Depuis que j’écris des articles à propos de la PC-Engine sur Retro Gamekyo, j’ai tendance à n’évoquer que les bons côtés. Je ne vous expose que les coups de génie de la firme à l’abeille, Hudson, et de sa façon audacieuse et compétitive d’aller secouer Nintendo sur son propre terrain. Seulement voilà, il ne faut pas croire que tout fut rose pour l’alliance Nec/Hudson et leur PC-Engine et que tout leur a souri. C’est évident que non, sinon la console aurait triomphé au-delà des frontières nippones et Hudson aurait vaincu Nintendo et SEGA depuis belle lurette. Si Hudson fut assez ambitieux et malin pour signer des coups d’éclats tels que les portages parfaits de nombreux hits d’arcade, l’apparition novatrice du CD-ROM sur sa console en 1989, où le ralliement d’éditeur prestigieux comme Namco, il y eut également des couacs. On sait par exemple, via le témoignage d’anciens employés de TTI (une filiale de NEC créée pour gérer la commercialisation et la distribution de la PC-Engine, renommée TurboGrafx-16, aux USA) que les hauts responsables au Japon sont passé à côté de plusieurs belles opportunités. Par exemple, la PC-Engine qui cherchait à pénétrer le marché américain aurait pu capitaliser sur la présence de Mortal Kombat (probablement au moins les deux premiers opus) de Midway, cependant, la proposition de l’éditeur américain resta sans réponse favorable des japonais, ces derniers prétextant que le marché leur semblait trop concurrentiel et qu’il ne voyait pas comment Mortal Kombat pourrait rapporter de l’argent. La suite, on la connaît. À partir de 1993, à peu près tous les supports du monde bénéficient d’un portage de Mortal Kombat, même les antiquités que sont l’Amiga et la Master System ! Chacun de ces portages, même s’ils sont d’une qualité très variable, rapporte une tonne de billets verts à Midway et aux éditeurs/constructeurs qui ont pris part au deal.
C’est un raisonnement d’autant plus étrange et à côté de la plaque que celui-ci ne semblait pas s’appliquer aux nombreux shoot them up que la PC-Engine a pu accueillir durant toute sa vie. En effet, si le marché des jeux de combat fut concurrentiel au début des années 1990 d’après Hudson/NEC, que dire de celui des shmup, littéralement saturé. À tel point qu’après l’heure de gloire des 16-bits, bons nombres de studio ayant fait des shmup leur spécialité durent fermer ou se faire violence et innover pour survivre. À la décharge des gens d’Hudson et NEC, il est vrai qu’il était difficile de prévoir un si gros succès pour un projet aussi incroyable que celui de Mortal Kombat.
Qu’à cela ne tienne, la PC-Engine a d’autres arguments notamment dans le genre du jeu de combat. À cette époque, la rumeur insistait sur l’existence d’un support CD-ROM à brancher sur la Super Nintendo, développé conjointement avec d’autres grands de l’électronique, tel que Sony. Vous savez, le fameux Play Station. L’Histoire ne donnera jamais concrètement vie à ce projet mais Hudson et NEC voulaient en tous les cas couper l’herbe sous le pied de Nintendo et ils en ont profité pour annoncer plusieurs mesures. Tout d’abord, la sortie de la PC-Engine DUO-R, qui est en fait une DUO de base (le hardware qui lit aussi bien les HuCard que les CD-ROM) mais avec quelques options en moins (la prise casque, notamment) et qui sera vendu 20 000 yens moins cher en mars 1993. Une coupe drastique du prix qui représente presque la moitié du tarif initial de la machine, tout de même. L’autre annonce, communiquée non sans fierté par Hudson, NEC, mais également Capcom, fut le portage de Street Fighter II sur PC-Engine ! Pas de Mortal Kombat, mais du SFII, peut-on dire qu’on y gagne au change ? Tout dépend de la qualité du portage, et c’est ce qu’on va voir tout de suite, tiens !
Aller, j’insère la volumineuse (non, je ne parle pas de ça…) HuCard dans la machine. Volumineuse car la bougresse pèse pas moins de 20mbits. Bon, tout est relatif car énormément de cartouches Super Nintendo faisaient 16 ou 32mbits entre 1992 et 1994, c’était le cas notamment de celle de Donkey Kong Country pour ne citer que lui. Mais en ce qui concerne les HuCards, de la taille d’une carte de crédit (ah oui, ça calme, n’est-ce pas ?), celle de Street Fighter II était la plus grosse, ni plus, ni moins. Faut dire que c’était absolument nécessaire pour rendre honneur au jeu roi de Capcom.
Une fois la carte introduit, le jeu se lance. Et là, premier constat : la petite introduction a disparue. Vous savez, ce combattant de rue blond qui en frappe un autre entouré d’une foule en liesse avant que la caméra ne se déplace vers un building. La version PC-Engine affiche directement le menu principal où on peut sélectionner le mode de jeu. Ce petit couac relativement insignifiant est rapidement corrigé par une bonne surprise, le casting est élargi, comme dans Street Fighter II' : Champion Edition. Pas de Fey Long ou de Cammy pour le moment, ces derniers viendront seulement avec Super Street Fighter II ; en revanche, les quatre boss du Street Fighter II originel sont désormais jouables, en l’occurrence, nous disposons désormais des charismatiques Sagat, Balrog, Vega et Bison. Le casting se compose donc de douze guerriers, ce qui commence à être très intéressant, d’autant plus que chacun dispose de ses spécificités et que la majorité du roster d’origine a été révisé afin d’équilibré le tout. Ce qui suit ne concerne pas la version PC-Engine qui se base sur The World Warrior, la première vraie version de Street Fighter II, en termes de gameplay (tandis que le Champion Edition de la concurrence inclut les évolutions dont on parle au paragraphe suivant, la version la plus élaborée à ce moment précis de la vie de Street Fighter II restant le Hyper Fighting de la SNES donc).
Par exemple, Honda peut se déplacer pendant qu’il exécute l’attaque des mille-mains, ce qui permet une stratégie de zoning inédite avec ce personnage. Chun-Li possède une nouvelle attaque sautée imparable avec une défense traditionnelle, seule l’esquive et la fuite pure et simple reste efficace face à ce nouveau coup particulièrement fourbe ! Quant à ce colosse de Zangief, il peut désormais assener à ses adversaires un coup de boule en plein saut, ce qui lui donne le contrôle du terrain aérien, crucial lorsqu’il s’agit de maximiser le potentiel offensif face à un adversaire coriace et mobile. Les experts du pad se régaleront, à n’en point douter. Même Ryu et Ken, longtemps critiqués pour leur mimétisme s’offrent quelques singularités. Ainsi, le Hadoken de Ryu est légèrement plus puissant et plus rapide, tandis que le shoryuken du blondinet porte plus loin. Et je ne fais qu’évoquer les petits ajouts de gameplay sans entrer dans les moindres détails. Je le répète, presque tous les personnages ont subi quelques révisions, parfois mineures, mais dans tous les cas dignes d’intérêt et ajoutant souvent une vraie plus-value au titre d’origine.
Mais tous ceux qui ont déjà tenu entre les mains, ou du moins aperçu une manette de PC-Engine devrait se poser une question importante dès lors : comment joue-t-on à un tel jeu ? Eh oui, parce que bon, j’sais pas si vous avez remarqué, mais le pad de la PC-Engine ne dispose que deux boutons principaux, comme celui de la NES ou de la Master System. À vrai dire, Capcom et Hudson/NEC ont réussi à pallier cela de façon plus ou moins aisée. Avec le pad de base, il est tout à fait possible de jouer à cette version de Street Fighter II via une petite duperie. En effet, par la pression du bouton ''run'' (l’équivalent du start pour toutes les autres manettes), on switch (euh, il y a erreur là, nous sommes sur PC-Engine, pas sur Switch… ) de type d’attaque entre coup de poing et coup de pied. Ce n’est pas forcément super pratique, mais avec un peu d’exercice, ça vient relativement bien et on arrive à envoyer nos quelques enchaînements favoris. Bon, on préfère quand même le pad à six boutons de la Super Nintendo, on ne va pas se leurrer.
Et si cet artifice ne vous convainc pas, ils ont pensé à tout, et surtout à la commercialisation pour l’occasion d’un tout nouveau pad à six boutons, officiel et compatible avec la PC-Engine : l’Avenue Pad 6 au prix de 3980 yens, soit 1500 de plus que pour une manette classique. Pas folle la guêpe, enfin, l’abeille, en l’occurrence.
Graphiquement, la PC-Engine montre ses muscles, indéniablement. Si on prend comme référence la version Super Nintendo, on peut dire que le possesseur de la version PC-Engine n’est pas forcément le plus malheureux de tous les joueurs ! Le stage de Ryu me parait plus détaillé sur Megadrive que sur Super Nintendo, notamment avec cette superbe lune en fond, à demi couvert par un linge de nuages blafards. Le stage de Zangief sur PC-Engine est un peu moins joli, notamment dut à l’absence de quelques éléments décoratifs comme les clôtures. Elles ont été supprimées probablement pour fluidifier le défilement de l’écran lors des déplacements des combattants. Les superbes dégradés de couleurs chaudes du ciel orangé du stage de Guile sont également à noter et selon moi de bien meilleure qualité que sur Megadrive, ils rivalisent presque avec la SNES. Globalement, la PC-Engine tient la dragée haute à la console de SEGA concernant ce point très spécifique, et Street Fighter II est parfait pour nous le montrer. La PCE peut afficher jusqu’à 482 couleurs simultanément, la Megadrive 64 seulement. Même en ce qui concerne les animations, la toute petite machine blanche s’en sort comme une reine. C’est fluide, et les backstage sont toujours aussi fourmillant de vie (le cycliste qui fait des aller-retours dans le stage de Chun-Li, les militaires qui encouragent les combattants sur le tarmac de Guile…).
En revanche, les musiques sont de moins bonne qualité que sur les autres consoles 16-bits. Les sonorités sont plus mélodieuses et agréables à l’écoute sur SNES tandis que l’impact du son est plus clinquant sur Megadrive, le processeur sonore de la PC-Engine crache ses tripes et une HuCard, aussi volumineuse soit-elle ne permet pas de stocker des pistes sonores en qualité CD. Mais dans l’ensemble, la prouesse technique de la machine de NEC est vraiment époustouflante, Street Fighter II’ offre une dernière cartouche de taille au format HuCard, incontestablement.
Mais au fait, le jeu est sur HuCard, et il est sorti 12 juin 1993, vous n’y voyez pas une petite coquille ? Si vous avez lu certain de mes articles PC-Engine, ou tout simplement si vous avez eu cette console, ou encore si vous vous tenez un peu au courant, vous devez savoir qu’une extension comportant un lecteur de CD-ROM fut commercialisé pour la console à la fin de l’année 1988, à peine un an après la sortie initiale de la machine. Avec le recul, on peut se dire que cette démarche culottée et innovante était surtout incroyablement prématurée. Elle s’adressait à une frange de la population gamer addict aux nouvelles super technologies et traduisait aussi d’une volonté impérieuse de ne plus se voir contraint par les limites technologiques trop longtemps dictées par Nintendo. Car je rappelle qu’Hudson, avant d’être fabricant de console, était un développeur parmi les plus prolifiques et talentueux sur Famicom. Malheureusement, la console de Nintendo étant trop archaïque quelques années après sa commercialisation, les ingénieurs d’Hudson, frustrés et coincés par un plafond de verre technique infranchissable ont commencé à travailler sur leur propre hardware pour donner naissance à leurs envies et leurs délires.
Ça ne nous explique toujours pas pourquoi Street Fighter II’ est sortie sur une colossale HuCard et non pas sur CD-ROM, d’autant que le premier Street Fighter fut également porté sur PC-Engine en 1988 sous le nom de Fighting Street et … au format CD-ROM ! La raison est pourtant toute simple et Capcom avait bien compris leur erreur de sortir Fighting Street au format CD-ROM. Pour comprendre, il faut résumer ce qu’est un CD-ROM et ce qu’est une HuCard. Un CD-ROM est donc un support de stockage, il peut aussi bien servir aux musiques qu’aux films et aux jeux vidéo. La HuCard quant à elle s’apparente plus à une cartouche de jeu classique telle qu’on peut en voir sur Famicom, Master System, Gameboy et autre. Bien qu’en terme de dimension, une HuCard se rapproche d’une carte téléphonique ou d’une disquette 3,5 pouces, le principe n’est pas le même, la HuCard n’est pas dotée de bande magnétique sur laquelle on stocke les données. La HuCard contient une ROM, ou Read-Only Memory, autrement dit de la mémoire morte, qui n’a qu’un seul et unique but : être lue par la RAM (mémoire vive, celle qui interprète les données, en opposition à mémoire morte donc, qui est passive, qui n’attend que d’être lue) d’une machine, console, ordinateur ou autre. Cette méthode de transfert de donnée d’un support de stockage à une machine est la plus basique qui soit. Sa simplicité de principe fait que le processus est immédiat, rapide, facile. Les informations partent de la ROM dès qu’elle est connectée à la RAM, et le résultat s’affiche sur l’écran, le moniteur ou tout autre interface périphérique visuel. C’est pour cela que les temps de chargement ont tendance à ne pas exister, ou être quasi invisibles lorsqu’on joue à des jeux au format cartouche.
Le CD-ROM n’est qu’un support de stockage, son contenu n’est pas transféré vers la RAM de la console, il est ainsi nécessaire à la machine de se doter de ce qu’on appelle un buffer RAM. Autrement dit, une sorte d’espace virtuel qui émule la fonction de transfert de donnée d’une ROM vers la RAM. On dirait que c’est assez compliqué dit comme ça, mais j’essaye au maximum de simplifier les choses. Cet espace virtuel sera rempli au fur et à mesure que le jeu sera lu des données dont la machine aura besoin pour afficher ce qui est nécessaire à l’écran. Mais cet espace est limité, si bien que ce qui y sera stocké et donc affiché à l’écran sera le strict nécessaire selon les actes du joueur et les demandes qu’il fera à la machine. Si vous jouez à un jeu de plate-forme segmenté en tableau, il y a de forte chance que le buffer RAM ne rende accessible qu’une petite portion du niveau ou du tableau tandis que le reste figurera encore sur le CD-ROM, à attendre bien sagement qu’on ait besoin de lui pour être transféré momentanément dans le buffer RAM puis vers la console. Seulement voilà, Fighting Street est sorti avec un système de lecteur CD-ROM certes révolutionnaire pour l’époque mais qui visiblement ne l’était pas suffisamment pour rendre justice à toute la gourmandise graphique du jeu. La taille gigantesque de mémoire d’un CD-ROM permettait de stocker toutes les données en détail d’un jeu comme Fighting Street sans les compresser et donc sans altérer leur qualité : sprites, séquences d’animation, musiques dans la meilleure qualité sonore possible, etc. Mais le buffer du CD-ROM² de la PC-Engine sorti au même moment faisait 64ko, soit 0.5Mbit.
Si bien que le faible buffer RAM du CD-ROM² n’était pas suffisamment grand pour accueillir comme il se devait le flux de données transférées du support CD-ROM du jeu vers la RAM de la console. Le buffer devait se vider de certaines données au fur et à mesure qu’il en accueillait d’autres. Le buffer étant trop rempli de données qu’il ne parvenait pas à traiter et transférer suffisamment vite, cela occasionnait des ralentissements, des bugs, qui se traduisaient à l’écran par des animations saccadées, entre autres. Si le découpage complet de l’animation d’une attaque d’un personnage de Fighting Street réclame par exemple entre 70 et 100ko de stockage, il est évident que l’intégralité ne pouvait pas passer en une seule fois dans l’espace virtuel du buffer RAM pour être transférer sur la console. Alors le buffer RAM s’y reprenait à de multiples reprises pour faire passer la totalité des données en plusieurs fois s’il le fallait. Et si le délai de traitement et de transfert des données est parfois imperceptible, ce n’est hélas pas toujours le cas, surtout avec les jeux les plus costauds techniquement et qui réclament beaucoup de ressources.
Nous avons là un cas d’école qui nous prouve qu’une bonne maîtrise du hardware et de la technique peut influer sur le gameplay et le game design, car tout est lié. Sur un support type cartouche ou HuCard, il y a fort à parier que ce genre de problème ne serait pas survenu. Il aurait fallu fabriquer une HuCard d’une taille monumentale pour l’époque, car en 1988, celle-ci ne dépassaient pas les 2 ou 3mbits. Mais force est de constater qu’après l’expérience ratée Fighting Street sur CD-ROM², Capcom et Hudson avaient parfaitement assimilé et une HuCard exceptionnellement grande fut fabriquer pour accueillir convenablement Street Fighter II’ qui lui, pour le coup, tourne avec une fluidité exemplaire car l’accès direct de la ROM à la RAM est garanti. Pour vulgariser encore plus, dites-vous que si des données doivent passer par un buffer RAM, c’est comme si vous deviez passer par le centre-ville de Paris pour partir en vacances. Tandis que sur cartouche, les données empruntent l’autoroute pour se rendre de la ROM à la console. J’espère avoir été suffisamment clair avec cette petite métaphore.
En définitive, le CD-ROM² n’avait absolument pas les moyens de servir correctement un bon portage de Street Fighter premier du nom, quand bien même d’énormes efforts d’optimisation furent concédés par Capcom. Mais de cela, nous reparlerons peut-être un autre jour. À l’inverse, les choix techniques et l’optimisation pour Street Fighter II’ sur HuCard sont parfaits et offrent une expérience de jeu très agréable. Y’a pas à dire, même si quelques erreurs peuvent avoir été commises, Hudson et Capcom maîtrisaient leur sujet et savaient quoi faire à l’époque.
Autant le redire, si jamais vous n’avez pas encore compris, Street Fighter II’ est sur PC-Engine un véritable tour de force technique. Il est graphiquement sublime, pour une console qui a déjà cinq ans et demi dans le ventre au moment de la sortie du soft, elle n’a pas à rougir face à la concurrence de la SNES ou de la Megadrive. Le jeu est parfaitement jouable et on retrouve avec grand plaisir tout ce qui fait la quintessence de la licence. Nervosité, précision et richesse du gameplay sont au rendez-vous, surtout avec un pad adéquat. Le fun incomparable de ce jeu mythique est intergénérationnel est encore palpable, il nous brûle les mains dès lors qu’on s’empare de la manette et embrase notre cœur. Un must have absolu, peu importe son support. Il se place immédiatement comme le meilleur jeu du genre sur PC-Engine, même si par la suite plusieurs portages de jeux SNK viendront lui faire concurrence. Street Fighter II, définitivement, écrase tout sur son passage !
Monster Pro Wrestling est typiquement de ces curiosités nippones issues du catalogue de la PC-Engine. Mélange osé de sport de lutte (très populaire au Japon), de stratégie et de RPG (tout est relatif, nous allons voir ça en détail) et présentant un casting digne du dernier kaijū eiga à la mode, il fait parti de ces soft qui ont fait la marque de fabrique de la console la plus japonaise de tous les temps. Monster Pro Wrestling (qui n’a aucun lien de parenté avec la série de jeu de catch Fire Pro Wrestling signée Human) nous plonge dans un monde dystopique en 1999 où l’Humanité se terre dans des abris souterrains tandis que le vil Belzébuth envoi à la surface du monde ses armées de catcheurs démons pour exterminer notre race. Le docteur Yamato ne l’entend pas de cette oreille et décide de créer une troupe de mutants pour répondre aux menaces démoniaques, sur le ring !
Drôle de speech pour un jeu à l’allure complètement barrée mais qui prend son propos très au sérieux en même temps. Nous choisissons alors notre catcheur parmi une ribambelle de mutants bodybuildés et aux teintes de peau aussi étranges que variées : Flyman, Poisonman… ; le docteur Yamato nous sert de coach et entre chaque combat, il s’assure de l’amélioration des capacités de combat de notre mutant. Au départ, trente points sont disponibles à répartir sur diverses caractéristiques chiffrées qui, il faut se l’avouer n’ont pas l’air d’avoir grande influence sur le gameplay au départ. Force, résistance, endurance… On distribue les trente points un peu à l’instinct, selon ce qui nous semble important ou non dans un jeu de lutte, et on voit ce qui se passe. Vient le moment de passer à l’action.
Sur le ring, il n’est pas question de manipulation complexe de manette pour sortir des enchaînements de coup improbables et en rythme, nous ne sommes ici clairement pas dans un jeu de combat traditionnel. On sélectionne un type d’attaque, et un chiffre s’affiche à l’écran et défile de façon rapide et hasardeuse. Nous devons dès lors maintenir le bouton d’action enfoncé afin que le compteur qui défile à toute allure s’arrête et ne tombe sur un chiffre qui déterminera en quelque sorte votre potentiel d’attaque. Ensuite, c’est au tour de l’adversaire d’opérer cela ; et si son chiffre est plus élevé que le vôtre, votre attaque échouera tandis que la sienne vous sera asséné en pleine face !
Oui, dès les premières parties on a franchement l’impression de jouer à pierre-papier-ciseau tant le système parait saugrenu et hors de toute mesure de contrôle de la part du joueur. Il y a bien des types d’attaque plus ou moins efficace selon l’adversaire, et ces derniers disposent même de statistiques parfois très largement différentes des nôtres, elles sont par ailleurs systématiquement affichées à l’écran pour un maximum de transparence. Ainsi, si nous ne parvenons pas à vaincre un ennemi, il reste possible de recommencer une partie en sélectionnant un autre mutant et en redistribuant les points de statistiques autrement afin d’essayer de vaincre le fauteur de trouble selon ses propres forces et faiblesses. Mais le système de jeu reste malheureusement bien trop obscur pour qu’on puisse réellement parler de stratégie véritable. Tout au plus on devine que telle ou telle action peut être plus efficace qu’une autre, mais on a la fâcheuse impression que la chance prend beaucoup trop le pas sur le reste. Le manque de tutoriel au sein du soft n’arrange pas les choses, et pour le peu que le japonais vous soit complètement inconnu, il est certain que Monster Pro Wrestling ne soit qu’un mur de fumée opaque à vos yeux.
Ce qui nous pousserait à persister dans ce système de combat, c’est la séquence qui découle de ce simili shifumi. En effet, une fois qu’on attaque ou qu’on se fait attaquer, nous avons droit à de belles animations où nos mutants s’échangent de sacrés coups. Coup de pied sauté, prise de l’ours, saut de l’ange, facelock (terme technique en lutte qui désigne l’action d’enserrer le cou de son adversaire dans la pliure de notre coude et de serrer pour l’obliger à se soumettre), suplex, et même boule de feu ! Fun, ses animations montrent des sprites de combattants volumineux et bien détaillés servant une mise en scène réellement dynamique et explosive quand bien même tout cela ne se passe pas en direct. En fait, on peut comparer cela aux QTE modernes. On appuie sur un bouton, et la séquence animée - parfois d’une durée de plusieurs secondes - s’écoule devant nos yeux et montre les effets de notre action avant de nous demander de rappuyer sur un bouton pour lancer la suite. Les mutants sont bien designés et ont un certain panache. Il y en a un qui ressemble à une sorte de samouraï bleu sombre, un Shredder dopé au produit radioactif, tandis qu’un autre prend carrément l’apparence d’une espèce de minotaure aux cornes menaçantes. Il y en a un qui s’apparente littéralement à une momie, son visage intégralement recouvert de banderole de tissu blanc, un quatrième ressemble à s’y méprendre à Sasquatch de la série Darkstalkers qui n’apparaîtra pourtant que trois ans plus tard (le personnage étant lui-même inspiré du mythe du yéti). Mention spéciale à un de ces mutants au teint grisâtre, au crâne chauve et avec un motif d’œil sur le front, véritable sosie du docteur Manhattan des Watchmen !
Jeu inhabituel qu’est ce Monster Pro Wrestling, il mérite le détour non pas pour ses qualités ludiques finalement assez pauvres mais pour son statut de curiosité bien japonaise. Figure représentative d’une façon de faire du jeu vidéo japonais qui de tout temps préférait se baser sur un concept, aussi loufoque soit-il, plutôt que sur un idéal de jeu formaté, Monster Pro Wrestling intrigue autant qu’il frustre. Rares sont les joueurs à avoir eu la patiente ou le désir d’aller jusqu’au bout et à vrai dire, c’est une véritable gageure tant la difficulté devient insurmontable à partir du troisième ou quatrième combat. Le système de jeu répondant effectivement un peu trop du hasard, il est difficile dans ces conditions de lutter contre un compteur qui défile de façon incontrôlée et qui ne se soumet à strictement aucun raisonnement logique. Reste que graphiquement et d’un point de vue sonore, Monster Pro Wrestling est un sympathique divertissement qui montre les capacités épatantes de la petites PC-Engine face à une Super Famicom déjà disponible à la sortie du jeu.
Si je vous parle de Tōhō, il y a des chances pour que vous ne sachiez pas immédiatement de quoi il s’agit. Et pourtant, si je vous dis Godzilla, Akira Kurosawa, ou encore Lamu, cela devrait un peu plus vous éclaircir les idées. Tōhō est donc un studio de cinéma japonais fondé en 1932 à Tokyo. En 1989 sort un assez peu connu film de science-fiction nommé Gunhed, on ne va pas s’étendre sur le sujet. Bien que certaines critiques semblent avoir été conquises, n’hésitant pas à comparer le long-métrage à ce qu’aurait pu faire Ridley Scott dans ces belles années avec juste ce qu’il faut d’une vision toute japonaise de la sy-fy en sus. Oué, carrément. Dans les mêmes années, les géants japonais de l’électronique grand public et du jeu vidéo NEC et Hudson sont à la recherche de bons produits pour soutenir l’effort de guerre, car il se trouve qu’ils ont une console à vendre : la PC-Engine. Cette dernière est déjà sur de bons rails, elle prouve jour après jour sa férocité avec un hardware puissant et des jeux très intéressants. L’argumentaire marketing entre 1987 et 1990 argue qu’avec la PC-Engine, l’arcade à la maison est enfin possible. Et des soft comme R-Type l’ont déjà prouvé avec brio. Mais il est temps de définitivement enterrer la concurrence. Hudson s’octroie les droits d’exploitation du film principalement codétenu par Tōhō et Sunrise, un studio d’animation japonaise et appelle à l’aide des développeurs déjà aguerris face à l’exercice des shoot them up : Compile.
Ainsi naquit Gunhed, qui sortira le 7 juillet 1989 et qui deviendra instantanément un des classiques de la machine. Si R-Type, sorti un an auparavant avait bluffé son monde en donnant à la PC-Engine un titre proche au pixel prêt de l’arcade sur une petite HuCard de 2mbit, Gunhed entend aller encore plus loin. Pas de temps à perdre, la Megadrive pointe le bout de son nez, SEGA est lui aussi affamé de succès et NEC/Hudson ripostent par l’annonce de jeux toujours plus beaux et par l’exposition de leur système de CD-ROM à brancher sur la console dès 1988. Chaque production, qu’elle soit sur carte de jeu ou sur disque doit envoyer du bois pour impressionner. Contrairement à la Famicom qui s’adresse à la famille, et aux enfants surtout, la PC-Engine dévore un marché de niche de technophiles avides d’évolutions graphiques et d’hardware surpuissants.
Le scénario du film nous menait dans un futur proche, en 2038 plus exactement. Comme le craignait Sarah Connor dans Terminator, la suprématie des ordinateurs sur la race humaine est devenue une triste réalité. Les humains se défendent désormais à grand renforts de robots de guerre géants tandis que Chiron 5, le système d’intelligence artificielle le plus perfectionné, mais aussi le plus machiavélique, entend bien en finir une bonne fois pour toute. La courte ère de paix, fragile et dérisoire, qui s’était installée est terminée, l’extermination de la race humaine est inévitable. De son île où Chiron 5 fut emprisonné après que les humains aient tentés de la détruire à l’aide de leur flotte de Gunhed, les fameux robots de guerre, elle fomente un plan de vengeance. L’île en question n’est qu’un vaste champ de bataille où les carcasses de Gunhed détruits au combat sont légions, et constituent par ailleurs une sources financières importantes via le marché noir de l’armement. Lorsqu’on groupe d’individus avide d’argent facile s’introduit sur l’île pour piller les épaves, la colère de Chiron 5 se déchaîne…
Le jeu Gunhed ne reprend pas véritablement ce scénario. En vérité, on ne sait trop guère, la mise en scène étant relativement timide et le début du jeu ne nous met aucunement au contact d’une île, ni même de la planète Terre, puisque c’est dans l’espace que nous sommes conviés. En revanche, on devine que la pilote que nous dirigeons dans le jeu (eh oui, il n‘y a pas que Samus Aran dans la vie) est celle qui répond au nom de Nim dans le film, sergent des Texas Air Ranger de son état (alors que le film nous montre plutôt que c’est le rôle masculin principal tenu par Masahiro Takashima qui est le héros). En revanche, le boss final du jeu est là encore une femme et ça colle puisqu’il est précisé que Chiron 5 est une entité de genre féminin, au-delà de son état d’intelligence artificielle. Enfin bref, tout cela, on s’en fout un petit peu, je dois dire.
À peine le premier niveau débuté qu’on est frappé par l’excellence du graphisme. L’introduction façon anime nous claque son superbe pixel art en pleine tronche, tandis que le double scrolling vertical et horizontal, secondé par une avalanche de sprites, ne parvient même pas à faire grogner la console. L’animation reste d’une fluidité exemplaire, tout se déplace très vite, les explosions sont bien dessinées et… quoi ? J’ai entendu un truc, en ramassant le power-up là. Si, si, j’en suis presque sûr. Je me concentre et une minute plus tard, v’là t’y pas que je récolte une seconde pastille colorée et rebelote, une voix digitalisée m’informe qu’une nouvelle arme est disponible dans mon arsenal. Ça, en 1989, et sur une petite console de salon, c’est classe. C’est le genre de chose qui fait qu’on se souviens longtemps d’un jeu. Gunhed est le parangon technique de la PC-Engine, ses sprites sont pléthoriques et colorés, et quand bien même ses décors spatiaux ou le level 5 (un désert) peuvent paraître assez vides, les sprites superbement designés de ses boss (le boss 4 est, je trouve, un avant-goûts de ce que deviendra William Birkin dans Resident Evil 2, pas vous ? )et les effets spéciaux de notre arsenal rattrapent largement ce léger écueil. La technique ira en s’améliorant sans cesse avec les suites officieuses de Gunhed (Superstar Soldier, Final Soldier puis enfin Soldier Blade) et on ne serait lui en tenir rigueur bien longtemps quand on remet correctement le soft de Compile dans son contexte historique.
Heureusement pour lui, si ses graphismes vous paraissent trop vieillots (que foutez-vous là, sur Retro Gamekyo, alors ?), il dispose d’un autre gros atout, son gameplay ! Son système d’armement est original quoique légèrement déroutant au début. Apparaissant à l'écran sous la forme d'icônes allant de I à IV, toutes ces armes ont la faculté de monter en puissance dès lors qu'on en récolte suffisamment. D’autres pastilles, elles affublées de lettres, pouvaient aussi être utilisées pour configurer notre arme selon notre besoin du moment. Un mode offensif avec toute la puissance de feu vers l’avant pouvait donc se substituer à un mode défensif où une bonne partie de nos tirs se voyaient dirigés vers l’arrière ou les flancs de notre vaisseau. À vrai dire, ce n’était pas toujours aisé de jongler entre les différents modes dans le feu de l’action, mais à force d’essai et de répétition, ça permettait d’aborder certaines zones plus délicates que d’autres en se préparant de façon idoine. Cela occasionnait par ailleurs un déluge d’effets spéciaux et une bataille de sprite grandiose. En sus, on disposait de missiles à têtes chercheuses, de smartbomb et de bouclier, de quoi donner à notre Gunhed (puisque c’est comme cela qu’on appelle nos robots/vaisseaux de guerre dans le background du jeu) une franche gueule d’engin de mort volant !
Ça a tout de même son inconvénient et lorsqu’on ne connaît pas sur le bout des doigts les effets qu’engendre une certaine combinaison de power-up récoltée, on peut se retrouver avec un rayon laser qui virevolte sur tout l’écran n’importe comment. On perd fatalement en précision et en efficacité si on ne sait pas comment se positionner pour se servir correctement d’une telle arme, et cela mène à de la frustration. Le système d’armement de Gunhed réclame donc un temps d’adaptation et quelques expériences ingame pour déterminer quel est notre type d’arme favorite. Cela est contrebalancé néanmoins par une difficulté relativement cool et un rythme de jeu un peu déséquilibré. En effet, le niveau 4, organique et relativement calme succède à un niveau 3 où les unités ennemies envahissent l’écran. Les boss sont bien fichus mais pas franchement très difficiles à vaincre, leurs paterns ne sont pas complexes à comprendre et le nombre de boulettes qu’ils nous envoient à la figure est restreint. Mais ce n’est pas forcément un mal puisque Gunhed reste plaisant à jouer malgré tout. Pour une fois qu’un shoot them up - ou tout autre jeu des années 1980 - n’est pas d’une difficulté abominable, on ne va pas s‘en plaindre !
Les développeurs ont même été conciliant avec le joueur en lui offrant des possibilités tout à fait sympathiques. En effet, en pressant select, il est possible de moduler la vitesse de déplacement de notre vaisseau, pratique lorsqu’on bute sur certaines portions de niveau un peu trop épileptiques. De plus, il y a deux façons d’aborder la perte d’une vie. Les experts du shoot opteront pour l’option qui les fait revenir en plein cœur du champ de bataille sans plus aucun bonus ou power-up, leur laissant le challenge de se réarmer au plus vite face aux nuées de vaisseaux et d’aliens ennemis. L’autre option permet aux néophytes de revenir quelques écrans en arrière, dans une section du niveau un peu plus calme afin de prendre le temps de récolter quelques bonus avant de retourner en enfer. C’est une petite attention notable car Compile et Hudson ont eu le bon goût d’offrir le choix aux joueurs, là où énormément d’autres shmup de l’époque ne le faisaient pas et préférés imposer un défi parfois progressif, mais souvent très ardu également.
Shoot them up incontournable de la PC-Engine, Gunhed est un des meilleurs titres du début de vie de la console d’Hudson/NEC. Peut-être un peu conventionnel avec le temps, Gunhed dispose d’une technique haut de gamme, une véritable vitrine pour la PC-Engine, doublé d’un gameplay et d’un système d’armement qui allie efficacité et originalité. L’année 1989 sera riche pour la PC-Engine, avec Ordyne, Bloody Wolf, Doraemon – Meikyû Daisakusen, Nectaris, PC Genjin, Neutopia, ou encore le délicieux Son Son II, mais c’est Gunhed qui sera le véritable fer de lance de la machine. Au-delà du bon jeu, Gunhed est représentatif de tout l’esprit Hudson et PC-Engine, il a carrément servi d’outil de communication et de liant pour bâtir une communauté de fan à travers tout le Japon. Pour vous rendre un peu mieux compte de l’aura de Gunhed, bien qu’il ait pris des rides, je vous suggère de lire le niveau bonus de cet article.
Tel un Saïyen envoyé sur Terre, Agedama est un jeune garçon qui provient d’une lointaine planète. Cependant, lui n’a pas reçu pour mission de nous exterminer mais d’apprendre à devenir un super héros car il se trouve que la Terre est une planète agitée où il y a toujours des combats à mener et des injustices à résoudre. Rien de tel pour un super gentil en herbe pour apprendre le métier en somme. Pour passer incognito, il est intégré à l’école de sa ville où il y fait la rencontre de l’atrabilaire Rei Kuki, jeune fille imbue d’elle-même, profondément hautaine et richissime héritière de sa famille. Celle-ci traître son entourage (y compris les dirigeants et professeurs de l’école) comme des animaux à son service et lorsque Agedama lui tient tête, tout innocent qu’il est, Rei décide de se venger. Elle demande alors à son grand-père, inventeur de son état, de lui créer des monstres pour semer la terreur sur la ville et vaincre Agedama, devenu Agedaman lorsqu’il libère ses pouvoirs. Agedama, secondé par son assistant personnel et mentor Wapuro (une sorte de lapin-ordinateur qui ressemble à s’y méprendre au lapin de Rabio Lepus Special sorti également sur PC-Engine en 1990. Wapuro veut d’ailleurs dire traitement de texte ou ordinateur selon le contexte, en japonais) va donc devoir assurer un max pour gagner ses galons de super héros !
En fait, tout cela, c’est non seulement le synopsis du jeu mais également de la série animée qui l’inspire, produite par le studio Gallop (les 66 premiers épisodes de Kenshin le vagabond, Yu-Gi-Oh! Zexal ou encore Initial D First Stage en collaboration avec Studio Comet) et diffusée entre octobre 1991 et septembre 1992. Le jeu - un des très nombreux tiré d’anime sur PC-Engine qui avait trouvé là une source de revenu facile sur le sol japonais – se compose de plusieurs facettes de gameplay. À la plate-forme, on peut y ajouter une grosse part de shoot them up pédestre, ce qui en fait un run’n gun finalement, d’autant que le scrolling est forcé, nous poussant sans cesse vers la droite de l’écran. La fuite en avant est interminable et Agedama aura à sa disposition cinq pouvoirs différents pour venir à bout des monstres envoyés par Rei. Les cinq pouvoirs, chacun liés à une couleur (rouge, bleu, vert, jaune et rose) sont gérés par une jauge qu’on remplit en collectant des cartes semées par les ennemis qu’on élimine.
Le pouvoir rouge est celui du feu et vous permettra de balancer une colonne de lave dont la fumée forme une tête de mort, super classe. Le bleu est le pouvoir du vent qui prendra la forme d’une jolie tornade venant tout balayer sur son passage. Le jaune sera un redoutable éclair. Le vert est un laser qui ressemble à une vague d’énergie et enfin le rose, le plus original et visuel de tous invoquera un groupe de génie style mythologie arabe pour faire le ménage à l’écran. À cela s’ajoute une attaque de base si vous préférez stocker l’énergie de votre jauge pour vous en servir contre un boss et une roulade qui permet d’esquiver certains ennemis ou en détruire d’autres. Les boss, par ailleurs, ne sont pas bien costauds et globalement, les vagues d’ennemis ne vous poseront probablement aucun problème ; La difficulté est très modeste. Le principal point de friction que vous imposera le jeu sera sûrement certaines phases de plate-forme, rendues délicates par le scrolling forcé perpétuel. Un bon timing sera nécessaire mais dans l’absolu, là encore, rien d’insurmontable. Genji Tsūshin Agedama reste un jeu agréable à jouer, qui ne révolutionne rien, mais qui propose une sympathique dose d’action enrobée d’un challenge très modique. Ce qui est dommage, quelque part, car les six petits niveaux se bouclent assez vite et la durée de vie, bien que cela soit la moyenne des jeux d’action d’époque, en pâtit fortement. D’autant plus qu’à la moitié de chaque niveau, le checkpoint restaure l’intégralité de la généreuse barre de vie du héros !
Les boss, aussi peu coriaces soient-ils ont le mérite d’avoir un design sympathique, d’assez gros sprites et savent bien accompagner un visuel très coloré et chatoyant. Genji Tsūshin Agedama est joli à voir, vif. Ce n’est pas le plus beau jeu de la PC-Engine, ni sur HuCard, ni sur CD-ROM, mais il a du charme. Les niveaux ne sont pas très variés ni très nombreux, mais entre la ville, les forêts traversées, les grottes et les montagnes, il y a de quoi dénicher quelques sympathiques panoramas. Mention spéciale au désert du niveau deux et son ciel rosé du plus bel effet. Effet de scrolling parallaxe des nuages et autres éclats lumineux s’occupent également de parfaire le tout dans une fluidité totale du début à la fin (et pourtant, c’est parfois le bordel à l’écran avec plusieurs sprites qui se balancent des boules de feu et des éclairs à la tronche !).
Genji Tsūshin Agedama n’est, en soi, pas un jeu incontournable. Il est plutôt joli, jouable, fun, ça pète un peu de partout et l’ambiance joviale et bon enfant de l’anime est très bien retranscrite dans cette modeste HuCard. Typiquement le genre de jeu court, très arcade, typé début des années 1990 qui occupe le temps d’une moitié d’après-midi ou qui se boucle dans une espèce de fricassée de jeu qu’on a obtenu en lot sur eBay. Pourtant, sa nature mérite le détour car à bien y réfléchir, il s’agit là de l’expression la plus simple et épurée de ce que devrait ou pourrait être le genre du run’n gun. On court et on tire, tout simplement. On est d’ailleurs contraint de ne faire que cela. Digne alternative de Isolated Warrior et Atomic Runner Chelnov qui eux aussi on un scrolling forcé (en vue isométrique pour le premier, et en vue de profil pour le second), Genji Tsūshin Agedama est un de ses innombrables jeu rétro de l’ère 8 et 16-bits qui en fin de compte nous font nous souvenir qu’à une certaine époque, le jeu vidéo ne se prenait pas la tête et que les développeurs, pour la grande majorité, visaient une valeur unique avec conviction : le divertissement.
Ère Edo ( 1603-1868 ), Yoshikage, un chef de guerre apprécié vient d’être trahi par son bras droit, le ninja Hiei. Ce dernier a kidnappé la fille du seigneur, nommée Shizuhime et a fomenté une rébellion parmi les troupes de soldats de Yoshikage. Avec cette nouvelle armée, Hiei s’empare peu à peu des contrées avoisinantes et sème la discorde tandis que le seigneur, pieds et poings liés ne peut rien faire sans risquer la vie de sa fille bien aimée. Mais c’est sans compter l’intervention de Kaze Kiri (comme le fromage), jeune ninja fraîchement sorti du moule du dojo du coin et qui, pour prouver sa déférence envers son seigneur (et aussi un peu pour espérer pouvoir se taper la fille de ce dernier, parce que faut pas déconner, on n’est pas tous des canards à la Mario hein), va partir à l’assaut de l’armée traître et essayer de vaincre Hiei. Tout ça, ça nous est raconté dans une scène d’introduction animée façon manga particulièrement jolie et bien mise en scène, hé oui, nous sommes sur PC-Engine Super CD-ROM² !
Oué, aujourd’hui, pas d’introduction interminable sur les petits secrets de l’histoire du jeu vidéo ou sur les croustillantes anecdotes de coulisses. Après tout, tous les jeux n’ont pas été fait de rebondissements, de coups de tonnerre et de renversements de situation farfelus. Beaucoup en fait se sont fait dans la discrétion la plus totale, sans remous, à tel point que même lorsqu’ils sont sortis, personne ne les a remarqués. Aujourd’hui, Kaze Kiri Ninja Action a clairement disparu des mémoires, malheureusement pour lui car il ne mérite pas cela et c’est ce qu’on va voir dans cet article.
Dès qu’on lance le jeu, deux choses devraient nous sauter au visage, tout dépend de ce que vous remarquez en premier lieu. Parlons tout d’abord du gameplay, un des deux points centraux pour bien juger la valeur de ce logiciel signé Naxat Soft, un des meilleurs éditeurs de la belle vie de la PC-Engine. Kaze Kiri est un beat them all tout ce qui a de plus classique, peut-être même un peu trop classique diront certains. En effet, selon les quelques témoignages récoltés, on m’a laissé comprendre que le level design était parfois si rectiligne qu’il en été ennuyeux. Les vagues d’ennemi ne cessant de débarquer mécaniquement sur la droite ou la gauche de l’écran aurait de quoi ternir le plaisir de jeu sur la longueur.
"Hé, what did you expect ?", comme dirait la sublime Penélope Cruz, une bouteille de Schweppes agrume à la main, j’viens de vous dire que Kaze Kiri est un beat them all. Aller de gauche à droite et tabasser 25 ennemis random à la minute, c’est ça, un beat them all du début des années 90. Les Streets of Rage et autres Final Fight ne faisaient guère mieux, j’ai du mal à comprendre pourquoi les (peu nombreux) joueurs qui s’y sont essayés ont, de façon si insistante, pointé du doigt ce détail qu’ils considéraient comme un défaut.
De toute façon, l’aspect redondant et ennuyeux de la chose est relatif, et au vu du panel d’action qu’il nous ai possible de réaliser, je me demande vraiment si les quelques critiques vues ci et là sont justifiées. Outre balancer quelques combos de sabre à la figure de vos adversaires, vous pourrez ainsi bondir agilement, tel un ninja (sans blague), exécuter de foudroyantes glissades pour esquiver les attaques adverses, envoyer des kunaïs (genre de petite dague typique des ninjas de l’ère féodale japonaise), ou encore utiliser une magie. La magie en question, accessible via le bouton select du pad consiste à disparaître et se rendre, de ce fait, totalement invulnérable, même face à une attaque de boss ! Vous réapparaissez une seconde plus tard avec toutefois un micro délais de latence pour retrouver le contrôle de votre combattant. Un outil à double tranchant donc, utile lorsque vous n’arrivez pas correctement à déterminer le pattern d’un boss et que ses attaques sont difficilement évitables par un saut ou un dash.
Dans le même genre d’idée, le salto arrière vous octroie une frame d’animation d’invincibilité. C’est de l’ordre de la seconde, mais si vous parvenez à contrer une attaque adverse avec ce genre de mouvement, ça peut parfois sauver tout une partie ! Le coup de pied sauté, moins radical que dans certains autres beat them all (Legend, pour ne citer que lui) permet malgré sa relative inefficacité (les ennemis parviennent à le bloquer facilement) de gérer l’ère de combat et vous séparer rapidement d’un groupe d’ennemi qui vous encercle. Une prise au corps à corps est même possible, ce qui contribue encore un peu plus à rendre l’action dynamique. Mais attention à utiliser cette jolie palette de prouesse acrobatique à bon escient, car la magie et les kunaïs puisent à chaque utilisation dans votre barre de vie, qui se régénère au fur et à mesure (sauf si on vous tape dessus, naturellement) !
Bon, ok, on peut toujours se dire qu’on aurait bien aimé quelques phases de plate-forme pour profiter de la souplesse de notre ninja, un peu comme dans Hagane ou Shinobi, et puis ça aurait véritablement justifié de pouvoir sauter dans ce jeu. On aurait également apprécié que le jeu ne nous force pas, parfois, à revenir en arrière juste histoire d’aller foutre une rouste à quelques ennemis restés en arrière pour remplir un compteur, condition sine qua none à l’apparition du boss au terme du level. Kaze Kiri n’est pas subtil pour un sou, mais au moins, il défoule et Naxat Soft a accompli un effort remarquable pour rendre la maniabilité fluide et agréable en toute circonstance. Et ceci, avec rien de plus que le pad de base de la console, celui avec 2 pauvres boutons d’action (le pad officiel à six boutons, commercialisé plus tard n’est donc pas nécessaire avec ce jeu). Par ailleurs, la difficulté du jeu est très abordable, peut-être même trop, ça change de tous ces jeux typés arcade du début des années 90 qui vous font vous éclater le pif contre un monstrueux mur de difficulté abusive. Dans Kaze Kiri, on ne réfléchit point, on tranche, on court, on balance une volée de dague et on met des gros coups de tatane dans la mâchoire des brigands qui se dresse sur notre chemin, basta !
Ceux qui font la fine bouche sur le gameplay du jeu ne devrait pas trouver tant que cela à redire sur sa technique et ses graphismes, irréprochables en tout point. Vraiment ? Presque ! ‘Fin bon, le jeu est très joli, hein, avec des gros sprites, une animation fluide et des décors soignés en plus d’un jeu de couleurs chatoyantes. De la belle 2D 16-bits style comme on aime. C’est l’un des deux points qu’on est censé remarquer tout de suite en essayant le jeu, comme évoqué précédemment. En prime, le jeu use et abuse d’effets pyrotechniques éclatants et de trois à six plans de scrolling parallaxes peuvent être observés dans certains niveaux sans que la fluidité n’en pâtisse. Par ailleurs, quelques scènes clés fait en pixel art, parfois légèrement animées, et réalisées par le directeur du jeu, un vétéran de Naxat Soft nommé Kazuhiko Inoue (à qui on doit également Coryoon, un cute them up déjà testé sur Retro Gamekyo, ou encore Alzadick, l’excellent jeu du Summer Carnival 92 de Naxat Soft, dont il faudra qu’on parle un jour…) font vraiment très bonne impression. Les capacités du CD-ROM sont bien utilisées et permette le stockage de sprites détaillés et de grande taille en plus de musiques assez bien compressées. Bien que la bande-son soit jugée de qualité, et de façon assez globale, elle l’est, on aurait en revanche put apprécier dans de meilleures conditions l’aventure avec des thèmes un peu moins catchy et électro typique des années 90 mais plus traditionnel, plus ‘’Japon féodal’’ dans l’âme, quoi.
Les boss sont aussi les bénéficiaires d’un design très notable. Plus gros que le reste des sbires - véritable chair à canon qu’on charcle à tour de bras -, ils contribuent à donner du caractère à l’armée rebelle qu’on doit affronter. Le premier boss, une sorte de samouraï en armure armé d’un hachoir géant est vraiment plaisant à voir. Plus énorme encore, un boss prend l’apparence d’une gigantesque armure qui semble être animée par une quelconque magie noire, un peu comme Edward dans Full Metal Alchemist. Des ennemis encore plus folkloriques vous barrerons la route, comme un moine guerrier surmonté d’un grand chapeau conique que n’aurait pas renié Raiden dans Mortal Kombat ; ou bien encore un sublime tigre dressé à l’attaque !
Mais alors, qu’est-ce qui ne va pas dans les graphismes de Kaze Kiri Action Ninja ? Eh bien, tout aussi jolis qu’ils soient, les ennemis basiques et les décors sont assez répétitifs. Parmi les 19 level, un chiffre honorable au demeurant, on déambulera souvent - un peu trop - sur le toit des pagodes, dans des souterrains obscurs ou dans des coursives chichement éclairées par des torches, représentatif de l’architecture nippone d’époque. Parfois, les murs se couvriront de parures décoratives et des portes en bois sculptées seront visibles en fond, un peu de végétation ici ou là, mais globalement, on ressent tout de même une répétition nuisible des décors dès la seconde moitié du jeu. Les ninjas adverses à occire souffrent eux aussi d’un mal typique des beat them all, ils se ressemblent tous et c’est d’autant pire qu’ils apparaissent en nombre, comme le veut le principe même d’un beat them all. On aurait pensé qu’en avril 1994, période où est sorti le jeu, et après avoir accueilli d’innombrable ténor du genre, le genre beat them all aurait enfin trouvé le moyen de rendre son bestiaire un peu plus varié. À la place, d’inlassable vague de clone et un swap color feignant nous est servi. Tous les Streets of Rage sont déjà disponibles ; les deux premiers Final Fight le sont ; Legend sort à quelques jours d’intervalle ; l’excellent remake de The Ninja Warriors pour SNES a pointé le bout de son shuriken en janvier de la même année ; et en arcade, on a découvert les curieusement bons Astérix de Konami et Punisher de Capcom, bref, y’a de la concurrence !
D’aucun dirait qu’il est brut de décoffrage, même carrément rudimentaire, Kaze Kiri fait peut-être les choses simplement, mais du coup, il les fait bien. Très bien même, fluide et explosif, c’est un soft bourré d’action et d’amusement. Même si la concurrence d’autres gros morceaux du genre (Shadow Dancer sur Megadrive, Hagane sur Super Nintendo…), Kaze Kiri mérite clairement le détour. La PC-Engine, qui aura eu une durée de vie étonnamment longue et riche en jeu de qualité se dote encore d’un software que je vous conseille de zyeuter, un peu, juste pour voir. En plus, outre ses qualités intrinsèques manette en main, il se dote d’un enrobage séduisant, rappelant beaucoup le design manga d’une autre saga culte de la PC-Engine : Tengai Makyō.
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Cadeau bonus, même si ça n'a rien à voir avec le sujet de l'article, je pouvais pas m'en empêcher...