L’envie pour
Eidos Montréal (et
Square Enix évidemment) de proposer une belle adaptation des
Gardiens de la Galaxie était fort louable, mais forcément compliquée en terme marketing quand le titre a porté malgré lui tout le poids de l’échec
Avengers, au point qu’on est limite passé à coté de la présentation E3 dont les intentions étaient pourtant claires : délaisser le jeu à service et même le système de coopération (option pourtant présente en début de développement) pour se tourner vers une expérience purement solo et narrative, initiative décidément revenue à la mode chez certains éditeurs. Du genre
Electronic Arts. Bref on y croyait sans trop y croire en fait, laissant la communication faire son chemin en y jetant un simple coup d’oeil pour espérer au mieux un petit plaisir coupable des fêtes de fin d’année. Et quelle belle surprise au final.
Pas besoin d’avoir retourné les dizaines de productions du MCU pour aborder ici
Les Gardiens de la Galaxie puisque non seulement nous ne sommes pas dans une adaptation directe (et tout juste sait-on pour le contexte que Thanos s’est déjà fait déboîter), mais en plus, il est possible de se lancer sans rien connaître de la licence. Une sorte d’habituelle remise à plat, un nouveau départ, appelez ça comme vous voulez, mais surtout une nouvelle aventure pour cette bande d’anti-héros pleinement attachants toujours composée de Star-Lord le pseudo leader dont pas grand-monde n’écoute les ordres, Drax qui n’a jamais compris comment fonctionnait l’humour, l’ironie et les métaphores, Gamora qui restera la plus sage du lot, Rocket et ses provocations à outrance, et Groot qui se contente d’être Groot.

Il faut tout de même signaler que les influences du MCU reste là, et que s’il faudra faire comme d’habitude avec l’absence des visages des acteurs (dont un certain Chris Pratt), le comportement de l’équipe est parfaitement le même que durant les différents films, au point que si les origins story ne sont pas toujours identiques, on s’y tromperait parfois.
Eidos Montréal a parfaitement su capter l’aura de la licence et a le don de caresser le sens du poil par de nombreuses apparitions de personnages connus qu’on évitera de citer (même si les marketeux s’en sont chargés, et c’est d’ailleurs toujours dommage), nous livrant une sorte de version longue d’un scénario de film que l’on se plaît à suivre et qui ne rechigne pas à nous faire voyager d’un bout à l’autre de la galaxie pour la variété des décors, parfois très random, d’autres fois fabuleux esthétiquement.
Une variété qui n’a d’ailleurs pas été difficile à mettre en place puisque plutôt que de miser sur un monde ouvert ou même des zones ouvertes à la
Avengers, notre concerné est un produit à l’ancienne… ou en fait moderne selon le point de vue. Comparez ça à du
Naughty Dog d’une certaine façon, sans avoir le même budget certes, mais les mêmes intentions en terme d’expérience : de l’action/aventure narratif à la linéarité certaine, avec un enchaînement de stages où l’on trouvera de l’action et de petites énigmes sur la route (parfois aussi des boss), d’autres beaucoup plus posés où le dialogue va primer, au risque ici de casser le rythme tant certaines séquences auraient mérité d’être un chouïa raccourcis. Dans un cas comme dans l’autre, on dévie facilement du chemin pour aller fouiner derrière chaque recoin du décors pour glaner des matériaux, ou des skins (dont ceux des films tiens).
On ne va pas se mentir, pour l’essentiel, c’est donc la formule Dogs mais en moins poussée sur la majorité des aspects (hormis les boss, forcément vu l’univers) mais il y a néanmoins un point important où
Eidos Montréal a souhaité pousser le curseur au maximum : les dialogues. Deux persos qui blablatent pendant l’exploration dans
Uncharted pour éviter le silence de plomb, vous connaissez, donc maintenant imaginez le résultat avec 5 qui passent leur temps à se chambrer et s’envoyer des pics à la gueule. C’est bien simple, à de rares exceptions, le silence n’existe pas dans
Les Gardiens de la Galaxie et on n’ose imaginer le nombre de lignes de texte au total, ce qui n’est aucunement dérangeant si on aime l’univers, un peu plus quand s’entremêlent les doublages (du genre au lancement d’une cinématique alors que le blabla in-game n’était pas terminé). Doublage FR d’ailleurs de très bonne qualité dans l’ensemble, avec la mention ultime pour Damien Ferrette (Rocket) qui nous livre une prestation tellement parfaite que si toutes les VF étaient de cet acabit, on balancerait sans regret n’importe quelle VO aux chiottes. C’est dit.
En terme d’ambiance, on a donc tout ce que l’on attendait de cette franchise, OST inclus d’ailleurs où
Square Enix a fait plaisir en sortant le chéquier pour récupérer du
Take on Me,
Wake Me Up,
Call Me ou encore
Holding out for a Hero pour citer quelques morceaux des plus connus, signifiant donc qu’un jour ou l’autre, le jeu disparaîtra peut-être des stores pour non renouvellement des droits (gardez un exemplaire physique au chaud, on ne sait jamais). Les développeurs ont coché toutes les cases et si on est fan de la franchise, le jeu s’avale goulûment avec bien peu d’ennui durant une bonne quinzaine d’heures selon votre façon de jouer, ce qui est franchement pas mal pour une expérience solo de ce type malgré le manque de replay-value même pour les chasseurs de platine ou 1000G.
En effet, même si l’on a clairement adoré parcourir le jeu d’un bout à l’autre, il faut avouer qu’il manque de travail dans le fond. Qu’importe qu’il ne réinvente pas la roue, ce n’est pas ce qu’on lui demande (une expérience à l’ancienne après
Marvel’s Avengers, franchement, on ne refuse pas), mais il reste critiquable sur plusieurs points, comme le système de combat. Dire qu’il est bordélique est un euphémisme, et il est d’une certaine façon en adéquation avec la licence, mais on sent quand même le fait qu’il s’agissait d’un jeu coop à la base, et ça devient déjà plus compliqué de contrôler Star-Lord et ses guns tout en devant balancer des ordres pour déchaîner les capacités de vos alliés, avec effets combos selon certains. En gros, disons les choses simplement, en mode normal et même après avoir augmenté votre perso en puissance via l’atelier de Rocket et votre mini-arbre de compétences (4 par persos, dont la dernière qui se débloque vers la fin), vous vous contenterez de déchaîner les enfers en bourrinant les ordres de capacités, faisant juste attention à esquiver l’ennemi quand il faut. Et généralement, ça passera.
On sent quand même qu’il manquait une goutte de budget ou de talent pour viser plus fort, tant certaines intentions sont là sans avoir pu être concrétisé. Les dialogues on en parlait justement et si
Eidos a tartiné sur le sujet, construisant au fil des heures la psychologie des personnages et leurs différents doutes, le coup des choix multiples est là juste pour la forme sans avoir de réelle incidence. Alors après on préfère ça que de voir une narration être éparpillée dans plusieurs directions, mais on aurait aimé au moins des changements drastiques dans le cheminement qui auraient pu ainsi pousser l’envie d’un second run pour voir de réelles différences, et non pas des artifices dont les ficelles deviendront visibles une fois effectué les autres choix. On s’attristera aussi que certaines phases secondaires (en vaisseau par exemple) soient de l’ordre de l’anecdotique alors qu’une telle licence aurait mérité quelques envolées dantesques sur le sujet.