Bien qu'étant un total amateur, j'ai parfois la chance et l'opportunité d'interviewer des créateurs du monde du JV.
Ci dessous, un extrait ma toute nouvelle interview pour Gameforever : Wlad Marhulets compositeur de cinéma reconverti (en total autodidacte) en concepteur de jeu vidéo.
C'est la première fois que Wlad Marhulets s'exprime pour un site internet en français - une injustice réparée, surtout avec le constat que les grands sites JV ont boudé son jeu pourtant multi-récompensé
Darq s'est retrouvé en lice face à des mastodontes de l'industrie, comme Hideo Kojima et a été récompensé pour son énorme travail de sound design (le meilleur que j'ai entendu depuis...Dead Space), que l'on doit à un prestataire de CD Project.
Le jeu apporte un renouvellement sans équivalent de la 2.5D , et je vous invite donc vivement à y jeter un coup d'oeil !
Bref : bonne lecture!
Pour lire directement l'interview en intégralité (5 min de lecture) :
https://www.gameforever.fr/darq.php
Wlad Marhulets, concepteur du jeu DARQ
[GF] : Bonjour et merci d’avoir accepté cette petite interview pour notre site ! Nous sommes très heureux de pouvoir enfin discuter avec toi !
Wlad Marhulets : Le plaisir est pour moi !
Wlad Marhulets est un ancien compositeur
[GF] : Avant de parler de DARQ en lui-même, pourrais-tu nous résumer ta carrière d’avant le jeu et ce qui t’a poussé à te lancer dans ce projet ?
Fraîchement sorti de l’école, je suis parti pour Los Angeles pour poursuivre une carrière de compositeur de musiques de film. J’ai eu la chance de contribuer à de la musique additionnelle pour des films tels que The Giver, November Man, Hitman: Agent 47. Mon dernier projet cinématographique impliquant une bande originale est un court-métrage en VR avec Eminem, appelé Marshall From Detroit.
J’ai décidé de tenter le développement de jeux à la fin 2015. Pour beaucoup, cela a été perçu comme une décision arbitraire. Je suppose que j’ai toujours eu ce désir de faire quelque chose par moi-même. L’une de mes motivations pour faire DARQ était d’en écrire la musique. Paradoxalement, j’ai fini par la retirer sur l’essentiel du jeu, à la fin du développement.
[GF] : Tu es un autodidacte. Tu as donc décidé d’apprendre par toi-même tout ce qui touchait à la création d’un jeu (game design, programmation, modélisation, texture, etc.). Peux-tu nous dire, en résumé, combien de temps cela t’a pris pour tout apprendre ?
Réaliser le jeu de base, en excluant les DLC, m’a pris 3 ans et demi, ou environ 10 000 heures de travail. Beaucoup de ce temps a été utilisé pour l’apprentissage et pour acquérir l’expérience nécessaire. J’ai dû redémarrer 3 fois de zéro. Je dirais que le développement actuel a pris 2 ans, 2 ans et demi. Le reste a été utilisé pour essayer des choses. Je n’ai jamais pris de cours ou quoi que ce soit du genre. YouTube et Google étaient mes seuls professeurs.
Ébauche d’un personnage pour DARQ
Artwork par Mariam Beiruty (Septembre 2017)
[GF] : DARQ est un jeu d’énigme et d’aventure qui se déroule dans une atmosphère horrifique. Qu’est ce qui t’a inspiré dans ce choix ? Était-ce un choix pragmatique – parce que ça marche – ou avais-tu un goût particulier pour le genre ?
À vrai dire, je n’appellerais pas ça une “atmosphère horrifique”– le jeu n’a jamais été pensé pour être effrayant. Très tôt, j’ai décidé de faire en sorte que tous les environnements soient propres, beaux, esthétiquement agréables. L’élégance était le maître-mot derrière chaque décision artistique. Le jeu a ses moments sinistres, mais il n’est certainement pas terrifiant par nature.
Image de la version non finalisée du jeu (2017)
Je voulais créer une atmosphère de conte de fées sombre. L’un des films qui a inspiré le jeu est Le Labyrinthe de Pan de Guillermo del Toro – bien que ce soit une histoire sombre, elle a une teinte “fantaisie” que j’aime beaucoup. J’ai aussi grandi en regardant beaucoup de films de Tim Burton. Je suis un grand fan des choses qui sont bizarres et différentes, pas nécessairement effrayantes.
[GF] : Y a-t-il des jeux ou des œuvres artistiques que tu as utilisés en tant que références ?
En tant qu’ancien compositeur de musiques de film, j’ai rarement eu le temps de jouer à des jeux, mais Limbo et Inside m’ont certainement influencé d’une certaine façon. J’adore ces jeux. Pour la dimension artistique, je dirais M.C. Escher, H.R. Giger, Z. Beksinski.
[GF] : Le level design de DARQ emploie constamment un renversement des perspectives et une approche tri-dimensionnelle de l’espace. Peux-tu nous en parler ?
[img]Élaboration d’un niveau pour DARQ. Ici, « The Tower/ La Tour » (DLC)[/img]
Je voulais pousser le concept de la 2.5D dans ses retranchements. Le fait que le jeu se déroule dans un rêve permet l’exploration de divers mécanismes de jeu qui n’auraient aucun sens dans d’autres contextes. La nature abstraite du monde a permis d’introduire la gravité et la manipulation de l'environnement dans le gameplay.
[GF] : Avais-tu une vision claire de la taille et du déroulement du jeu depuis le début ou as-tu ajouté des chapitres et construit ton jeu au fur et à mesure que les choses progressaient ?
J’étais complètement inexpérimenté lorsque j’ai démarré, donc j’étais naturellement en incapacité de prédire combien de temps le développement allait prendre. Même des développeurs expérimentés tendent à sous-estimer combien de temps prennent les choses. Au début, j’ai naïvement pensé que DARQ prendrait 6 mois à développer. Ça a fini par prendre 3 ans et demi ou… près de 5, si tu comptes les DLC et les sorties consoles. J’ai tendance à beaucoup m’inquiéter de la qualité, ce qui est à la fois une force et une malédiction.
DARQ première version VS DARQ version finale (1/2)
DARQ première version VS DARQ version finale (2/2)
[GF] : Qu’est-ce qui t’inspire lorsque tu crées un puzzle ?
Les puzzles ont tendance à se concevoir d’eux-mêmes à la suite d’expérimentations et en jouant avec les mécaniques de jeu introduites dans chaque niveau. Laissez-moi l’expliquer.
Chaque niveau de DARQ introduit une nouvelle mécanique, en plus du changement de gravité et de la possibilité de marcher sur les murs et les plafonds, ce dans tous les niveaux. Par exemple, au chapitre 3, le joueur peut incliner le monde de 90° à l’intersection. Même si le jeu est un « side-scroller » (NDLR : un jeu où l’on se déplace horizontalement), la rotation du monde de 90° permet au joueur d'explorer la ville dans les 4 directions.
Le chapitre 3 repose sur une intersection centrale…
…Qui vous fera changer de perspective !
Exemple de puzzle ayant une approche dynamique et tridimensionnelle
[GF] : Il y a très peu de musiques dans DARQ. Est-ce un choix contraint ou une volonté d’appuyer en valeur l’atmosphère ?
Le compositeur a signé lui-même la bande originale du jeu
À la fin du développement, j’ai eu l’opportunité d’enregistrer la bande originale de DARQ avec l’Orchestre Philharmonique de Budapest. Ce fut très amusant, et un rêve qui devenait réalité. En tant que compositeur, j’étais tellement excité à l’idée de partager ma musique à travers ce jeu. En tant que développeur, j’ai compris que le jeu n’avait pas besoin d’autant de musique. Je devais choisir entre mon égo de compositeur et ce qui était juste pour le jeu. J’ai fini par retirer la plupart de la musique du jeu pour laisser le sound design prendre le relais. Avoir beaucoup de musique dans un jeu lui donne l'impression d’être trop « scripté » ou « orienté ». Cela fait ressentir au joueur qu’il participe à ma propre expérience. Retirer la musique crée une tout autre sensation. Les joueurs sont alors seuls dans cet univers. C’est leur monde et leur rêve.
[GF] : Un énorme travail a été effectué sur le sound design. À ce sujet, tu as reçu de l’aide pour y arriver. Peux-tu nous en dire plus ?
[img]Bjørn Jacobsen, sound designer émérite et récompensé pour son travail sur le jeu.[/img]
DARQ a été principalement fait en solo (environ 5 % de modélisation et d’animation ont été externalisés). En tant que compositeur de formation, j’ai une bonne compréhension de l’audio et je savais à quel point le sound design d’un jeu comme DARQ était important.
J’étais en train de déléguer intégralement la création du sound design. J’étais sur le point de signer un contrat avec deux sound designers. Le même jour, j’ai reçu un mail du sound designer Bjørn Jacobsen, qui était alors en train de travailler sur Cyberpunk 2077. Il m’a dit qu’il venait tout juste de regarder la bande-annonce de DARQ et était intéressé pour travailler dessus.
Après un appel via Skype, j’ai réalisé que nous étions sur la même longueur d’onde, et le reste, c’est de l’histoire. Bjørn a eu un contrôle créatif presque total sur tout le sound design de DARQ, donc tout le crédit lui revient.
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https://www.gameforever.fr/darq.php
tout est impressionnant autour de ce jeu : son créateur est compositeur à la base, il savait pas faire de jeux, etc....
J'ai pris la mise à jour ps5 ce week end, je vais repartir sur un 2ème platine