Conditions de test : effectué sur PlayStation 5 Pro, avec un patch qui n’est peut-être pas celui du Day One. Aucun bug notable à signaler en plusieurs dizaines d’heures, à part un étrange couac technique : même en Performance (60FPS), la zone dédiée à notre base passe automatiquement en 30FPS. Peut-être la gourmandise du Housing.
Ah,
Assassin’s Creed Shadows. On peut dire que cet épisode aura fait parler de lui avant la sortie, et pas seulement parce que sa campagne marketing fut la plus longue dû à deux reports, mais bien à cause de diverses polémiques, renforcées par la stature même d’Ubisoft invitant les détracteurs à taper de plus en plus fort, bien que parfois aveuglément, comme s’il y avait une sorte de délit de sale gueule. Et pourtant. Arrivé aux crédits de fin, la première sensation qui émergea dans ma boîte crânienne fut de l’ordre du « Tout ça pour ça ? », et pas pour le jeu lui-même qui est finalement bien proche que ce à quoi je m’attendais, mais bien parce que toutes ces gueulantes n’avaient même pas lieu d’être.
Assassin’s Creed Shadows ne tente pas de faire des courbettes au wokisme, ou de réécrire l’histoire à sa façon (en tout cas pas plus que depuis ses débuts). C’est juste un
Assassin’s Creed. Et surtout rien de plus ou de moins que ça.
Il y aura ceux qui se plairont à comparer la couleur des bols pour savoir si Ubisoft a fait preuve de fidélité envers le Japon de l’ère Féodal, et ceux qui regarderont ça de manière globale pour constater que le travail est clairement là. Graphiquement, il n’y a certes pas la finesse exemplaire d’un
Ghost of Tsushima mais on reste très satisfait du rendu global à travers les saisons (l’automne est clairement au-dessus du reste, vous vous doutez pourquoi), l’ambiance est plutôt respectée et on a quand même les honneurs d’avoir un mode assurant un très bon doublage japonais (et portugais selon le contexte). Carton rouge en revanche pour les musiques, globalement absentes quand elles n’ont rien à foutre là, du genre une espèce de schmilblick mélange entre du rap local et je ne sais quoi, le genre de choses qui fait souffler et brise la qualité du séquence.
Sur l’enrobage, le plus gros problème d’
Assassin’s Creed Shadows comme de bien des jeux d’Ubisoft depuis trop d’années restera sa narration. Si quelques efforts sont fait, avec notamment des flashbacks plutôt travaillés bien que parfois trop longuets, il faut bien avouer que l’on tombe dans les travers habituels de la franchise avec un joueur expédié dans un contexte qui lui échappe un peu. Invraisemblablement, on a beau être au coeur de l’affiche, la multitudes de personnages et de sous-scénarios donnent l’impression d’être davantage spectateur qu’acteur alors que c’est nous qui portons la lame faisant rendre les intestins à bien des figures historiques. C’est de toute façon une simple histoire de vengeance et d’honneur, autant pour Naoe que Yasuke, et comme d’habitude depuis longtemps, n’attendez rien de la meta.
Assassin’s Creed se contente de faire du
Assassin’s Creed et cela se voit par sa progression souple mais ironiquement vestige d’un autre temps, là où l’époque semble de plus en plus réclamer un retour à une formule plus terre-à-terre, plus linéaire d’une certaine façon même dans un monde ouvert (d’ailleurs cette fois pas toujours pratique à visiter vu la topographie). On est ici tellement libre dans un tableau d’objectifs qui ne fera que grossir au fil du temps que l’on finit par ne même plus parvenir à distinguer le principal du secondaire, comme si nous étions dans un gigantesque bac à sable. D’ailleurs, pour peu que vous vous attardiez à des quêtes annexes, il est possible de passer plus de 15h aux commandes de Naoe avant de pouvoir enfin « débloquer » l’accès à Yasuke, que l’on aura heureusement l’occasion d’incarner rapidement dans l’introduction.

Il faut dire qu’il y a de quoi se perdre mais en gros, les choses se situent comme suit. Il y a les quêtes principales propres à Naoe et Yasuke qui ne se débloqueront qu’au fil du temps, majoritairement en épongeant une grosse liste d’ennemis principaux à abattre (c’est définitivement un jeu Ubisoft hein). Vous ajoutez à cela le tableau des alliés qui ont leurs propres petites missions, mais également dans quasiment chaque zone un mec qui va vous donner sa propre liste de cibles diverses (donc un sacré paquet au final), également quelques petites annexes par-ci par-là, puis d’autres qui font sérieusement office de remplissage (tuez plein d’ennemis dans x zone) et avec tout cela, ajoutez également des séquences QTE, des animaux à approcher et même des missions temporaires apparaissant chaque semaine pour faire progresser une espèce de pass de combat (gratos, 2 disponibles pour le moment) débloquant plein de trucs dont de la monnaie in-game à dépenser dans une boutique dédiée, sachant BIEN ÉVIDEMMENT qu’il y a aussi l’autre grosse boutique où il faut sortir la carte-bleue, déjà jonchée de skins ultra classes que vous n’aurez jamais gratuitement.
Ce dernier point fâcheux (80€ le jeu) mis à part, la formule reste efficace d’une certaine façon et il y a toujours cette motivation à explorer un peu tout ce qui est possible rien que par la récompense de l’augmentation constante en puissance, où tous les systèmes s’entrecroisent efficacement pour ressortir meilleur de chaque voyage. Chaque accomplissement est l’occasion de gagner de l’expérience et des points de compétences dont certaines peuvent vraiment changer la vie, beaucoup de missions ajoutent des points d’aptitudes qui débloquent de nouveaux paliers dans ces mêmes arbres de compétences, et les récompenses sont également l’objet de nouveau matos ou de matériau permettant d’augmenter ce que vous avez entre les mains (vous pouvez de fait garder la même arme tout le jeu, tant que vous la boostez de temps en temps), en plus de faire évoluer votre base pour toujours plus de bonus.

Indiquons d’ailleurs que contrairement à bien d’autres jeux Ubisoft, le farm de matos est bien moins intensif, et il n’y aura pas besoin de courir à travers les plaines pour chopper des foutus plantes éparpillées dans tous les coins. Dans la grande majorité des cas, les ressources se trouvent dans des camps (el famosos) ou des forts, leurs équivalents XXL. Un bonne comme une mauvaise chose car si cela réduit le loot à un seul type de zone dédiée, cela pourra être également considéré comme usant de s’en taper à tour de bras, et ce sera la même chose pour les annexes histoires de ne pas buter contre un mur de difficulté liée à un level trop bas.
Assassin’s Creed Shadows est clairement l’épisode qui propose le challenge le mieux équilibré (on peut mourir bêtement même contre des ennemis de niveaux équivalents), mais la ligne droite est de l’ordre de l’impossible. Retenez juste que lorsqu’on vous dit que vous pouvez piocher un peu tout et n’importe quoi dans les annexes, c’est qu’il quand même faut piocher quelque chose, et pas tout laisser de côté.
Cette branche un peu répétitive de la progression était censée être atténuée de par le choix entre deux personnages jouables, et de base, la promesse est tenue : on peut effectivement changer quand on le souhaite (à part quelques rares missions dédiées à l’un ou l’autre) et le level-design est adapté pour les deux styles. Pour autant, la sensation d’un jeu de base conçu pour Naoe est bien là. La kunoichi offre tous les aspects que l’on attend d’un
Assassin’s Creed, par la souplesse du personnage, ses possibilités d’assassinats en douceur et ses nombreux outils. Et même qu’elle s’en sort finalement très bien en combat. Yasuke a lui davantage de défense, davantage de soin et un joli arc toujours utile, mais son côté bourrin ne fonctionne pas longtemps (en plus de sa lourdeur dans le parkour, et ses animations de boucher qui se répètent en boucle), au point que l’on privilégie la demoiselle la plupart du temps.
Non encore une fois,
Assassin’s Creed Shadows n’est ni mauvais ni décevant, c’est juste un simple épisode de plus pour une licence incapable de se réinventer, s’améliorant certes sur divers points comme ces nombreuses petites choses pour privilégier l’exploration au lieu d’une apparition automatique de points d’intérêt (mais vous avez l’option pour, si vous préférez), n’arrivant jamais à surprendre hormis ironiquement par sa constance vieillotte, comme si les développeurs étaient encore tout fiers bientôt 20 ans après le premier de nous faire grimper sur des tours pour lancer un plan panoramique avec un bruit d’aigle. On y évolue pourtant de manière hypnotique, farmant et tuant dès que l’occasion se présente sans essayer de saisir les enjeux d’un scénario sans éclat (parfois, on croise deux camps qui s’entre-tuent, et on débarque pour planter tout le monde), mais lointaine est l’époque où la franchise parvenait à chaque fois à marquer le calendrier.
Alors c’est ça Assassin’s Creed Infinity ???
Un mot sur le désormais nommé « Animus Hub » qui comme son nom l’indique est un Hub à part mais néanmoins intégré à Shadows, accessible en un clic. Outre sa simplicité (juste des menus), nous n’avons pas compris l’intérêt du truc : la boutique de micro-transactions comme les Pass gratuits auraient pu se retrouver directement dans un sous-menu de Shadows, non ? Ah et on peut comme annoncé pouvoir « lancer » un autre épisode en piochant dans la chronologie, à condition bien sûr de le posséder sur son disque dur. Donc voilà, si vous êtes par exemple sur PS5, que vous avez Valhalla et Shadows, vous pouvez maintenant lancer Shadows puis allumer Valhalla depuis l’Animus, au lieu de cliquer directement sur Valhalla depuis le dashboard de la console. Trop cool ! (non) Mais on imagine plus sérieusement que tout cela n’est qu’un essai avant que l’Animus ne possède son propre launcher.