Hello!
Notre dossier du jour est consacré aux advergames : les jeux publicitaires! De petits softs gratuits à de véritables jeux payant; du jeu arcade dans les bars, à la mascotte de CoolSpot en ou passant par les concerts de Fortnitre, retour sur un phénomène qui a toujours existé dans le jeu vidéo, et qui a une histoire riche en rebondissement!
Dossier réalisé par @blondexgf : un grand merci à lui!
Comme d'hab' je mets, le début du dossier, la suite est à lire sur le site source.
Si vous voulez y aller directement :
http://www.gameforever.fr/advergames.php
Où que vous alliez, la publicité est partout, vous entoure, vous accompagne et entre dans vos têtes pour ne plus en sortir. Et c’est pour échapper à cette oppression que vous êtes venus ici, sur Game Forever, un site sans publicités ! Enfin, c’est ce que vous croyiez, car la pub est vraiment partout et se cache parfois sournoisement dans vos jeux vidéo.
Les Advergames (advertising games, jeux publicitaires), c’est le concept de la campagne marketing poussée à un niveau plus élevé que l’affichage ou le placement de produit : vous jouez à un jeu qui a été pensé et conçu dans le but de faire connaître un produit, et plus généralement une marque, ou de contribuer à lui donner une image positive. On pourrait porter très loin cette logique, mais un jeu destiné à promouvoir un film ou un artiste est-il un advergame ? Eh bien moi, je vous répondrai, Madame, Monsieur, qu’en France, pays de l’exception culturelle, la culture n’est pas un produit de consommation comme les autres ! Même si, en vérité, la frontière est tout de même plus floue.
Alors, vous restera-t-il assez de temps de cerveau disponible pour lire cet article ?
> La gratuité, essence de l’advergame
Par nature, un advergame doit être gratuit, car la publicité a déjà financé ce à quoi vous jouez, en échange de votre attention. Et les origines de l’advergaming sont à chercher bien avant le jeu vidéo : dans un journal, une page de mots-croisés sponsorisée par une marque et avec quelques devinettes cachées (en 8 lettres : "épaisseur triple, pour un toucher plus doux"), c’est évidemment un jeu publicitaire.
Marque mise en avant, charte graphique étudiée, concept de puzzle game repris d’un jeu existant (Puzzle Fighter II)… Trident White Puzzle Smash est typique des advergames, aujourd’hui hors ligne et sauvegardé "miraculeusement" sur un site de jeux gratuits
Pour ce type de jeux, le paramètre principal reste avant tout la visée publicitaire ; le gameplay n’est qu’accessoire, même s’il est tout de même préférable de proposer un jeu jouable ! La "direction artistique" aurait quant à elle vocation à s’inscrire dans le plan marketing global de la marque ou de la campagne publicitaire en cours, à respecter certains codes graphiques et un état d’esprit. Les innovations de gameplay ne sont donc absolument pas une priorité, et le moyen le plus simple pour vendre une marque ou un produit reste encore de s’appuyer sur un concept qui a déjà fait ses preuves : un clone de Puzzle Bobble pour promouvoir des mouchoirs ; un jeu de gestion à la Theme Park pour une marque de sodas…
Difficile de désigner quel est l’ancêtre des advergames, mais Chase the Chuck Wagon est le meilleur candidat, et en tout cas le plus "connu"
Aux origines du jeu vidéo publicitaire, on trouve l’Atari 2600. Le parc installé de consoles suscita l’intérêt des marques,mais il fallait un pionnier : cet honneur incombe en 1983 à la société Ralston Purina, spécialisée dans les céréales et l’alimentation pour animaux. Dans le prolongement d’une campagne de réclames télévisuelles où un chien poursuit un chariot ("chuckwagon" en anglais, le terme étant également la marque de la pâtée), Purina commande au développeur SpectraVision un jeu reprenant l’idée de la publicité. Chase the Chuck Wagon s’inspire ainsi des jeux typiques de son époque, comme Pac-Man ou Lady Bug, et doit être commandé auprès de Purina en échange de preuves d’achats.
D’autres jeux du même acabit suivront : Kool-Aid Man (la mascotte de Kool-Aid, un Banga américain) et Tooth Protectors (un jeu à double-visée éducative et promotionnelle, proposé par Johnson & Johnson). Quant à Pepsi Invaders sorti la même année toujours sur Atari 2600, je ne le classe pas dans cette catégorie, le jeu étant uniquement produit pour des salariés de Coca-Cola à des fins de communication interne et de promotion de l’esprit d’entreprise, en dénigrant le rival – quelle belle mentalité !
Ces initiatives ne rencontreront toutefois pas de grands succès, et se heurteront qui plus est à la crise américaine du jeu vidéo en 1983.
Chex Quest est un Doom reskinné, le parfait exemple d’un advergame qui a touché sa cible en utilisant un jeu qui a fait ses preuves
Face à l’échec de la commande par preuves d’achats, l’advergame va alors employer d’autres moyens pour se diffuser : la distribution gratuite d’office ! Proposé en 1996 aux États-Unis dans un CD-ROM offert avec des paquets de céréales de la marque Chex (à l’époque détenue par Ralston Purina, tiens donc), Chex Quest a été distribué à des millions d’exemplaires, le coût de production d’un CD étant relativement dérisoire.
Concrètement, Chex Quest est une conversion de Doom (avec l’accord d’iD Software) en mode "kid-friendly", ayant expurgé la violence et remplacé les monstres par des extraterrestres rigolos. Mais pour de nombreux joueurs, le vénérable Doom restait en 1996 encore une référence, et Chex Quest pouvait faire bonne impression, a fortiori pour un advergame.
Le comble pour ce jeu – qui n’est finalement qu’une copie ne proposant que les 5 premiers niveaux de Doom – est qu’il ait pu acquérir par lui-même une communauté de fans, et qu’une remasterisation HD (!!) est même sortie en 2019.
Fanta King of the Park, jeu social pour promouvoir la marque de sodas. Depuis, Fanta a changé de logo, et le jeu frappé d’obsolescence a disparu. Le succès marketing ne va qu’un temps
Vous avez peut-être vous même souvenir d’un jeu distribué dans un paquet de céréales. Mais c’est aussi bien l’essor du casual gaming popularisé par Wii Sports et les jeux DS que l’augmentation du débit d’internet, qui vont véritablement permettre à l’advergaming de prendre son envol et se retrouver partout. Parfois, directement sur les sites internets des marques, mais très souvent sur Facebook, plateforme idéale pour vous pousser à liker, à partager des expériences ludiques : inviter un ami à jouer pour gagner une partie supplémentaire, vous avez sans doute déjà connu ça, non ? Si en plus, vos amis accrochent et partagent avec vous leurs scores pour comparer, le plan marketing est sur la voie du succès.
Autre advergame vanté comme une réussite marketing mais ayant totalement disparu des stores, La Chuuuuute - lancé sur smartphone par la marque Oasis - s’inspire de Doodle Jump
Mais Facebook demande à rester devant son écran d’ordinateur. Les pubs, si elles veulent être toujours plus performantes, doivent pouvoir vous suivre où que vous soyez, et c’est ainsi qu’elles vont progressivement abandonner Facebook pour investir massivement les smartphones, en inondant les App Store et Google Play Store d’applis qui n’attendent que de vous divertir durant vos innombrables pauses. Sans surprise, les smartphones sont particulièrement privilégiés pour cibler les enfants et les fidéliser très tôt à une marque. Et si ces jeux peuvent parfois proposer du challenge, l’idée est de rester accessible au plus grand nombre : hors de question de pondre un Dark Souls de l’advergame. Ce serait tout de même un comble si un jeu vidéo publicitaire vous colle la honte en étant trop difficile !
Lego est tellement investi dans le jeu vidéo (ici Lego Legacy – Heroes Unboxed sur smartphone) qu’il n’y a plus de frontières avec la publicité
Difficile pour moi de vous recommander un de ces jeux en particulier : sans être forcément mauvais (parfois réellement amusants), ils sont souvent des copies inférieures de jeux déjà existants, mais plus gênant, lorsque la campagne marketing est achevée et / ou que le succès n’aura pas été au rendez-vous, ces jeux sont généralement retirés des stores ou des réseaux sociaux. La tendance est même au déclin de ce type d’advergames à mesure que des développeurs investissent ces boutiques avec des productions originales et ambitieuses (comme Candy Crush, Angry Birds ou Clash of Clans), quand ce ne sont pas les éditeurs traditionnels du jeu vidéo qui viennent avec des adaptations, voire des volets exclusifs de leurs licences : en termes d’impact, des clones de Mario, Sonic ou Pac-Man sponsorisés par des marques ne peuvent pas lutter contre les originaux.
Le résultat est visible dès la page d’accueil du Google Play Store, et les seuls advergames à pouvoir tenir tête résultent eux-mêmes de licences hyper commerciales (Lego, Disney…) et de concepts forts qui dépassent le gaming (comme le jeu de cartes Uno ou des jeux de société).
En apparence anodin, Hawt Dawg Man (l’advergame fictif de Captain Spirit) pose en réalité un nouveau regard sur ces mini-jeux
Se pose alors la question de la préservation du jeu vidéo, y compris de ces advergames : méritent-ils d’être oubliés une fois leur raisons d’exister disparues ? Ou doivent-ils être sauvegardés au même titre que des jeux vidéo classiques, comme témoins de l’époque durant laquelle ils ont paru ?
Une réponse à cette question se trouve dans l’affection que des joueurs peuvent avoir pour Chex Quest, mais est également illustrée dans The Awesome Adventures of Captain Spirit, le prologue offert par Dontnod pour promouvoir Life is Strange 2 (tiens, autre sujet d’étude d’ailleurs) : lorsque le jeune Chris joue au mini-advergame fictif Hawt Dawg Man, on peut y voir un clin d’œil à tous ces jeux, mais alors que le gamin s’amuse à battre son record personnel, qui sait s’il ne gardera pas une affection toute particulière pour ce jeu que tout le monde aura peut-être oublié ?
> L’advergaming compatible avec les gamers ?
Dans le milieu du marketing, il existe différents termes pour qualifier un advergame, mais la classification retenue (promotion, casual, serious…) ne correspond pas du tout à celle que nous retenons pour distinguer casuals et hardcore gamers. Traduction : nous ne parlons pas le même langage ! Peu importe les classifications marketing, certains advergames ont bel et bien été conçus pour cibler les joueurs.
Sorti en 2015 et toujours gratuit sur Steam, Proving Grounds est la 4ème itération du jeu America’s Army, et sans doute pas la dernière
Le cas America’s Army, sorti sur PC en 2002, est en cela très intéressant. Développé et conçu en interne par des équipes de l’US Army avec budget alloué d’une trentaine de millions de dollars, le FPS présente des objectifs clairs : transmettre des valeurs (comme l’esprit de coopération), participer à la bonne information des potentielles recrues en proposant une vision réaliste du métier de soldat, et pour les autres (y compris toi, joueur de la Vieille Europe), véhiculer une image positive de l’armée américaine.
Allant même au-delà d’un simple advergame pour être un hybride « serious game / production pour gamer », le jeu a fait naître des polémiques logiques : tout comme des séries comme Call of Duty ou Battlefield, America’s Army se voit ainsi reprocher de constituer un camp d’entraînement virtuel pour les futures recrues, mais aussi d’être un outil de propagande américain, critique majoritairement émise hors des États-Unis. En temps que jeu vidéo à proprement parler, America’s Army a cependant reçu des critiques favorables de la presse spécialisée américaine de l’époque. Le jeu sera même adapté pour PS2 et Xbox par Ubisoft, et des suites seront également développées.
First Person Lover est un advergame conçu pour séduire un public gamer, et lui donner envie de visiter IRL ou en ligne une boutique de vêtements Björn Borg
Dans un tout autre secteur d’activité, First Person Lover a des objectifs commerciaux plus traditionnels. Proposé en téléchargement gratuit sur PC en 2015, il a été intégralement financé par la marque de vêtements Björn Borg. Chaque article proposé pour personnaliser votre avatar renvoie même vers la boutique en ligne. Ce projet publicitaire remplit donc toutes les cases de l’advergame : promouvoir l’esprit de la marque ainsi que les produits. Alors pourquoi le classer parmi les jeux gamer ?
D’abord, malgré sa courte durée, il s’agit d’un FPS pesant pas moins d’1,5 Go et jouable uniquement au combo clavier-souris, tout sauf grand public. De plus, outre sa contribution à l’amélioration du moteur Unity qu’il utilise, First Person Lover présente également un concept original de FPS que ne renierait pas un studio indé : combattre les "haters" en les paralysant puis en les déshabillant, pour les relooker avec des vêtements Björn Borg.
La campagne marketing a également ciblé des profils de gamers : en s’offrant les services de Youtubeurs comme PewDiePie ou Squeezie, la marque veut séduire spécifiquement ce public en respectant les codes des jeux qu’ils sont susceptibles d’apprécier. Une initiative très poussée pour un advergame, même si je n’irai pas jusqu’à dire que ça le rend indispensable pour autant.
Doritos Crash Course est un advergame conçu initialement pour être amusant par lui-même… ce qui est également bénéfique pour la marque
Pour Doritos, l’idée est davantage de proposer des jeux susceptibles de plaire aux gamers, et la célèbre marque de biscuits salés (qu’il ne faut surtout pas me montrer, j’ai suivi une cure de désintox) organisa deux concours en 2008 et 2010, les « Doritos Unlock Xbox ». Finançant les projets des petites équipes de développement participant aux concours, le groupe Frito-Lay (lui-même filiale de Pepsico) récompense les vainqueurs de 50 000 $. Outre le nom Doritos accolé à leurs titres, les jeux seront proposés gratuitement aux joueurs sur le Xbox Live Market. Doritos Dash of Destruction est le titre choisi en 2008, et Doritos Crash Course remportera l’édition 2010. Ces deux jeux, advergames de par leur financement, intègrent également la marque en cours de parties, mais n’ont d’autre objectif que de participer à l’image de Doritos auprès du public gamer, notamment en offrant des succès très courus pour la réputation des joueurs. Un 3ème jeu, Harms Way, finaliste malheureux de 2010, sera également proposé gratuitement sur le Xbox Live grâce au financement de Frito-Lay, mais sans porter la marque Doritos.
> L’advergame payant : quand la marque devient licence
Le logo Budweiser s’affiche absolument partout dans Tapper. Ah, et n’oubliez pas : à consommer avec modération, hein ? En même temps, la Bud…
L’advergame est gratuit, c’est le principe… miné par les exceptions ! Payer pour de la publicité paraît pourtant insensé, mais certaines marques sont tellement connues que vous offrir des jeux reviendrait à écorner leur image, et qu’elles peuvent même vous les vendre plein pot, avec la conviction que vous allez en plus les acheter. Autrement dit, la marque est une licence.
La borne de Tapper est vraiment bien étudiée : vous pouvez même laisser votre bière sur le repose-verre pendant que vous jouez !
Une nouvelle fois, remontons le temps. Je parlais de Chase the Chuck Wagon comme l’ancêtre des advergames ; Tapper est quant à lui l’ancêtre des jeux sous licence publicitaire. Edité par Bally-Midway et développé par MGA, ce jeu d’arcade a reçu très tôt dans sa création le sponsoring du groupe Anheuser-Busch pour faire la promotion de la bière Budweiser. Cela se voit immédiatement, avec le logo de la marque à chaque écran ; cela s’entend aussi avec la musique des spots TV pendant le jeu bonus ; et plus encore, par la conception de la borne elle-même. La machine est destinée à être fournie aux bars comme un complément pour inciter les clients à rester plus longtemps, mais les parties n’étaient absolument pas offertes.
Avec un concept aussi simple et efficace, Tapper allait vite quitter les bars pour arriver en salles d’arcade dans une version sans licence et sans alcool, Root Beer Tapper. La nature initialement publicitaire de Tapper n’a donc pas empêché le jeu de devenir un classique de l’arcade.
McDonald’s Treasure Land Adventure s’est avéré être un révélateur de talents, en étant l’un des premiers jeux du studio Treasure
D’autres jeux connaîtront (plus ou moins) le même genre de reconnaissance de la part des gamers. Et vous pensez bien sûr à… à… ? Cool Spot ? Mais je voulais parler de McDo d’abord !
La différence entre les versions américaine (à gauche) et européenne (à droite) de Cool Spot saute aux yeux. Cela n’a pas empêché les joueurs européens d’associer le jeu à 7-Up
Bon, allez, commençons par Cool Spot… Le jeu est le résultat de commandes du groupe Dr Pepper à Virgin, d’abord en 1990 avec Spot – The Video Game, un genre d’Othello sorti sur NES et Game Boy. En 1993 sur Megadrive, puis sur SNES, puis sur un tas d’autres supports, la 2ème commande a été quant à elle développée par l’équipe de David Perry, qui avait déjà signé Global Gladiators pour McDonald’s – ah ! Vous voyez que j’aurais dû commencer par McDo !
Il faut dire que le groupe McDonald’s avait très tôt souhaité faire du jeu vidéo, avec une tentative avortée en 1983 sur Atari 2600, puis plusieurs jeux : d’abord sur NES (M.C Kids aux États-Unis, renommé McDonaldland en Europe), puis sur Megadrive avec Global Gladiators en 1992 donc, mais aussi McDonald’s Treasure Land Adventure sur la même console en 1993, un jeu cette fois développé par le studio japonais Treasure.
Expurgé de sa licence britannique Quavers pour sa sortie sur SNES, Push-Over n’en reste pas moins un vrai jeu de réflexion signé Ocean
McDonaldland sur Game Boy (à gauche) ne sortira pas aux USA, mais le jeu est récupéré par 7-Up pour en faire Spot – The Cool Adventure (à droite)
On note par ailleurs à quel point ces advergames ont parfois pu contribuer à la notoriété des studios qui les ont développés : Global Gladiators et surtout Cool Spot marquaient la reconnaissance du studio de David Perry, qui allait ensuite signer Aladdin sur Megadrive, puis devenir Shiny pour développer Earthworm Jim. Quant à Treasure, c’est en appréciant le travail réalisé sur le jeu sous licence McDonald’s que Sega, convaincu, permit au studio de réaliser en parallèle Gunstar Heroes.
Sinon tu peux parler des jeux Yakuza qui sont bourrés de vrais pubs, vrais produits de bouffe dans les magasins, vrais marques d'alcool au bar etc.
je me rappel des premières images de mario kart 64 il y avait sur les panneaux des pub pour les marioro (le logo était clairement celui de marlboro)....ça a rapidement été expurgé maintenant je ne sais pas si c'est nintendo qui a pris l'initiative ou si c'est les législations national qui les y ont poussé (je crois que formula one sur playstation avait été le premier jeu à s'y plier)