Les remakes graphiques, on en a vu passer un paquet dans l’histoire du jeu vidéo mais depuis quelques années, il semble y avoir un attrait particulier à apporter une nouvelle couche de peinture sur des vieilleries. On pourrait citer des jeux 2D comme
Wonder Boy : The Dragon’s Trap ou plus récemment le retour de
Link’s Awakening, mais la 3D n’est pas en reste, particulièrement avec Activision qui a balancé toutes les aventures de
Crash et
Spyro avec un joli peaufinage. Et surtout un énorme succès dans le cas de
Crash Trilogy. Du coup, Sony s’est dit qu’après avoir zieuté du coté de la PS2 en repiquant
Ratchet & Clank et
Shadow of the Colossus, pourquoi ne pas aussi aller encore plus loin en remontant jusqu’aux années 90, avec le cas
MediEvil. Et ce ne fut pas la meilleure idée qu’a pu avoir l’éditeur sur cette génération.
Toute la problématique va venir du genre. Déjà les vieux jeux en 2D sont susceptibles de garder une certaine prestance en terme de gameplay, et pour les autres cas cités (ceux de la PS1), on parle d’un jeu de course et de platformer, donc pas forcément les genres qui vieillissent le plus mal, surtout
Crash encore une fois, en dépit de quelques imprécisions. Or, dès que l'on aborde le cas de jeux d’action en déplacement plus ou moins libre, se contenter de sortir un mouchoir et une bouteille de vernis n’est peut-être pas suffisant, car implique de laisser délibérément des défauts pardonnables à une époque où les gens écoutaient du Manau, mais beaucoup moins acceptables en 2019. Surtout pour un jeu vendu 30€, ce qui ne représente que 10 balles de moins que les produits d’Acti qui étaient vendus sous forme de trilogie, avec globalement le même travail.

Et là où je peux faire preuve d’une certaine objectivité sans être biaisé par le voile de la nostalgie, c’est tout simplement parce que je n’ai jamais touché à la franchise jusqu’à présent, juste « vu » quelqu’un le faire, et ce n’était que le début de l’aventure (c’était peut-être une démo d’ailleurs…). Pour autant, je connaissais au moins l’histoire, donc cette de Sir Daniel Fortesque, plus grand chevalier des terres écossaises de Gallowere, envoyé en première ligne avec son armée pour affronter le démoniaque sorcier Zarok. Mais Fortesque est un malchanceux et est mort comme une merde dès les premières secondes en se prenant une flèche perdue dans l’oeil à défaut du genou. Cela n’a pas empêché votre armée de gagner et comme on sait que l’histoire est écrite par les vainqueurs, le bon roi a décidé de jouer les révisionnistes en préférant indiquer que vous êtes mort en héros, après avoir tué Zarok. Sauf que le Zarok, il avait juste fui et c’est donc 100 ans plus tard qu’il revient pour transformer les habitants en zombies tout en réveillant les morts… incluant par mégarde Fortesque, version squelette. Il est temps de se montrer enfin digne de votre pseudo réputation.
Mine de rien, même 20 ans après, il faut reconnaître que le scénario de
MediEvil est juste génial, même s’il faut prendre en compte que cette qualité revient surtout au synopsis décrit et qu’à partir de là, plus grand-chose ne va évoluer jusqu’à l’affrontement final. Cela n’a pas empêché les développeurs d’époque d’avoir su construire un univers marquant et teinté d’humour, par ce « héros » atypique qui s’exprime en « mgneugneu » (pas facile quand tu n’as plus de langue, de cordes vocales et qu’il te manque la moitié de la mâchoire), l’âme de vos anciens lieutenants qui n’hésitent pas à vous placer parfois quelques piques, et surtout les têtes de gargouilles qui sont dans la provocation constante en vous rappelant que votre statut de héros a la même valeur que la parole de Bertrand Cantat dans une réunion sur les violences faites aux femmes. Il faudra en revanche faire avec un doublage assez spécial, refait pour l’occasion et parfaitement digne de l’original. Faut juste aimer le coté un peu enfantin dans le ton.
MediEvil est donc un jeu d’action-aventure à l’ancienne qui va mixer exploration, quelques énigmes et des affrontements au travers de deux douzaines de niveaux à taille variable ponctué à chaque fois de sales temps de chargement, où malgré un thème unique (celui d’un Halloween façon Burton), on parvient à trouver une certaine variété dans les niveaux qui ont enfin l’occasion de briller techniquement, sans non plus nous renverser. C’est évidemment incomparable à la version d’origine et même celle sur PSP, mais ce n’est pas chatoyant, et disons le pour forcer dans le comparo bien moins agréable que les trilogies coté Activision. A quelques rares effets, c’est typiquement le résultat qu’on aurait qualifié de « ouais, sympa... » même sur une PS3. Il faut dire qu’on n’a pas non plus l’occasion de bien apprécier les éventuels détails vu la caméra éloignée, pas toujours pratique mais toujours plus que la nouvelle vue « de dos », tout simplement exécrable et qui ne trouvera utilité qu’en cas de danger (donc en exploitant des armes à distance pour éviter le contact).
Et ce point permet de rebondir sur l’autre problème du jeu. Car même en mettant de coté sa caméra vieillotte, le jeu se traîne des tares qui n’ont plus lieu d’être aujourd’hui. Aucun problème concernant les mécaniques plutôt réussies bien que devenues très (trop ?) classiques, et on aime le fait d’être récompensé à vouloir taper le 100% à chaque niveau pour ensuite se rendre au Hall des Héros et récupérer une nouvelle arme ou une jauge d’énergie supplémentaire, mais wow, ce feeling du néant quoi ! Car si le jeu est plus simple à manier (on joue quand même avec un stick plutôt qu’une croix), les combats sont majoritairement navrants, donnant l’impression de mouliner dans le vide contre des ennemis qui vous touchent obligatoirement à moins d’user en boucle de la même technique (du genre l’attaque concentrée au marteau). En ressort une difficulté artificielle, parfois bien rageante tant elle grimpe assez vite, et un plaisir de jeu, disons le clairement, assez limité durant les 7-8h réclamées pour terminer le jeu. Qu’importe le polish donc. Quand vos fils de 7-10 ans vous regarde jouer en balançant « On dirait un vieux jeu » sans avoir la moindre envie d’y toucher, c’est clairement que Sony a loupé son coup pour relancer une franchise qui méritait meilleure attention.