Legendary men return...
1992. SNK sort les crocs. Street Fighter II règne en maître incontesté sur le monde de l’arcade, et les autres éditeurs se cassent les dents à vouloir l’imiter. Sauf que dans un coin de South Town, Terry Bogard et ses potes ont encore une rage de loup. Fatal Fury 2 débarque sur Neo Geo, et ce n’est pas juste une suite : c’est une déclaration de guerre. SNK affine sa formule, muscle son moteur, et surtout injecte ce supplément d’âme et de technique qui fera sa marque de fabrique.
Résultat ? Un jeu qui a redéfini ce que pouvait être un versus fighting « SNK style » : nerveux, lisible, élégant, mais exigeant.
Mai Shiranui dans ses premiers designs
Un prince de la ville qui se voulait roi
Le premier Fatal Fury (1991), conçu par Takashi Nishiyama, le papa du tout premier Street Fighter (1987), était presque une suite spirituelle à ce vieux titre Capcom : trois personnages jouables, un système simple, des coups exigeants… et une étrange idée : un mode 2 joueurs coop contre le CPU.
Un gameplay moitié beat them up, moitié versus, où deux humains pouvaient castagner le même boss. Une relique d’une autre époque.
Mais le vrai truc marquant, c’était ce fameux système à deux plans : un décor avec une “profondeur”, permettant de sauter à l’arrière-plan pour esquiver ou surprendre. À l’époque, c’était un gimmick. Dans Fatal Fury 2, ce gimmick devient une vraie mécanique.
Les nouveaux visages du ring
Huit combattants jouables, quatre boss, et une galerie de persos qui transpirent la personnalité.
Le casting s’étoffe et donne à SNK une vraie identité :
Terry Bogard, toujours en haut de l’affiche, le blond à casquette le plus charismatique de l’arcade. Le “héros du peuple”, fort, franc, fidèle à South Town.
Andy Bogard, son frère, plus discret, plus technique, adepte du Shiranui-ryu.
Joe Higashi, le kickboxeur au rire insupportable et aux genoux dévastateurs.
Mai Shiranui, nouvelle venue, ninja explosive et ô combien symbole du fan-service avant l’heure (et SNK savait ce qu’il faisait). 1992, l'année de la création du fantasme originel.
Kim Kaphwan, la justice incarnée, Taekwondo pur jus et discipline absolue (et balai dans le cul).
Jubei Yamada, vieux maître judo goguenard, une sorte de “Tortue Géniale” de South Town.
Cheng Sinzan, riche bedonnant au style explosif, mélange improbable entre boxe chinoise et boule humaine.
Big Bear, un catcheur australien géant — anciennement Raiden, méchant du premier opus, devenu “face” (gentil) dans ce tournoi. Même coups, nouveau masque, nouveau cœur.
Et puis viennent les boss :
Billy Kane, bras droit de Geese Howard, armé de son infernal bâton télescopique (le zoning de l’enfer).
Axel Hawk, le boxeur massif.
Laurence Blood, le toréador sadique et poseur.
Et enfin, Wolfgang Krauser, colosse aristocrate et demi-frère de Geese Howard.
Les newcomers
SNK soigne sa mythologie.
On apprend que Wolfgang Krauser et Geese Howard partagent le même père : un noble allemand, coureur invétéré, et grand amateur des bains douches à Paris. Un homme qui aimait le bon vin, les femmes, et visiblement oublier les capotes dans son chateau.
Geese, fils illégitime, prend le nom de sa mère américaine et grandit à South Town, tandis que Wolfgang Krauser hérite du château, du prestige et d’un ego de cathédrale.
Wolfgang méprise son demi-frère, qu’il juge vulgaire et déshonorant. Mais quand Geese meurt (dit-on en ville), battu par Terry dans le premier jeu, Wolfgang Krauser décide de venger “l’honneur familial” : qu’un “gueux américain” terrasse un Krauser, même demi-Krauser, c’est inacceptable.
Un grand seigneur, certes, mais un grand seigneur susceptible.
Gameplay : ou la crampe aux doigts!
Ici, SNK affine sa grammaire.
Les deux plans ne sont plus un gadget : ils deviennent un outil tactique. On peut esquiver un projectile, feinter une choppe, ou punir un saut.
C’est une mécanique qui demande du timing et de la lecture, et qui donne à chaque combat une dimension stratégique que Street Fighter II n’a pas.
Mais attention : ce n’est pas de la souplesse Capcom, c’est du fer SNK.
Les commandes sont plus dures, les timings plus secs.
Les Desperation Moves (DM), ancêtres des super coups, apparaissent ici.
Mais il faut être en danger (barre de vie rouge), et surtout, sortir des manipulations d’orfèvre.
SNK n’a pas inventé la demi-lune arrière pour les touristes.
Ces DM, c’est la récompense des joueurs qui bossent le stick jusqu’à la tendinite.
Quand tu balances un Power Geyser dans la tronche de Krauser, tu le sens dans la paume.
Côté sensations, c’est du costaud :
Les coups claquent, les sons ont du coffre, et la gestion des priorités (parfois bizarre) rend chaque duel intense.
Mais attention : le jeu reste rigide.
Les sauts sont un peu lourds, certains coups spéciaux sortent à la sueur du front, et les combos ne sont pas encore naturels. On enchaîne plus au feeling qu’à la frame data.
Et Billy Kane, parlons-en. Ce type est une plaie.
Son bâton couvre la moitié de l’écran, son zoning te punit à la moindre erreur, et son IA (en mode 1P) lit carrément dans tes inputs.
Même Krauser, boss final, est plus abordable que lui.
Un mur, littéralement.
Les nouveaux boss
Réalisation : l'école du pixel viril
Si le premier Fatal Fury posait les bases, Fatal Fury 2 est le moment où SNK devient SNK.
On entre ici dans le grand bain de la Neo Geo à pleine puissance, cette machine d’arcade pensée pour en mettre plein les yeux et les oreilles. Et pour le coup, les artistes du studio se sont surpassés.
Derrière la patte graphique, on retrouve plusieurs figures du SNK de la grande époque : Ayumi Tsuzaki (Tsuzakingyo), Higashi Pon, Ryouji Sei, UG Wada, ou encore Youichiro Soeda.
Pas encore de Kuroki ou Shinkiro, ils arriveront plus tard, mais déjà cette touche si reconnaissable : des sprites massifs, hyper expressifs, bien virils et une colorimétrie éclatante, propre aux débuts des années 1990.
Tout respire la maîtrise du pixel : contours nets, palettes chaudes, et animations finement segmentées.
Les coups spéciaux laissent des traînées lumineuses, les effets d’impact font trembler le fond de l’écran, et les transitions de round jouent sur la lumière du décor en mode jour, crépuscule, nuit, comme un cycle dramatique miniature.
Et quels décors !
Chaque arène est une carte postale du monde :
- Terry sur son train américain en plein désert du Dakota près du Monument du Mont Rushmore
- Andy dans les canaux de Venise,
- Joe face à un temple thaïlandais en pleine jungle
- Mai sur son radeau dans un Japon mystique
- Kim dans une rue fréquentée de Séoul
- Cheng dans un temple chinois majestueux,
- Jubei au dojo du Mont Fuji,
- Big Bear dans son repaire en plein désert australien,
- Billy sous la pluie de Londres,
- Laurence Blood dans son arène de corrida espagnole,
- Axel Hawk dans une salle de boxe electrifié hardcore
- et Krauser, enfin, dans son château allemand, sur fond de vitraux et de chandeliers.
Chaque décor raconte quelque chose : un pays, un tempérament, une philosophie de combat.
Le tout animé par des petits détails vivants, foule en fond, oiseaux, drapeaux, eau qui ondule. Tous ces effets étaient un luxe absolu en 1992.
Côté son, SNK frappe tout aussi fort.
La bande originale, signée Masahiko Hataya, Toshio Shimizu et Yoshihiko Kitamura, est un pur bijou d’époque : des mélodies orchestrales et épiques, entre rock synthétique, percussions martiales et envolées classiques.
Chaque combattant a son thème, immédiatement identifiable : celui de Krauser, évidemment, avec ses accents de Mozart (“Lacrimosa”), reste un monument du jeu d’arcade.
L’identité sonore de SNK se forge ici : grandiloquente, mélodique, et pleine de panache.
Là où Capcom vise la clarté et la lisibilité, SNK joue sur la démesure, la mise en scène, le charisme pur.
C’est le début d’une époque où la Neo Geo ne se contentait pas de rivaliser avec les autres bornes :
elle posait les codes du spectacle de baston en posant un vrai univers voire une mythologie.
On rugit de plaisir !
– Graphismes somptueux, colorés, typiques du début 90.
– Un vrai versus fighting, riche et technique.
– Les deux plans enfin bien exploités.
– Des personnages ultra charismatiques, chacun avec son style.
– Desperation Moves : durs à sortir, mais hyper gratifiants.
– Musiques et ambiances au sommet.
– La mythologie SNK prend corps avec Krauser et la lignée Howard.
On a la fureur !
– Rigidité globale : sauts, coups spéciaux, déplacements.
– Certains coups ont du mal à sortir, hitbox parfois floue.
– Priorités étranges (Kim et Billy, stop).
– Desperation Moves trop exigeants à exécuter.
– IA brutale : Billy Kane, pure torture.
– Moins “confortable” que Street Fighter II, surtout niveau enchaînements.
Conclusion - Quand SNK serre les poings
Fatal Fury 2 n’est pas juste une suite : c’est la vraie naissance du rival de Street Fighter II.
Le premier Fatal Fury était encore dans l’héritage du tout premier Street Fighter (1987) : raide, expérimental, un peu perdu entre deux époques.
Celui-ci, en revanche, entre dans la cour des grands.
Technique, exigeant, stylé, Fatal Fury 2 prouve que SNK n’est pas qu’un suiveur : c’est un bâtisseur.
Là où Capcom mise sur la fluidité et le confort, SNK choisit la dramatique et la discipline.
Street Fighter II te sourit en te donnant une leçon ; Fatal Fury 2 te fixe, se craque les phalanges, et dit :
“Viens, si t'as des c.....”
Et quelque part, entre un Power Wave et un bâton de Billy, tu comprends pourquoi cette série s’appelle Garou Densetsu : La Légende du Loup.
Parce qu’ici, tout le monde veut mordre.
Fiche technique: Titre original : Garou Densetsu 2: Arata-naru Tatakai Développeur: SNK Editeur: SNK Genre: Versus Fighting Année: 1992 Autres supports: Arcade (Neo-Geo MVS), Megadrive, Super NES, X68000, NEC CD-ROM (Arcade Card), Game Boy, Neo-Geo CD, PS4, Xbox One/Series, Switch Nombre de joueur(s): 2 Localisation:
NOTE PRESSE (Joypad 019 - Avril 1993)
Screenshots:
Pub japonaise
Test de l'émission Micro Kid's (France 3) - 11 Avril 1993
C'est surtout, un an plus tard, la giga claque avec Fatal Fury Special qui a marqué la série, je dirais, car Fatal Fury 2 en comparaison, c'est vraiment pas encore ça.
Moi j'avais découvert Fatal Fury 2 sur SNES, 20 francs je l'avais loué dans un vidéo club (déjà taxé 5 francs a mes vieux c'était énorme) mais bordel comment j'avais kiffé
victornewman : une petite console hybride full jeux 2,5 D avec toutes les licences de l’époque + quelques nouvelles qui cartonnent en esport franchement ça pourrait avoir son p’tit succès !
defcon5 oui c'est même de la merde ce test, mais bon c'est rigolo ^^ et Micro Kid's c'est vraiment l'emission que je loupais jamais, donc grosse nostalgie
mercure7
FF Special était indéniablement mieux équilibré mais visuellement identique au 2 donc très plaisant certes mais pas vraiment une "claque" comme a pu l'être le 2 à sa sortie.
Que de temps de jeu au temps de Console club. Lui, FF spécial, réal bout, les premiers Kof, une sacrée console qui est morte par son manque de diversité et ses prix.
alexkidd
Merci et tres bon retour sur ce jeu.
Pour ma part, je me souviens d y jouer en arcade. Il etait impressionant à l epoque.
Mais en terme de jeu impressionnant, art of fighting le plus haut.
Quoi qu il en soit, j en aie claqué des pieces de 5 francs et j ai toujours un fatal fury special installé sur ma ps4, pret a faire feu pour partie occasionnel
fan2jeux De rien, je n'y ai pas du tout joué en arcade à l'époque, mais par contre je l'avais acheté en import dans une boutique sur megadrive avec l'adaptateur à l'poque, je l'ai littéralement saigné dessus. C'est la version que je connais le plus defcon5 thx
Kikoo31 : je sais bien… surtout que SNK a encore moins d’argent que SEGA, et vu l’état du marché actuel, aucune chance qu’ils trouvent des investisseurs capables de financer ce type de projet…
cail2 Pas d'accord, sauf si tu parles uniquement de claque visuelle, auquel cas, plein de jeux Neo Geo ont été une claque.
Moi je parle de la façon dont le jeu a marqué son époque, par ce qu'il proposait au global, et FF2 c'est de la merde en barre en comparaison à FF Special pour tout ce qui touche aux combats, et c'est pas juste une question d'équilibrage.
C'était le SF2 de SNK, pour le coup, là où FF2 avait encore tellement de trucs bancals (comme bcp de jeux SNK qui étaient visuellement bons, mais le gameplay ne suivait pas)
Si t'as joué aux deux jeux à leur sortie, tu dois savoir.
En reproposant le même style de jeux « arcade à la maison » de l’époque ?
FF Special était indéniablement mieux équilibré mais visuellement identique au 2 donc très plaisant certes mais pas vraiment une "claque" comme a pu l'être le 2 à sa sortie.
mais les rêves resteront des rêves pour certaines choses
Merci et tres bon retour sur ce jeu.
Pour ma part, je me souviens d y jouer en arcade. Il etait impressionant à l epoque.
Mais en terme de jeu impressionnant, art of fighting le plus haut.
Quoi qu il en soit, j en aie claqué des pieces de 5 francs et j ai toujours un fatal fury special installé sur ma ps4, pret a faire feu pour partie occasionnel
defcon5 thx
Moi je parle de la façon dont le jeu a marqué son époque, par ce qu'il proposait au global, et FF2 c'est de la merde en barre en comparaison à FF Special pour tout ce qui touche aux combats, et c'est pas juste une question d'équilibrage.
C'était le SF2 de SNK, pour le coup, là où FF2 avait encore tellement de trucs bancals (comme bcp de jeux SNK qui étaient visuellement bons, mais le gameplay ne suivait pas)
Si t'as joué aux deux jeux à leur sortie, tu dois savoir.