attaques. Il est par ailleurs strictement impossible de parler de quelconque stratégie de combat avec Fighting Fury puisque celui-ci dispose d'un système de parade tout sauf intuitif. Dans Mortal Kombat, il suffit d'appuyer sur la flèche directionnelle en direction de l'arrière de votre personnage pour exécuter une parade. Dans Tekken, il suffit tout simplement de ne pas appuyer sur le moindre bouton pour enclencher une parade automatique. Ici, il faut appuyer sur la flèche arrière et en même temps sur le bouton rond de votre manette Playstation 2. Déjà que respecter le timing pour parer le coup adverse pile poil au bon moment est un exercice souvent délicat dans les jeux de combat, si en plus on ajoute à cela le défi d'appuyer sur deux boutons à la demi-seconde prêt au même moment, ça en devient prise de tête.
Ce système interdit donc les counter ou les revers chop à la Tekken et annihile tout espoir de combat chorégraphié ou de stratégie face à un adversaire coriace.
Plus haut, je disais que les combos étaient peu nombreux, ce n'est pas tout à fait vrai, mais c'est une occasion pour moi de vous expliquer un autre système du jeu qui est d'une idiotie rare. Pour bien comprendre, je dois vous présenter les deux modes qui font l'originalité de Fighting Fury. ''Learning Baki Moves'' est un mode où vous combattez des adversaires qui peuvent vous apprendre plus d'une centaine de techniques, à condition que ces techniques soient utilisées sur vous et que vous gagnez le combat pour pouvoir les enregistrer dans votre base de donnée. Une fois avoir combattu et apprit les techniques, il faut aller dans le second mode, ''Baki Move Buildup'' pour personnaliser votre combattant (en la personne de Baki uniquement, tous les autres personnages du casting passent à la trappe...) où vous devrez remplir 13 slot avec les techniques voulues et que vous avez enregistrées.
C'est là que le bât blesse, que l'incompréhension se fait totale et que les choix conceptuels du jeu sont particulièrement idiots. Pourquoi offrir un panel d'une centaine d'attaques aux combattants du jeu si c'est pour autoriser le joueur d'en utiliser que treize ? Ça ruine littéralement l’intérêt de répéter les combats afin de mémoriser et maitriser à la perfection toutes les attaques possibles. Ça va allant contre du principe même du jeu de combat qui veut qu'on y joue pendant des heures afin de connaître sur le bout des doigts la moindre manipulation de manette afin d'envoyer une super mornifle dans la face de l'adversaire !
Bref, c'est affreusement con, qui est l'incroyable tête de nœud qui a eu cette idée nom de dieu ?!
En parallèle, le soft inclus une jauge de furie (ici appelée endorphine), à travers laquelle de nombreuses actions peuvent s'exécuter, comme par exemple, se relever rapidement après un choc, ou alors, plus utile, ressusciter avec en main la moitié de sa barre de vie si tant est que l'endorphine soit à son paroxysme. Cela est censé tenir lieu de feature importante. Ce système aurait eu de la valeur si seulement les manipulations pour bénéficier de ces joker de luxe n'étaient pas si compliquées à exécuter et aussi irréalistes dans leurs conditions (par exemple : appuyer sur une série de boutons entre le moment où le personnage est KO et où il tombe au sol. Ce qui exige qu'on doit connaître la manipulation par cœur, l’exécuter en une seconde et que l'adversaire nous ai infligé un coup qui nous projette hors du sol pour valider la manipulation. Bref, c'est beaucoup trop hasardeux et ardu pour être abordable...).
Pour en finir avec ce gameplay moisi jusqu'à l'os, ajouter à cela les esquives tout bonnement impossible puisque bien que les combattants soient modélisés en 3D, le jeu se joue sur un seul plan, en 2D.
Graphiquement, c'est un désastre d'une ampleur rarement vu sur Playstation 2. Je peux comprendre que le développeur, Tomy n'ai pas les moyens de faire du travail de qualité. Mais l'éditeur tristement connu Midas Interactive Entertainment (un tas de jeux de sport très bas de gamme sans aucun intérêt, d'autres étrons inconnus comme Freak Out, Eternal Quest, Hidden Invasion, Daemon Summoner...) n'aurait jamais dut commercialiser cet horrible production qu'est Fighting Fury. Surtout pas au prix de 7140 Yens à l'époque (le prix d'un jeu neuf de 60€ quoi), c'est indécent.
Ce jeu est une telle honte graphique que je ne sais pas par où commencer... la modélisation est probablement ce qui sautera le plus aux yeux de tous. Taillés à la machette, les combattants sont si anguleux et mal proportionnés qu'on se croirait sur un jeu 3D de première génération sur Playstation, en 1997, là où la mode des ''super deformed'' sévissait encore. Mais non, il s'agit bel et bien d'un jeu Playstation 2 !
Les articulations des modèles 3D sont abusivement proéminentes et leurs expressions faciales si étranges que les personnages ne sont nullement attachants mais plutôt effrayants ! Et que dire de ces effets spéciaux d'une pauvreté sans commune mesure à base de petits cercles rouges lumineux qui s'accrochent aux poings des combattants à chaque coups portés ? Que dire des arènes vides, sans aucune animation (si ce n'est des flammes en arrière plan qui ne sont en fait qu'un misérable gif...) et aussi fades qu'un parking sous-terrain ou un terrain vague en plein milieu d'une base militaire ? Que dire de cette obscurité permanente qui nous donne l'impression qu'on se bagarre la nuit au détour d'une ruelle malfamée ou dans une cave (une technique de cache-misère grossière) ? Que dire de ces artworks parfaitement immondes présents sur les écrans de pré-combat censés présenter les duellistes ? Cela m'eut été impossible de le savoir tant ce jeu est passé inaperçu (et tant mieux), mais si jamais les artworks dont il est question sont l’œuvre de l'auteur d'origine du manga, laissez moi vous dire que cela donne un résultat atroce et encore une fois de très mauvais goûts !
Le jeu se paye le luxe d'être buggué, comme si cela ne suffisait pas. En effet, il m'est arrivé de constater des sortes de reboot lors des combats au moment où je portais un coup un peu violent dans une situation particulière. Par exemple, si je tente une technique de projection sur mon adversaire pendant qu'il est en plein saut, le jeu n'a probablement pas été programmé pour gérer cela et donc reboot la position des combattants. Ces derniers se replacent littéralement au centre de l'arène comme si le combat venait d'être lancé et cela dans un freeze de l'action absolument consternant à voir...
Le fait que le jeu ne soit même pas sur support DVD mais CD-ROM tel un vulgaire jeu Playstation montre bien à quel point il ne pèse pas lourd techniquement et graphiquement, c'est d'une misère affligeante.
Je me souviens qu'en l'an 2000, les joueurs grognaient sévèrement (et à tord) contre Tekken Tag Tournament, qu'ils n’estimaient pas digne de la Playstation 2, trop peu ambitieux et ennuyeux. Heureusement que ces même joueurs n'ont pas eu entre les mains Fighting Fury et sa torture graphique à la limite de l'illégal... !
Ce jeu n'est rien d'autre qu'un attentat vidéoludique, une façon détournée des britanniques de chez Midas de rendre fou les gens du monde entier afin de prendre le pouvoir petit à petit, ou je sais pas... rien n'est assez farfelu pour expliquer l'existence de cette bouse monumentale qui attise mon dégout depuis que je l'ai découvert.
L'éditeur a raisonnablement pensé que lors de la première année de vie de la machine, il pouvait placer un petit jeu et ainsi attirer la couverture à lui. Tous les éditeurs sont pareils, c'est normal, c'est le business. Mais dans une année où la console accueille des jeux comme Kessen, Timesplitters, SSX, Midnight Club, Ready 2 Rumble Boxing: Round 2 (ou encore Dead or Alive 2 : Hardcore, dans le même genre de jeu, tant qu'à faire...), comment diable Midas pouvait-il espérer s'imposer de quelque manière que ce soit avec ce guano atomique ?
Bref, si vous avez de l'humour (avec quelques bons potes, de la bière et de la pizza, on sait jamais...) vous pouvez l'essayer et peut-être rigoler une vingtaine de minutes sur la désastreuse qualité de Fighting Fury. Autrement, fuyez le comme la peste.
Activision n'a pas toujours été synonyme de monstre tentaculaire aux pratiques douteuses et père d'une saga de jeu vidéo parmi les plus polémiques (dans le sens où on adore la détester), à savoir Call of Duty. En effet, au début des années 90, et quand bien même à cette époque les grandes entreprises américaines du secteur peinaient un tantinet à se faire une aussi belle réputation sur console que les japonais Namco, Konami et autre Capcom, Activision restait une compagnie pas si moche que cela. Suite à une première banqueroute en 1992, la société se relance sur des bases un peu plus saines et tente de faire venir plusieurs jeux de qualité provenant du Japon sur les territoires occidentaux tandis qu'ils soutiennent en parallèle quelques projets vidéoludiques bien de chez eux (l'excellent Hunter sur micro-ordinateur, ou encore les adaptations de l'univers BattleTech avec MechWarrior dont on a déjà parlé sur Retro Gamekyo) tout en essayant de capitaliser sur des succès du passé tel que Pitfall! (Pitfall: The Mayan Adventure en 1994).
BioMetal fait partie de ces quelques jeux venus du Japon qu'Activision à sut dénicher pour les éditer chez nous. Et c'est là qu'on voit que malgré leur bonne volonté, Activision reste une société née au départ d'un différend entre Atari et certain de ses développeurs phares de l'époque, ceux ayant programmés les plus grand succès de l'Atari 2600. Forcément, bâtir une entreprise sur les bases d'une querelle judiciaire, ça sonne comme un petit quelque chose de prophétique, comme si on savait que Activision serait voué à devenir une entité pas très réglo et tout à fait détestable.
Avec BioMetal, si l'initiative de le faire venir jusqu'en Europe et aux USA est louable, Activision prouve si tant est que cela soit encore nécessaire qu'ils pouvaient parfois faire de biens étranges choix stratégiques et faire de la merde (disons le comme ça). En effet, il faut savoir que la bande-son de BioMetal version occidentale s'est vu privée de ses belles compositions japonaises (dont l'auteur est un dénommé Yoshio Nagashima) pour être remplacées par des musiques sans âme et tout à fait commerciale du groupe de techno à la mode de l'époque : 2 Unlimited (qu'on a put entendre dans le film Space Jam notamment).
Choix discutable donc, autant créativement que stratégiquement, d'autant que l'écart de qualité se fait réellement ressentir au final, mais est-ce que cela seulement fait de BioMetal un mauvais jeu ? A-t-on le droit de le punir uniquement sur ce critère en occultant tout le reste du travail fourni ?
Tout d'abord, on a le droit à un petit scénario, qui comme toujours ou presque pour un shoot them up ne casse pas trois pattes à un canard, mais on ne vas pas faire la fine bouche. Ainsi, on nous apprend que l'Humanité, à force de se faire la guerre a épuisé toutes les ressources naturelles de la planète Terre, forçant à accélérer la course à l'espace pour tenter de mettre la main sur des nouvelles planètes habitables. Une flotte est envoyée en mission d'exploration sur la planète "UP457" (notez que ça fait très LV426 comme dans Aliens, certaines créatures biomécaniques rappelant d'ailleurs visuellement l'univers glauque et organique de l'artiste suisse Hans Ruedi Giger qui a donné son apparence à la plus terrifiante créature xénomorphe du cinéma), mais la-dite flotte est décimée par les Bio Metal : des créatures mi animales mi machines venues du fin fond de l'espace. On estime que si l'Humanité ne peut faire face à cette menace que leur soif de conquête spatiale a réveillé, la voie lactée sera détruite dans les 32 heures. Ainsi est créée une flotte d'assaut spéciale équipée d'une arme révolutionnaire pour tenter de contrer les Bio Metal.
Pour une fois, on nous épargne le coup classique de l'invasion extra-terrestre puisque si on y réfléchit bien, nos ennemis viennent nous agresser car nous avons nous même franchis les limites de leur territoire afin de dévorer comme des parasites de nouvelles régions de l'espace dans le seul but de continuer ad vitam æternam notre guerre idiote.
L'arme révolutionnaire dont il est question se nomme le G.A.M et s'installe sur un vaisseau de type MF-92 GX Halbard. On s'en fout un peu, ce qu'il faut savoir, c'est que cette arme si extraordinaire est un bouclier flexible mais qui n'est pas éternel, bien évidemment. À tout moment, le chasseur se pare de 4 sphères bleues qui se mettront en rotation autour de l'appareil. Elles le protègeront de tout tir (ou presque) mais aussi pourront vaincre les unités belliqueuses selon différentes méthodes. Tout d'abord, un simple contact avec un vaisseau ennemi suffira à lui causer des dégâts. Une seconde technique consiste à propulser les quatre billes de protection façon éventail, un peu hasardeux mais utile pour dégager rapidement un écran un brin surchargé. Et enfin, la troisième attaque consiste à élargir le périmètre de protection couvert par les sphères bleues tout en les laissant rattachées à votre vaisseau.
Semblable au module de R-Type, le G.A.M. s'avère ainsi indispensable pour venir à bout de BioMetal, dont la difficulté est légendaire (d'autre diront abusive). Mais n'ayez crainte, une fois mis en stand-by, le bouclier se recharge. Vous comprenez donc que le piment et la particularité de ce shmup proviennent de la gestion de cette arme principale. Outre cela, vous disposerez naturellement de l'arsenal classique du genre à savoir tir de laser, tir par vague et autre boulette. Le système de combat est de ce fait relativement original de par la présence de cette arme unique, et on a plus l'impression de se défendre (ce pourquoi le G.A.M. est prévu) plutôt que d'attaquer réellement nos adversaires.
Cependant, dans son ensemble, BioMetal a la fâcheuse tendance d'être trop traditionnel, voir monotone. Le jeu se présente comme un shoot them up horizontal où le décor ne réserve aucune surprise. Il n'y a guère de changement de thématique et aucun event particuliers n'est à noter pour venir chambouler l'aventure. Le panel de monstres adverses, bien que joliment dessiné n'est guère varié et les boss reste, eux aussi, de jolis sprites mais avec un comportement et des attaques bien trop gentilles pour être remarquables. Le problème à ce sujet, c'est que passé après Thunder Force III et Axelay, pour ne citer qu'eux, et ne proposer que ce qui a de plus classique en terme de sensation et de progression, ça ne joue pas en la faveur du produit d'Athena.
Techniquement, c'est néanmoins assez satisfaisant. Si on fait fi d'une certaine répétitivité dans les ambiances grises et glauques que les différents niveaux de BioMetal nous propose, on peu tout de même observer des sprites sympathiques, un joli nombre d'ennemis à l'écran et quelques éclats lumineux bien fichus. Les décors si ils ne sont pas très variés et auraient gagnés à être un peu plus détaillés ont au moins le mérite de distiller une véritable atmosphère propre à BioMetal. Cependant, la profusion de sprites liée à une vitesse importante a tendance à ralentir l'animation. À part dans le premier niveau, tous les autres stages connaissent des ralentissements. Malgré leur constance, ils ne sont pas gênants, au contraire ils sont d'une aide salvatrice dans les moments difficiles.
Pour en revenir à la bande-son et conclure ce retro test, il faut savoir, comme dit plus haut que BioMetal propose une OST différente aux USA et en Europe par rapport à sa version d'origine japonaise. Coup marketing foireux de la part d'Activision, la version occidentale dispose de musiques aux beat lourdingues et répétitifs, presque agressifs pour les tympans composés par le groupe de Dance Music néerlandais 2 Unlimited, très à la mode en 1993 (encore en activité aujourd'hui selon Wikipedia, même si le groupe à connu de nombreuses ruptures...). Outre la composition en elle-même, assez pauvre pour ne pas dire minable, l'ambiance du soft s'en voit littéralement dénaturée. Le rythme rapide et l'avalanche de sons électroniques couplés à la difficulté extrême du titre a de quoi fatiguer les nerfs.
En revanche, la bande-son originale composée par Yoshio Nagashima est de qualité, et offrant un surplus d'âme à BioMetal. Moins explosive et excentrique que le travail de 2 Unlimited, la bande-son version japonaise se pare de touches très mélancoliques, souvent bien plus en phase avec l'ambiance visuelle et la nature de l'action dont on est spectateur dans BioMetal. Pour ne pas arranger les choses et définitivement ruiner la légitimité de 2 Unlimited, il faut aussi noter que la bande-son japonaise comporte 17 morceaux, contre seulement 7 sur celle occidentale. Globalement, cela donne lieux à une plus grande variété de sonorité, à l'image de cet espèce d'écho dissonant sur la musique Dark Clouds où ce fatalisme désespérant dans Deep Underground Ruins. Subtilité absente de la version occidentale donc. Pour une question de cohérence entre le propos et le thème abordé par Athena avec BioMetal, on préférera ainsi, indéniablement, la version originale du jeu.
Malgré sa redoutable difficulté et le fait qu'il soit passé inaperçu en 1993, quand bien même BioMetal disposait de l'appuie d'Activision en occident, Athena donna une seconde chance à son shoot them up sur Saturn avec une suite. BioMetal n'est pas un mauvais jeu, mais un jeu un brin trop conventionnel pour oser se dresser face aux ténors du genre. Frustrant bien que disposant d'un potentiel d'accroche véritable (notamment dut à une ambiance visuelle et sonore assez travaillée) et doté d'un système d'armement original, il pêche par un manque d'ambition et une expérience qui aurait mérité à être plus creusée, notamment grâce à l'ajout de quelques niveaux supplémentaires (seulement 5, malgré leur difficulté, c'est trop peu).
Vidéo de gameplay de la version japonaise de BioMetal
Avant de parler du jeu qui nous intéresse aujourd'hui, on va évoquer une console qui a tendance à être victime d'indifférence sur Gamekyo : la Master System.
Après deux faux départs sur le marché des consoles de jeu, la troisième tentative de SEGA avec la Mark III est la bonne et est vouée à véritablement façonner l'avenir de la gamme de l'américano-japonais. Aussitôt balayé par le succès retentissant de la Famicom de Nintendo au Japon, SEGA ne désespère pas et lorgne très vite du côté de l'occident. Mais il est déjà trop tard, Nintendo, là encore est bien installé. Il ne reste plus qu'un marché à conquérir et où la tentaculaire firme au plombier moustachu n'a pas encore installé ses grosses pattes : l'Europe.
En effet, le prix élevé de la NES ainsi qu'un marketing pas très en adéquation laisse la place libre à SEGA qui se prépare à signer un coup mémorable. Renommant pour l'occasion leur machine Master System, afin de lui donner plus d'identité qu'une vulgaire Mark III, SEGA entame une campagne publicitaire du tonnerre à l'aube du Noël 1987. Faisant miroiter aux joueurs une expérience de jeu exceptionnelle digne des meilleures bornes d'arcade et proposant un tarif plus qu'intéressant, SEGA attaque fort. Les portages de hits de l'arcade, convertis fidèlement ou du moins modifiés intelligemment, souvent par SEGA eux-même pour en conserver toutes les qualités inondent le marché. Hang-On, After Burner, Space Harrier... Autant de bons jeux qui ont impressionnés par leur allure graphique principalement et qu'on ne retrouve pas sur les machines concurrentes. La Master System s'installe dans de nombreux foyers.
Et nous autres, pauvres hères français et européens, nous devons chanter les louanges de SEGA et s'estimer heureux. Pourquoi cela ? Car il faut savoir que le catalogue de la Master System en Europe comprend un peu plus de trois cent jeux, inédits ou provenant de l'arcade, contre seulement quelques cent et des poussières aux États-Unis et au Japon où la machine a eu beaucoup plus de mal a percer. Les éditeurs, guidés par SEGA en ont profité et se sont donc penchés sur le Vieux Continent en nous abreuvant de jeu de qualité jusqu'à très longtemps après la mort présumée de la Master System, au milieux des années 90 ! Ainsi, en sus des hits de l'arcade arrivent les titres originaux et indispensables tels que Ninja Gaiden, The Lucky Dime Caper (testé par notre cher Docteurdeggman sur Retro Gamekyo) ou encore Phantasy Star.
Autant dire que pour une fois et même si ça part d'une stratégie commerciale et non de la générosité de SEGA, nous ne somme plus la cinquième roue du carrosse.
La mésestimée Master System aura été quand même bien malchanceuse, quand on voit les jeux d'excellente facture qu'elle a aligné. Out Run, c'est la quintessence simple du savoir-faire en terme de fun du SEGA des années 80 et est un parfait exemple pour parler du jeu vidéo typique tel qu'on le trouvait sur console 8-bits. Le savoir-faire, c'est le mot d'ordre, et pour cause, car ce sont la crème des designer et programmeur de la firme au hérisson qui s'en occupe : AM2 (Hang-On, Virtua Racing, Virtua Fighter, Daytona USA, House of the Dead, Shenmue... bon bref, vous avez pigé).
Genre instauré par le Pole Position d'Atari en 1982, SEGA s'occupe de reprendre le sujet en y insufflant une grosse dose de coolitude et beaucoup de personnalité à sa copie. Ainsi naquit Out Run, son ambiance de plage californienne, sa Ferrari Testarosa, sa blonde volcanique et son côté new wave branché typique de la côte ouest des États-Unis (même si le jeu nous fait découvrir d'autre type de région, c'est bien la Californie qui est mis en avant lors de la promotion du jeu). Un cocktail détonant que n'aurait pas renié Magnum et sa glorieuse moustache (même si lui conduisait une 308 GTS) !
L'ambiance est primordiale dans Out Run, le « délire » dans lequel veut nous embarquer le jeu est propre à sa conception et permet de se démarquer avec brio du reste des jeux de course automobile. Et le moins que l'ont puisse dire, c'est que c'est réussi. La première chose qu'on a à faire, ce n'est pas choisir son circuit, ni même son bolide, mais la piste musicale que l'ont veut écouter parmi un choix de trois sur son poste radio. Véridique ! Magical Sound Shower (Averse de Son Magique), Passing Breeze (Brise Passante) et Splash Wave (Vague Eclaboussante). Out Run joue à fond la carte de la pop culture de la Californie des années 80 et le jeu finira par faire partie intégrante de cette pop culture.
Ainsi, tel un Ryan Gosling dans le film Drive (qui s'inspire beaucoup de Out Run), équipé de ses gants de pilote et de sa veste satiné, on arrache le bitume sous un soleil de plomb. Out Run n'est pas à proprement parler un jeu de course puisqu'on ne concourt contre aucune autre auto, seule la montre est notre ennemie ici. Le jeu prend des allures de road trip où le joueur se voit seul confronté à l'immensité de l'horizon. Comme Yu Suzuki le dira à propos de l'idée qui donna naissance à Out Run, il n'était pas question de faire un jeu de course, mais un jeu de conduite où l'essentiel n'était pas de dépasser tout le monde mais de maitriser à la perfection le maniement de sa voiture. Une nuance qui a une grande importance et qui témoigne du génie de ce game designer précurseur dans bien des domaines.
Les checkpoint faisant office d'embranchements où il faudra sélectionner entre deux parcours, souvent l'un étant relativement simple tandis que l'autre l'étant nettement moins. Cela à le mérite de varier les circuits (au nombre total de 15) et donner naissance à pas moins de cinq fins sensiblement différentes mais toutes sympathiques à découvrir.
Mais attention à ne pas se laisser avoir par son ambiance de vacances au soleil, Out Run reste un jeu d'arcade à l'ancienne, et son gameplay est de ce fait exigeant. D'autant qu'à l'époque, SEGA n'était pas des branquignoles, ils savaient faire des jeux dignes d'intérêt, au replay value éprouvé. Tout d'abord, il vous faudra maitriser le passage de rapport manuel entre les deux vitesses dont dispose votre bolide. Dit comme ça, ça paraît bidon, mais le secret pour pouvoir garder une vitesse suffisamment élevée pour espérer vaincre le chrono tout en se faufilant à travers le trafic parfois soutenu, c'est le rythme. Embrayer et débrayer pour ralentir, accélérer et bien négocier les virages sera une affaire de feeling où tout se jouera parfois au poil de cul de pixel. En général, les accidents sont forts handicapants, l'état de votre engin ne sera pas remis en cause mais celui de votre chrono si. Si vous arrivez à attraper le coup, vous vous surprendrez en train de jongler entre l'accélérateur et le frein pour engager de furieux dérapages (dont le crissement sonore est plutôt bien fichu, en plus) et l'ensemble de la maniabilité de votre fusée rouge s'en verra fluidifié.
Comme la conversion de son grand cousin Hang-On, Out Run, qui je le rappelle date de 1987 est graphiquement satisfaisante, globalement. L'impression de vitesse est admirablement bien rendue pour l'époque et ceci grâce, notamment, à une petite astuce visuelle toute bête. Le fait que la texture de la route soit séparée en deux rectangles de pixel de couleurs différentes (gris clair et gris foncé) afin de simuler le défilement d'avant en arrière du bitume suffit largement pour exprimer la vitesse de folie que vous pouvez atteindre. On peut aussi parler de l'effet de scalling (zoom et dezoom) des décors panoramiques mais c'est sur la version Megadrive que ceci est le plus bluffant. Évolution majeure à noter par rapport à Hang-On, la constitution des circuits qui se fait plus vivants. Les développeurs y ont ajouté une bonne dose de virages, des pentes plus ou moins prononcées et un trafic routier à densité variable pour maintenir l'attention et la concentration du joueur à tout moment. C'est aussi un signe du progrès technique de l'équipe de programmeur de AM2.
Néanmoins, si on creuse un peu plus, on constate quelque petites choses faucheuses. Les décors restent variés et jolis dans l'ensemble, mais cette mouture 8 bits se trouve toutefois confrontée à ses limitations techniques. On aurait ainsi apprécié d'admirer un plus grand nombre d'éléments affichés à l'écran. Comme sur la première course, qui dispose d'un jeu de couleur légèrement pastel tout à fait agréable à l’œil, mais qui n'offre presque rien de plus que des palmiers à contempler sur le bas-côté de la route. D'ailleurs, on se demande si le problème vient uniquement du hardware 8-bits de SEGA qui montre trop vite ses limites, puisque dans le quatrième opus de la série, Out Run Europa développé par Probe Software (un des rares bons jeux qu'ils auront fait, ceux-là …) on constate que les décors sont infiniment plus détaillés, quand bien même le jeu est sorti tardivement (1991).
Out Run est donc un bon jeu, qui a marqué son époque par ce qu'il représentait : le savoir-faire et le jeu vidéo selon SEGA. Simple, mais exigeant à la fois, offrant un challenge certain et pourtant un sentiment d'amusement et de liberté immédiat, exactement ce qu'un jeu vidéo traditionnel se doit de proposer à celui qui y joue, en réalité. Doté de sa propre personnalité, Out Run ne révolutionne pas tout à fait le genre mais se démarque suffisamment pour en faire un titre remarquable à lui seul et opère une évolution intéressante à partir du concept de Hang-On. Ce deviendra d'ailleurs un grand nom du jeu vidéo, principalement sur Master System avec une série de pas moins de quatre jeux principaux (donc, or portage pléthoriques et suites/spin-of balancés un peu dans l'anonymat, comme sur Xbox en 2003).
C'est aussi un de ces jeux anciens qui vous donneront une sensation de satisfaction forte et authentique lorsque vous aurez enfin bouclé une course de la façon la plus parfaite qui soit, en ayant recommencé quinze fois dans le but de millimétrer le moindre virage. Et ça, il n'y a définitivement que les jeux vidéo retro (les vrai hein, pas les néo retro qui inondent Steam depuis des années) qui en sont capables.
Si il y a un acteur qui contribua fortement au succès de la scène ZX Spectrum tel qu'on l'a connu, c'est bien Ultimate Play the Game, autrement désigné sous le nom de Rare dans les années 90 et 2000 ! En effet, les gars de la petite ville d'Ashby en Angleterre auront apportés un soutient massif à l'appareil de Sinclair en y produisant un tas de jeux non seulement exclusifs mais en plus de qualité.
Soutient massif, et même un peu plus que de raison diront certains analystes et pour cause, puisque le développeur continuait d'exploiter le ZX Spectrum en 1988, alors même que l'Amiga de Commodore et le ST d'Atari s'étaient largement imposés sur le marché des micro-ordinateurs. Ceci n'ayant pas été fait par hasard puisque Sinclair, le producteur du ZXS et Ultimate Play the Game étant toutes deux des sociétés britanniques, le premier avait accepté de fournir gratuitement des kits de développement au second tandis qu'Atari, Commodore et Amstrad (mais aussi BBC Micro, ou encore le consortium à l'origine du MSX sur lesquels Ultimate Play the Game a développé aussi) échangeaient leurs kits contre des sommes extravagantes. Ce genre de pratique n'étonne plus personne puisqu'aujourd'hui encore la plupart des fabricants de consoles vendent à qui le veule leurs outils pour pouvoir développer leurs jeux, sauf en de rares exceptions comme pour Microsoft et SONY qui ont rendu gratuit aux petits studios indépendants les outils de création sur Xbox 360 et Playstation 4. Une façon comme une autre d'empêcher n'importe qui de pirater et/ou copier la technologie du voisin pour produire sa propre machine, je suppose.
Il n'empêche que ce fut pour les deux parties une alliance fructueuse, et après une année 1983 pleine de 6 bons petits jeux (dont 4 seront pleinement exclusifs au ZX), Ultimate Play the Game attaque sa seconde année d'existence en tant que producteur de jeux vidéo (entre 1982 et 1983, ils n'étaient que réparateur de borne d'arcade) avec le premier soft de ce qui est déjà prévu pour être une quadrilogie (une pentalogie en réalité, mais le cinquième jeu ne sera jamais commercialisé) : Sabrewulf, les origines de la série Sabreman.
Sabrewulf nous met donc dans la peau de Sabreman, un explorateur à la recherche de l'amulette ACG (référence au premier nom des développeur : Ashby Computers & Graphics) séparée en 4 morceaux qui sont cachés dans une vaste jungle tropicale. Bien entendu, jungle tropicale peuplée de créatures plus ou moins hostiles et avec lesquelles il faudra jongler entre pièges de Dame Nature et parcours pour le moins labyrinthique.
Ce qui choque au premier coup d’œil, c'est le foisonnement de couleur que dispense le jeu (ok, dit comme ça, en 2016, ça peut faire rigoler) dans sa version ZX Spectrum, étant donné que c'est ce support qui fut « lead » lors du développement, autant parler de celui-ci en priorité. C'est d'autant plus légitime qu'on peut y apporter une comparaison intéressante entre Sabrewulf et d'autres jeux de la même époque de l'appareil de Sinclair pour prouver la maitrise technique d'Ultimate. On étaient en effet habitués à voir des jeux avec des couleurs monochromes ou éventuellement bichromes pour les plus évolués. Un fond noir avec quelques pixels jaunes ou bleus pour donner forme aux personnage et aux décors, et c'était déjà pas mal. Mais là, les anglais papas de Donkey Kong Country donnent vie à un mélange de jaune, rose, vert, bleu et rouge particulièrement plaisant à voir à l'époque, rien que pour ça, Sabrewulf est vite fait repéré par les rares amoureux de jeux électroniques (oué, le mot « jeu vidéo » n'était pas vraiment usité en 1983). Et comme il était compliqué de faire mieux qu'une animation à deux frame, ce n'était pas vraiment le critère de sélection principal de ceux qui étaient exigeant en la matière. Sabrewulf s'impose tout naturellement.
Une fois porté un an plus tard sur Amstrad CPC et Commodore 64, le jeu n'aura pas la même aura princière puisque ces machines étaient déjà pourvues de jeu tout aussi jolis et colorés. Et c'est grâce à ça que Ultimate Play the Game put se construire une réputation, ils avaient l'art et la manière d'exploiter une machine potentiellement plus faible que les autres supports du marché pour en sortir des jeux graphiquement très intéressants.
Niveau gameplay, le jeu partage quelques caractéristiques d'un des touts premiers jeux de l'histoire d'Ultimate, lui aussi sorti sur ZX Spectrum : Atic Atac. Le jeu comporte une grande carte composée de 256 écrans parfois reliés entre eux, mais le plus souvent séparés par des obstacles tels des rochers ou une végétation luxuriante infranchissable. Vous devrez non seulement affronter la faune de la jungle (chauve-souris, araignées, serpents, félins divers) mais aussi trouver le moyen de dégager le chemin jusqu'à trouver les 4 morceaux de la fameuse amulette. Bloc de pierre à bouger, bouton à actionner, gros animaux endormis à faire fuir pour libérer le passage... du grand classique, quoique pas tellement que ça en 1984 puisque tout ou presque restait à inventer. Mais de l'efficace en toute situation !
Même le feu qui se déclenche totalement au hasard pourrait ralentir votre progression ! Parfois, votre machette d'explorateur et votre intelligence ne suffiront pas, comme face à ce loup argenté (bleuté en réalité, mais faut imaginer! ) rencontré au hasard sur les écrans de la carte. Invincible, ennemi mortel, rapide et mystérieux, il donne son nom au jeu, une sorte de mascotte légendaire et ultra charismatique pour un jeu d'époque, dont on ne connait rien mais qui reviendra dans un des autres très grands succès futurs d'Ultimate Play the Game/Rare, à savoir Killer Instinct (eh ben oui, le loup-garou Sabrewulf, c'est lui ! ) !
À noter l'existence d'un remake de ce jeu, sobrement intitulé Sabrewulf lui aussi, parut en 2004 sur Gameboy Advance et qui, d'un point de vue gameplay n'a pas grand chose à voir avec son modèle. Pas énormément de chose à dire sur ceci pour l'instant, on en reparlera probablement dans un autre article .
Ultimate Play the Game montre qu'au début des années 80, ils sont capables de produire des jeux ambitieux, exploitant le maximum des (très faibles) capacités techniques des machines d'époque et de faire preuve d'une belle créativité. Le jeu se démarquant sans mal de la masse absolument incroyable de clones de Space Invaders et autres Adventure qui inondèrent le marché entre 1978 et 1983, le studio anglais passe admirablement bien à travers le krash du jeu vidéo de cette même année 83 et continuera à faire parler l'innovation et le plaisir ludique grâce à des jeux au gameplay savoureux et à la technique sans reproche. Si leur tout premier jeu, Jet Pac aura bénéficié d'un succès commercial sans commune mesure (300 000 exemplaires vendus, incroyable quand on voit le score d'un certain Lightning Returns : Final Fantasy XIII aujourd'hui disponible sur un parc de console 80 fois plus conséquent...! ), c'est bel et bien Sabrewulf qui fera rentré Ultimate Play the Game dans la cour des grands et boostera sa popularité notamment outre Atlantique.