Rockstar et
Take Two ont beau se féliciter de résultats
“largement supérieurs aux attentes”, mais l’ambiance, elle est tout sauf triomphante.
Quelques jours après l’annonce de plusieurs dizaines de licenciements,
des ex employés du studio ont manifesté ce jeudi devant les bureaux de Rockstar North et de Take-Two Interactive à Londres pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une répression syndicale pure et simple.
L’action, menée par l’Independent Workers’ Union of Great Britain (IWGB), accuse Rockstar d’avoir renvoyé près de trente salariés au Royaume Uni et au Canada pour le simple fait d’avoir discuté entre eux de leurs conditions de travail. D’après le syndicat, ces échanges se tenaient sur un serveur Discord privé,
mais Rockstar y a vu une “fuite d’informations confidentielles dans un forum public”. Une explication que l’IWGB juge totalement fallacieuse.
“Ils ont été licenciés pour avoir exercé leur droit fondamental à parler de leur emploi et de leur rémunération”, déclare
Fred Carter, représentant du syndicat.
“Certains ont été escortés hors des locaux sans comprendre pourquoi. J’ai vu des gens pleurer, paralysés de peur à l’idée même de parler de leur travail à voix haute.”
Rockstar assure avoir “pris des mesures contre un petit nombre d’individus” pour atteinte à la confidentialité, mais le discours passe mal, surtout venant d’un studio dont l’histoire est déjà marquée par des années de tensions internes et de conditions de travail contestées.
Car pour beaucoup, ce nouvel épisode ne fait que raviver les vieux démons du crunch. En 2010, déjà,
un groupe de femmes se faisant appeler les “Wives of Rockstar San Diego” avait publié une lettre ouverte devenue célèbre. On y lisait les plaintes de conjointes désespérées, expliquant ne plus voir leurs maris,
happés par des semaines de 80 à 100 heures de travail sur Red Dead Redemption.
“Ils ne dorment plus, ne mangent plus, et ne rentrent plus à la maison”, écrivaient-elles, dénonçant un management
“inhumain et destructeur”.
Le scandale avait jeté une lumière crue sur la culture interne du studio, et l’affaire avait refait surface huit ans plus tard, en 2018, lors de la sortie de Red Dead Redemption 2. Plusieurs employés avaient alors confirmé que rien n’avait vraiment changé : toujours les heures à rallonge, la pression hiérarchique, et cette fierté mal placée de
“mourir pour l’art”.
Six ans plus tard, Rockstar promettait avoir “profondément réformé” sa culture. Mais à voir le climat actuel, difficile de croire que la page soit vraiment tournée.
Les témoignages récents parlent de peur, d’isolement, d’un malaise latent. Et quand les syndicats s’en mêlent, la réponse du studio semble encore être la même :
le couperet.
Tout cela tombe, ironie du sort, au moment où Take Two publie des résultats mirobolants et annonce un nouveau report de GTA VI au 19 novembre 2026, “pour plus de finition”. On imagine sans mal la grimace de ceux qui, ces dernières années, ont justement tout sacrifié pour cette finition la.
Fred Carter, lui, résume la situation sans détour :
“C’est une communauté en état de choc et de colère. Les gens ont l’impression que rien n’a changé. Rockstar parle d’évolution, mais sur le terrain, c’est le même schéma : silence, peur, et promesses creuses.”
Rockstar avait promis une nouvelle ère, plus humaine, plus équilibrée. Mais à force de multiplier les licenciements tout en célébrant des profits records, le studio donne surtout l’image d’une entreprise qui a troqué le crunch contre le ménage social.
Sources :
Gameindustry.biz
Kotaku
Shacknews
Bit-Tech