Micromania dans la tourmente : 47 magasins vont fermer.
Article signé par Virgile (ex JVFR/Gamekult) qui d'après ses sources annoncerait la fermeture imminente de 47 magasins Micromania.
Après GAME, la plus grosse enseigne de JV franchisé en France va t elle aussi disparaitre?
Source
Ces magasins vont ils fermer? On est loin
du discours rassurant d'il y a 2 ans.

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posted the 02/04/2022 at 07:58 PM by
obi69
J'ai discuter avec pas mal de vendeurs de chez eux et certains me l'avaient deja dit que d'ici quelques mois il allait avoir du changement pour eux et que beaucoup de magasin allaient fermés
C'est la fin d'une epoque , en tout cas j'avais bien kiffer leur DVD E3 avec marcus
La concurrence des grandes enseignes même sur les jeux vidéo physique est devenu beaucoup trop forte(avec des prix parfois jusqu’à 30% de moins à la sortie d’un jeu).
Sans parler de la dématérialisation qui les achèvent depuis plusieurs années.
A relativiser donc.
Le papier est par ailleurs intéressant à lire pour toutes les pratiques commerciales qui y sont exposés afin d’atteindre les objectifs parfois aberrants imposés par la direction.
God job.
Néanmoins ils vont continuer a morfler à cause des grandes surfaces, amazon, vinted et compagnie + les offres type Gamepass. Ca serait pas une grosse perte cela dit. Je préfère de loin les magasins indépendants ou les rayons jv d'une fnac/cultura.
Les grandes surfaces ont tués les magasins de jeux vidéos, on le sait, mais micromania se tue tout seul avec leurs prix aberrants.
Micromania c'est deja plus un magasin pour figurines pop qu'un magasin de jeux vidéos dorénavant, et ca va continuer comme ca en se tournant vers d'autres secteurs que le jeu vidéo pour survivre.
Des salariés, des familles qui vont subir ces fermetures.
Les magasins Micromania restent une des vitrines du jeu vidéo en France pour faire découvrir ce média au grand public.
ma snes, achetée au score game de la rue des écoles
mon chrono trigger, acheté à micro mania champs élysée
depuis la psx et 98, mes jeux, achetés à la Fnac où je ne sais plus où
Dans le cas de Micromania, c'est bien sûr la dématérialisation et la concurrence des grandes surfaces qui leur ont mis une claque mais aussi les prix délirants à l'heure où les gens comptent leur sous et passe par leboncoin/vinted. C'est déjà un exploit que ce soit encore vivant en 2022.
Pour ma part, j'ai bien fait de suivre mon instinct et de me barrer du commerce fin 2016 pour travailler dans l'informatique. Clairement, ça manque pas de travail, les salaires sont intéressants et tu t'ennuie jamais.
En espérant que c'est qu'une rumeur. Je suis pro démat en général mais du côté des industriels, on connais leur putain de finalité (on ne possédera plus rien et on sera plus heureux).
Dans le centre commercial le plus proche de chez moi, j'ai un carrefour et un cultura dont les prix neuf varie de 69.99€ à 44,99€ . Alors que le magasin de jeu vidéo lui tout est à 69.99€.
Mes derniers achats ont été une manette Xbox 20e anniversaires à Cultura. Et Metroid Dread a Carrefour. Hormis revendre mes DS et 3DS car le prix proposé était le même que chez easy cash, j'ai jamais acheté une seule chose dans le magasin de jeu vidéo.
yanissou noishe Ouais enfin ça dépend pour qui, parce qu'entre les employés et les scalpers qui était de mèche avec la direction, tu finissais avec de la merde même en étant parmi les premiers dans les magasins.
Et deuxièmement, pour Micromania c’est impossible de s’aligner face à la grande distribution etc…. (et je sais de quoi je parle j’y bosse actuellement dans une enseigne connu pour sa baguette à 29 centimes) pour la simple et bonne raison que le JV uniquement ne suffit plus et donc pas assez rentable (car oui faut payer les employés, les charges , le loyer , l’électricité etc…… hein !!!!!!) .
Voilà pourquoi Micromania élargi son offre hors JV (Goodies , figurines etc….)
Donc avant de dire des conneries abstiens toi pour le bien de tous
donc bon ....
Ils encaissent direct les préco contrairement à toutes les enseignes.
Certains jeux sont à 15, 20 voire 25€ plus chers.
Leurs opérations commerciales sont nul à chier au possible.
J'entends pas que du bon sur le personnel de Micromania (je ne généralise pas mais les salariés sont motivés à faire des choses très borderline notamment ce qu'il s'est passé récemment)
Fin bref. Micromania c'est juste bien pour les consoles à la limite vu que c'est le même prix et qu'ils ont du stock.
Certains membres de Gamekyo découvrent le monde de l’entreprise et du commerce……. Changez rien les gars restez dans votre monde de bisounours et de l’assistanat
-Triste pour les salariés
- Mais ils ne manqueront à personne.
Tu ne prendras rien du tout car visiblement tu ne comprends même pas comment fonctionne un marché.
D’accord Jean Michel Parisot.
Investir directement dans du développement jeu vidéo, avoir des exclus d'éditions physiques (à la manière de Limited Run et tant d'autres), se lancer dans l'édition de jv (pour mettre en avant nos indés francophones), etc. Il y aurait clairement de quoi faire...
Les éditeurs ont clairement le pouvoir dans les négociations et imposent leurs règles. C'est pas un milieu avec des négociations folles sur les prix d'achat surtout quand les éditeurs n'ont plus réellement besoin des distributeurs grâce à la démat.
Et faut pas se leurrer, les prix de ventes en GSA, c'est bon pour les clients, mais indécent pour le business. Ils veulent avec des marges très très faibles uniquement pour passer du volume. L'objectif c'est d'amener le chaland à consommer autre chose de margé dans le magasin, principalement la bouffe... Vous remarquez qu'en GSA, on trouve rarement des vendeurs au rayon JV.
Je ne m’attendais pas à une réflexion de ta part mais alors là, tu dépasses l’entendement.
Fondée en 1983 et devenue depuis l’une des marques fortes du jeu vidéo en France, l’enseigne spécialisée Micromania, rachetée en 2008 par le géant américain Gamestop, compte aujourd’hui 399 points de vente dans l’Hexagone. Un chiffre qui a notamment été atteint par le biais de fusions - avec Zing, spécialisée dans le merchandising, en 2017 - et d’acquisitions - la chaîne britannique GAME en 2013, alors qu’elle était placée en liquidation. Ce chiffre a toutefois tendance à décliner désormais : il y a tout juste cinq ans, l’entreprise comptait ainsi une trentaine de boutiques de plus qu’aujourd’hui. Le témoin d’une période plus difficile pour la firme.
Avec l’explosion du dématérialisé, la domination de plus en plus hégémonique d’Amazon sur la vente en ligne et la politique tarifaire agressive de la grande distribution, Micromania a dû trouver d’autres sources de revenus pour consolider son chiffre d'affaires et pérenniser son activité. Produits dérivés, extensions de garantie et même cours de perfectionnement en partenariat avec une école privée : on compte déjà de nombreuses tentatives de diversifications qui ont permis à la société de se maintenir au rang de filiale modèle dans le portfolio du groupe américain Gamestop.
Mais elles soulèvent également un certain nombre de questions sur ses pratiques commerciales, alors que la société prépare par ailleurs la fermeture de 47 nouveaux points de vente, un projet dont Gamekult a pu prendre connaissance dans le détail. L’occasion pour nous de revenir dans cette enquête sur la culture d’entreprise de la marque et sur les pratiques auxquelles se livrent certains de ses employés, sous la pression d’objectifs parfois difficiles à atteindre et d’une mise en compétition permanente.
Interrogée sur un certain nombre de sujets soulevés par nos témoins, notamment ceux liés aux pratiques commerciales, la direction de Micromania n’a souhaité répondre qu’aux questions portant sur la réduction de son parc de magasins et sur la mesure d’injonction. Leurs réponses ont été reproduites in extenso.
47 boutiques et 130 employés concernés
L'essor du dématérialisé scellera-t-il le sort des bonnes vieilles boutiques de jeux vidéo ? « Le digital est depuis quelques années devenu le canal majoritairement utilisé par les consommateurs pour leurs achats de jeux vidéo. 62% des transactions sont désormais réalisées en ligne, en hausse de 19% en 2020 par rapport à 2019. » Ce constat figure en introduction d’une communication interne adressée aux salariés de Micromania-Zing au mois d’octobre, que Gamekult a pu consulter. La direction y poursuit son état des lieux en ces termes : « Les ventes de jeux vidéo réalisées en physique (achats en magasins spécialisés, grande distribution, etc.) ne représentent aujourd’hui plus que 38% des transactions. Par comparaison, en 2013, la répartition était inversée : le software physique représentait 60 % du chiffre d’affaires alors que la vente dématérialisée de jeux vidéo représentait seulement 39 % des transactions. »
Micromania s’appuie ici sur le bilan du Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisirs de l’année 2020, mais en présente une lecture légèrement orientée : en effet, si la part des ventes de jeux physiques complets dans le chiffre d’affaires total du marché français représente bien 38% des transactions selon ce bilan, celle des ventes de jeux dématérialisés complets est de 36%, auxquelles viennent s’additionner les transactions de contenus dématérialisés (DLC, micro-transactions, abonnements, service à la demande, le tout sur consoles, PC et mobiles). Le chiffre d’affaires du marché total représentait ainsi 1152 millions d’euros, en progression de 9,5% par rapport à l’année précédente. Autrement dit, avec le développement d’offres et services dématérialisés, la taille du gâteau a augmenté, mais la vente de jeux complets en dématérialisé n’a pas autant ponctionné la part du physique que ce que Micromania sous-entend.
Les V-Bucks, clé de voûte de l'écosystème Fortnite, a bousculé en partie celui de Micromania.
Plusieurs de nos sources nous ont confirmé que certains produits dématérialisés phares ont bel et bien porté préjudice à l’enseigne. Fabien*, qui fut responsable adjoint d’une boutique dans un grand centre commercial durant de nombreuses années, nous en livre un exemple significatif : « Des jeux comme Fortnite ont fait du mal à la société » analyse-t-il. « Les gens se sont mis à acheter des V-Bucks, et ça n’était pas un phénomène éphémère. Donc ils ont commencé à vendre leurs jeux pour acheter du dématérialisé. Et là, t’es foutu. Parce que le prochain gros jeu qui sort, ils n’ont plus rien à vendre pour l’acheter. Et du coup ils n’ont vraiment plus aucun intérêt à venir. Et je peux te dire que les gamins ont fait vendre un paquet de jeux aux parents ou aux grands frères. Et ça nous a fait un afflux de jeux d’occasion, bénéfique dans un premier temps, mais malheureusement la pompe est désamorcée à ce moment-là, car les gens n’achètent plus de nouveautés mais des V-Bucks qu’ils ne peuvent évidemment pas revendre ensuite. Donc rapidement on s’est retrouvé avec une dégringolade du stock de jeux d’occasion récents. Et comme c’est beaucoup là-dessus que Micromania faisait de la marge, ça a fait très très mal à l’enseigne. Ensuite, comme les gens n'avaient plus rien à revendre, ils sont allés là où c'est le moins cher, et ce n'est pas Micromania. Et puis ça a poussé bon nombre de familles à mettre un moyen de paiement sur la console, souvent l'étape que les gens ne franchissent pas et qui les retient de basculer dans la conso démat’.»
Ainsi, pour s’assurer de meilleures chances de prospérité dans un marché de plus en plus concurrentiel et désincarné, l’enseigne entend accélérer les changements entrepris ces dernières années, et notamment le développement de la diversification de ses produits et de sa stratégie d’omnicanalité, consistant à homogénéiser l’expérience client sur tous ses canaux, en ligne et dans les boutiques physiques. Mais pas seulement : « En complément, notre entreprise doit rationaliser son parc de magasins afin de pouvoir concentrer ses investissements sur un périmètre plus réduit de points de vente, répondant mieux aux attentes des clients. Dans ce cadre, Micromania envisage de fermer l’année prochaine - en 2022, ndlr - 47 de ses 399 magasins, au sein desquels sont affectés 130 de nos 1400 collaborateurs (...) ». Un projet qui fait suite à une année 2021 difficile pour la société, dont le bilan fait état de plus de 11 millions d'euros de pertes, à rapporter aux 3,7 millions d'€ de bénéfice net enregistrés pour l'exercice 2020 qui fut, lui, encore dans le vert. Et un chiffre d'affaires qui s'est contracté en l'espace de quatre ans, passant de 636 millions d'euros pour 2018 à 368 millions d'euros en 2021.
Le produit dérivé, une source de revenue qui a permis à Micromania Zing de maintenir ses bénéfices.
Exclure le recours à des départs contraints
Les 130 employés de l'enseigne concernés par cette annonce se sont ainsi vu proposer une Rupture Conventionnelle Collective, autrement dit un dispositif de départ volontaire en dehors de tout motif économique. Un accord conclu avec les organisations syndicales, que nous avons pu consulter. Micromania y affirme sa volonté de ne pas contraindre ces départs : « Afin d'adapter le dimensionnement de son parc de magasins et d'atteindre l'organisation cible envisagée, Micromania a estimé préférable d'exclure le recours à des départs contraints en cohérence avec son ADN, sa politique sociale et le dialogue social existant au sein de la Société. » Concrètement, la décision de quitter la société appartient aux employés et ils pourront s’y maintenir s’ils le souhaitent en étant mutés dans d’autres boutiques si celle à laquelle ils étaient affectés devait fermer.
Pour l’heure, nous ignorons combien d’employés ont répondu favorablement à cet appel à candidature. La société espère en tout cas réduire son effectif par ce biais et ainsi être en mesure de fermer les 47 points de vente susmentionnés, après redéploiement éventuel d’un certain nombre d’employés dans des zones de réaffectation, précisant que « les fermetures de magasins envisagées ne pourraient être mises en oeuvre que sous réserve d'un nombre suffisant de volontaires ». Pour l’heure, il n’est donc pas question d’en passer par un licenciement pour motif économique. L’accord de Rupture Conventionnelle Collective précise que la société « s’engage à ne pas mettre en oeuvre de licenciement pour motif économique pendant la durée du présent accord [...] soit jusqu’au 30 juin 2022. »
Au-delà de cette date et dans le cas où l’appel à candidature n’a pas eu le succès escompté, Micromania-Zing envisagera-t-il cette fois un Plan de Sauvegarde de l’Emploi, autrement dit un licenciement économique ? Interrogée à ce sujet, la société nous a simplement réaffirmé sa volonté de ne pas recourir à un plan de licenciement : « Cet accord perçu favorablement par l’ensemble des collaborateurs concernés permet donc à l’entreprise d’adapter son parc de magasin sans recourir aux départs contraints. »
Une réponse aux évolutions du marché
Ce projet de fermetures est-il le signe d’une entreprise fragilisée par la conjoncture et dont les décisions stratégiques n’ont pas été couronnées du succès escompté ? La crise sanitaire est évidemment passée par là. Comme bon nombre d’enseignes dans des secteurs très divers, Micromania-Zing a encaissé de plein fouet les confinements successifs et leurs conséquences sur son activité. Pour pallier la fermeture de ses magasins, la marque a, durant cette période, concentré ses efforts sur son site de vente en ligne.
Ainsi, dans un mail interne datant d’avril 2020, la direction fait mention de cet infléchissement nécessaire de son organisation et détaille les mesures mises en oeuvre à cette fin : « Remontées de stocks de certains magasins vers le site Web (...) (plus de 1 500 consoles et près de 3 000 jeux !), maximisation de la performance du site Micromania.fr grâce à tous les efforts des équipes commerciales Web et de notre logistique, adaptation de nos systèmes informatiques pour pouvoir supporter davantage d’expéditions grâce à notre équipe informatique (...) » Mais cela n’a vraisemblablement pas suffi. La crise sanitaire aurait en effet eu un effet multiplicateur sur les difficultés rencontrées par la société, comme l’évoquait Laurent Bouchard, directeur général de Micromania-Zing, dans un autre mail interne datant du mois de juin 2020 : « Nos bons résultats depuis la réouverture de nos magasins ne doivent cependant pas nous éloigner des réalités économiques auxquelles nous étions déjà confrontés et que la crise du Covid n’a évidemment fait qu’accentuer », rappelait-il.
Un exemple de surface de vente, ici à Auxerre.
Pour Bertrand*, ancien responsable régional qui a récemment quitté la société après de nombreuses années d’activité, « ce projet de fermetures ne doit pas être analysé comme un échec de la part de Micromania ». Il s’agirait avant tout, nous dit-il, d’une contraction nécessaire sur un marché qui a énormément bougé depuis quelques années avec la part de plus en plus importante des achats en dématérialisé bien sûr, mais aussi Amazon et la grande distribution qui se sont taillés une place importante : « Or, Micromania a ouvert énormément de magasins depuis l’époque de la Wii et puis il y a eu la fermeture de GAME à la suite de laquelle Micromania s’est positionné sur 44 boutiques supplémentaires. On est arrivé à un moment où il y avait beaucoup de magasins Micromania, avec des ouvertures et rachats opportunistes - au bon sens du terme - et l’enseigne s’est retrouvée avec trop de magasins compte tenu des évolutions du marché de la distribution. » Il poursuit : « C’était inévitable. J’ai moi-même fait des fermetures de magasins et c’était souvent des boutiques situées dans des centres commerciaux morts de chez morts. La déprime la plus totale. Je me souviens d’un centre commercial en particulier, à chaque fois que j’y allais, j’avais toute ma bonne humeur qui s’en allait, c’était atroce. Donc il y a toujours eu des fermetures stratégiques. ».
Selon Bertrand*, le diagnostic formulé par Micromania dans la communication interne que nous avons pu consulter serait donc conforme à la réalité du marché. Un marché qui se porte bien - ventes physiques comprises, puisque le recul du chiffre de vente en valeur sur 2021 n’a été que de sept points par rapport à l’année précédente selon le dernier panel GSD, 2020 ayant été une année exceptionnelle. Mais les acteurs sont plus nombreux, les modes de consommation ont changé et ça, Micromania-Zing a cherché de longue date à l’anticiper. L’arrivée des premiers produits dérivés en boutique entre 2012 et 2013 puis la fusion entre Micromania et Zing - filiale spécialisée dans ce type de produits appartenant elle aussi à GameStop - en 2017 allaient déjà dans le sens d’une consolidation du chiffre d’affaires et se sont révélées des stratégies payantes : « Zing marchait super bien en Australie. C’est EB Games - une autre filiale de GameStop, ndlr - qui avait lancé ça, et ça cartonnait. Le groupe Gamestop a donc décidé de généraliser ça. Au début chez Micromania ça n’était pas une grosse part de l’offre mais c'était dès le départ amené à se développer : ça n’était pas un petit test, il fallait juste que ça se fasse progressivement », fait remarquer Bertrand*.
L’enseigne s’est retrouvée avec trop de magasins compte tenu des évolutions du marché de la distribution.
Bertrand*, ancien responsable régional de l'enseigne.
En plus de diversifier l’activité de l’enseigne, le produit dérivé présentait d’autres avantages : ceux de la rentabilité et de l’optimisation de la surface de vente : « Ce que j’ai constaté en magasin, c’est qu’on avait des linéaires qui auraient pu être du remplissage sur certains supports qui n’avaient plus d’actualité », se remémore Bertrand*. « Du coup le produit dérivé a apporté quelque chose en plus et ne l’a pas fait au détriment du reste. Ça a amené une nouvelle clientèle, qui pouvait aussi découvrir ce que Micromania était par ailleurs. Et puis la marge directe était évidemment plus intéressante que sur le jeu vidéo traditionnel. » Interrogé sur cette dernière affirmation, Bertrand* n’a malheureusement pas pu nous éclairer, et pour cause : la direction ne communiquait pas ce genre d’informations aux responsables régionaux, qui ne recevaient de sa part que des objectifs de chiffre d’affaires à réaliser.
Loots, services et abonnements
Mais les loots, comme les appellent les employés de la société, ne font pas tout et Micromania-Zing a eu recours à d’autres types de produits pour maintenir son chiffre d'affaires : les services. « Sans ces services, le déclin aurait été beaucoup plus important et tu aurais eu des fermetures de magasins, des licenciements et autres », analyse d’ailleurs Mathias*, ancien responsable de magasin qui a quitté la société il y a trois ans. C’est justement la commercialisation de certains de ces services qui a récemment été épinglée par la direction départementale de la protection des populations, dont nous reproduisons ici le communiqué décrivant la mesure d'injonction administrative adressée à la société.
Ces services sont de différente nature. Il y a d’abord, comme mentionné dans le communiqué, les « extensions de garantie » sur les consoles. Pour 45 euros de plus lors de l’achat d’une machine, le client peut ainsi bénéficier d’une garantie supplémentaire de deux ans, mais celle-ci n’est pas un prolongement de celle du constructeur, comme pourrait le laisser supposer son appellation. Mathias* nous l’explique : « Je me suis toujours battu contre ça, sans jamais obtenir gain de cause : ton extension de garantie n’est utilisable qu’une fois. Alors que selon la loi il ne doit pas y avoir une limite d’utilisation. Et comme ce service est improprement présenté comme une extension de garantie fabricant, tu ne devrais pas pouvoir te permettre de le restreindre à une utilisation unique. »
Une garantie ne fonctionnant qu’une seule fois, comme une sorte de joker en cas de pépin ? Bastien*, un autre ancien responsable de magasin, nous précise son fonctionnement : « C’est un échange à neuf qui est fait : le client a un avoir de la valeur de la console neuve de l’époque, qu’on lui déduit sur une nouvelle console. Et du coup, c’était l’occasion pour nous de revendre une garantie sur celle-ci ! Puisqu’on disait : “On ne va pas vous expliquer à vous que ça vaut le coup quand même ?” Si le client le souhaitait, avec une petite manipulation informatique, on faisait une reprise puis une revente de la console avec une garantie, sur la même transaction. Je crois que c’était complètement interdit de faire ça. On le faisait parce que ça nous permettait d’avoir une garantie de plus que le nombre de consoles que t’as vendu. Du coup, on aimait bien ça, les échanges garantis SPB, parce que systématiquement on claquait une nouvelle garantie derrière. »
SPB est le prestataire de service - un courtier en assurance en réalité - auquel Micromania a recours pour commercialiser cette assurance. Et ça, jusqu’à présent, le client n’en était pas toujours bien informé, comme l’épingle le communiqué de la Direction départementale des populations. Dylan*, ancien vendeur, nous explique que ce manque d’information peut jouer en défaveur du client : « SPB est un courtier en assurances. Donc tout ce qu’ils pourront trouver pour ne pas faire jouer l’assurance est bon à prendre (...) Le fait que ce soit une société externe qui gère l’assurance sans que ce soit dit alors qu’elle a tout intérêt à ne pas remplacer la console, si tu le sais avant, ça peut te dissuader. »
Pour parer à toute mauvaise surprise pour le client, certains, comme Fabien*, prennent tout de même les devants en faisant preuve de beaucoup de pédagogie : « Nous on savait exactement ce que le prestataire - SPB, ndlr - voulait entendre. Donc on avait fait un petit pense-bête imprimé qu’on donnait au client, avec ce qu’il fallait dire et ne pas dire pour être sûr de faire fonctionner sa garantie. Du coup, dans ces conditions, ça marchait bien et surtout on accompagnait le client, lors de ses démarches avec SPB, et on expliquait au moment de la vente comment cela se passait en cas d’échange. » Dans la boutique de Mathias*, le défaut d’information auprès du client tenait plus à un manque de temps qu’à une volonté de dissimulation : « Imagine-toi que, quand t’es en train de faire ton travail en magasin et que t’as une file d’attente, ou que tu es en rayon, que c’est Noël, tu peux pas non plus passer du temps avec chaque client pour lui expliquer que c’est une souscription auprès d’un assureur tiers, même si c’est nous qui serons son interlocuteur. »
Petites astuces et gros objectifs
Un visuel de promotion pour l'assurance "Jeux Indestructibles".
La raison pour laquelle les opérations dont nous parlait Bastien* sont si prisées, c’est que chaque magasin est évalué en fonction d'objectifs à remplir, notamment sur la commercialisation de ce type de services. « Depuis le rachat par Gamestop, Micromania a des comptes à rendre », nous explique Mathias*. « Il fut un temps où on nous laissait tranquille en France parce que ça tournait bien. La branche française était celle qui rapportait le plus sur tout le continent européen. D’autant plus que notre ancien DG de Micromania France était devenu DG de Gamestop Europe. Donc il nous avait à la bonne : son objectif était de répliquer le succès français dans les autres filiales européennes. Mais quand il est parti pour des problèmes de santé, on a senti la différence. » Et la différence, ce sont des objectifs toujours plus ambitieux et une pression de plus en plus importante sur les équipes, comme nous l’explique Fabien* qui a vécu l’arrivée des extensions de garanties et autres services à cette époque : « Avant 2007 - à peu près - tu n’avais pas d’indicateur, si ce n’est le chiffre d’affaires. T’étais encore dans le magasin de jeux vidéo à l’ancienne. Puis sont arrivées les extensions de garantie, en 2007 ou 2008. Et à l’époque, si tu faisais 20 ou 25% d’attachement, t’étais largement dans les clous. Et quand je suis parti, si t'étais sous les 60 ou 65%, t’étais nul. C’était aberrant. ».
Arrivé bien après au sein de la société, Dylan*, qui a travaillé dans huit magasins différents, a quant à lui toujours connu des objectifs assez élevés, établis selon la moyenne des boutiques du réseau : « Dans tous les magasins sur lesquels j’ai été affecté, on avait les mêmes quotas à remplir : 60% de taux d’attachement d’extensions de garantie sur les consoles, 30% sur la garantie “Jeux Indestructibles”, 50% de garantie accessoire. La pression était différente selon les responsables régionaux. Mais elle est compréhensible dans la mesure où il s’agit d’une des plus grosses sources de revenus de Micromania avec l’occasion.» Et ces fameux objectifs, mieux vaut s’y conformer, sous peine de remontrances : « Forcément, t’étais obligé de rentrer dans le moule si tu voulais éviter d’avoir ton responsable régional tous les jours dans ton magasin et d’avoir la pression », nous fait remarquer Mathias*. « Comme t’as les statistiques qui tombent tout le temps, quand t’es dans le rouge, ça fait mal au tronc (sic). Quand t’es en réunion de zone et que c’est toi qui prend tout du long parce que ton magasin est pas dans le vert comme les autres, bah derrière, t’es un peu plus sur le dos de tes collègues et ils le vivent moins bien… et il arrive un moment où ça vient. »
Ce qui vient, ce sont justement ces manoeuvres discrètes au sein des points de vente pour booster les statistiques et qui concernent tous les services commercialisés : extensions de garantie bien sûr, mais aussi assurance “Jeux Indestructibles” ; un jeu endommagé ou cassé remplacé pour un ou trois euros supplémentaires en fonction du prix. Sans oublier d’autres services comme des abonnements à la plateforme de streaming d’anime ADN, d’autres au magazine Game Informer - racheté par GameStop - ou encore des cartes prépayées pour profiter des cours en ligne de la Gaming School, un programme de coaching pour progresser sur certains jeux populaires, monté en partenariat avec le réseau d’écoles Gaming Campus et abandonné depuis. Et ces objectifs s'additionnent à ceux sur le chiffre d’affaires ou le nombre de précommandes, comme nous l’explique Albin*, qui officia en tant que responsable de magasin durant quatre ans : « On parle d’une enseigne où la tradition c’était de réserver des jeux pour tes oncles et tes tantes, ne serait-ce que pour remplir ton quota de réservation. Quand t’avais le nouveau jeu du moment qui sortait, d’un coup ton magasin c’était la mairie de Paris, les morts se mettaient à voter. ».
Prenons l’assurance “Jeux Indestructibles”, commercialisée en propre par Micromania-Zing. Un service qui peut se révéler très utile pour certains foyers, comme nous l’explique Mathias* : « Moi j’ai déjà vu un père de famille revenir en magasin avec une pile de vingt-deux jeux tout rayés parce que son nourrisson avait fait du patin à glace avec. Lui je peux te dire que la garantie "Jeux Indestructibles", il la prenait en permanence. » Toutefois, tous les clients n’ont pas des nourrissons patineurs et l’objectif pour un magasin était d’atteindre un taux d’attache de 30%, autrement dit trois jeux sur dix devaient être vendus avec cette garantie anti-casse. Pas toujours évident d’atteindre un tel niveau. Tout du moins avec la régularité attendue par la direction : « En fait, les objectifs ne sont pas tout le temps irréalistes. 30% de garantie Jeux Indestructibles, ça peut se faire et même sans mentir au client. Certains magasins y arrivaient. Et c’est ce qu’on nous rétorquait quand on leur disait que ces objectifs n'étaient pas forcément atteignables tout le temps », se souvient Dylan*.
Albin* pointe lui aussi un manque de considération du contexte dans lequel se trouvait son magasin par rapport à d’autres, voire vis à vis de son propre historique : « On recevait des mails plusieurs fois par jour quand les indicateurs n’étaient pas bons. Tu as beau leur expliquer les raisons, ça ne change rien. Par exemple, les objectifs de chiffre d'affaires étaient souvent établis par rapport à l’année précédente. Donc, imagine cette année-là tu avais pu compter sur une grosse sortie et là t’es sans rien, tu peux pas lutter. Mais ils te mettent quand même face à ça. » Il poursuit : « Ce qui me gonflait et qui était vraiment frustrant, c’est qu’on ne m’a jamais expliqué le pourquoi de ces objectifs-là. Je suis pas plus con qu’un autre, je sais comment fonctionne une entreprise et donc je demandais à mon chef de me communiquer les chiffres sur le loyer, les salaires, le chiffre d’affaires à réaliser, etc. Et ces infos on n’a jamais voulu me les donner. Donc on te donne des objectifs sans te dire pourquoi tu dois les atteindre. »
T’as mille et une façons de gonfler ton chiffre et tes statistiques. Quand t’annonces un prix et que la personne est contente… Eh bien elle est contente, voilà tout.
Mathias*, ancien responsable de magasin.
Officiellement, les vendeurs sont tenus de satisfaire à ces exigences en mettant en pratique les bonnes techniques de vente, comme nous l’explique Bastien* : « La vraie technique de vente qu’on nous a inculquée, c’est celle du vendeur de bagnoles qui te claque les tapis de sol ou le kit d’entretien en option. A savoir, proposer la chose de manière plus ou moins affirmative : “On protège le disque ? Comme ça au moindre souci vous repassez et on vous en redonne un”. Le fait de le dire vite, dans le feu de l’action, généralement le client dit oui. Donc t’as déjà cette manière pour avoir des résultats sans tricher. » Mais quand la boutique a besoin d’un petit coup de boost, d’autres méthodes moins avouables peuvent être employées.
Un linéaire de produits dérivés.
Albin*, qui participait à la cellule audit de l’enseigne et se déplaçait donc fréquemment dans d’autres magasins que le sien, se souvient l’avoir observé : « J’ai vu des gérants de petits magasins qui ont paniqué et qui se sont mis à faire des grosses conneries qui, légalement, les auraient foutus dans la merde, tout ça pour atteindre leurs seuils d’extensions de garantie par exemple. ». De quoi parle-t-on exactement ? « Pour faire toujours plus, eh bien tu trouves des combines », nous répond Mathias*. « Quand quelqu’un vient pour une reprise de quinze jeux pour racheter derrière, bah tu inclus la garantie Jeux Indestructibles dedans. T’as mille et une façons de gonfler ton chiffre et tes statistiques. Quand t’annonces un prix et que la personne est contente… Eh bien elle est contente, voilà tout. »
Bastien* nous explique plus précisément comment il procédait : « Par exemple, quelqu’un qui vient en caisse te demander si t’as tel jeu, tu regardes dans ta base de données et tu vois que tu l’as à 14,99 euros sauf que tu réponds : “Oui il est disponible à 15,99”. Là, tu le récupères dans ta réserve ou dans le bac en retirant le prix affiché avant de l’amener. (...) Mais t’as des pratiques encore plus fourbes et interdites par la loi, comme des jeux boostés dans les bacs d’occasion, c’est à dire que le prix du jeu n’est directement pas le bon dans le bac. Ou un jeu très bien mis en avant sur le devant du bac avec le +1 ou le +3 euros, devant d’autres exemplaires auxquels ils n’ont pas été ajoutés. Quand tu veux être clean, tu le précises sur la jaquette. Mais dans la réalité, ça se fait souvent comme ça. »
Un exemple d'accessoire auquel a été ajouté le prix de la garantie.
Au cours de notre entretien, Bastien* a multiplié les exemples de ce genre. Et ces pratiques pour booster les statistiques de son point de vente et se hisser parmi les meilleures boutiques du réseau étaient parfois d’une sophistication qui laisse pantois. Cet autre exemple en est une parfaite illustration : « Là, on entre dans l’orfèvrerie. Disons que le client a 300 euros d’avoir en faisant jouer son extension de garantie. En soi, il peut les dépenser sur ce qu’il veut. Mais ça, on ne le lui dit pas évidemment. On lui dit juste que c’est un échange à neuf de la console. Or, parfois tu as des opérations promotionnelles du type une manette et/ou des jeux offerts en plus d’une console achetée par exemple. Donc, si une opération de ce genre était en cours quand la personne venait pour son échange - attention, accroche toi - on faisait l’échange en passant cette opération promo, sauf qu’on ne filait que la console et on gardait la manette ou les jeux de côté. Et ces jeux ou cette manette, neufs mais invendables en tant que produit neufs, on les réintégrait dans notre stock d’occasion en les rachetant sur une fausse carte client. Donc ça générait un avoir pour ce faux client et sur cet avoir artificiel, on vendait des codes pour Gaming School ou de l’abonnement Game Informer par exemple, ce qui nous permettait de booster nos statistiques sur tout ça. Et en plus ça nous rentrait du stock d’occasion dans une condition neuve ! Donc c’était ensuite très facile de revendre la manette neuve au prix de l’occasion en incluant la garantie ou les jeux avec l’assurance “Jeux Indestructibles” en disant au client : “Vous avez du neuf au prix de l’occasion et mieux garanti en plus, belle affaire non ?” »
Bastien* nous a d’ailleurs confié que cette pratique était une trouvaille de son invention pour répondre aux exigences commerciales, telles que formulées par son responsable régional. Il nous a d’ailleurs permis de consulter l’un des mails de mécontentement envoyé par ce dernier aux boutiques de sa région : « Votre zone est quasiment entièrement rouge sur les services. Avec des taux inadmissibles pour certains magasins sur certains items. Grosse réaction attendue sur la fin de semaine », leur est-il ainsi demandé. Mais la boutique sous sa responsabilité caracolait en tête du classement : « Voilà comment on se retrouvait dans les meilleurs magasins du réseau avec ce genre d’entourloupes », nous dit-il. « Je pense que si des vendeurs de Micromania lisent ton article, ils vont halluciner et se dire “ah c’est comme ça qu’ils faisaient pour être dans le Top ?” Peut-être même que Micromania va apprendre des choses qu’ils ne soupçonnaient pas. ».
De son côté, Fabien* avait mis au point une méthode qui, elle, était davantage au bénéfice du client qu’à celui de l’enseigne : « On avait mis en place une technique pour réagir à l’augmentation de la triche et à cette course en avant déraisonnée. Mais on ne voulait pas arnaquer nos clients, parce qu’on avait surtout une clientèle d’habitués : des mamans, des papas, des gamins qu’on a vu grandir. Du coup on a monté une caisse noire. La consigne, c’était que cette caisse était là pour gonfler les statistiques, pas pour se faire un p’tit billet au passage. Donc, par exemple, quand on reprenait un jeu dont on savait qu’il allait être revendu dans la journée, on sortait l’argent de la caisse - officielle, ndlr - pour le racheter disons 35 euros mais sans le rentrer dans le stock ; puis on le revendait, mettons 59 euros ; on mettait les 24 euros de bénéfice dans une petite boîte, et dans la journée ça nous permettait d’offrir 7 ou 8 fois la garantie “Jeu Indestructible” à des clients. Du coup eux ne payaient rien et c’est Micromania qui payait sur sa marge sans le savoir. ». Mais même avec ce genre d’astuces, Fabien* nous confesse qu’il pouvait être difficile de talonner d’autres points de vente moins scrupuleux : « Ça marchait pas mal, mais bon on avait pas l’Action Replay comme certains quoi, on n’était pas à 100% sur toutes les statistiques. »
Les paroles et les actes
Le service "Gaming School", lancé à l'initiative de Thierry Debarnot, PDG de Gaming Campus, et Laurent Bouchard, PDG de Micromania.
De l’avis de plusieurs de nos sources, ce système de caisse noire était relativement courant. Et les pratiques consistant à associer un service ou un abonnement à un produit seraient toujours en vigueur dans un certain nombre de boutiques du réseau et pas seulement sur les services de garanties, comme nous l’explique une nouvelle fois Bastien* : « Il y a aussi eu ADN, le service de streaming d’anime. Ils nous demandaient des taux de rendement terribles sur les ventes de ces trucs-là », se remémore-t-il. « Et donc on se retrouvait à faire des packages dissimulés : on prenait un Funko Pop un peu rare, un peu recherché, et on boostait le prix du montant de l’abonnement mensuel à ADN - 6,99 euros, ndlr - et ça te montait le Funko Pop à 22 euros au lieu de 15 tu vois. Le tout en écrivant : “Abonnement ADN pour un mois inclus”. Ca c’est une belle entourloupe qui se fait encore je crois, notamment pour les protections de Funko Pop qui sont ajoutées au prix de la figurine. »
Tout le monde savait. On te tapait sur les doigts quand on te prenait la main dans le sac, mais à côté de ça, on te félicitait quand tu avais de belles statistiques.
Mathias*, ancien responsable de magasin.
Il poursuit : « Ce sont des petites mesquineries qui vont parfaitement à l’encontre de l’intérêt du consommateur, mais qui vont dans le sens des objectifs à réaliser pour être dans le vert. Et si tu ne le fais pas, on va te demander pourquoi tu n’y arrives pas alors que les autres si. » Enfin, Bastien* évoque également la Gaming School, cette offre de cours en ligne sur des jeux populaires et commercialisée sous la forme de différents forfaits, donnant accès à des ressources plus ou moins importantes : « La Gaming School fonctionnait exactement comme les abonnements ADN ou Digital Game Informer : on les foutait dans des bundles, les codes n’étaient jamais activés. Les clients auxquels on arrivait à les vendre en toute transparence étaient souvent déçus parce qu’ils y trouvaient exactement la même chose que sur YouTube. Donc ça n’a pas fonctionné et ils ont arrêté parce que c’était pourri. Mais comme pour tout lancement de service, la pression sur la vente de la Gaming School a été forte. »
« Si tu motives tes vendeurs de façon bête et méchante, tu peux évidemment pousser à des combines », réagit Bertrand*, ancien responsable régional, quand nous lui parlons de ces pratiques. « Pour moi, c’était pas tant lié à Micromania qu’au fait qu’on travaille avec le facteur humain : si tu pousses une personne de façon déraisonnable, elle va se donner tous les moyens - y compris mauvais - pour y arriver. » Il poursuit : « Je savais qu’il y avait des équipes ou des vendeurs qui en avaient marre d’avoir une pression monstrueuse de la part de leurs managers pas très habiles. Après, ça peut aussi venir d’un vendeur qui n’a pas envie qu’on l’embête et qui choisit la facilité. Mais, honnêtement, je pense que ça venait plutôt du manager qui mettait une pression débile. Cela dit, c’était quand même vraiment quelque chose de surveillé, avec un service d’audit qui nous remontait des alertes si les taux étaient anormalement élevés. » Interrogé sur ce système d’alerte, Fabien* tempère : « Oui, ils ont des alertes sur les comportements abusifs. Et puis quoi ? Ils vont voir le mec et lui dire : “ouais, ralentis un peu parce que ça se voit”. Et puis c’est tout. En fait, c'est un comportement qui est encouragé en silence et blâmé à demi-mots sauf si un client porte plainte. »
Les forfaits "Gaming School" vendus en boutiques.
Mathias* nous apporte quant à lui une réponse un peu plus nuancée : « Évidemment, ça n'est pas Micromania qui te l’impose, au contraire. Leur discours, c’est qu’il est interdit de faire ça. J’avais un responsable de région qui n’était évidemment pas dupe de la réalité des choses mais qui n’avait pas de preuve que ça se pratiquait. Mais tout le monde savait. On te tapait sur les doigts quand on te prenait la main dans le sac, mais à côté de ça, on te félicitait quand tu avais de belles statistiques. »
Si, selon Dylan*, la direction n’a jamais encouragé ce genre de pratiques et les condamnait même régulièrement dans des communications internes, il dénonce un discours ambigu et prend pour exemple le Pack du Gamer, une offre proposée par toutes les boutiques et qui donnait à ses yeux le mauvais exemple : « C’est un pack qui se présente comme ça : la PS4 + une manette + un jeu au choix + un abonnement + toutes les garanties, pour un certain montant payé en quatre fois, affiché à 150 euros par mois. Comme ça tu peux te dire que c’est intéressant. Sauf que déjà le paiement en quatre fois peut être fait sur n’importe quel achat qui dépasse les 100 euros et en plus t’as pas de réduction sur le prix du pack. En fait, c’est juste pour faire une grosse vente qui maximise les statistiques, il n’y a pas de promo alors que la manière dont c’est affiché peut te laisser penser le contraire. » Et dans ce pack, l’enseigne cherchait elle-même à inclure des offres sur lesquelles les objectifs étaient importants, comme par exemple l’abonnement au magazine Game Informer, ainsi que nous l’explique Mathias* : « Dedans, ils ont commencé à intégrer l’abonnement à Game Informer, parce que le groupe avait racheté ce magazine et il fallait absolument faire de la statistique dessus parce que ça avait coûté de l’argent à l’entreprise. Et ça, c’est quinze euros de plus à l’année. »
Fabien* se souvient quant à lui de la naissance de cette offre et de sa généralisation dans tous les points de vente du réseau : « Le “Pack du Gamer” a été inventé par le responsable d’un magasin qui jouait pour les statistiques. Un type qui est rentré assez jeune dans la boîte et qui a été nourri à la stat’. Ce fameux “Pack du Gamer”, il l’avait fait de sa propre initiative et avec les dents qui rayent le parquet : l’idée c’était de refourguer tout ce qu’il était possible de refourguer, dans une offre payée en quatre fois. Et il s’est fait un peu taper dessus à l’époque parce que c’était pas tout à fait légal de ne pas décomposer l’offre. D’ailleurs les ventes groupées c’est toujours un peu tendancieux. Mais bon, la direction s’en est quand même inspirée et a fait de la PLV pour tous les magasins. De mon point de vue, c’était une offre un peu malhonnête : t’achètes quand même un pack de services dont la moitié ne te sert pas. Mais tout de même légal parce qu’ils inscrivent en tout petit ce qu’ils mettent dedans. »
Mais il n’y pas que le Pack du Gamer qui montre le mauvais exemple. Nous avons pu consulter un échange de messages entre un responsable régional et les responsables de magasins de son secteur, où le premier conseille aux seconds : « Afin de performer au maximum, voici une petite astuce qui fait ses preuves sur un magasin du Top 30 du réseau : vérifiez si le client a un bon d’achat de 10 euros, ne lui dites pas tout de suite et validez la vente du jeu. Après l’encaissement, dites-lui que vous venez de vous apercevoir qu’il a un bon d’achat et proposez-lui la conversion sur un autre produit. Cela évite notamment l’effet d'aubaine du client qui l’utilisera uniquement sur son jeu. » Ce genre de comportement de la part du personnel encadrant est-elle monnaie courante ? Impossible à dire. S’il n’en a jamais fait l’expérience, Bertrand* n’est toutefois pas surpris de l’apprendre : « Il y a eu pendant un moment - et peut-être encore maintenant - un tel culte de l’objectif, que je ne suis pas surpris qu’il y ait eu des managers qui aient voulu être plus efficaces. Mais encore une fois, Micromania a toujours mis en avant le fait qu’il fallait être réglo. »
Le coût de la tranquilité
Les bacs d'occasion permettent de dégager davantage de marge qu'un jeu neuf lors de la revente.
En dehors d’acheter sa tranquillité, l’accomplissement de ces objectifs a-t-il un intérêt pécuniaire pour les employés de l’enseigne ? Eh bien pas vraiment si l’on en croit nos sources, ou, du moins, dans des proportions assez dérisoires : « On nous donnait des objectifs sur tous ces trucs-là mais il n’y avait pas vraiment de contrepartie pour nous derrière », déplore Bastien*. Dans la région à laquelle était affecté Dylan*, la situation semblait un peu plus enviable, bien que les modalités d’obtention de la prime présentaient selon lui un effet pervers : « On avait une prime trimestrielle en fonction des magasins qui faisaient les meilleurs résultats. C’était un classement par rapport aux meilleurs magasins de la zone. Il ne fallait donc pas seulement remplir tes objectifs, il fallait en plus être meilleur que les autres. Ça entraîne une concurrence un peu malsaine. ».
Fabien quant à lui nous explique un peu plus précisément comment fonctionne cette prime trimestrielle : « En réalité, il n'y avait pas qu’une seule prime. D’abord, tu en as une indexée sur le chiffre d’affaires sur le neuf, hors console. Ça, tout le monde y a droit et c’est un tout petit pourcentage. La moitié de cette somme va au responsable, en brut. L’autre moitié est partagée entre les autres employés du magasin. Ensuite tu as la prime trimestrielle : c’est l’addition des trois dernières mensuelles, pondérée par un indicateur de 0,6 au maximum. Cette prime-là, elle revenait aux boutiques qui remplissaient leurs objectifs et qui étaient dans le vert. Quant à cette histoire de prime pour les trois premiers, elle était de 100 euros pour les responsables et 50 euros pour les vendeurs - elle a été légèrement majorée récemment - et elle était indexée sur certains indicateurs clés, comme la vente d’abonnements par exemple. »
Il ne fallait donc pas seulement remplir tes objectifs, il fallait en plus être meilleur que les autres. Ça entraîne une concurrence un peu malsaine.
Dylan*, ancien vendeur de l'enseigne.
Selon nos témoins, la pression commerciale mise sur les équipes les contraindrait à une certaine ambivalence. D’un côté, la chaîne ferait la promotion d’une offre comme le Pack du Gamer, consistant à glisser des services dans un pack sans la moindre promotion afin de maximiser les statistiques, tout en interdisant à ses boutiques de faire de même de leur propre initiative. Et de l’autre, elle attendrait de ces mêmes boutiques qu’elles remplissent des objectifs parfois difficiles à atteindre. Ce qui ne va pas sans poser problème. Pour Mathias*, « le souci de Micromania, ce sont aussi ses employés. T’essaies de jouer le jeu en faisant les choses bien et puis quand tu vois que d’autres magasins sont numéro un devant tout le monde parce que ça triche et qu’à cause de ça, toi et tes gars touchez moins… » Il développe : « Quand je dis que le souci de Micromania c’est aussi les salariés, c’est parce que si tu avais un front commun qui s’accordait à dire à la direction qu’il n’est pas possible de surperformer sur certaines choses comme les extensions de garantie parce que les clients en ont marre de toujours payer pour payer, peut-être qu’ils auraient revu les objectifs à la baisse. Mais comme t’en as qui n’ont pas de scrupules - et ça c’est malheureusement l’image de la société - t’auras des mecs qui cartonnent et on va te demander de faire pareil. »
Un constat que partage Fabien* qui, au fil des années, a vu la moyenne des objectifs sans cesse augmenter : « Au début, on était premier avec 26% de taux d’attachement sur la garantie “Jeux Indestructibles”. Et puis soudainement, t’as un autre magasin, à la sortie du dernier FIFA, qui vend 103 jeux et 98% d’attachement ! Faut pas nous prendre pour des cons (sic). Donc forcément, tout le monde s’est mis un peu à faire ça, le taux à viser est passé à 40%, puis 45% et même 50%. »
Pour Bertrand, ancien responsable régional, le phénomène ne devrait toutefois pas être surestimé : « Évidemment, si tu te retrouves avec une part suffisamment importante de gens qui trichent pour que la moyenne du réseau soit faussée, quelqu’un qui ne triche pas aura du mal. Mais, de mon expérience personnelle, je n’ai jamais vu ces pratiques de façon généralisée. » Difficile de dresser un bilan comptable des responsabilités dans les pratiques que nous ont rapportées nos témoins. Mais une chose est sûre : ce culte du chiffre dont nous parlait Bertrand, et cette mise en compétition des boutiques entre elles sur fond de survie commerciale, semblent porter en elles le germe de toutes ces dérives.
fretide Oui enfin la PS5 c'est la loterie pour l'avoir tu as eu de la chance chez micromania quand beaucoup les ont detesté pour leurs rezas PS5 beaucoup plus longue que prévues...
nosphor68 Clairement le modèle micromania n'est plus rentable, ils vont devoir évoluer, je m'entends bien avec ceux de ma galerie, ils ont tous déjà trouvé autre chose heureusement (Qui font parti des mags a fermer) Je bosse au jeux vidéo a Auchan et c'est dur pour eux comme concurrence...
Et oui les responsables micromania sont insupportables j'y ai bossé avant Auchan mentalité opposé niveau management...
A dans 1 mois
J'avais acheté FF XII sur PS4 à 10€ en édition limitée steelbook. J'ai sauté sur l'occasion d'autant qu'il était dans son emballage.
Malheureusement, je ne me suis pas méfié et je ne l'ai ouvert que bien plus tard. Résultat : aucun dvd à l'intérieur.
Donc, j'ai payé 10€ pour un boitier en métal, certes très joli mais pas de jeu. Et maintenant que j'y songe, je n'ai même pas eu le steelbook avec.
L'article nuance aussi les fermetures. Visiblement, Micromania a récupéré pas mal de magasins Game lors de la fermeture de l'enseigne.
Les petits témoignages à gauche à droite sont plaisants à lire.
Certains points me rappellent une vidéo de bibi300 sur le sujet :
le pack du gamer, les triches pour gonfler les stats des magasins...