A un moment, il faut quand même dire la vérité : si
Bethesda a admirablement bien démarré cette génération, il y a quelque chose qui a foiré entre temps. La première conférence E3 de l’éditeur était dantesque, donnant le bout dur à l’assistance sur place ou de l’autre coté de planète, mais ce fut ensuite les heures sombres. Car on a très vite finit par comprendre que
Starfield et
The Elder Scrolls VI, ce n’était pas pour demain la veille et il fallu se rabattre sur le reste, malheureusement loin d’être à la hauteur du firmament attendu, où l’on prenait certes quelques belles gâteries sur le chemin comme
Wolfenstein II et
The Evil Within 2, jusqu’au drame
Fallout 76 qui a ensuite conduit à un enchaînement de déceptions : un spin-off bancale de
Wolfenstein, une version VR juste très mauvaise, un
Rage 2 qui a oublié de proposer une structure…
Doom était le nerf principal du début de cette génération.
Doom Eternal se devait donc d’être la rédemption qui viendra l’achever.
C’est fou mais après avoir retourné cette suite, on en vient à se demander ce qui a bien pu se passer. Mais dans le bon sens du terme. Il y a quelques mois, l’éditeur a réussi l’exploit de sortir quatre projets qui accumulaient une masse d’erreurs, et c’est cette même boîte qui arrive aujourd’hui avec un projet loin d’être sans risques vu certaines nouveautés, mais qui pourtant arrive à éviter chacun des pièges qui lui était tendu. Qu’est-ce qui s’est passé ? Bah on dirait qu’au lieu de parler de
Bethesda, on va peut-être féliciter avant tout
id Software dont le travail était d’ailleurs la seule chose à sauver de Rage 2, et dont on retrouve le feeling, la nervosité et la patate des armes. Même plus encore. Car si le reboot de 2016 était déjà une véritable leçon du FPS à grosses burnes, cette suite va encore plus loin pour devenir, on peut le dire, le meilleur représentant du genre à l’état brut de ces dernières années.

Pour cela, il fallait donc analyser les qualités du précédent pour les renforcer. On retrouve bien entendu la principale force qui est le mixe entre tirs massifs pour éponger les troupes, glory-kill non obligatoires mais permettant de faire popper de la vie, et enfin la tronçonneuse qui garde son rôle pour offrir un feu d’artifice de munitions en l’utilisant sur un ennemi pas trop fort. L’équilibre reste le même mais avec tout un tas de nouveaux échantillons, que ce soit le lance-flammes pour faire apparaître des points d’armure, l’arrivée de la grenade-glace qui permet de souffler par moment, et ce nouveau système de faiblesse lié à certains ennemis : tirer dans les tourelles des Arachnotrons et Revenants, c’est les priver de suite de leur principale force. Tout le bestiaire (qui n’a jamais été aussi conséquent dans un
Doom) n’est pas concerné par ce principe mais attention, n’oubliez pas d’aller jeter un œil au codex qui vous dira en complément quelle arme est la plus efficace contre tel ou tel. Le genre de petite aide qu’il ne faut pas refuser tant la difficulté est au rendez-vous.
Doom Eternal est indéniablement plus difficile, et même en mode normal, vous allez vite comprendre que c’est très vite sans rapport avec l’équivalent de 2016. La raison est simple : plus vous êtes équipés, plus les développeurs renforcent les opposants, pour des affrontements d’arènes viscérales, explosifs, ultra nerveux, à en ressortir presque essoufflé. Même une fois le sacro-saint BFG-9000 entre nos mains, on reste loin d’être tiré d’affaire devant ces vagues venues des enfers, où viennent maintenant se mêler le vicieux Arch-Vile qui buff toute la zone, et c’est sans parler du PUTAIN (!) de Maraudeur qui va éponger votre réserve de vies alors que ce n’est même pas un boss. D’ailleurs, cet épisode a finalement très peu de boss et finalement pas à haut challenge (sauf le tout dernier), mais c’est compensé par de gros paquets genre Tyran débarquant parfois à plusieurs pour nous décalquer la gueule, du moins jusqu’à ce qu’on obtienne une certaine arme des plus puissantes juste avant le dernier-tiers. Et c’est à ce moment que id Software se décide à balancer encore plus la sauce pour tout le reste de l’aventure.

Oui, le jeu évite tous les pièges et on pourrait même parler d’un des derniers trailers qui nous faisaient flipper en mettant en avant un quelconque scénario, car tout le monde sait que c’est l’aspect le plus secondaire d’un
Doom. Et pourtant, pas d’entourloupe : le scénario étant ce qu’il est, banal donc, les cinématiques sont très rares et ne vont pas stopper l’action plus d’une petite minute. L’introduction est parlante à ce sujet avec quelques secondes de blabla puis allez, ça prend le fusil à pompe (l’arme de base ouais, le flingue inutile a été mis à la poubelle) et c’est parti pour déboîter du démons. Et les phases de grimpette ? Aucunement préjudiciable et ça sert plutôt bien l’exploration car comme en 2016, l’aventure sait manier assez efficacement les petits moments de recherche avec les grosses séquences d’action, et tout juste reprochera t-on les séquences de nage un peu inutiles pour le coup (mais il y en a moins que les doigts d’une seule main) et le fait qu’on ne peut toujours pas activer une mini-map à l’écran pour éviter de multiplier les allers-retours dans le menu.
La recherche des secrets n’est d’ailleurs jamais obligatoire mais garde pourtant toute son utilité pour déjà profiter sagement de son premier run d’une bonne quinzaine d’heures de jeu, mais aussi comme avant débloquer un maximum de secret que l’on retrouvera dans notre gigantesque forteresse rappelant ce que fait
NetherRealm avec ses jeux de baston : la faculté de mettre en avant le déblocage de bonus autrement que par un simple menu. La forteresse, c’est votre base, et vous pouvez de temps en temps après une mission aller ouvrir de nouveaux accès pour renforcer les compétences secondaires de vos armes ou vos perks, débloquer de nouveaux skins, aller faire du training en arène, ne pas oublier de débloquer l’arme ultime (réclamant de finir huit zones spéciales dans l’aventure), ou encore profiter des morceaux bonus de l’OST ratissant plus loin que l’histoire de la franchise (on a du
Quake par exemple).
Bon, vous l’avez compris,
Doom Eternal parvient à être meilleur que son prédécesseur. Et pas seulement parce qu’il renforce la formule sur de nombreux aspects, mais aussi parce qu’il parvient à supprimer les défauts d’il y a quatre ans. On pourrait par exemple parler de ce dernier tiers à mille lieux de l’arrivée dans l’Enfer en 2016, synonyme en ces temps d’une baisse d’intérêt et de savoir-faire dans le level-design. Cette fois, tout est maîtrisé d’un bout à l’autre, ça fait un bien fou, et c’est en plus servi par un travail incroyable sur la direction-artistique des environnements, à croire qu’un nouveau talent a été embauché entre temps. Certains décors sont proprement magnifiques au point qu’on est constamment surpris de voir une telle débauche de classe dans une licence pareille, davantage habituée au confinement (...), et on offre à titre purement personnel une belle mention pour les stages en pleine ville, capables de nous briser le coeur lorsqu’on fantasme à l’idée d’un
Duke Nukem par
id Software.
Mais des défauts, on peut en citer ? Si peu, mais néanmoins existant. Le premier, et probablement celui dont beaucoup vont se contrefoutent, c’est que le multi est comme attendu très anecdotique. Du 1V2 en arène à raison d’un Slayer face à deux ennemis (et des tonnes de mobs IA), l’équilibrage étant fait que chacun des clans bénéficient de plus en plus de bonus à chaque round. Alors oui, c’est ultra nerveux mais après plusieurs parties, on continuent de se poser des questions sur la pertinence de ce mode unique, et on préférera se tourner vers le suivi principal, aussi bien payant (des extensions solo) que gratuit (des versions « maîtres » des différents stages, plus difficiles, et dont deux sont déjà dispos dont un pour l’édition Deluxe). Le deuxième point, c’est qu’il faut quand même reconnaître qu’à pousser de plus en plus l’aspect fast-FPS, certaines sessions deviennent vraiment plus difficiles qu’il ne le faudrait pour une manette et on sent que sur de nombreuses séquences, le clavier/souris prendrait des allures de bénédiction. Bonne chance à ceux qui vont tenter les modes ultimes avec un pad PS4 ou One.