(Note : mis à jour le, euh, 23 mars à 23h10, avec en fin de texte un paragraphe sur le cas difficile de l'appareil dentaire - problème qui m'avait totalement échappé)
Partie I : Le collégien
Dans son lieu d’études, le collégien connaît différents statuts, à travers l’évolution de sa scolarité. En sixième, il n’est qu’un CM2 évolué soumis aux brimades des troisièmes, lesquels ne se calment que si le collège est mélangé avec le lycée, et que les lycéens, souvent plus matures, les recadrent. Les troisièmes étant les doyens du collège, il s’imaginent qu’ils ont tout pouvoir sur le reste de l’établissement.
Le collégien n’a pas des masses de préoccupations ; ce qu’il aime le plus au monde, c’est sa bite. En découvrant l’épanouissement de cette dernière, c’est tout un univers qu’il voit s’ouvrir devant lui ; une quantité indénombrable de possibilités. Evidemment, cette extension du domaine de la queue est traumatisante au départ ; elle provoque nécessairement une forme de malaise, que le collégien trouve toutefois le moyen de surmonter par une extraordinaire pratique individuelle : la masturbation. Tout est bon pour se branler ; ce petit plaisir de l’existence constitue une fin en soi. Cette découverte hédoniste est bien sûr consubstantielle de l’attirance ressentie soudainement pour les filles, ou plutôt pour leurs seins encore en formation. En conséquence de quoi, pour un collégien, une meuf ne vaut rien si elle ne fait pas bander. Ainsi, si l’une d’entre elles connaît quelques problèmes dans sa croissance mammaire, elle peut avoir l’assurance de subir les railleries des bites sur pattes qui constituent sa camaraderie masculine de classe. Les mystères de la féminité naissante étant ce qu’ils sont, la grande question qui taraude tout collégien dès qu’il voit une fille est : ‘’a-t-elle ses règles ?’’.
Le collégien, comme n’importe quel homme de n’importe quel âge, n’a aucun courage s’il est seul ; il est même d’une étonnante lâcheté. Mettez-le en revanche en compagnie d’une bande de potes, et notre cobaye se sentira plus dévergondé et fort que jamais. Dès lors, il peut se permettre de critiquer ses camarades sur leurs goûts vestimentaires ou musicaux (tout ce qui est ‘’pour vieux’’, donc âgé de plus de deux ans, est à bannir). Le collégien aime un genre de musique à choisir parmi ces deux-là : le rap ou le métal. Le rap parce qu’il expose avec justesse et violence les problèmes des jeunes de banlieue ; le métal parce qu’il explose avec justesse et violence les oreilles des jeunes riches. Un collégien n’aimant aucun de ces deux genres n’est évidemment pas de notre planète ; il pourra même faire l’objet d’une coalition de la part de deux collégiens aimant l’un le rap, et l’autre le métal. La défense des goûts musicaux du collégien se base généralement sur un analyse particulièrement fine des qualités de ce qu’il aime : pour le métal par exemple, c’est parce que ça déchire et parce que c’est ultra-violent (alors qu’il ne sait même pas ce que disent les textes ; peut-être que Slipknot chante des conneries du genre « Viens, laisse-moi t’offrir ces fleurs, elles sentent tellement bon » ).
Avec ses potes, nous l’avons dit mais le répétons, le collégien ose tout. Plus particulièrement, il ose enfin aborder les filles, ces porteuses de nichons (et de touffes) qui exercent sur lui une attraction tellement mystérieuse qu’il ne sait comment s’y prendre avec elles. Seul, il est bien évidemment incapable de tenter quoi que ce soit. Avec deux potes, il est désinhibé ; ainsi il se sent légitimé dans la critique facile et lâche de la petite taille des seins de ses camarades. Pour rentrer en contact physique, il se bat avec elles ; ça lui permet de tâter leur poitrine en faisant comme si c’était pas fait exprès. Il n’a évidemment aucun scrupule à les insulter ; il s’imagine que ça le rend désirable et beau.
Au collège, lieu où il perd la moitié de son temps, certes contre son gré, le collégien peut se montrer rebelle ; il ne faut surtout pas qu’il ait l’air de s’intéresser à ce que les professeurs prétendent lui inculquer. Il se tiendra bien sûr à carreau pendant les cours, mais n’hésitera pas, dans un accès de courage, à insulter à voix basse cette connasse de prof de bio dès la sortie de la salle.
D’une manière générale, le collégien a un besoin irrépressible de se sentir rebelle, individualisé. C’est pourquoi il va affirmer haut et fort ses goûts vestimentaires contre les critiques de ses parents. Il ne faut toutefois pas abuser, et lesdits goûts vestimentaires doivent évidemment être conformes à ceux de tout le collège, sinon c’est l’exclusion assurée. Placez quatre collégiens côte à côte, de dos, et tentez de les différencier. C’est impossible. Le collégien revendique de toute manière une indépendance totale dans le choix de ses vêtements ; subséquemment tous arborent des t-shirts trop larges menant un combat contre des trucs nuls (la pollution, le racisme, la police, etc), des pantalons baggy, et des chaussures ès.
D’un point de vue spirituel, le collégien a deux points de vue, au choix : soit il a été élevé par des parents pas trop cons ou athées, et ne s’est donc pas encore vraiment posé la question de l’existence de Dieu, par conséquent si on lui demande il dira qu’il est athée parce qu’il trouve les religions nulles, ou qu’il croit en Dieu mais c’est tout ; soit il a été élevé dans un milieux religieux extrémiste et s’avèrera totalement aveuglé par les conceptions dangereuses de ses géniteurs – cas désespérant puisqu’on peut dès lors dire que le collégien est foutu, finalement.
Evidemment, le collégien est avant tout un humain – on a tendance à l’oublier et à le prendre pour un animal, mais c’est pourtant le cas, et connaît une vie extrascolaire qu’il estime extraordinaire. Au delà des habituelles activités sportives, qu’il pratique souvent parce qu’il paraît, selon sa mère, que c’est bon pour sa santé, le collégien se prend souvent assez vite de passion pour les jeux vidéo, loisir dans lequel il trouvera généralement tout ce qui lui faut. Au départ, son intérêt pour ce loisir ô combien noble et sous-estimé par les adultes aveuglés par leurs œillères s’avère bien innocent. Il choisit généralement sa console selon les choix de ses copains, qui eux-mêmes l’ont choisies pour jouer à des jeux de sport ; en conséquence de quoi il opte bien souvent pour un PlayStation 2, choix qu’il continuera de justifier, parfois, en expliquant que la PS2 c’est pour les adultes, alors que Nintendo c’est pour les gamins ; il oublie du même coup qu’il a quatorze ans. En misant tout sur les jeux de bagnoles, le collégien a quelquefois le malheur de louper les œuvres d’arts que la console de Sony recèle, mais qui ne l’attirent jamais au premier abord. Quant à celui qui a opté pour une GC, il passe souvent pour un con, puisqu’il joue à des jeux de gosses.
Par la suite, le collégien découvre Internet ; il commence donc par gentiment flooder en langage sms sur divers forums où il apprend bien vite les règles régissant la communauté. Puis, avide de connaissances vidéoludiques, il fréquente des sites de jeux vidéo, dont les plus accessibles : jeuxvideo.com et jeuxfrance.com. Sur ce dernier, on constate qu’il devient un moulin à paroles, capable de produire quatre articles dans la journée sur son blog, et de défendre un constructeur ou une console pendant des heures sur une insignifiante news. Il fréquente le chat du site, qu’il quitte généralement tôt dans la soirée en semaine, parce qu’il ne faut pas se coucher trop tard ; du coup, ledit chat se vide de sa population à partir de 22 heures.
Il arrive qu’une fille se pointe sur JeuxFrance. En fait, dès lors qu’un membre semblant être de sexe féminin arrive dans le chat, il peut être sûr d’être assailli de toutes parts par des tarés lui demandant son âge, si ses seins sont gros, si elle veut bien sortir avec eux, si elle les trouve beaux, etc. Les blagues vaseuses et portées sur le sexe commencent à fuser, les allusions grivoises avec, et tout ça provoque un joyeux bordel. Dès lors, une fille se sentant en mal d’amour sait ce qu’elle a à faire pour trouver quatre contacts msn en une soirée et se faire draguer de tous les côtés.
Le collégien est relativement apolitique, en ce sens qu’il n’a pas vraiment de conviction. Tout ce qu’il sait c’est que l’Etat c’est de la merde, et que vive l’anarchie. Il ignore juste qu’un système anarchique repose sur un concept de contrats individuels, qui engagent chacun de ses membres vis-à-vis des autres, et qui exige donc de tous un civisme et un respect que la république n’exige pas.
Parfois, le collégien n’est rien de tout ce que nous venons de décrire ; il se sent alors très mal à l’aise, se demande s’il ne vient pas d’une autre planète (d’autant plus que les autres lui posent cette question), et traverse ces quatre années dans la plus grande douleur. Il parvient néanmoins généralement à sa trouver des amis dans son genre ; parfois même, s’il a de l’humour, il peut séduire sa classe en la faisant marrer.
On évoquera rapidement la collégienne, qui voudrais généralement être adulte, sûrement pour se faire draguer par des types un peu moins débiles. Elle peut toutefois être volontairement provocante, et aller vers les garçons leur dire qu’ils sont décidément trop cons, puis se plaindre que ces derniers se soient révoltés. Pour qu’une collégienne ose ça, il faut qu’elle ait conscience d’avoir un certain pouvoir de séduction sur les mecs. Si elle a le malheur d’être complexée, elle sera vouée aux pires brimades.
N’oublions pas, pour finir, le drame du collégien : l’appareil dentaire. Bien souvent obligé d’en arborer un pendant une bonne partie de sa présence au collège, il trouve ça cool au début, parce que ça lui donne l’air d’un grand, mais regrette vite le nombre de saloperies se coinçant irrémédiablement dans ce bidule ferrailleux. Il se rend vite compte, en outre, que l’appareil dentaire est le pire tue-l’amour qui soit, et que tant qu’il en portera un, il risque d’être privé du plaisir des embrassades langoureuses. Sa chance dans ce malheur est que presque tous ses camarades, mâles ou femelles, portent aussi un appareil dentaire ; c'est une sorte de loi générale, un peu comme l'acné.
Tel est le monde impitoyable, et parfois pitoyable, des collégiens.
Vivement le lycée, putain.
posted the 03/20/2006 at 10:17 PM by
franz