Conditions de test : effectué avant le patch Day One qui fait surtout office de correctifs (mais je n’ai de toute façon rencontré quasiment aucun bug majeur).
En préambule, j’ai un certain besoin de vous donner d’importantes explications pour éviter que davantage tombe dans l’incompréhension manette en main :
Rise of the Ronin n’est pas un Souls, même si beaucoup l’ont cru de loin. En bref, il n’est pas à ranger dans la même catégorie que les
NiOh et
Wo Long du même développeur (la
Team Ninja en l’occurrence). Certes, nous en retrouvons quelques aspects notamment dans son gameplay ou encore le principe d’aller récupérer son xp perdu après trépas (mais pas trop : juste l’xp du niveau en cours) mais le game-design n’a absolument rien à voir et se rapproche en fait davantage d’un
Ghost of Tsushima ou plus globalement d’une production
Ubisoft en monde ouvert. Dans tous les cas, car quelle que soit la comparaison, elle ne sera pas en faveur du concerné du jour. Loin de là.
On va commencer par se plonger dans le contexte avec un voyage dans le Japon des années 1850, époque propre à la modernité et l’ouverture mais non pas sans conflits internes notamment politique avec d’un côté les pro-Shogun, de l’autre les pro-Empereur, et au milieu l’arrivée d’occidentaux. Le héros ou plutôt « les » héros sont loin de toute cela. « Les » car le jeu vous propose dès le départ de créer non pas un mais deux avatars (homme ou femme dans un cas comme l’autre, c’est vous qui voyez), les deux incarnant un duo d’assassins dits « lames jumelles ». Au départ car après une mission d’introduction dans un minuscule niveau fermé (un bateau), le retour au bercail sera marqué par la contre-attaque du clan ciblé et la mort de votre « lame jumelle ». C’est à ce moment précis que vous pourrez choisir qui vous voulez incarner, l’autre trépassant. Mais bon, entre nous et sans spoil, je pense que vous avez deviner que si on vous propose de créer un personnage, ce n’est pas pour qu’il disparaisse du scénario au bout de 30 minutes hein…
Bref, la lame restante va donc fuir les ruines de son village natale et embrasser la liberté du monde ouvert, donc en gros c’est là que le jeu commence vraiment. Et si dans l’introduction, on s’attendait quand même à un style Souls, du genre
Wo Long mais en monde ouvert façon tentative
Elden Ring, la réalité des choses va vite nous rattraper rien que par les choix de la
Team Ninja de proposer plusieurs modes de difficulté et une map. Oui, une map, avec plein d’icônes de trucs secondaires pour ne jamais être perdus, ce qui élimine de suite l’un des principaux aspects du genre Souls, mais il faut dire également que le jeu ne comptait de toute façon par perdre le joueur dans des labyrinthes et des niveaux tortueux : il n’y en a pas. Il n’y a RIEN en terme de level-design qui rapproche ce jeu des deux précédentes licences de la
Team Ninja. RIEN du tout. C’est une grande map, et vous placez au milieu quelques grandes villes que vous traverserez au fil du scénario, et de tout petits camps ennemis qui une fois nettoyés deviendront des coins de tranquillité (genre un ou deux marchands). C’est tout.
Il n’y a pas les tombeaux d’un
Assassin’s Creed ou les Creusets d’un
Horizon pour apporter du neuf dans le level-design. Jamais la moindre énigme pour avancer ou quoi que ce soit du genre donc. Alors on va le comparer à
Ghost of Tsushima admettons mais va falloir s’accrocher car rien que sur le plan graphique,
Rise of the Ronin est indigne d’une PS5 sur tous les plans (hors frame-rate, ça tourne en 60FPS quand il peut si vous optez pour la performance). Je vais être franc et dire tout simplement que ce jouer à
Rise of the Ronin m’a rappelé directement
Dynasty Warriors 9, cet épisode qui a fait le choix du monde ouvert alors que les développeurs (
Omega Force, mais toujours
Koei Tecmo vous noterez) n’avaient aucune compétence en la matière. Eh bien là c’est exactement pareil : la
Team Ninja n’a jamais fait de jeux en monde ouvert, le moteur pue la poussière à des kilomètres mais rien à faire, ça veut se la jouer moderne donc faut en assumer les conséquences.
Donc
Rise of the Ronin est un jeu qui sur le plan graphique se ferait déjà dégommer sur PlayStation 4, et l’on n’en retiendra que de rares plans grâce aux effets de lumière et avec les bonnes conditions (de nuit et sous la pluie, ça passe assez bien). Plusieurs animations sont hachées, le monde est mort de chez mort en terme d’ambiance, ça tente quand même un truc sur la végétation notamment l’herbe mais c’est inférieur à ce que serait une alpha de
Ghost of Tsushima, les animations faciales des PNJ sont les plus risibles pour ce que l’on a vu d’un AAA sur ces dix dernières années (dans le sens où il n’y en a quasiment pas) et les (grosses) villes sont quasiment vides de PNJ, à nous rendre dépressif. Franchement, la gestion de la foule était meilleure dans
Assassin’s Creed 1 et pour ce qui est du rendu brut en zone urbaine,
Assassin’s Creed Unity faisait mieux. En 2014. Et bien entendu, le manque de budget ou de talent se ressent tout autant dans la narration, avec très peu de vrais cinématiques pour à la place des dialogues plan-plan façon J-RPG à pas cher sur PS2, où la seule originalité sera de faire parfois des choix de factions conduisant à quelques promos dans certaines boutiques (ou des malus dans d’autres) et des différences au niveau des alliés.
C’est une vrai déception vu l’attente qui pouvait être faite, encore plus avec une mise en avant de PlayStation par le statut d’exclusivité, mais y a quand même du positif, forcément lié au CV de la
Team Ninja. Donc le gameplay en combats. Là, vous serez totalement dans du
Wo Long pour citer le plus récent, avec comme d’habitude le besoin de stun la jauge de fatigue de l’opposant et surtout boss en usant de vos compétences spéciales et plus généralement grâce au parry, jusqu’à retrouver le système de posture et différentes armes dans lesquelles vous pourrez vous spécialiser, mais aussi des apports secondaires tels arcs, armes à feu et des gourmandises inattendues dont un lance-flammes artisanale (mais ça s’use rapidement). Les combats sont bien nerveux, les possibilités nombreuses et le sound-design bien viscéral, en plus de proposer des finish aussi satisfaisants que gores. Dommage que le bestiaire ne suive pas des masses niveau renouvellement, la faute il est vrai à un contexte bien plus réaliste que dans
NiOh.
La petite originalité viendra des alliés que vous recruterez au fil du jeu et exploitable dans les missions principales. Si l’IA est bien entendu moyenne pour évidemment vous laisser faire l’essentiel du boulot,
Rise of the Ronin apporte cette fois en grande différence le fait de pouvoir lors d’une mission principale switcher librement entre vous et l’un de vos camarades pour découvrir leurs styles au niveau des postures et compétences. Et si leurs atouts sont à vos goûts, sans arrière-pensée, alors il suffira d’aller dans le bon sens des dialogues et ne pas hésiter à les inviter dans votre base pour échanger et offrir des cadeaux afin de débloquer leurs aptitudes pour votre propre personnage. Une excellente idée pour creuser davantage dans son propre style (par contre, faut faire avec le méga-loot à outrance comme dans les grandes habitudes du studio), qui donne à cette licence un aspect bien à lui.

Dommage qu’il n’en soit pas de même pour le reste, notamment sur l’infiltration dont la mise en avant est bien-là mais loin d’être fun. On débloque certes de nouvelles choses au fil des heures comme un objet pour détecter les ennemis au travers du mur, mais le level-design est peu motivant pour donner des approches éclatantes. Le planeur par exemple est trop imprécis pour servir autrement que pour les balades et pour traverser plus rapidement une grande ville, tandis que le grappin est une arnaque par le fait qu’il n’est exploitable que sur des points précis, vous obligeant souvent à tourner tout au tour d’une bâtisse pour trouver le bon point. Un énorme retour en arrière, de même que pour l’IA ennemie qui a une vision d’aigle mais de sérieux problèmes d’otite séreuse : elle peut nous entendre arriver dans son dos si on marche calmement même en pantoufle (faut être accroupi ou c’est mort) mais ne va même pas lever un bout de sourcil si lors d’une roulade mal négociée, vous fracassez 5 caisses de bois à 2 mètres du mec.
Rise of the Ronin ne marquera pas l’histoire, mais servira juste de leçon à
Koei Tecmo car si encore une fois le jeu garde un très bon gameplay et un vrai système d’augmentation en puissance (améliorations des armes, arbres de compétences, loot…), sa structure est en-deça du scolaire et on pourrait même parler d’amateurisme avec une grande map pleine de vide où l’on place tel des pions de multiples campements minuscules sans âme ni génie. Ubisoft, déjà critiquable en la matière sur de nombreuses productions, fait pourtant aujourd’hui mieux et
Rise of the Ronin aurait pu à la rigueur sauver les meubles en noyant ce manque de créativité au milieu de missions principales exceptionnelles soit par le level-design, soit par la mise en scène, ou les deux. Et même pas. En dehors des dialogues et de séquences sans intérêt (prendre des photos, wahou), les missions du fil rouge se résument à de trop rares exceptions (qu'on évitera du coup de spoil) à de petites séquences d’affrontements ou infiltration dans des endroits instanciés tout aussi petits, ou finalement pas grand-chose ne les différencient de ce que l'on rencontre dans le monde ouvert, juste qu’on a cette fois des compagnons de soutien. Et parfois un boss balaise.