description : Groupe officiel de Gamekyo, où vous pourrez retrouver tests, aperçus, avis de DLC, bilan de Season Pass et parfois des "retour sur" quand la situation le permet.
Conditions de test : effectué sur Xbox Series à partir d’un code review fourni par l’éditeur.
Comment vous dire les choses, sans être trop brutal… En 2018, Microsoft commence à mettre en place ses plans pour fonder une vraie famille de studios, créant The Initiative qui n’a d’ailleurs pas intérêt à se foirer, et rachète d’un jet les copains de Playground Games et Undead Labs, mais également plus surprenant Ninja Theory et Compulsion Games. Pour le premier, si on ne pourra pas parler de succès commercial pour Hellblade II, le studio a réussi à montrer son expertise dans le photo-réalisme en plus de bosser en amont sur la R&D, notamment sur l’IA. Pour Compulsion Games, c’est une autre histoire.
Déjà il y a 7 ans, on avait l’impression que le rachat de l’équipe canadienne n’était là que pour booster les effectifs dans ce déferlement à l’aveugle de chèques lancés à la gueule de qui le souhaitait. Car Compulsion, c’est Contrast qui n’a pu se faire remarquer que par sa disponibilité Day One au launch PlayStation 3, puis l’étrange mais le tout aussi oublié We Happy Few. En 2025, South of Midnight était censé être l’ascenseur pour leur donner une véritable aura dans le milieu. Mais, et là encore sans être brutal, je pense sincèrement que l’on peut possiblement en parler comme un futur chant du cygne avant la fermeture du studio tant j’imagine aussi mal le succès que l’intérêt pour Xbox de garder une boîte qui aura mis autant d’années pour oser pondre ce truc. Ok, c’est brutal...
Croyez-moi bien, je suis posé là quelques heures après un Nintendo Direct Switch 2 lui aussi inoubliable mais toujours pas dans le bon sens du terme, et 2 jours après avoir bouclé le jeu qui nous concerne aujourd’hui. Avis à froid, à tête reposée, mais toujours aussi incrédule devant une telle proposition. On va déjà commencer par les bons côtés, à savoir une attendue bonne mise en avant de l’imaginaire folklorique sud-américain, malheureusement servi avec un scénario banal en inadéquation avec un casting qui méritait pourtant mieux. Il est en effet dommage que les deux personnages les plus charismatiques (l’espèce de squelette sur le bateau déjà vu dans un trailer et un simili Dr. Facilier) soient si peu présents, laissant au moins la lumière à une sympathique héroïne dont la VF fait le taf (profitez, c’est pas si commun avec Microsoft) même si la VO est infiniment supérieure.
Mention également pour les graphismes. Même si la patte esthétique des personnages sera sujet à débat et peut grandement varier d’un personnage à l’autre, l’enrobage flirte lui entre le joli et le magnifique selon les situations. Les développeurs ont su jouer sur les différents moments de la journée (l’histoire se déroule globalement du matin au soir tardif) pour proposer des effets vraiment dignes, et un énorme travail sur les détails aussi bien extérieurs qu’intérieurs. On a même droit à quelques mini-séquences où l’on incarne une sorte de poupée vaudou dans des intérieurs étrangement aménagés pour les animaux, et c’est tellement beau et mignon à l’écran qu’on aurait presque voulu un jeu entier dans ce style (en vrai, ça existe déjà, mais vous avez compris).
Et le reste ? Hé bien disons que si ce jeu serait sorti il y a 20 ans sur 128 bits (rendu mis à part, évidemment), il se serait fait autant démonter la tronche qu’aujourd’hui. South of Midnight est d’un vide abyssal en terme d’intérêt ludique, et je n’arrive toujours pas à comprendre comment Compulsion a pu en arriver là, hormis à la rigueur si l’équipe n’est constituée que d’éléments n’ayant jamais joué à un produit autre que les leurs. La progression est faite d’une suite de 14 chapitres (13 en fait, le dernier est limite une cinématique interactive), tous fait d’une totale linéarité à part quelques exceptions de toute façon inutile tant l’exploration ne vaut rien, ne se résumant qu’à des documents et des orbes pour booster des compétences dont la moitié seront inutiles.
Un grappin utilisable à des instants clés, une caisse à pousser, une course-poursuite (molle de chez molle), du wallrun, du pseudo deltaplane, et je vous ai fait là les deux-tiers des situations que vous allez rencontrer en boucle durant environ 10h. Il n’y a quasiment aucune énigme ni de séquence réclamant un minimum de skill genre Level 1 d’un platformer Nintendo, et le seul moyen de perdre réside dans des combats semblant avoir été rajoutés en fin de développement (d’ailleurs, vous pouvez même les supprimer dans les options d’accessibilité, c’est dire). Hormis une poignée de boss façon Zelda en moins intéressant, il y a en tout et pour tout six types d’ennemis (sans variante) d’un bout à l’autre du jeu. SIX. Et si vers la fin, faut savoir bouger vite au coeur de l’arène (tous les combats se déroulent dans des arènes dédiées), c’est mou, ça manque d’impact, il n’y a aucune sensation de montée en puissance, d’accomplissement ou de quoi que ce soit. On enchaîne les chapitres en soufflant, priant pour que tout s’accélère, on regarde la cinématique de fin d’un œil usé, retour au menu principal sans le moindre ajout (heureusement ?), puis on fait de la place sur notre SSD.
Conditions de test : effectué sur PlayStation 5 Pro à partir d’un code review fourni par l’éditeur, terminé en prenant mon temps, surtout pour privilégier les sessions dans le CALME, garantissant la sécurité de mes proches.
Lointaine paraît l’époque où la concurrence avançait timidement dans le genre Soulsborne face à prestance du patron des lieux. Désormais, nombreux sont ceux qui s’inspirent de la formule, parfois en tentant de la dissimuler, souvent en en reprenant les codes les plus populaires, notamment en Chine et en Corée. The First Berserker : Khazan en est l’un des derniers représentants et lui ne compte aucunement maquillé ses intentions : nous sommes à 300 % dans cet héritage, certes avec ses petites différences, mais quand même en plein dedans jusqu’au bout des ongles.
On évitera en revanche de tartiner sur la narration malheureusement digne des principaux représentants du genre, c’est à dire volontairement (?) cryptique et c’est fort dommage vu le très séduisant chara-design du casting finalement bien peu mis en avant hormis dans de rares cinématiques, comme si les développeurs avaient voulu faire plaisir aux fans de Dungeon Fighter en oubliant que la majorité des gens sur la planète n’ont jamais touché à cette franchise. Le lore est là, massif mais imbitable pour la plupart, et on ne s’attardera du coup que sur l’emballage : des personnages au style affirmé, contrastant avec des environnements froids et souvent monochromes, malgré quelques rares panoramas réussis. Dans ces conditions, le gain de quelques pixels importe peu, et on ne saurait trop vous conseiller de privilégier le mode 60FPS, toujours plus confortable pour ce type d’expérience.
Donc c’est du pur Soulsborne en précisant néanmoins que ce n’est ni Elden Ring (pas de monde ouvert) ni Dark Souls (pas de niveaux interconnectés). Nous sommes davantage dans une suite de niveaux rappelant forcément les premiers essais en la matière de la part de la Team Ninja comme NiOh et Wo Long : Fallen Dynasty. Le level design, simple à appréhender, pourra paraître un peu trop sage, mais il assure un bon rythme, sans jamais être frustrant. On retrouve tous les fondamentaux : avancer jusqu’au boss, des checkpoints façon feux de camp qui font respawn les ennemis, des raccourcis qui se débloquent progressivement, et quelques sentiers annexes pour récolter plus de loot. Les mecs ont tellement voulu singer la « vision » de FromSoftware que malgré l’absence de multi, il n’y a pas de fonction Pause, ce qui est toujours très discutable quand vous trépassez comme une merde en ayant voulu répondre à un coup de fil prétendument urgent alors que c’était juste une nana à l’accent improbable souhaitant vous arnaquer avec ses foutus panneaux solaires.
Ceux qui ont testé la démo le savent : The First Berserker est foutrement difficile. La présence d’un mode Facile (qui, soyons honnêtes, ressemble plutôt à un mode Normal déguisé) ne fait qu’atténuer moyennement le défi imposé, sans aller jusqu’aux plus grandes hauteurs de la concurrence, mais l’expérience aura le don de vous faire rager comme dans la grande tradition du style, et cette fois sans l’apport de compagnons online pour vous dépanner face à un boss trop vener à votre goût. Les premiers chapitres sont d’ailleurs les plus rudes, lorsque nous sommes en quelque sorte encore dénué de bien des choses et donc avant la lente mise en place des diverses mécaniques. Augmentation classique des stats, build à développer avec différents sets et seulement 3 types d’armes (on joue un berserk donc ici, y a pas de baguette magique ou d’arc), compétences sous différents arbres et des choses qu’il ne faut surtout pas oublier, comme des bonus de force/endurance en allant dans le bon sous-menu.
Au fil des missions, l’aventure s’adoucit… un peu. On débloque notamment un allié IA, bien que son utilité soit limité : il ne se pointe que contre les boss et sert principalement de chair à canon pour détourner leur attention quelques secondes, histoire de gratter quelques précieux dégâts en début de combat. Petit côté chiant d’ailleurs : si on n’échappera pas à quelques séquences de farm à loot contre des boss (on peut se TP directement devant une fois un niveau terminé), l’augmentation en puissance de l’allié est clairement répétitive. Il faut pour cela affronter vos propres ghosts sous IA via des sortes d’orbe rouge sur le chemin, mais comme il n’y a que 3 types d’armes, il n’y a donc que 3 types de ghosts. Heureusement plus on avance, plus battre un ghost rapporte de gemmes pour améliorer votre allié. Et puisqu’on parle d’optimisation, il faut bien gérer son équipement. Ici, plusieurs options : revendre le matos inutile (à déconseiller), le convertir en XP (déjà plus intéressant), ou le démanteler pour récupérer des matériaux. C’est à ce moment-là que la notion de build commence vraiment à prendre forme, et que chaque choix d’équipement devient crucial.
En explorant chaque recoin des niveaux – et c’est presque une nécessité pour éviter de suer du sang – vous tomberez sur des plans permettant de fabriquer diverses choses dont des sets complets d’armes/armures. Et autant vous dire que c’est ici que se joue votre survie, bien plus que sur votre simple talent manette en main. Petit tips gratos : partez sur un build axé sur les attaques enflammées, boostez massivement votre endurance et votre force, et privilégiez les compétences améliorant la vitesse d’attaque. Résultat ? La majorité des boss verront leur rapport de force s’inverser en votre faveur. Ajoutez à ça une sacoche remplie au max de grenades élémentaires et c’est parfois un déferlement de chaos sur le malheureux opposant. Attention, ça ne transformera pas le jeu en une balade champêtre façon Kirby, et certaines morts restent inévitables si vous ne savez pas tenir une manette. Un faux pas, un de ces foutus vers géants qui vous choppe avant de vous balancer dans le vide, ou encore cette satanée esquive spéciale à caler au poil de cul face aux attaques imparables… Tout peut basculer en une seconde. Mais parole de rageux ayant mal vécu l’expérience Sekiro, avec ce build, vous avez largement de quoi voir la fin du jeu.
Comptez d’ailleurs facilement plus d'une cinquantaine d’heures pour venir à bout du contenu principal et des missions annexes – dont certaines sont d’importance capitale aussi bien pour le système de jeu que pour les boss cachés et les matériaux qui vont avec. Ce temps variera évidemment selon vos capacités (et votre tolérance aux crises de nerfs). Et si vous voulez rentabiliser l’achat, le jeu vous réserve un NG+ avec une nouvelle rareté d’équipement, des compétences inédites et même une fin cachée. Pour les plus acharnés, un NG++ pousse encore plus loin le délire avec du loot encore plus puissant et des bonus supplémentaires. En clair, pour un premier essai dans le genre, Nexon s’en sort avec les honneurs. Si The First Berserker ne brille pas par sa variété, il compense largement par un contenu généreux et une efficacité redoutable. Un Soulsborne pur jus, brutal, exigeant, mais diablement satisfaisant une fois dompté.
Conditions de test : effectué sur PlayStation 5 Pro, avec un patch qui n’est peut-être pas celui du Day One. Aucun bug notable à signaler en plusieurs dizaines d’heures, à part un étrange couac technique : même en Performance (60FPS), la zone dédiée à notre base passe automatiquement en 30FPS. Peut-être la gourmandise du Housing.
Ah, Assassin’s Creed Shadows. On peut dire que cet épisode aura fait parler de lui avant la sortie, et pas seulement parce que sa campagne marketing fut la plus longue dû à deux reports, mais bien à cause de diverses polémiques, renforcées par la stature même d’Ubisoft invitant les détracteurs à taper de plus en plus fort, bien que parfois aveuglément, comme s’il y avait une sorte de délit de sale gueule. Et pourtant. Arrivé aux crédits de fin, la première sensation qui émergea dans ma boîte crânienne fut de l’ordre du « Tout ça pour ça ? », et pas pour le jeu lui-même qui est finalement bien proche que ce à quoi je m’attendais, mais bien parce que toutes ces gueulantes n’avaient même pas lieu d’être. Assassin’s Creed Shadows ne tente pas de faire des courbettes au wokisme, ou de réécrire l’histoire à sa façon (en tout cas pas plus que depuis ses débuts). C’est juste un Assassin’s Creed. Et surtout rien de plus ou de moins que ça.
Il y aura ceux qui se plairont à comparer la couleur des bols pour savoir si Ubisoft a fait preuve de fidélité envers le Japon de l’ère Féodal, et ceux qui regarderont ça de manière globale pour constater que le travail est clairement là. Graphiquement, il n’y a certes pas la finesse exemplaire d’un Ghost of Tsushima mais on reste très satisfait du rendu global à travers les saisons (l’automne est clairement au-dessus du reste, vous vous doutez pourquoi), l’ambiance est plutôt respectée et on a quand même les honneurs d’avoir un mode assurant un très bon doublage japonais (et portugais selon le contexte). Carton rouge en revanche pour les musiques, globalement absentes quand elles n’ont rien à foutre là, du genre une espèce de schmilblick mélange entre du rap local et je ne sais quoi, le genre de choses qui fait souffler et brise la qualité du séquence.
Sur l’enrobage, le plus gros problème d’Assassin’s Creed Shadows comme de bien des jeux d’Ubisoft depuis trop d’années restera sa narration. Si quelques efforts sont fait, avec notamment des flashbacks plutôt travaillés bien que parfois trop longuets, il faut bien avouer que l’on tombe dans les travers habituels de la franchise avec un joueur expédié dans un contexte qui lui échappe un peu. Invraisemblablement, on a beau être au coeur de l’affiche, la multitudes de personnages et de sous-scénarios donnent l’impression d’être davantage spectateur qu’acteur alors que c’est nous qui portons la lame faisant rendre les intestins à bien des figures historiques. C’est de toute façon une simple histoire de vengeance et d’honneur, autant pour Naoe que Yasuke, et comme d’habitude depuis longtemps, n’attendez rien de la meta.
Assassin’s Creed se contente de faire du Assassin’s Creed et cela se voit par sa progression souple mais ironiquement vestige d’un autre temps, là où l’époque semble de plus en plus réclamer un retour à une formule plus terre-à-terre, plus linéaire d’une certaine façon même dans un monde ouvert (d’ailleurs cette fois pas toujours pratique à visiter vu la topographie). On est ici tellement libre dans un tableau d’objectifs qui ne fera que grossir au fil du temps que l’on finit par ne même plus parvenir à distinguer le principal du secondaire, comme si nous étions dans un gigantesque bac à sable. D’ailleurs, pour peu que vous vous attardiez à des quêtes annexes, il est possible de passer plus de 15h aux commandes de Naoe avant de pouvoir enfin « débloquer » l’accès à Yasuke, que l’on aura heureusement l’occasion d’incarner rapidement dans l’introduction.
Il faut dire qu’il y a de quoi se perdre mais en gros, les choses se situent comme suit. Il y a les quêtes principales propres à Naoe et Yasuke qui ne se débloqueront qu’au fil du temps, majoritairement en épongeant une grosse liste d’ennemis principaux à abattre (c’est définitivement un jeu Ubisoft hein). Vous ajoutez à cela le tableau des alliés qui ont leurs propres petites missions, mais également dans quasiment chaque zone un mec qui va vous donner sa propre liste de cibles diverses (donc un sacré paquet au final), également quelques petites annexes par-ci par-là, puis d’autres qui font sérieusement office de remplissage (tuez plein d’ennemis dans x zone) et avec tout cela, ajoutez également des séquences QTE, des animaux à approcher et même des missions temporaires apparaissant chaque semaine pour faire progresser une espèce de pass de combat (gratos, 2 disponibles pour le moment) débloquant plein de trucs dont de la monnaie in-game à dépenser dans une boutique dédiée, sachant BIEN ÉVIDEMMENT qu’il y a aussi l’autre grosse boutique où il faut sortir la carte-bleue, déjà jonchée de skins ultra classes que vous n’aurez jamais gratuitement.
Ce dernier point fâcheux (80€ le jeu) mis à part, la formule reste efficace d’une certaine façon et il y a toujours cette motivation à explorer un peu tout ce qui est possible rien que par la récompense de l’augmentation constante en puissance, où tous les systèmes s’entrecroisent efficacement pour ressortir meilleur de chaque voyage. Chaque accomplissement est l’occasion de gagner de l’expérience et des points de compétences dont certaines peuvent vraiment changer la vie, beaucoup de missions ajoutent des points d’aptitudes qui débloquent de nouveaux paliers dans ces mêmes arbres de compétences, et les récompenses sont également l’objet de nouveau matos ou de matériau permettant d’augmenter ce que vous avez entre les mains (vous pouvez de fait garder la même arme tout le jeu, tant que vous la boostez de temps en temps), en plus de faire évoluer votre base pour toujours plus de bonus.
Indiquons d’ailleurs que contrairement à bien d’autres jeux Ubisoft, le farm de matos est bien moins intensif, et il n’y aura pas besoin de courir à travers les plaines pour chopper des foutus plantes éparpillées dans tous les coins. Dans la grande majorité des cas, les ressources se trouvent dans des camps (el famosos) ou des forts, leurs équivalents XXL. Un bonne comme une mauvaise chose car si cela réduit le loot à un seul type de zone dédiée, cela pourra être également considéré comme usant de s’en taper à tour de bras, et ce sera la même chose pour les annexes histoires de ne pas buter contre un mur de difficulté liée à un level trop bas. Assassin’s Creed Shadows est clairement l’épisode qui propose le challenge le mieux équilibré (on peut mourir bêtement même contre des ennemis de niveaux équivalents), mais la ligne droite est de l’ordre de l’impossible. Retenez juste que lorsqu’on vous dit que vous pouvez piocher un peu tout et n’importe quoi dans les annexes, c’est qu’il quand même faut piocher quelque chose, et pas tout laisser de côté.
Cette branche un peu répétitive de la progression était censée être atténuée de par le choix entre deux personnages jouables, et de base, la promesse est tenue : on peut effectivement changer quand on le souhaite (à part quelques rares missions dédiées à l’un ou l’autre) et le level-design est adapté pour les deux styles. Pour autant, la sensation d’un jeu de base conçu pour Naoe est bien là. La kunoichi offre tous les aspects que l’on attend d’un Assassin’s Creed, par la souplesse du personnage, ses possibilités d’assassinats en douceur et ses nombreux outils. Et même qu’elle s’en sort finalement très bien en combat. Yasuke a lui davantage de défense, davantage de soin et un joli arc toujours utile, mais son côté bourrin ne fonctionne pas longtemps (en plus de sa lourdeur dans le parkour, et ses animations de boucher qui se répètent en boucle), au point que l’on privilégie la demoiselle la plupart du temps.
Non encore une fois, Assassin’s Creed Shadows n’est ni mauvais ni décevant, c’est juste un simple épisode de plus pour une licence incapable de se réinventer, s’améliorant certes sur divers points comme ces nombreuses petites choses pour privilégier l’exploration au lieu d’une apparition automatique de points d’intérêt (mais vous avez l’option pour, si vous préférez), n’arrivant jamais à surprendre hormis ironiquement par sa constance vieillotte, comme si les développeurs étaient encore tout fiers bientôt 20 ans après le premier de nous faire grimper sur des tours pour lancer un plan panoramique avec un bruit d’aigle. On y évolue pourtant de manière hypnotique, farmant et tuant dès que l’occasion se présente sans essayer de saisir les enjeux d’un scénario sans éclat (parfois, on croise deux camps qui s’entre-tuent, et on débarque pour planter tout le monde), mais lointaine est l’époque où la franchise parvenait à chaque fois à marquer le calendrier.
Alors c’est ça Assassin’s Creed Infinity ???
Un mot sur le désormais nommé « Animus Hub » qui comme son nom l’indique est un Hub à part mais néanmoins intégré à Shadows, accessible en un clic. Outre sa simplicité (juste des menus), nous n’avons pas compris l’intérêt du truc : la boutique de micro-transactions comme les Pass gratuits auraient pu se retrouver directement dans un sous-menu de Shadows, non ? Ah et on peut comme annoncé pouvoir « lancer » un autre épisode en piochant dans la chronologie, à condition bien sûr de le posséder sur son disque dur. Donc voilà, si vous êtes par exemple sur PS5, que vous avez Valhalla et Shadows, vous pouvez maintenant lancer Shadows puis allumer Valhalla depuis l’Animus, au lieu de cliquer directement sur Valhalla depuis le dashboard de la console. Trop cool ! (non) Mais on imagine plus sérieusement que tout cela n’est qu’un essai avant que l’Animus ne possède son propre launcher.
Conditions de test : effectué sur Xbox Series X en binôme avec ma demoiselle, au gré des soirées pour un total d’une bonne douzaine d’heures de jeu hors (nombreux) échecs. De par sa faute.
Josef Fares dit « l’homme au gros doigt d’honneur pendant les Game Awards » n’a rien de l’image du sale gosse que l’inconscient pouvait lui prêter à ce moment. Réalisateur à contre-courant de la modernité et de la course au pognon facile, la star de Hazelight en récolte pourtant de plus en plus en misant sur ce que beaucoup ne veulent plus faire : des expériences à pratiquer exclusivement à deux, si possible sur le même canapé (l’écran sera de toute façon splitté même en ligne), dans des univers de plus en plus grand public. Peut-être même un peu trop à bien y regarder.
Car si A Way Out avait ses moments de détente entre deux bro en cavale, et It Takes Two un certain message de fond sur les conflits parentaux, Split Fiction peut lui décevoir sur l’orientation, peut-être aussi parce que le jeu est une sorte de dédicace pour les deux filles de Fares dont il reprend ici le nom. Mio et Zoé sont donc les deux héroïnes de cette nouvelle aventure, plus précisément deux romancières voulant se prêter au jeu d’une expérience inédite fondée par une grande corporation. En gros, pouvoir transformer d’un claquement de doigts un récit en un monde de réalité virtuelle. Mais bien entendu, qui dit grande corporation dit « grands méchants » (caricaturaux) et le but de l’expérience en question est en fait de voler toutes les idées des romancières, même celles abandonnées au fin fond de leurs mémoires.
Mio, qui sent vite l’entourloupe, tente une échappée foireuse et se retrouve bloquée dans la même « bulle » que Zoé, donc dans un monde où les univers s’entrecroisent d’une séquence à l’autre, avec besoin de progresser sans cesse pour forcer la machine à partir en sucettes et ainsi ressortir de ce grand bordel. Narrativement, quelques cinématiques sont là pour apporter de la psychologie très simpliste aux deux protagonistes (ça et divers blabla in-game). Mio est la réservée amatrice d’écrits SF, tandis que Zoé est l’optimiste souriante de service vouant elle un amour à la fantasy. Et c’est un peu tout. Il faut dire qu’il n’y a pas vraiment de matière à faire du forcing sur l’opposition de deux goûts différents en matière de littérature, et on ne retiendra pas vraiment Split Fiction pour son scénario.
Non, ce qui va faire toute la qualité de ce nouveau titre de Hazelight, c’est son offre purement vidéoludique, à mille lieux de ceux qui privilégient l’enrobage au contenu (y a les deux aussi hein). On ne qualifiera pas Split Fiction de simple jeu d’action, de plates-formes ou d’énigmes, mais on en parlera comme d’une sorte d’expérience séquentielle, car c’est clairement ce qu’il représente : un ensemble de séquences à limite prendre indépendamment les unes des autres où chacune peut-être l’occasion d’apporter de nouvelles idées et situations (pas toutes pleinement réussies mais nous restons dans une moyenne haute) qu’on évitera de spoiler pour ne pas gâcher la surprise. Évitez même de vous abreuver des trailers si possible. Et même lorsqu’il y a de la redite car il y en a parfois, c’est en quelque sorte pour permettre aux joueurs de valider ses acquis avec une petite hausse de challenge bienvenue (et pas commune dans les jeux du développeur), potentielle source de rage si votre binôme a deux mains gauches. Ma moitié a les bonnes mains aux bons endroits, elle sait le prouver, mais diable, je pensais qu’elle aurait davantage de potentiel même uniquement grâce à Fortnite.
Deux univers qui s’entrecroisent, c’est aussi l’occasion de varier les plaisirs visuelles et les mécaniques de gameplay et même si certes nous n’aurions pas refusé un déferlement plus important de genre, Hazelight s’est montré suffisamment large dans la proposition pour ne pas se contenter de deux biomes. La SF peut autant offrir du space opera que du cyberpunk, tandis que la fantasy va au simili LOTR que le conte de fées. On vit donc l’expérience comme un véritable enchaînement de Kinder Surprise que l’on consomme à une vitesse peu permise tant, c’est indéniablement la grande force du jeu, le rythme est tout simplement dantesque. Exception faite des cinématiques trop longues pour ce qu’elles ont à raconter, le jeu enchaîne non stop sans le moindre moment de « rien », et va jusqu’à se permettre des séquences annexes à dénicher. Attention car on passe facilement à côté mais il y a heureusement la sélection de chapitres pour les plus curieux, à défaut d’une motivation pour tenter un deuxième run intégral, même en changeant de personnages.
Conditions de test : effectué sur Xbox Series X à partir d’un code review, essentiellement en solo avant d’aborder des choses plus sérieuses (mais pas trop) en endgame.
Monster Hunter est devenu à Capcom ce que GTA a toujours été pour Rockstar. Ce n’est pas non plus la même envergure, loin de là même, mais c’est aux yeux de chaque éditeur concerné le messie qui à lui seul sera capable de porter une année fiscale et une partie des suivantes. L’attente était là et les joueurs ont plus que jamais répondu présents avec un démarrage record dans toute l’histoire de Capcom. Quelques dizaines d’heures après avoir épongé l’essentiel de l’écosystème des Terres Sauvages, que va t-il donc rester de ce premier jet de contenu si ce n’est cette sensation de plus en plus constante de voir un éditeur se complaire dans une politique macronnienne du « en même temps », incapable de réellement choisir entre deux publics et donc d’obtenir le pin’s du sans-faute de l’un comme de l’autre.
Le pire étant que l’on a l’impression de se répéter mais disons que lorsque le succès parle de lui-même, on n’a pas vraiment le couteau sous la gorge pour être amené à changer. Oh, Monster Hunter Wilds est indéniablement un produit de haute qualité reposant sur une formule qui l’est tout autant. Graphiquement, on continue néanmoins de souffler entre le chaud et le froid, d’un côté l’impressionnante modélisation et le jeu des animations au cœur de panoramas variés et détaillés (et certains effets de lumière sont proprement magnifiques quand les conditions s’y prêtent), mais de l’autre les failles du RE Engine, déjà vieillissant sur certains points mais en plus pas le moteur le plus idéal du monde pour la gestion des mondes ouverts, offrant le 60FPS au prix de nombreux sacrifices sans empêcher les drop, quand le 40FPS offre lui un compromis idéal mais pas toujours fiable quand la météo s’y met.
Non le principal problème de Monster Hunter Wilds, c’est qu’il accentue sa notion d’accessibilité déjà mise en place dans World. Alors dit comme ça, ça paraît forcément très bien mais en réalité, nous sommes confrontés à un numéro d’équilibriste de la part de développeurs dans l’obligation de s’attarder sur une certains surdose de superflus. Prenons le fil rouge par exemple. Comme depuis déjà quelques épisodes, Monster Hunter propose un semblant de scénario qui est en fait une sorte de gros tuto très bien maquillé (on voit le soin aux cinématiques d'introduction de chaque monstre) destiné à présenter les dernières nouveautés tout en prenant les nouveaux-venus par la main. Une main qu’aimeraient refuser certains habitués qui n’ont que faire d’un scénario prétexte (y a des efforts, mais la franchise est vraiment pas typé pour) et de bien trop longues séquences de blabla pour le genre, véritable forcing pour découvrir la moitié de choses déjà connues sans la moindre forme de difficulté mais on va y revenir.
Et de l’autre, le nouveau public, qui n’a peut-être jamais eu le temps de s’occuper sur la franchise, ou qui souhaite enfin s’y attarder après quelques précédents loupés dans l’espoir que les choses se dérouleront mieux cette fois. Eux auront les honneurs de suivre un fil principal limpide dans la forme mais paradoxalement toujours aussi vieillot dans le fond. Rien que les menus. On se plaignait de Dragon Quest, encore plus quand on nous a offert ceux de la version européenne de DQVIII avant de nous les reprendre sauvagement, mais bon courage à celui qui abordera la franchise de Capcom face à un tel bordel vieux de deux décennies, enchevêtrement façon plats de spaghettis de sous-menus, onglets et raccourcis. Pas assez pour freiner l’habitué ni celui qui veut s’investir (pensez néanmoins à éditer le sous-menu des favoris, ça peut changer la vie) mais comprenez que l’austérité est toujours de mise, tout comme le chemin de choix pour tout saisir du mode coopération pourtant central de l’expérience.
Mais cela démontre en tout cas toute l’absurdité dans l’évolution de cette franchise. Un Souls siglé FromSoftware peut se montrer également très austère mais jamais le développeur ne s’en est caché ou a souhaité faire les choses autrement. Capcom lui vante lui une accessibilité qui n’est que relatif, jusqu’à pouvoir dire que cette « histoire tuto » est incapable de permettre au non-initié de vraiment saisir chaque chose que l’aventure peut réellement lui apporter. Et il y en a des choses à dire et à comprendre autour de cette franchise qui vogue d’un sous-genre à l’autre, tantôt action quand il s’agit de défourailler de la bébête, parfois survie quand les éléments se déchaînent pour faire souffrir autant le joueur que la cible, tantôt RPG dès lors que l’on se tourne enfin vers les mécaniques de loot & build où chacun mitonnera sa propre sauce. Par expérience personnel, quatre chasseurs la bave aux lèvres équipés d’armes infligeant le statut de paralysie, ça donne pour bien des situations un tel degré de massacre que vous risquez une plainte de Brigitte Bardot.
Monster Hunter Wilds est aussi l’épisode de la démesure au niveau des terrains de jeu, avec des biomes beaucoup plus massifs, plus que jamais chargés en recoins et cachettes… mais qui sont incroyablement bordéliques en terme de level-design. Alors c’est la nature, c’est le côté sauvage et de ce côté, il faut faire avec mais le surplus de verticalité rend la map totalement illisible, sans pour autant que vous puissiez réellement vous perdre avec votre monture. Ici, on ignore si c’est Capcom qui a voulu rendre le jeu toujours plus accessible ou si la simple existence de cette bestiole vient du fait que les développeurs se sont eux-mêmes rendus compte du risque d’atteinte au moral des joueurs face au segment labyrinthique, mais toujours est-il que leur principal point fort vient qu’ils filent automatiquement à l’objectif, vous laissant admirer la vue et surtout user de votre grappin pour looter des trucs sur le chemin.
L’objectif en question pouvant être un monstre, l’aspect « chasse » en prend un certain coup mais peut-être finalement que la conclusion véritable de Wilds, c’est tout simplement l’envie pour Capcom de s’attarder désormais et uniquement sur l’essentiel : le génocide de la flore local pour se faire du stuff. Ce qui explique l’immédiateté de certains points depuis World dans le loot, et désormais aujourd’hui d’autres facilités comme la possibilité de porter son petit kit pour faire de la bouffe où l’on souhaite (évitez quand même à côté de carnivores qui ont faim) ou notre monture qui peut porter une deuxième arme pour être sûr de palier à chaque situation, surtout en solo qui reste une expérience comme une autre, permettant la contemplation des infinis détails et des interactions entre les créatures sans que trois potes nous hurlent de bouger notre cul pour faire rendre gorge au Rathalos du coin.
Car le plus important, Monster Hunter Wilds sait l’offrir. Les combats n’ont jamais été aussi viscéraux face à de superbes créatures dont la campagne servira au moins à bien les mettre en avant au niveau de la mise en scène. On a toujours les mêmes 14 types d’armes (à croire que ce sera l’event du siècle lorsque Capcom en annoncera un nouveau) mais chacun a été toujours plus peaufiner et l’on a de nouveau cette sensation que même si tout ne peut pas plaire, rien n’est pour autant à jeter. A vous la grande épée et/ou l’arc pour l’offensif, la lance pour ceux qui misent sur les contres, et bien entendu les nombreux buff du Cor de Chasse (du moins uniquement si vous jouez coop dans le dernier cas). Et outre la possibilité d’exploiter les richesses de son environnement (avec son grappin) pour placer des pièges de fortune ou vous soigner, la grande nouveauté de cet épisode sera le mode Focus, celui qui aux yeux des plus gros fans va tout changer.
Depuis bien longtemps, et encore plus dans les prémisses de la franchise, Monster Hunter se voulait assez lourd dans sa prise en main (et même « très lourd » selon le type d’arme en main) avec besoin d’analyser au maximum les patterns avant de balancer son combo et pour cause : une fois entamé, il était impossible de modifier réellement sa direction. Tout cela fait désormais parti du passé avec le mode Focus qui permet tout simplement, hérésie pour certains (mais toujours moins que l’indicateur prévenant d’un coup fatal en approche), de viser précisément une partie du corps pour s’attarder dessus en conséquence. En ajoutant l’attaque focus qui défonce la pauvre bestiole pile là où ça commençait à piquer, c’est un déferlement de douleur et une foire aux loot. C’est grisant, déjà seul donc imaginez à plusieurs, mais un peu comme tout ce qui avait été cité jusque-là, ça affaiblit encore le challenge mis en place, détail déjà dommageable pour les 20h de l’histoire sans que rien ne s’arrange réellement en endgame.
Et c’est là que Monster Hunter Wilds pêche le plus. Si l’expérience reste de très haute qualité si tant est que l’on accepte la nouvelle orientation prise par Capcom, difficile en revanche de valider le fait que le contenu de base (et on précise « de base » car on sait que le suivi sera là) ne prenne pas en compte la rapidité d’exécution. Les quêtes, le loot, la forge, tout s’enchaîne plus rapidement et plus facilement, même en endgame où à de rares exceptions près, il est soudainement devenu très rare de faire face à l’échec. Alors il y a de quoi faire une fois le générique de fin passé en matière de dépeçage et de l’envie de se constituer le matos ultime, en plus de l’améliorer, mais entre le manque de challenge faisant que même du haut level n’impose plus d’optimisation ultime de build et le fait que dès le lancement, le titre propose encore moins de grands monstres que World, on a cette impression que le jeu « de base » (encore une fois) sert de simple préparatif en vue des nombreuses mises à jour à venir, et de l’inéluctable grosse extension… qu’il faudra de nouveau payer. Et en parlant de payer, il est toujours aussi impardonnable de demander à un joueur de sortir sa carte-bleue pour changer en profondeur son perso en cours de partie (par exemple sa voix).