Entre
Batman et
Spider-Man, une confiance nouvelle s’est instaurée avec les années dans les adaptations de super-héros sur nos PC/consoles et même s’il y a eu d’évidents ratés sur le chemin ou des titres qui ne dépassaient pas le statut de relative bonne surprise, l’annonce d’un projet
Avengers chez
Square Enix avait de quoi faire frétiller les fans. Nous sommes alors en janvier 2017, là où le MCU n’en est qu’au début de sa phase III et il faudra attendre un moment avant de comprendre qu’il s’agit en fait d’un jeu à service, chose que l’on avait bien du mal à comprendre au départ : ça ressemblait clairement à du solo, on nous promet d’ailleurs du solo, mais on ne sait pas vraiment où
Crystal Dynamics veut en venir pour sa composante multi au point de devoir enchaîner par la suite quelques présentations pour comprendre exactement le découpage de cette expérience. Chose sur laquelle on va revenir pour ceux qui n’ont pas suivi.
Donc oui, de base en tout cas,
Marvel’s Avengers est un jeu solo. Il débute d’ailleurs comme tel en nous faisant incarner Kamala Khan, l’une des nombreuses itérations de Ms Marvel qui va d’ailleurs prochainement intégrer le grand cycle du MCU, encore au stade d’humaine comme les autres, accessoirement fan des grands super-héros qui passent leur temps à sauver la planète. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle tient à assister à un grand concours du coté de la Tour Avengers où seront présents les cinq grandes stars : Iron Man, Thor, Captain America, Black Widow et Hulk. Événement qui est également l’occasion pour Stark Industries de présenter son nouveau matos révolutionnaire et comme d’habitude, les choses vont partir en sucette, un mystérieux groupuscule va exploiter cette technologie, des civils vont en payer le prix et l’explosion d’une source de tératogène fait que de nombreuses personnes aux alentours vont développer des pouvoirs, intégrant assez librement le concept des Inhumans. Bref, les Avengers sont jugés responsables de cette catastrophe, le mouvement est dissout et la vie reprend comme elle peut.

Cette introduction permet surtout de prendre en main les différents héros mais comme dit, c’est bien Kamala Khan qui reste au centre du scénario puisque quelques années plus tard et désormais sous le statut de Inhumans par ses pouvoirs polymorphes, la demoiselle va donc se lancer en quête de vérité sur ce que l’on nomme désormais le « A-Day », ce qui l’a conduira à retrouver un à un les différents super-héros que l’on connaît tous. Inutile à partir de là de tartiner davantage sur le scénario qui n’apporte absolument aucune surprise même pour celui qui ne connaît rien à
Marvel puisque la communication même du jeu empêche tout mystère et rebondissement : on sait que l’AIM sont les méchants puisqu’il y a Modok, et vous n’allez faire croire à personne que Captain America est mort dans l’introduction puisqu’il s’agit d’un personnage jouable. Simpliste donc, comme la plupart des adaptations il faut le reconnaître mais Spider-Man s’en sortait mieux pour citer un exemple connu, ne serait-ce que par son travail de mise en scène que l’on retrouve ici assez rarement, une trop grande partie des dialogues se faisant en plein jeu ou avec deux persos statiques face à face.
Une fois que Kamala retrouve Hulk, c’est à partir de cet instant précis que le jeu virevolte entre son expérience solo et multi, mais pas toujours de manière très adroite. Les missions principales peuvent parfois avoir l’allure d’un
Tomb Raider ou d’un
Uncharted par leur linéarité et le coté grand spectacle, mais en bien moins travaillée, et d’autres fois, on tombe sur des zones un peu plus ouvertes qui sont l’occasion d’apporter quelques points annexes se résumant globalement par des coffres à ramasser, des portes à ouvrir de x façon, des civils à sauver et enfin des ennemis un peu plus balaises que la moyenne. Certaines missions se jouent exclusivement en solo (quand le scénario l’impose), quand d’autres peuvent être pratiquées en coopération même s’il n’y a pas trop d’inquiétude à avoir : on peut choisir le personnage que l’on souhaite et il faut reconnaître que l’IA des alliés fait parfaitement le taf pour ce qui est du combat brut, ce qui s’explique surtout parce que, contrairement à un
Anthem par exemple, la complémentarité des pouvoirs est bien moins vitale pour s’en sortir.
Mais même en y jouant constamment en solo, et même si vous pouvez parfaitement finir la campagne de cette façon (une dizaine d’heures en ligne droite), vous n’échapperez pas à tout ce qui tient du modèle jeu à service de l’époque moderne, dont les options vous sont littéralement jeter à la gueule. On pourrait parler du menu de la world map qui vous connecte automatiquement en ligne au point qu’il est impossible de revenir se promener dans le vaisseau (instancié solo) sauf en revenant au menu principal et en relançant votre sauvegarde. Il y a aussi ces périodes d’attente avant le lancement d’une mission qui ne sont pas seulement là pour masquer les temps de chargement mais pour balancer ses meilleurs emotes et skins. Et comment ne pas parler de l’onglet des défis qui a été repiqué d’un Battle Pass de
Fortnite, avec plusieurs paliers à atteindre pour débloquer des skins en tout genre, dont un paquet bien moisis, à condition d’accomplir (justement) de petits défis qui se renouvellent chaque jour et chaque semaine. Tout cela imposera du coup une connexion obligatoire, même si vous voulez faire fi de la coop (qui demande d’ailleurs un compte Square Enix en passant).
Après pour ceux qui aiment ce genre d’expérience où vous aurez des jauges de défis dans tous les coins, pourquoi pas, surtout qu’il y a une masse de choses à débloquer sans être obligé de sortir la carte-bleue (mais vous pouvez aussi, évidemment). Le problème de
Marvel’s Avengers ne se situe pas vraiment là, mais tout simplement dans le fait que l’expérience n’est jamais transcendante aussi bien en solo comme en multi. En solo tout d’abord car hormis quelques moments d’éclats, on sent trop souvent ces moments de murs invisibles qui imposeront un peu de farm, très souvent dès qu’on abordera des missions secondaires, mais aussi dans les missions principales, tout simplement parce que le game design est souvent fait pour le coop. Vous avez opté pour Hulk et laissé l’IA s’occuper des autres dont Iron Man ? Soit. Ça marchera très bien en combat, mais vous allez comprendre que lorsque les tourelles seront présentes en masse ou qu’il faudra aller démolir des modules ou trucs du genre d’un bout à l’autre de la salle, Hulk (assez lent) sera loin d’être l’élu type pour ce genre d’objectifs, et Iron Man en aura strictement rien à foutre puisque l’IA est juste là pour combattre. Pire encore pour les missions type capture de zones (si si, il y en a). Quand il y en a une, vous serez obligé de rester dans la zone requise (l’IA s’en fout, elle file combattre) et c’est pire quand il y en a plusieurs : vous devrez courir sans cesse de l’une à l’autre.

Donc en coop, c’est mieux ? Forcément, puisqu’on peut se partager les tâches, dire à untel d’aller récupérer des coffres à droite pendant que le reste de l’escouade part démolir des tronches à gauche, demander au spécialiste des attaques à distance de nettoyer la zone des tourelles pendant que les autres combattent au centre… C’est toujours plus sympa mais pour autant, hé bien ça tourne très vite en rond. A quelques séquences grand spectacle près, généralement d’ailleurs pour des missions exclusivement solo, le jeu est full action et reposera autour des mêmes objectifs maquillés de différentes façons : avancer jusqu’au point B en dégommant tout le monde, rester dans une salle en dégommant tout le monde, protéger un truc en dégommant tout le monde. Et parfois sauver quelques civils. En dégommant tout le monde. En même temps c’est un peu le propre du jeu d’action, mais si ce n’est pas la jouabilité qui propose de la variété, ça doit être le reste et sur ce point, on se retrouve dans l’habituelle constante des jeux à service : pour le moment, y a pas grand-chose, aussi bien du coté des décors que du bestiaire.
Et on sait oui que
Square Enix compte sur l’avenir et donc le suivi, totalement gratuit. Rien qu’en automne arriveront les deux Hawkeye avec leurs propres missions, et qu’on aura un jour ou l’autre du Black Panther, du Ant-Man, du Spider-Man (uniquement chez Sony) et probablement bien d’autres en plus de divers events et on imagine de nouveaux endroits et des streums supplémentaires. Mais en attendant, le jeu ne parvient à se reposer que sur son casting initial qui est déjà correct avec des styles bien différents dont on trouve de bonnes surprises (Black Widow) et disons de moins bonnes (Iron Man), suffisamment de compétences à débloquer et une réelle augmentation en puissance qui demandera comme le veut le genre une masse d’allers-retours dans le menu équipement pour mettre des nouveaux trucs (qui ne changent pas le skin), constamment démonter le trop plein qui ne sert à rien pour looter des matériaux afin de booster les autres, etc.
On osera dire que ce n’est pas totalement déplaisant et qu’on parvient à s’amuser, surtout quand le jeu sait aller à l’essentiel ou nous faisant affronter des vagues d’ennemis où le bordel et les attaques spéciales règnent à l’écran mais qui permettent d’avoir un peu de punch et de nervosité qui manquent trop souvent à l’expérience solo. Techniquement, si vous êtes fans et que vous avez envie de vous lancer dans la chasse au loot, il y a clairement de quoi faire entre les différents modes de difficulté qui améliorent les récompenses et les premières missions post-game qui ne réinventent jamais les bases mais qui poussent le challenge toujours plus loin, mais reste que vu l’ampleur d’un tel projet, on s’attendait à clairement mieux que quelque chose de bricolé pour tenter de plaire à l’époque moderne des jeux coop à suivi. On peut même légitimement se demander si un projet purement solo avec un ou deux personnages (du genre le duo Captain America/Black Widow) n’aurait pas été potentiellement plus vendeur, surtout quand on voit le succès de
Spider-Man.