Le Bureau enquêtes et analyses (BEA) vient de livrer les premiers éléments tirés des boîtes noires du vol Air France 447 Rio-Paris, recueillies au fond de l'Atlantique. Le BEA indique avoir publié cette note explicative, «confronté à la divulgation régulière d'informations parcellaires et souvent approximatives depuis le 16 mai», visant les éléments parus récemment dans la presse anglo-saxonne, allemande et française.
«Cette note, d'après le BEA, décrit de manière factuelle l'enchaînement des évènements qui ont conduit à l'accident, et présente de nouveaux faits établis. Les premières analyses seront développées dans le rapport d'étape dont la publication est prévue à la fin du mois de juillet.»
Dans ces informations, tirées des communications enregistrées en cabine de pilotage, il ressort que l'Airbus A 330 a bien décroché et que sa descente a duré 3 minutes 30 avant de toucher la surface de l'océan Atlantique, le 1er juin 2009 faisant 228 morts. Voici, sans rentrer dans les détails, le résumé des minutes qui ont précédé le crash :
2h00 : des turbulences annoncées à l'équipage, le commandant sort de la cabine
Vers 2 heures du matin, le commandant de bord annonce qu'un copilote va le remplacer. Six minutes plus tard, il n'est donc plus dans la cabine quand l'un des pilotes prévient l'équipage que l'appareil va entrer dans une zone de fortes turbulences. « Tu peux éventuellement prendre un peu à gauche […] » entend-t-on dans la cabine deux minutes plus tard. L'avion amorce un léger virage à gauche. A ce moment précis, «le niveau de turbulences augmente légèrement et l’équipage décide de réduire le Mach vers 0,8.» constate le BEA.
2h10 : le pilote automatique se désengage, l'appareil décroche et commence sa chute
A 2h10, le pilote automatique et l'auto-poussée se désengagent, et le resteront jusqu'à la fin du vol. L'avion part en roulis à droite, ce que le pilote tente péniblement de corriger. La vitesse chute, et l'alarme de décrochage retentit trois fois. Pendant un peu moins d'une minute, l'un des pilotes tente de rappeler le commandant de bord. Les pilotes voient alors s'afficher deux vitesses différentes pendant un peu moins d'une minute, l'une d'elles indiquant un effondrement brutal de la vitesse. L'avion arrive au somment de sa trajectoire ascendante, et commence sa chute.
2h12 : le commandant de bord revient et donne des ordres pour redresser, en vain
Vers 2 h 11 min 40, le commandant de bord rentre dans le poste de pilotage. Dans les secondes qui suivent, toutes les vitesses enregistrées deviennent invalides et l’alarme de décrochage s’arrête. Il donne immédiatement des consignes à ses deux copilotes pour redresser l'aéronef, sans jamais reprendre les commandes lui-même. A 2 h 12 min 02, l'un des pilotes annonce qu'il n'a « plus aucune indication valable».
2h14 : Après plus de deux minutes de manoeuvres, les enregistrements s'arrêtent
Pendant deux minutes, les trois pilotes vont ensuite tenter plusieurs manoeuvres pour redresser l'appareil, en vain. Les enregistrements s'arrêtent à 2h14 et 28 secondes. L'appareil a alors une assiette («il pique du nez») de 16,2 degrés et un roulis (Il est penché) de 5,3 degrés à gauche.
Parmi les nouveaux faits, le BEA note notamment la conformité de la composition de l'équipage, le fonctionnement des alarmes de décrochages et le fonctionnement sans interruption des moteurs. Cet enregistrement révèle en revanche une incohérence entre les vitesses affichées sur le tableau de bord et sur l'instrument de secours, ainsi que les conditions du décrochage et opérations tentées pour «cabrer», c'est-à-dire redresser l'appareil.
Les explications :
Sur BFM-TV, Jean Serrat, ancien pilote de ligne décrit «une véritable catastrophe». «Dans le cockpit, il existe un compteur de vitesse du côté du pilote et du copilote. Quand on n'a plus de notion de vitesse, on perd tous les calculateurs», désespère le spécialiste.
L'avion se trouve alors en mode alternatif ("alternate flight"), c'est à dire d'après Jean Serrat, «des conditions de vol très dégradées» accentuées par la nuit. Dans ces conditions il ne « voit pas un pilote d'Airbus s'en sortir indemne».