Sony Pictures le reconnaît désormais :
la recette des super-héros ne suffit plus. Lors d’une conférence
Bank of America,
son PDG Ravi Ahuja a dressé un constat lucide sur l’état du marché :
"Aujourd’hui, il faut de l’originalité, une connexion émotionnelle et en faire un événement culturel. Et surtout, vous ne pouvez plus faire un mauvais film."
Depuis
Venom en 2018 (
856 millions de dollars),
Sony a tenté de bâtir un "Spider-Man Universe"… sans Spider-Man. La suite a rapidement tourné au fiasco :
Morbius plafonnait à 167 millions,
Madame Web s’arrêtait à 100 millions, et
Kraven the Hunter s’effondrait à 62 millions.
Pire encore,
Venom lui-même a été transformé en figure comique, loin de son essence sombre et ambiguë dans les comics. A cela s’ajoutait une stratégie qui entretenait
l’illusion qu’un Spider-Man finirait par apparaître dans cet univers. Une promesse implicite qui n’a jamais été tenue, et qui ne le sera jamais puisque ce projet partagé est désormais abandonné.
L’annonce de films autour de personnages obscurs comme El Muerto ou Hypno-Hustler a accentué l’incompréhension. Le public n’attendait rien de ces productions, et l’impression a dominé que
Sony cherchait avant tout à exploiter son catalogue plutôt qu’à raconter des histoires solides.
Le contraste est d’autant plus frappant que
du côté de l’animation, Sony a prouvé sa capacité à livrer des œuvres majeures.
La saga Spider-Verse a été unanimement saluée pour son audace visuelle et son écriture ambitieuse. Ce succès montre que le problème n’est pas la licence en elle-même, mais bien la stratégie adoptée en live-action.
La seule véritable constante positive reste la collaboration avec Marvel Studios autour de Tom Holland.
Spider-Man : No Way Home a frôlé les 2 milliards de dollars et le prochain volet,
Brand New Day, s’annonce déjà comme un événement et attire la curiosité avec les récents teasings et par le biais des premières images du tournage qui a débuté récemment. Mais ici encore,
la direction créative vient de Marvel, tandis que
Sony se place essentiellement en distributeur.
Le constat de
Ravi Ahuja est juste, mais incomplet. Ce qui a condamné l’univers
Sony, ce n’est pas seulement la saturation du marché,
c’est avant tout l’incapacité à livrer de bons films.
En misant sur des projets secondaires, en dénaturant ses personnages, et en laissant planer l’idée trompeuse d’un Spider-Man qui n’est jamais venu, Sony a perdu la confiance du public.
Le studio a déjà prouvé avec les films d'animation Spider-Verse qu’il savait viser l’excellence. Reste à se demander pourquoi cette exigence n’a jamais été appliquée à ses productions live-action. Car avant de rêver
"d’événements culturels", la priorité aurait dû être claire : faire des films solides, crédibles et respectueux de leur univers.