Vous ne trouvez pas que ça manque de partage de musiques de JV par ici ?
Chaque semaine (sauf contrainte), je choisirais un thème au pif, quel qu’il soit. A vous de partager ensuite en commentaire une musique d'un jeu - ou plusieurs, mais restez raisonnables et n'en partagez que 5 maxi ! - qui selon vous correspond à ce thème !
Pensez à indiquer si possible le nom du jeu et du morceau choisi, et éventuellement pourquoi vous l'avez choisi pour ce thème
Sauf si c'est précisé par le thème, il n'y a pas de contrainte : tout type de jeu, toute console/support, toute époque sont acceptés.
Thème du jour :
Les jeux Pac-Man
« Rond comme un ballon, jaune comme un citron, c’est lui Pac-maaan... »
C’est le 22 mai 1980 qu’apparaissent au Japon les premières bornes d’arcade de Pac-man, le jeu d’arcade culte de Namco qui deviendra un succès retentissant dans le monde entier ! Le pépère a donc 40 ans mine de rien, joyeux anniversaire à lui ! (oui, je suis en retard de deux jours, mais tant pis)
En réalité j’avais prévu autre chose pour aujourd’hui, mais je suis tombé sur cet article rétrospective du journal Le Monde qui m’a appris la nouvelle, et je me suis dit que c’était la bonne occasion pour accorder une place d’honneur à notre cher glouton jaune dans cette rubrique, lui qui a su révolutionner le monde du jeu vidéo et est pourtant un peu oublié aujourd’hui comparé à un Mario ou même un Sonic.
Je le confesse, je suis trop jeune pour l’avoir connu, et à mon époque la Pac-man Fever avait déjà commencé à céder sa place à bien d’autres phénomènes (Mario, Sonic, Pokémon...), je n’ai donc jamais véritablement touché aux jeux de la série... Je compte sur vous pour rattraper mon manque de culture
Cette fois, le thème est lié à une série, il faut donc choisir des musiques en rapport avec les jeux de cette série. Cela inclue les musiques des spin-offs (Mrs. Pac-man, etc.) et remakes, ou les remixes et arrangements entendus dans d’autres jeux (ex. Smash Bros) ou sur des albums originaux, etc.
Voici mes propositions !
Titre : Pac-Man Theme
Jeu : Super Smash bros Ultimate
Arrangé par : Yuzo Koshiro
Je commence par l’évidence même, un medley des musiques du jeu original ! Enfin, « musiques », à la base ce ne sont que des jingles de quelques secondes, donc il est un peu difficile de les proposer en piste complète. C’est pourquoi je propose ici l’arrangement très approprié fait pour SSBU/3DS, qui a le mérite de respecter la sonorité du jeu d’origine, en plus d’en faire une piste diablement entraînante inspirée du vieux jazz façon ragtime/dixieland !
Titre : Rolling Hills
Jeu : Pac Man World Rally
Composé par : Tommy Tallarico, Dweezil Zappa, Mike Rubino, Rod Abernathy & Charlie Malone
Comme Mario et un peu toutes les autres mascottes, Pac-Man s’est vite écarté de son genre de prédilection pour s’essayer à d’autres styles de jeu, dont le classique Mario Kart-like. Je n’ai pas joué au jeu et je découvre cette musique un peu au pif, mais je la trouve vraiment chouette avec cette fois un doux parfum de funky music et un saxo badass qui reprend une fois de plus les fameux jingles du jeu d’origine !
Titre : Pac Jump Up !
Jeu : Pac-Man Championship Edition 2
Composé par : Pas trouvé, si vous avez l’info...
Dans un style complètement différent, le dernier jeu Pac-Man en date propose des musiques dans un style electro/trance très prononcé, en adéquation avec son ambiance visuelle. Là encore, je ne connais pas le jeu, mais je voulais voir ce que donnait l’évolution musicale du personnage dans ses dernières itérations, et on peut dire que le changement est flagrant ! Comme quoi Pac-Man est capable de s’adapter à pas mal de styles musicaux
Allez, je ne peux pas finir cette sélection sans vous la mettre dans la tête...
A votre tour de rendre hommage à notre cher bouffeur de fantômes !
S’il y a un thème que vous souhaiteriez avoir une prochaine fois, n’hésitez pas à le faire savoir, je le rajouterais à ma liste.
Sur ce, bon jeu à tous et toutes
Vous ne trouvez pas que ça manque de partage de musiques de JV par ici ?
Chaque semaine (sauf contrainte), je choisirais un thème au pif, quel qu’il soit. A vous de partager ensuite en commentaire une musique d'un jeu - ou plusieurs, mais restez raisonnables et n'en partagez que 5 maxi ! - qui selon vous correspond à ce thème !
Pensez à indiquer si possible le nom du jeu et du morceau choisi, et éventuellement pourquoi vous l'avez choisi pour ce thème
Sauf si c'est précisé par le thème, il n'y a pas de contrainte : tout type de jeu, toute console/support, toute époque sont acceptés.
Thème du jour :
La tranquillité
Je propose un thème un peu plus abstrait aujourd’hui, histoire de rendre l’exercice un poil plus difficile ! Plus qu’un thème récurrent de JV, il s’agit ici de réfléchir à ce qu’une musique est capable de véhiculer. Mais en gros, c’est simple : quelle(s) musique(s) vous viennent à l’esprit lorsque l’on évoque la tranquillité ? Un thème qui, je l’espère, vous donnera envie de vous la couler douce en ce dimanche ensoleillé
Voici mes propositions !
Titre : Another Guldove
Jeu : Chrono Cross
Composé par : Yasunori Mitsuda
Difficile de ne pas parler de ce thème sans évoquer les musiques de Mitsuda, et en particulier son travail sur Chrono Cross. Par l’utilisation de nombreux instruments acoustiques, son style musical évoque à lui seul une sorte de sérénité, chose qui se ressent dans de nombreuses pistes du jeu. Mais celle qui évoque pour moi le plus le calme et la tranquillité est définitivement celle du village de Guldove version « another ». A la fois douce, envoûtante et insouciante, on se laisse vite bercer par ses arpèges de guitare.
Titre : Little Love
Jeu : Rhapsody A Musical Adventure
Composé par : Tenpei Sato
Un morceau qui incarne à merveille l’idée de la tranquillité ! Il en émane une douceur et d’une tendresse assez incroyable, et mériterait sûrement son nom de « Little Love » si ça avait réellement un rapport avec l’endroit où est joué le morceau, à savoir le village et la forêt de début de jeu (il est bien peu question d’amour, en vérité). Le must pour se relaxer lors d’une balade.
Titre : Neighbourhood of Water
Jeu : Final Fantasy XII
Composé par : Hitoshi Sakimoto
Un peu comme Mitsuda, le style de Sakimoto est aussi très propice à la sérénité. Dans FFXII, un paquet de pistes pourraient coller au thème (A Moment’s Rest, Eruyt Village, Cerobi Steppe...) mais étrangement, c’est celle-ci qui me vient en premier lieu à l’esprit quand il s’agit de tranquillité. Probablement son côté insouciant là encore, associé à l’idée d’une pause au bord de l’eau...
Bon, ça fait encore 3 RPG cette fois-ci, normal vu que c’est le genre de jeu auquel je joue le plus et qui représente donc la majorité des OST que j’écoute... Désolé, il va falloir vous y habituer Rien ne vous empêche bien sûr de proposer d’autres genres de jeux, le thème se veut assez libre pour ça.
Et donc vous, quelle musique vous évoque « la tranquillité » ?
S’il y a un thème que vous souhaiteriez avoir une prochaine fois, n’hésitez pas à le faire savoir, je le rajouterais à ma liste.
Sur ce, bon jeu à tous et toutes
Vous ne trouvez pas que ça manque de partage de musiques de JV par ici ?
Chaque semaine (sauf contrainte), je choisirais un thème au pif, quel qu’il soit. A vous de partager ensuite en commentaire une musique d'un jeu - ou plusieurs, mais restez raisonnables et n'en partagez que 5 maxi ! - qui selon vous correspond à ce thème !
Pensez à indiquer si possible le nom du jeu et du morceau choisi, et éventuellement pourquoi vous l'avez choisi pour ce thème
Sauf si c'est précisé par le thème, il n'y a pas de contrainte : tout type de jeu, toute console/support, toute époque sont acceptés.
Thème du jour :
Enfin dehors !
Demain, c’est la fin du confinement pour les français, et même s’il faut continuer de faire attention et de respecter la distanciation et les gestes barrières (et globalement se dire que la crise est loin d’être passée), nous allons enfin pouvoir sortir en toute bonne conscience ! Je vous propose donc de « fêter » cela en nous partageant mutuellement des thèmes d’extérieur ou quelque chose dans le même esprit, en clair des musiques qui donnent envie de marcher et de prendre un bol d’air frais
...Bon, en vrai, il fait un temps de chien partout en France Mais gardons espoir, il fera un peu plus beau demain ! J’espère !... T_T
Titre : Rustling of the Wind
Jeu : Gensô Suikoden III Collection ~Rustling of the Wind~
Composé par : Michiru Yamane, Takashi Yoshida, Masahiko Kimura, Keiko Fukami (une fois de plus, je sais pas qui a fait quoi...)
Arrangement par : bosque aroma
C’est bien connu, les OST des jeux Suikoden sont goldées, et on aura sûrement l’occasion d’en revoir souvent dans cette rubrique (je sais qu’il y a quelques amateurs ). « Rustling of the Wind » est, de façon assez évidente, une musique que l’on entend en se baladant dans les plaines du jeu, et même si la composition est plutôt simple, elle n’en est pas moins rafraîchissante. J’aurais pu vous mettre l’originale, plus calme, plus relaxante, mais je trouvais la version arrangée plus complète et plus propice à l’évasion ^^
Titre : The Flatlands
Jeu : Octopath Traveler
Composé par : Yasunori Nishiki
Octopath Traveler, comme son nom l’indique, met l’accent sur le voyage, il était donc important que son OST reflète cet état d’esprit. Et force est de reconnaître que c’est très réussi de ce côté (pas forcément sur les autres aspects du jeu...), notamment avec les thèmes des différentes régions, qui sont une vraie incitation à la balade. Celui des Flatlands (Basses plaines en VF) en particulier, avec son ton léger et rafraîchissant, est parfait pour agrémenter une balade ensoleillée.
Titre : Colony 9
Jeu : Xenoblade Chronicles
Composé par : Yoko Shimomura
C’est indéniable, Xenoblade Chronicles premier du nom a d’excellentes musiques. Et si pour moi le jeu a tout de même pas mal de défauts (un avis qui ne fait pas l’unanimité, je sais), je dois reconnaître que j’ai été marqué par les musiques entendues en début de jeu. « Colony 9 » est donc le thème que l’on entend en parcourant les plaines autour de la Colonie 9 (sans dec), la ville de départ. Et que dire de cette musique si ce n’est la sensation d’émerveillement et de liberté qu’elle véhicule dès les premiers instants, couplée à la vastitude du terrain de jeu qui nous est offert à peine après avoir commencé l’aventure ? Ça vous donne pas envie de sortir, ça ?
Titre : Blue Rogue’s Ship
Jeu : Skies of Arcadia/Eternal Arcadia
Composé par : Yutaka Minobe & Takayuki Maeda
J’en met une dernière pour la route, et ce sera Skies of Arcadia à l’honneur ! Un peu pour rattraper mes manquements de la semaine dernière d’ailleurs... (ne pas mettre Skies of Arcadia pour le thème des pirates ? Quelle hérésie !)
Pour le coup plus question de balade à pied mais en navire volant cette fois, avec le thème du vaisseau des Pirates bleus, que l’on entend lors de nos premiers déplacements dans le monde d’Arcadia en début de jeu. Un thème léger, plutôt discret au départ mais qui s’intensifie vite pour nous faire ressentir cette sensation d’aventure. C’est aussi un de mes thèmes préférés tout JV confondu, qui m’a toujours donné furieusement envie de lever les voiles et d’explorer le vaste monde (même si bon, à vélo, c’est quand même moins grandiose...).
Voilà, j’attends vos partages de musique d’extérieur, histoire de se donner envie de marcher ! (même sous la pluie !)
Et s’il y a un thème que vous souhaiteriez avoir une prochaine fois, n’hésitez pas à le faire savoir, je le rajouterais à ma liste !
Sur ce, bon jeu à tous et toutes
Me revoici pour parler comme à l’accoutumée de RPG, et cette fois on va parler d’un jeu culte ! En tout cas parmi les amateurs du genre, car au final il reste aujourd’hui encore assez discret auprès du grand public contrairement à un Final Fantasy, un Secret of Mana ou un Chrono Trigger.
Pour l’occasion, je vais essayer de revenir un peu sur l’historique du titre et sa place dans le catalogue de feu Squaresoft, comme je l’ai fait pour ma rétrospective sur FFV... mais en beaucoup moins gros, parce que je n’ai pas le courage de refaire un aussi gros morceau ^^’ Et il y a malheureusement moins de chose à dire sur Bahamut Lagoon de toute façon. Quoiqu’il en soit, ce sera sûrement une découverte pour certains (je l’espère !), un rappel nostalgique pour d’autres, et quoiqu’il en soit une occasion de plus de se remémorer un excellent titre et un Square au sommet de sa gloire.
C’est parti !
Bahamut Lagoon Titre original : Bahamut Lagoon
Consoles : Super Famicom
Développé par : Squaresoft
Edité par : Squaresoft
Sortie japonaise : 9 février 1996
Contexte de sortie
Dans le milieu des années 90, fort du succès de ses licences phares que sont Final Fantasy, Romancing SaGa et Seiken Densetsu (la série des « Mana »), Squaresoft est devenu le roi du RPG et arrive progressivement au sommet de sa gloire, dont le point culminant sera Final Fantasy 7 sur lequel l’équipe de Kitase et Nomura est encore en train de plancher à destination de la Nintendo 64 (avant une certaine brouille avec Nintendo, si vous me suivez). Au Japon, le nom de la boîte est déjà associé dans la tête du public à des RPG de qualité que l’on peut presque acheter les yeux fermés, et forte de sa notoriété, l’entreprise peut se permettre de sortir des sentiers battus et tenter de nouvelles choses, de donner la parole à certains de ses créateurs qui ne demandent qu’à exprimer leurs univers et leurs idées.
De cette liberté créatrice est né l’incroyable Chrono Trigger bien sûr, et d’autres jeux plus discrets comme Live-A-Live, le RPG « omnibus » avec ses huit scénarios distincts (dont j’ai parlé pour rappel dans cet article, et je vous recommande une fois de plus chaudement de découvrir le jeu si ce n’est pas déjà fait) ou Front Mission, première incursion de Square dans un univers froid et métallique avec un jeu de stratégie robotique lui aussi devenu culte.
Bahamut Lagoon est le fier rejeton de cette période bénie. Sorti en 1996, soit vers la fin de vie de la Super Famicom (qui, je le rappelle, est plus ou moins considérée comme morte en Occident depuis l’arrivée des 32-bits, mais continue au contraire de livrer ses meilleures productions au Japon), le titre est une expérience originale à plus d’un titre.
D’abord, parce qu’il réunit et révèle le talent d’employés de Square qui s’étaient fait discrets jusqu’ici. C’est le premier véritable projet au sein de Square de Kazushige Nojima, le fameux scénariste de FFVII, VIII, X etc. et des Kingdom Hearts (je sens qu’à l’évocation de son nom, j’en ai fait trembler certains ici et pas pour les bonnes raisons ), et il officie sur Bahamut Lagoon comme directeur, épaulé par Tadashi Nomura à la production (monsieur qui poursuivra plus tard son rôle au sein de Monolith Soft, les gars derrière Baten Kaitos et Xenoblade).
Le scénario est quant à lui signé Motomu Toriyama, dont c’est aussi le premier projet, et qui restera discret jusqu’à son poste de directeur sur FFX-2 puis la trilogie FFXIII, quand bien même il a travaillé dans les coulisses de FFVII et FFX.
Toute cette fine équipe est supervisée par la grande coqueluche de Square, Hironobu Sakaguchi, qu’on ne présente plus.
Enfin, et c’est probablement celle dont le travail a été le plus remarqué sur le jeu, nous retrouvons Noriko Matsueda à la composition musicale, elle qui n’avait jusqu’ici officié que sur Chrono Trigger (sur quelques pistes seulement, ce qui fait qu’on a tendance à l’oublier au profit de Uematsu et Mitsuda) puis Front Mission avec l’autre grande compositrice de Square, Yoko Shimomura.
Encore aujourd’hui, miss Matsueda n’est guère célèbre parmi les talents de Square, principalement à cause de sa courte carrière chez eux. Pourtant, force est de constater qu’elle n’a pas moins de talent que les autres compositeurs célèbres de la boîte et qu’elle a su composer des bandes-son incroyables. Celle de Bahamut Lagoon en fait indéniablement partie !
On retrouve des compositions grandioses, illustrant à merveille l’onirisme de l’univers fantasy du jeu ou la vaillance épique des combats, tentant même quelques singularités bienvenues avec par exemple le thème de combat et ses sonorités jazzy.
Outre son ambiance musicale, Bahamut Lagoon a marqué les joueurs sur son aspect le plus visible : ses graphismes. Il suffit de voir quelques screens pour s’en convaincre, le jeu offre des sprites absolument fabuleux lors des combats avec une animation fluide et soignée, que ce soit pour nos unités ou celles de l’ennemi. Le chara design, tout en lignes et courbes sveltes, fait des ravages, et chaque personnage a son apparence propre, malgré quelques évidentes ressemblances pour certains d’entre eux. Les décors des différentes maps de batailles sont honorables pour le genre tactical, mais c’est surtout ceux que l’on voit lors des séances d’exploration qui impressionnent par leur prestance. Et ne parlons pas dragons et en particulier les dragons sacrés, de véritables fresques sous format 16-bits malgré leur aspect étrange ou menaçant, dont le style artistique rappelle le monster design des FF ou des SaGa en encore plus poussé.
Alors que l’on croyait le summum atteint avec FFVI, Romancing SaGa 3, Chrono Trigger ou les jeux Mana, Bahamut Lagoon parvient encore une fois à nous décrocher la mâchoire.
Tout en réalisant une prouesse artistique et technique, la patte artistique du jeu forge définitivement son identité visuelle et projette le joueur dans l’univers du jeu comme peu de jeu savent le faire.
Des décors travaillés, des sprites grands et détaillés, des animations fluides, le jeu est une vraie claque graphique. Pas mal pour un Tactical !
L’univers du jeu
Le jeu nous plonge dans l’univers d’Orelus, un monde non pas constitué d’une unique planète, mais d’îles et continents flottants appelés « lagons ». Une idée largement popularisée avec des jeux comme Skies of Arcadia ou Baten Kaitos, mais assez peu commune dans un jeu vidéo pour l’époque (le concept de continent flottant a bien sûr existé dans des jeux comme Chrono Trigger, mais cela n’était pas étendu à l’univers entier du jeu).
Le jeu ne nous donne malheureusement pas la possibilité de voyager librement entre ces « lagons » comme le proposeront plus tard les jeux que j’ai mentionné, mais cela permet tout de même de créer une esthétique très particulière au jeu, portée par des décors grandioses fait d’une 2D sublime, résultat du travail des orfèvres de chez Squaresoft.
La particularité du monde d’Orelus n’est pas seulement d’être faits de continents flottants : les dragons y tiennent un rôle important, et notamment les Dragons sacrés, piliers du monde. Nous ne serons donc pas étonnés de voir apparaître Leviathan, Jormungand ou Bahamut, sans que cela n’implique une quelconque filiation avec Final Fantasy.
Ces deux idées (lagons et dragons) vont permettre aussi de poser les bases du scénario : le monde d’Orelus est rongé par les guerres, causées par les ambitions de l’empire de Granbelos et de son dirigeant, Sauzer. Sans grande surprise, son but est de conquérir Orelus et d’obtenir le pouvoir des dragons sacrés. Pour cela, il a besoin du pouvoir de la douce princesse de Kahna, Yoyo (ne me regardez pas comme ça, c’est pas moi qui ait choisi ce nom !), capable de communiquer avec les dragons.
Nous incarnons Byuu, éternel héros muet et renommable dans lequel le joueur peut se projeter, et accessoirement capitaine de l’escouade de dragonniers de Kahna, qui au début du jeu défendra son pays et son royaume dans une ultime bataille, sans succès. Le roi est tué, la princesse enlevée, et les soldats survivants obligés de fuir leur patrie, tombée aux mains de l’empire... Mais cela ne suffit heureusement pas à éteindre la flamme de la fierté des soldats de Kahna, et quelques années plus tard, la résistance s’organise pour la contre-attaque. Très vite, nous comprendrons que tout ceci fait partie d’un évènement plus grand, une prophétie impliquant le « Dragnar », l’élu des dragons, et le réveil des dragons sacrés qui mènera à « une nouvelle ère »...
Un début forcément extrêmement classique, dans les standards de la grande fantasy de l’époque, qui plonge immédiatement le joueur dans l’univers du jeu. Pourtant, très vite les codes classiques vont laisser la place à des développements inattendus notamment du côté de l’empire, et surtout, renverser le sempiternel cliché de l’histoire d’amour entre le héros et la princesse, quitte à jouer avec le cœur des fans (qui l’ont très, TRES mal pris, mais j’y reviendrais), cette dernière tombant finalement amoureuse de son ravisseur : Palpaleos, général de l’empire et bras droit de l’empereur (sacré syndrome de Stockholm quand même).
C’est un des premiers points forts du jeu : le jeu dépeint des personnages travaillés aux personnalités très marquées voire exagérées, comme le veut le style japonais. Quelque chose que l’on avait encore peu l’occasion de voir dans le genre du T-RPG jusqu’à présent (même chez Fire Emblem, ce n’était pas aussi poussé). Les possibilités de mise en scène sont évidemment très limitées sur la 16-bits de Nintendo, mais Squaresoft a déjà prouvé son savoir-faire en la matière sur la machine, et on retrouve avec plaisir dans Bahamut Lagoon les dialogues inventifs et les animations et mimiques burlesques des personnages, marque de fabrique des jeux Square de l’époque, qui les rendent on-ne-peut-plus attachants. Enfin pour être honnête, la boîte a fait mieux sur de précédents jeux, mais cela reste agréable de retrouver leur « patte narrative » ici.
Plus surprenant en revanche est comment le ton en apparence dramatique du scénario cède régulièrement la place au comique, avec un humour débile que l’on qualifiera de « typiquement japonais ».
Ainsi aura-t-on droit à tour de rôle aux minauderies de Sendack, vénérable ancêtre de la troupe à l’attitude très efféminée dont on soupçonne les tendances homosexuelles, puissant mage s’auto-dépréciant en vieillard sénile et demandant au héros de le porter sur son dos ou de lui faire un câlin ; les multiples phrases lourdes de double sens et de sens-entendus comme les membres de la troupe de Byuu qui « deviennent adultes » à un certain moment du jeu ; ou encore le ramassage d’une crotte de dragon (sic) qui donne lieu à une étrange légende selon laquelle celui qui en mange s’ouvrirait vers de nouvelles voies spirituelles en lien avec les dragons... Le tout au milieu des dialogues complètement barrés avec les différents membres de l’équipage, tous plus tordus les uns que les autres, à en faire passer notre héros muet pour le plus « normal » de tous.
Et c’est sans oublier les multiples objets étranges que l’on peut récolter au cours de l’aventure, entre les étranges résidus du cracra Gunso que l’on obtient quand on lui parle, les mystérieux « ??? » de princesse que l’on obtient par exemple en fouillant le lit de ladite princesse, ou les onéreux livres érotiques qui peuvent donner un coup de boost à l’attaque des dragons si vous les nourrissez avec, sans oublier de faire baisser leur intelligence derrière... Vous voyez le topo.
Square nous avait déjà habitué à cet humour douteux par petites doses dans certains de leurs jeux, ici ils se sont visiblement fait plaisir. Malheureusement, j’ai trouvé que cette surabondance de comique gâchait un peu la dramaturgie de l’univers, mais quelque part c’était sans doute voulu par les développeurs. Au final, cela fait tout de même partie des charmes du titre, qui en a bien d’autres à offrir !
Les dialogues sont parfois à la limite entre le comique et le douteux.
Le gameplay
En effet, ce n’est pas tant pour sa narration que pour ses mécaniques de jeu que Bahamut Lagoon a su se faire une place dans le cœur des joueurs. Faisant le choix audacieux du Tactical-RPG a une époque où le genre était en plein essor (Fire Emblem, Langrisser, Shining Force, Ogre Battle, Tactics Ogre...) mais encore réduit à un public de niche, le soft expérimental de Square apporte de nouvelles idées pour se démarquer du genre.
En premier lieu, une gestion particulière des combats. Le jeu offre deux approches de ces derniers : les attaques à distance, généralement possibles grâce aux magies, toucheront toutes les unités de la troupe visée avec une unique attaque sans risque de représailles ; au corps-à-corps en revanche, toutes vos unités au sein de la même troupe pourront attaquer et donc faire plus de dégâts, mais en contrepartie l’adversaire peut lui aussi riposter. Une prise de risque récompensée par un bonus d’exp et de butins en fin de combat.
En effet, ici vos unités fonctionnent par groupes de 4, qui sont fixés en début de jeu mais que vous pourrez vite répartir comme bon vous semble. Cela à son importance, car regrouper ou séparer les différentes classes du jeu a un impact : les techniques et sorts seront plus puissants si plusieurs unités dans la troupe peuvent les utiliser (ex. : la puissance d’une magie de feu est multipliée par 4 si la troupe est composée de 4 mages), mais il peut être utile de répartir les forces au sein d’une unité pour qu’elle soit plus polyvalente (donc deux guerriers et deux mages, par exemple), d’autant que toutes les unités ne sont pas égales en termes de déplacement. Ainsi, une équipe entièrement composée d’armures lourdes avancera lentement, mais remplacez-en une par une armure légère, et vous augmenterez la capacité de déplacement de toute la troupe d’une case.
Le jeu comprend une douzaine de classes, donc il y a de quoi faire pour composer son équipe. Et on retrouve les petits délires de programmation de Squaresoft avec notamment les Mini-Devils, classe très difficile d’utilisation puisque la réussite de leurs actions se fait de manière aléatoire... Ils ne dévoilent leur véritable potentiel qu’en étant associés à certains types de dragons ou d’unités.
Vous allez pouvoir compter sur une bonne trentaine d’alliés, tous avec leur propre design !
Le jeu offre donc une dimension stratégique intéressante dans la gestion des unités, et il en va de même pour le terrain. S’il n’y a pas de bonus associé au terrain comme dans certains T-RPG, il est néanmoins possible d’interagir avec lui par le biais des magies : lancez un sort de feu sur une forêt pour y mettre le feu et infliger des dégâts à chaque tour aux troupes se trouvant sur les cases en train de brûler ; lancez un sort de glace sur l’eau pour la geler et créer une passerelle pour atteindre une zone spécifique ; ou lancez un sort de foudre pour détruire les bâtiments ou les canons ennemis et leur mettre des bâtons dans les roues. Les différentes maps du jeu sont d’ailleurs suffisamment variées pour offrir régulièrement l’occasion au joueur de se servir de ces possibilités stratégiques.
Autre point novateur pour le genre (même si d’autres jeux ont déjà lancé l’idée, notamment les Shining Force), la présence de passages d’exploration comme un RPG classique entre deux batailles. Ces phases restent assez limitées et l’on peut rarement aller très loin, mais elles permettent de se réapprovisionner entre deux combats et de parler avec les différents membres de l’équipe avec des dialogues mettant en avant leurs personnalités. Cerise sur le gâteau, de nombreux objets cachés très utiles se cachent aussi dans les éléments de décor, comme c’était de coutume à l’époque. De même, parler à ses alliés pour déclencher certains événements nous octroie souvent une récompense, avec dans certains cas un personnage à recruter à la clé.
Mais bien entendu, l’idée phare du jeu qui le rend si original est la présence des dragons dans votre armée ! Ces derniers sont considérés comme des unités à part entière et sont rattachés à chacune de vos troupes. Contrairement aux unités humaines, les dragons agissent selon leur propre volonté, donc de façon plus ou moins aléatoire. Une façon de compenser leur force de frappe monumentale, les dragons ayant des statistiques largement plus élevées que les troupes normales. Il est tout de même possible de leur donner des ordres, au nombre de trois :
- « Viens ! » est l’ordre le plus basique, le dragon suit la troupe à laquelle il est rattachée, et attaquera les ennemis à proximité de celle-ci ;
- « Attaque ! » est à double tranchant, le dragon attaque les ennemis selon ses envies, quitte à pénétrer sans vergogne dans leur base et se retrouver encerclé. Utile dans certaines situations, le risque de voir son dragon se faire rouer de coups par l’ennemi (en plus de rameuter les troupes jusque-là immobiles) reste assez élevé ;
- « Attends ! » est l’ordre de défense. Le dragon reste à proximité de sa troupe et n’agit pas, sauf parfois pour soigner.
Si le jeu est largement faisable avec ces trois ordres, il faut admettre que l’aléatoire des dragons est parfois plus un handicap qu’autre chose, entre l’impossibilité de leur désigner une cible à attaquer en priorité ou le fait qu’ils peuvent se poser n’importe où, le plus souvent sur la case où vous vous apprêtiez à déplacer une unité...
Tout comme ils n’agissent pas comme les unités humaines, les dragons ont leur propre mécanisme d’évolution : vous devrez les nourrir entre chaque mission, et ce avec tout ce qui vous passe sous la main ! Potions, armes, armures, objets de combat, livres ou objets atypiques comme le « doux souvenir » ou les « champignons pourris », tous les objets du jeu peuvent être donnés aux dragons, occasionnant une montée de stat en conséquence. Cette dernière est bien sûr déterminée par la nature de l’objet, et on devine logiquement qu’une épée ou une hache augmente la force, une armure la défense, un objet d’élément feu la statistique feu, etc.
La plupart des objets augmentent plusieurs stats à la fois, mais malheureusement rien n’étant indiqué par le jeu (option disponible uniquement en New Game +), on ne découvre quelles stats sont augmentées qu’en faisant des essais.
Malgré tout, les possibilités d’évolutions sont multiples, allant même jusqu’à récompenser les expérimentations du joueur avec un changement de forme du dragon, et pourquoi pas, de nouvelles capacités ! Chaque dragon dispose ainsi de près d’une quarantaine de formes différentes, pour autant de sprites à l’écran ! Bien entendu, beaucoup d’entre eux se ressemblent ou changent simplement de couleur, mais il faut saluer le travail de l’équipe artistique, tant le niveau de détail du pixel art force le respect. De même, les différences de capacités entre les formes sont parfois difficilement perceptibles, et il faudra tâtonner pour trouver une forme qui nous paraît vraiment plus puissante. Sans compter le risque de tomber sur une de ces formes bizarres qui, comme les Mini-Devils, réussissent leurs attaques de façon aléatoire (mais quand ils réussissent, les ennemis le sentent passer !). On aura donc vite fait de se perdre pour comprendre les différentes possibilités d’évolution des dragons et espérer atteindre leur forme ultime (qui correspond grosso modo au fait d’avoir maxé toutes les statistiques du dragon), ce qui sera une bonne chose ou non selon les joueurs, mais il est agréable d’avoir un jeu qui permette autant de liberté d’évolution.
Quelques formes qu’un dragon peut atteindre. Il y en a bien d’autres.
Au-delà du changement de forme, l’évolution des dragons est un aspect primordial du jeu et des combats, puisque cela influe non seulement sur les capacités qu’un dragon peut utiliser, mais aussi sur celles de sa troupe ! Ainsi, plus un dragon maîtrise d’éléments, plus la troupe associée augmente son panel d’attaques avec des capacités ayant ces mêmes éléments. Le niveau élémental d’un dragon est aussi pris en compte, et se répercute sur le niveau de l’attaque de votre troupe associée à cet élément. Il est donc plus judicieux, en tout cas en début de jeu, d’augmenter un seul élément pour chaque dragon et avoir un type d’attaque très puissant, plutôt que d’étaler l’évolution d’un dragon sur plusieurs éléments et avoir plusieurs attaques mais toutes de faible niveau.
Au passage, le jeu commence avec seulement 4 dragons, puis on en récupère progressivement deux autres et même un septième dans la seconde moitié du jeu, celui-ci nous donnant la possibilité de faire naître un bébé dragon qui héritera des meilleurs statistiques de ses deux parents.
Le concept des dragons et de leur évolution est donc une idée de game design originale et prenante, quoiqu’encore très perfectible, mais constitue clairement l’un des plus grands charmes du jeu.
Réception et impact
Voilà ce qu’est Bahamut Lagoon : un condensé du savoir-faire de Squaresoft en termes de graphismes 2D et de game design dans une tentative qui n’a certes pas réussi à créer un système parfait et sans failles, mais qui reste diablement original et fun à jouer. Son côté expérimental accuse de nombreux défauts, et en premier lieu l’équilibrage du jeu, celui-ci se retrouvant étonnamment trop facile : peu importe la façon dont on fait évoluer nos dragons, ces derniers sont si puissants que l’on éprouve peu de difficultés à finir les 27 chapitres du jeu, à part certaines batailles tout de même bien corsées. Une facilité pas vraiment aidée par l’IA simpliste des ennemis, qui préfèrent souvent attaquer vos solides dragons plutôt que vos unités plus fragiles. À l’inverse, l’absence d’indications sur le système d’évolution des dragons et autres soucis de game design (on ne peut sauvegarder qu’à la fin d’un chapitre, ou alors faire une sauvegarde « temporaire » durant une bataille) peuvent se révéler frustrant.
Ça n’empêche pas le jeu d’être l’un des grands témoins de cette époque bénie de Square, où en dehors de ses séries phares, la firme parvenait à mettre en œuvre le meilleur de son talent et de sa créativité pour proposer des œuvres uniques.
Aujourd’hui culte pour plusieurs d’entre nous, le jeu n’a évidemment pas eu l’accueil d’un Final Fantasy ou d’un Romancing SaGa quand il est sorti au Japon, mais aura tout de même eu un gros succès d’estime avec plus de 600 000 unités vendues sur le sol japonais.
Le jeu est un temps envisagé pour l’Occident, mais comme pour beaucoup de jeux sortis tardivement sur la 16-bits de Nintendo, Square jugera que le public occidental ne sera pas intéressé par un jeu qui sera forcément désuet alors que tous les regards se tournent vers la 3D... et la Playstation. Une raison assez logique, mais entre nous, je les soupçonne aussi de ne pas avoir voulu se lancer dans une localisation compliquée tant le jeu est bourré de références, dont certaines si connotées (sexuellement, notamment) qu’on imagine bien que le tout aurait été charcuté par la censure.
Qu’à cela ne tienne, comme pour FFV, Seiken Densetsu 3 et d’autres, le jeu bénéficiera de sa localisation non-officielle par les fans grâce à l’émulation, et participera lui aussi à l’essor de la fan trad. C’est notamment grâce à cela qu’il est devenu culte pour nombre d’amateurs de JRPG, marqués par son sublime pixel art et son principe novateur d’élevage de dragons.
La DA incroyable des dragons (ici les invocations) est sans doute ce qui a marqué le plus les joueurs.
Pour les souvenirs des joueurs japonais, en revanche... c’est plus compliqué.
Noté un petit 29/40 chez Famitsu, le jeu fait de bonnes ventes et est globalement apprécié, mais les fans (masculins surtout) ont aujourd’hui encore en travers de la gorge la « traîtrise » de la princesse Yoyo...
En effet, je ne me suis pas attardé plus que ça sur la romance entre le héros, Yoyo et Palpaleos dans l’article, pourtant elle a son importance. En fait, plus qu’un arc scénaristique anecdotique, cette romance tiens une place centrale dans l’histoire et est régulièrement mise en scène à chaque chapitre. Comme je le disais, le jeu sous-entend une relation entre Yoyo et le héros en début de jeu, à travers leurs souvenirs d’enfance, dont un en particulier où ils se promettent de revenir dans une certaine église quand ils seront plus grands pour se marier. Mais Yoyo est enlevée par l’empire en début de jeu, et fini par tomber amoureuse de Palpaleos qui vient s’occuper d’elle dans sa cellule.
C’est déjà un coup dur en soi pour les joueurs qui ont forcément projeté sur le personnage leur affection, mais ça ne s’arrête pas là : tout le long du jeu, le joueur a l’impression que Yoyo le « nargue » avec de nombreuses remarques blessantes, disant par exemple au héros « Je ne peux plus revenir à cette époque insouciante... » en faisant référence à leur enfance commune, tout en disant plus tard à son nouvel amant « nous vivrons heureux, comme à cette époque ! »...
Ou encore un « Il est bien plus rapide que Salamander ! » très douloureux pour le joueur (Salamander est le nom du dragon du héros), lancé alors qu’elle chevauche le dragon de Palpaleos. Tout ça pour que finalement Yoyo retourne bel et bien à la fameuse église pour se marier... avec Palpaleos, les deux tourtereaux s’embrassant sous les yeux du héros.
La princesse Yoyo, bourreau des cœurs à l’origine d’un traumatisme pour de nombreux adolescents japonais.
Bref, Yoyo n’a aucun tact et joue littéralement avec les sentiments du héros (et par extension, du joueur), qui plus est de façon assez gratuite. Une attitude qui a fait écho auprès de certains joueurs avec des personnages féminins d’autres jeux Square, si bien que suite à la sortie de Bahamut Lagoon, certains fans finiront par parler des スクウェア3大悪女Sukuea san dai-akujo, les « trois garces de Square »...
Quand je vous disais qu’ils l’avaient très très mal pris ! Encore aujourd’hui, nombreux sont ceux à le considérer comme un kusoge (jeu de merde) principalement pour cette raison...
Aparté : Pour ceux qui sont curieux de savoir qui sont les deux autres « garces », il s’agit de Mireille dans le tout premier Makaitoushi Saga sur GB, et de la princesse Alicia dans la dernière scène de Live-A-Live, dont j’ai déjà parlé. Certains y ajoutent aussi une quatrième en la personne de Linoa Heartilly... Si vous lisez le japonais et que vous voulez en savoir plus, voici un article là-dessus : ici
Bien sûr, cela ne concerne pas tous les joueurs, et nombre d’entre eux se sont remis de ce traumatisme en grandissant. Et bien entendu, la plupart d’entre eux se souviennent du jeu avec une certaine nostalgie. D’autres en revanche, regrettent amèrement encore aujourd’hui d’avoir donné leur nom au héros et le nom de la fille dont ils sont amoureux à Yoyo, coutume largement répandue parmi les joueurs japonais à l’époque... (Je vous dit pas quand ils ont fait la même chose avec Aerith )
Personnellement, j’ai trouvé audacieux de présenter une telle histoire dans un jeu vidéo, média qui nous a largement habitué au happy end avec le sempiternel mariage entre le héros et l’héroïne à la fin du jeu. Mais il faut admettre qu’ici cette romance est racontée de façon assez maladroite, n’amène aucune réflexion sur les vicissitudes de l’amour ni de réelle profondeur au personnage de Yoyo (mis à part que ce tiraillement amoureux est la source de ses nombreuses hésitations au cours du jeu), et ne sert dans le fond que très peu le scénario du jeu. Je me suis même effectivement demandé si ce n’était pas volontairement un énorme troll envers les joueurs japonais qui ont l’habitude de transposer leurs sentiments et leur affection sur des personnages en 2D... Si vous voyez de qui je veux parler.
Bref, intentionnel ou non, c’était sans doute maladroit de la part des auteurs du jeu. Cela dit, je trouve tout de même cette anecdote édifiante concernant les liens d’affection parfois malsains que les joueurs peuvent entretenir envers les personnages de fiction.
EDIT : je change un peu mon propos après avoir regardé un peu plus attentivement la fin. Il est clair que décevoir le joueur en faisant en sorte que Yoyo rejette le héros et tombe amoureuse d'un d'autre était la volonté des développeurs. Mais loin d'être une moquerie envers certains fans, ils ont vraiment tenté de construire leur histoire avec pour base cette déception amoureuse. Et même si certains passages s'avèrent très maladroits, la fin rattrape un peu en mettant en avant le fait que le héros grandit de cette déception. On peut donc dire que l'idée de vivre une déception amoureuse et d'en tirer des enseignements pour devenir plus mature est au cœur du thème du jeu, n'en déplaise aux fans toujours amers envers le jeu, le scénario ou le personnage de Yoyo.
Certains joueurs ne se sont toujours pas remis de leur désespoir.
Au final, est-ce parce que le traumatisme des joueurs en a dissuadé Square, ou est-ce parce que Bahamut Lagoon était voué dès le départ à n’être qu’une expérience éphémère, toujours est-il qu’il n’aura jamais connu de suite malgré son succès, ni officielle ni spirituelle. Ce savant mélange de tactical et d’élevage de dragons ne sera jamais réutilisé par personne, contribuant à faire de Bahamut Lagoon une œuvre unique et atypique dans le catalogue de Square.
Méfions-nous des homonymes : il existe bien un Blood of Bahamut sorti sur Nintendo DS en 2009 et uniquement au Japon, mais à part son titre, il n’a rien à voir ni en termes d’univers, ni en terme de gameplay. Son seul lien est d’avoir été écrit et dirigé par Motomu Toriyama, mais ce dernier n’a jamais confirmé de lien entre les deux jeux.
D’autres on fait le rapprochement avec un certain Racing Lagoon sur PSX, autre jeu obscur et oublié de Squaresoft n’ayant là encore aucun lien (en même temps, c’est un jeu de course dans un univers contemporain !), si ce n’est encore une fois la présence de Motomu Toriyama au scénario et de Noriko Matsueda à la bande-son (dans un style mélangeant électro et jazz-fusion de façon remarquable).
Il est du coup fort regrettable de ne pas avoir donné suite au concept du jeu, qui aurait largement mérité d’être peaufiné et amélioré. Faudrait-il alors en faire un remake ? Tel quel, je pense que cela risque de surtout porter préjudice au jeu : les mécaniques, la progression, l’écriture barrée des personnages, tout cela est fortement teinté de l’ambiance des jeux des années 90, et un remake ne ferait à mon avis qu’accentuer les failles et défauts du titre. Mais je prie tout de même pour qu’un jour, dans un élan de lucidité, Square-Enix se souvienne de ce jeu et s’en inspire pour créer de nouvelles œuvres atypiques de ce genre...
Voilà, comme d’hab, j’espère que ce petit dossier vous aura plu, et dans tous les cas n’hésitez pas à partager vos impressions ou vos souvenirs du jeu en commentaire ^^
Vous ne trouvez pas que ça manque de partage de musiques de JV par ici ?
Chaque semaine (sauf contrainte), je choisirais un thème au pif, qu'il soit concret (type de jeu, d'univers, de personnage, d'animal...) ou abstrait (un concept, un sentiment, une philosophie...). A vous de partager ensuite en commentaire une musique d'un jeu - ou plusieurs, mais restez raisonnables et n'en partagez que 5 maxi ! - qui selon vous correspond à ce thème !
Idéalement, indiquez le nom du jeu et du morceau choisi, et surtout pourquoi vous l'avez choisi pour ce thème
Sauf si c'est précisé par le thème, il n'y a pas de contrainte : tout type de jeu, toute console/support, toute époque sont acceptés.
Thème du jour : Les pirates
Hardi moussaillons ! Les pirates, y’en a dans tous les jeux. Un cache-œil, une jambe de bois, et surtout une bonne pétoire. Un pirate, ça pille, ça tue, et pis ça amasse des trésors aussi. Mais surtout, un pirate, ça aime la mer. Sans ça, c’est pas un bon pirate. Hein ? T’sais déjà c’est quoi un pirate ? Alors va m’chercher une musique de pirate, et plus vite que ça ! Quoi ? T’sais pas quoi mettre ? Bah tu mets une musique de jeu où y’a des pirates, morbleu ! Ou au pire, une musique de niveau où y’a un pirate, même si le jeu n’a rien à voir. Ou une gigue de pirate, je sais pas moi. Mais trouve un truc, sinon tu sais ce qui t’attends... Un joli p’tit bain avec les requins, har har harrr !
Hiii non, pitié, pas les requins !... Hum, bref, voici ma petite sélection ! ^^
Titre : Main Theme
Jeu : Donkey Kong Country 2
Composé par : David Wise
Pour son second opus, Rare décide d’emmener les Kong sur l’île de King K. Rool, et pour mieux les accueillir comme il se doit, tous les Kremlins se griment en pirates !
Le main theme (alias l’écran-titre) retranscrit à merveille cette atmosphère de piraterie. Peut-être grâce à sa petite ressemblance avec le thème principal du film Hook sorti quelques années avant...
Titre : Pirates Ahoy !
Jeu : Final Fantasy V
Composé par : Nobuo Uematsu
Les pirates ont fait partie de l’univers de Final Fantasy dès le premier opus, car après tout, point de fantaisie sans pirates ! Mais il faudra attendre FFV pour que ces derniers prennent une certaine importance, et aient droit à un thème propre. Par extension, c’est aussi le thème de Faris, jeune femme devenue capitaine des pirates par la force des choses. Sans être le meilleur thème du jeu ni même de la série, c’est une composition simple inspirée des supposées « gigues pirates », et il faut dire que sieur Uematsu a bien réussi son coup pour évoquer en quelques notes nos fiers flibustiers.
Titre : Pirates
Jeu : The Legend of Zelda - Wind Waker
Composé par : Kenta Nagata, Hajime Wakai, Toru Minegishi, Koji Kondo (un des quatre, mais je sais pas qui )
Forcément, un jeu où Link doit parcourir les mers sur son navire, il fallait bien entendu y ajouter des pirates ! Mais ce thème, loin d’évoquer la férocité des corsaires, se veut plutôt lourd et pataud, et du coup un peu comique. Normal après tout, ces pirates sont quasi-inoffensifs et ont le cœur sur la main. Peut-être parce qu’ils sont dirigés par l’impétueuse Terra, dont on se gardera bien de révéler la véritable identité (comme si c’était pas assez obvious ). Quoiqu’il en soit, le thème fonctionne à merveille, et grâce à lui on s’attache vite à cette bande de joyeux drilles !
En voici d’ailleurs une très chouette cover live !
A vous de partager vos musiques de pirates préférées !
J’ai une liste de thèmes en tête avec largement de quoi tenir un ou deux ans, mais si vous avez d’autres thèmes à suggérer, n’hésitez pas, je les rajouterai à ma liste !
A la semaine prochaine et bon jeu !
Vous ne trouvez pas que ça manque de partage de musiques de JV par ici ? Je vous propose un petit "jeu" pour remédier à cela !
Chaque semaine (enfin, si je peux), je choisirais un thème au pif, qu'il soit concret (type de jeu, d'univers, de personnage, d'animal...) ou abstrait (un concept, un sentiment, une philosophie...). A vous de partager ensuite en commentaire une musique d'un jeu - ou plusieurs, mais restez raisonnables et n'en partagez que 5 maxi ! - qui selon vous correspond à ce thème !
Idéalement, indiquez le nom du jeu et du morceau choisi, et surtout pourquoi vous l'avez choisi pour ce thème
Sauf si c'est précisé par le thème, il n'y a pas de contrainte : tout type de jeu, toute console/support, toute époque sont acceptés.
Pour commencer, on va faire un thème simple... Je veux un écran titre !
Voici ma proposition !
Titre : Rising Sun
Jeu : Seiken Densetsu/Final fantasy Adventure/Mystic Quest
Composé par : Kenji Ito
Un thème doux et poétique, qui parvient à nous toucher et nous émouvoir malgré la faible qualité sonore de la Gameboy, et ce sans même avoir commencé l'aventure ! C'est fort ! Si la BO générale du jeu est excellente, ce thème s'en démarque pour à la fois représenter le jeu et la série dans son entièreté : onirique et envoûtante.
Une composition magistrale de Kenji Ito alors qu'il vient à peine de commencer à travailler chez Square.
Une musique qui a évolué avec la série, comme en témoigne son retour dans Children of Mana avec une réorchestration du plus bel effet.
Mystic Quest est aussi un de mes tous premiers RPG, même si je débats encore avec moi-même pour savoir si mon tout premier RPG a été Mystic Quest ou Secret of Mana
Une découverte sur Wild Arms 2 ? Mais pourquoi, alors que le jeu est connu ?
Eh bien c’est d’abord une découverte pour moi (oui je sais, je suis un mauvais fan de RPG, vu qu’il y en a plein que je n’ai pas encore fait ) et puis mine de rien, tout le monde ici connaît sûrement le premier Wild Arms, mais peut-être pas le deuxième vu qu’il n’est jamais sorti en France (raison pour laquelle je ne l’ai moi-même pas connu à l’époque, remarquez). Qui plus est, il souffre d’une étrange réputation de vilain petit canard de la série, et est globalement cité comme l’un des moins bons.
Mais qu’à cela ne tienne, il était plus que temps pour moi de rattraper mes classiques, et même pour ceux qui le connaissent, une piqûre de rappel ne fait pas de mal, pas vrai ?
Bref, mettez vos sombreros et vos roues crantées, il est temps de repartir pour le FarWest !
Wild Arms 2 Titre original : Wild Arms: 2nd Ignition
Consoles : Playstation
Développé par : Media Vision, Contrail
Edité par : Sony Computer Entertainment
Sortie : 2 septembre 1999 (JP), 2 mai 2000 (US)
Chacun des deux CD dispose de sa propre intro animée, toutes deux issues du talentueux studio Production IG.
Le premier Wild Arms sort en 1997 et remporte un joli succès d’estime au Japon comme en Occident, bien que moins impressionnant que la concurrence de l’époque (au hasard, FF7). Son charme, il le doit surtout à son ambiance « western », les vastes plaines désolées, le chara design mélangeant habilement le style manga et le far west, ou bien évidemment la musique rappelant fortement l’ambiance du grand Ouest américain (ou plutôt les westerns spaghettis, disons). Dans les faits pourtant, il n’était nullement question de cow-boy solitaires ou de duels au revolver, et l’univers n’était en réalité qu’un prétexte pour partir sur des thèmes bien plus proches de la fantasy japanime, avec des golems antiques, des civilisations perdues, de la magie, etc. tout proposant un monde à l’esthétique se situant entre le western et le steampunk.
Wild Arms 2 reprend évidemment tous ces éléments, et en même temps s’en écarte beaucoup. On pourrait même dire que l’ambiance western y est bien moins prononcée, ce qui fut l’une des raisons du désamour du jeu auprès du public américain. Est-ce que cela veut dire que Wild Arms 2 est moins bon que son aîné ? Loin s’en faut ! De mon point de vue, il en est même la digne suite.
On retrouve bien évidemment l’essentiel des éléments originaux du premier volet, à savoir le système de combat au tour par tour avec la jauge de « Force » qui permet d’utiliser les ARMs et autres techniques propres à chaque personnage, les objets spéciaux servant à l’exploration et les donjons, le système de course particulier du premier volet, le système de Crest auquel on associe les magies, les invocations via les runes, l’utilisation du scanner pour révéler lieux ou objets cachés sur la carte, et bien d’autres choses.
D’une manière générale, tout dans l’esthétique et le gameplay du jeu rappelle le premier Wild Arms, si bien que s’il n’y avait pas eu le passage en 3D intégrale pour les décors et les quelques ajouts de gameplay, on aurait pu croire qu’il s’agissait du même jeu... Une critique qui a d’ailleurs été faite au jeu, là où d’autres séries étaient généralement capables de proposer un grand renouvellement à chaque épisode (au hasard FF, encore).
On passe à la 3D intégrale pour les décors. Sympa pour jouer sur la perspective lors des donjons, mais ça a quand même bien mal vieilli.
Cela dit, je trouve les ajouts du jeu non négligeable, car Wild Arms 2 instaure un certain nombre de features importantes qui deviendront récurrentes par la suite dans la série :
Déjà, le jeu propose d’esquiver les combats aléatoires, via un « ! » qui apparaît lors de l’exploration pour signifier qu’un combat va arriver. On peut alors l’éviter d’une simple pression sur le bouton « carré ». Un peu cheaté puisqu’il n’y a aucune limite d’utilisation (cela arrivera avec les épisodes suivants), cela reste une feature encore bien rare à l’époque.
On trouve aussi des cristaux qui parsèment les donjons et permettent de regagner les HP perdus en combat.
En dehors des équipements et des ARMs à customiser (cette fois, deux personnages disposent d’un ARM), les personnages ont accès à des Personal Skills (en gros, des skills passives pour améliorer les stats ou obtenir divers effets utiles) que l’on peut acquérir en ville avec des points gagnés lors de l’obtention de niveau. Les skills ne semblent pas bien coûteuses au premier abord, mais elles sont trop nombreuses pour qu’on puisse toutes les acquérir, il faudra donc faire des choix.
Le jeu assouplit aussi son système de Force, celle-ci se remplit plus facilement et il devient plus aisé d’utiliser les techniques associées ainsi que les invocations (qui nécessitent tout de même d’avoir Tim dans l’équipe). Les magies, qui consommaient auparavant des MP, fonctionnent maintenant avec la Force ce qui les rend moins lourdingue à utiliser (fini la nécessité de régénérer ses MP !), et surtout plus efficaces. Peut-être trop d’ailleurs, car ces dernières sont surpuissantes, surtout si on parvient à exploiter la faiblesse élémentaire des ennemis (je veux dire, faire 3000 de dégâts via un point faible élémental quand une attaque de base fait « au mieux » 800 dégâts, c’était peut-être un peu abusé...).
C’est malheureusement un défaut du jeu, tous ces ajouts pourtant très appréciables facilitent grandement le jeu, à tel point qu’on roule sur la plupart des combats, y compris les boss. Il faudra attendre la fin du CD1 voire le début du CD2 pour que les combats se corsent, avec des attaques douloureuses qui peuvent parfois tuer un personnage d’un seul coup, mais dans l’ensemble il n’y a rien de difficile même pour un novice. Heureusement, le joueur acharné (que je ne suis plus, je n’ai plus autant la patience de farmer comme je le faisais à l’époque ) trouvera son bonheur avec la multitude de boss cachés bien balèzes que l’on peut combattre dans la dernière partie du jeu. Comme dans tout bon JRPG qui se respecte, quoi !
Les gros boss ont plusieurs parties à détruire, dont l’unique intérêt est de vous filer de meilleures récompenses de combat. Bien trouvé !
En dehors de ces ajouts, le jeu fait le choix comme je le disais de la 3D pour les environnements (les personnages restent en 2D), et le level design jouera régulièrement sur les effets de perspective pour créer des énigmes ou cacher des objets. Même chose pour les combats, où cette fois même les personnages sont en 3D, ce qui était déjà le cas dans le premier épisode mais ici, alliés comme ennemis sont tout de même plus détaillés et moins « sac à patates ». Une remise à niveau technique appréciable, qui reste néanmoins bien en-deçà de ce que d’autres jeux pouvaient offrir en matière de 3D à l’époque sur la console. Mais que voulez-vous, la 3D, c’était l’avenir, la 2D était vouée à disparaître...
Après, cela n’empêche pas d’avoir de jolis efforts de mise en scène, j’ai d’ailleurs beaucoup aimé ces petites séquences de « suspense » qui précèdent chaque boss ! Avec en plus leur look de gros monstres bizarres, on sent comme une inspiration des films de tokusatsu type Ultraman tout le long du jeu, renforcée par le nouveau pouvoir du héros, capable de contrôler son démon intérieur lors d’un combat pour se transformer en une sorte de super-héros.
Une preuve de plus que la série assume complètement son héritage issu de la pop culture japonaise, à laquelle se rajoute le look des personnages typique des animés des années 2000 (que je trouve, personnellement, bien plus classe que beaucoup de chara design récents), plutôt qu’une quelconque volonté de rendre hommage au western ou à la culture américaine. C’est peut-être le point qui aura fâché le plus de joueurs (surtout aux US en fait), car là où le premier pouvait encore faire illusion, le second s’éloigne très loin de tout ce qui pouvait ressembler au monde des cow-boy et des indiens, en particulier tout ce qui concerne le scénario et les personnages.
Du coup, exit Rudy aux allures de gentil cow-boy solitaire et muet, place à Ashley travaillant comme mercenaire dans une unité des forces spéciales de Meria Boule, et quant à lui parfaitement loquace. Ayant terminé sa précédente mission tant bien que mal, son unité est tout de même conviée à un banquet d’honneur pour une cérémonie sacrée, mais qui tourne à la catastrophe alors que les soldats essayent un à un de retirer l’épée sacrée comme le veut la tradition... Tous sont transformés en démon, Ashley compris, mais ce dernier parvient tout de même à garder un semblant de conscience et fini par retirer l’épée, et « tout rentre dans l’ordre » (en devant massacrer ses anciens compagnons au passage, mais bon).
Comme le précédent Wild Arms, le jeu propose de suivre trois scénarios de départ avant que les personnages ne se rejoignent pour faire le reste de la route ensemble, et les deux autres membres de l’équipe sont donc Lilka, une apprentie magicienne maladroite qui essaye de marcher sur les traces de sa sœur, disparue lors d’un accident de magie ; et Brad, ex-héros de l’armée de libération de Slayheim, révolte ayant eu lieu il y a quelques années, mais devenu criminel suite à la trahison de son ancien camarade d’escouade.
Nos trois héros seront recrutés par un certain Irving pour former le groupe ARMS (Awkward Rush & Mission Savers si on joue à la version japonaise... Pour une fois, la trad US s’en sort mieux avec un Agile Remote Missions Squad plus inspiré ), considérés comme une troupe d’élite qui devra œuvrer pour la paix et la sécurité en accomplissant diverses missions aux quatre coins du globe. Et plus particulièrement déjouer les plans d’Odessa, une organisation terroriste qui semble vouloir renverser l’ordre des choses, ce qui implique évidemment détruire le monde...
Tous les personnages, héros comme antagonistes, sont plus travaillés quand dans le premier volet, avec parfois même des dialogues en combat.
A cela on peut ajouter trois autres personnages au sein de l’équipe (dont un optionnel), ayant tous leurs capacités spécifiques et donc un style de combat propre, ainsi que toute une galerie de personnages secondaires que l’on aura la chance de nommer (j’ai presque halluciné sur le nombre de personnages, jouables ou non, que l’on doit nommer durant les premières heures de jeu, et même parfois plus tard ! Un plus toujours appréciable et typique de l’époque, puisque cette feature a largement dis-parue des jeux récents). Tous sont très attachants et immédiatement identifiables par leurs mimiques (Brad qui fout des coups de tatane, Lilka qui agite les bras dans tous les sens...), leur personnalité est largement mise en avant dans les dialogues encore minimalistes mais tout de même plus nombreux que dans le précédent volet qui pouvait être assez avare là-dessus.
Malheureusement, passé les premières heures de jeu qui laissent présager des personnages travaillés, on retombe vite dans les clichés habituels, et l’écriture des dialogues et des personnages se montre régulièrement assez pauvre, pour être honnête. En même temps, ça n’a jamais été la grande force des Wild Arms, et ça reste dans les standards de beaucoup de productions de l’époque.
Un petit mot en revanche sur la traduction US, qui traduit trop souvent de façon littérale le japonais (étrange, alors que les américains sont plutôt réputés pour s’écarter tellement du texte original qu’il n’a finalement plus rien à voir) donnant lieu à des phrases franchement bizarres. Heureusement, cela n’empêche pas de comprendre le propos du jeu dans sa globalité.
Liz et Ard sont les comic-relief du jeu, mais j’ai plus souvent eu envie de rire devant les dialogues douteux que pour leurs interventions anecdotiques...
Comme dit plus haut, le monde a beau être le même que dans le premier (enfin, en vrai ils partagent juste le même nom : Filgaia), l’univers est devenu clairement plus moderne, plus « sérieux » même, au vu du background de départ des personnages. Je m’avance peut-être un peu, mais on sent que FF7 et FF8 sont passés par là, entre les histoires de soldats, de terroristes et d’organisations gouvernementales... Ce qui n’est pas forcément un mal de mon point de vue, car cela donne à l’univers du jeu un background bien plus développé et construit que le premier Wild Arms et sa relative simplicité. Mais cela n’empêche pas les deux jeux de partager pas mal de points communs dans la narration et les thèmes abordés, notamment une fois le second tiers du jeu passé (en gros l’arrivée au CD2), et de retrouver à nouveau le côté fantasy à base de vieilles légendes et de dragons divins, mélangé à un style résolument « mécanique » propre à la série et aux univers de fantasy japonais en général (on se retrouve quand même à affronter une arme nucléaire qui prend la forme d’un dragon... Quand un autre se transforme en vaisseau volant façon Macross ). Mis à part ça, je n’ai vu aucune référence au premier Wild Arms, les deux jeux n’étant à priori pas directement liés.
Le scénario est donc plus fourni que précédemment et n’est pas dénué d’intérêt en abordant le thème du « héros » sous des angles différents à travers les questionnements des différents personnages. Malheureusement n’est pas FF qui veut, et il faut bien admettre que le tout est traité de façon très consensuelle, et ce sera bien évidemment le pouvoir de l’amitié qui sauvera le monde à la fin. On n’échappe donc pas aux sempiternels clichés (le faux traître, le personnage qui se sacrifie pour mieux revenir en parfaite santé plus tard, la fausse fin qui révèle le véritable ennemi du jeu, j’en passe et des meilleures... On ne va pas se leurrer, le scénario est assez prévisible, comme d’habitude), mais au moins on retrouve ce qui faisait l’une des forces des JRPG de l’époque : les événements s’enchaînent à bon rythme avec une réelle sensation de progression et de parcourir le monde, où chaque endroit sera différent des précédents. La structure du jeu reste un peu redondante à cause du fait que les héros se retrouvent systématiquement au QG après chaque mission, et il arrive bien sûr que faute d’indications claires, le joueur se sente perdu à plusieurs reprises sur la marche à suivre.
Mais l’aventure se fait sans temps mort et on ne s’ennuie pas, d’autant que comme à l’accoutumée à l’époque, il y a une foultitude d’objectifs annexes intéressants à faire : quel plaisir de partir à la recherche des Crest, des Gardiens, des ARMs ou pouvoirs cachés des personnages, de fouiller les différents continents à la recherche des Duplicator (qui ouvrent certaines portes et coffres spéciaux, renfermant généralement de bons objets) ou des Lucky Card (gros boost d’XP), et de toutes les capacités des différents personnages ! A cela s’ajoute quelques objectifs originaux plus anecdotiques comme le bestiaire à remplir, mais qui sont toujours sympas à faire et poussent encore plus s’approprier le jeu.
Ces objectifs, disséminés tout le long du jeu (et pas uniquement à la fin voire en post-game comme c’est le cas aujourd’hui) permettent de sortir un peu de la trame principale tout en offrant de véritables récompenses pour renforcer son équipe et donnent une vraie valeur à l’exploration et à la recherche. Car bien entendu nombre de ces objets ou objectifs annexes sont bien cachés, et beaucoup peuvent être manqués même en fouillant assidûment... A moins de suivre un guide, comme c’était de coutume à l’époque.
Sans être la meilleure sur ce point (FF lui vole encore la vedette), la série Wild Arms peut se targuer de proposer un contenu conséquent et intéressant en termes de quêtes annexes, sans avoir recours aux quêtes FeDex barbantes que l’on a aujourd’hui...
Les donjons sont dans l’ensemble assez simples, mais certains nous font frôler la crise de nerf, entre level design volontairement labyrinthique ou énigmes absconses.
Je découvre Wild Arms 2 sur le tard, mais le plaisir est présent comme si je l’avais découvert à sa sortie. A l’époque, le jeu avait été boudé pour son manque d’ambition et son trop grand écart envers la référence du genre à l’époque qu’étaient les Final Fantasy, mais il s’en sort tout de même honorablement bien parmi les RPG de la console en renforçant la recette établie par le premier. On peut regretter la disparition de ce petit côté « aventure façon Far West » qui faisait le charme de son prédécesseur, mais en compensation l’univers de Wild Arms 2 est plus complet et intéressant, comme le reste du jeu. Malgré les clichés et le gros coup de vieux qu’accuse le jeu (moi qui était si réticent à l’époque quand sont apparu les premiers jeux en 3D notamment sur Playstation, je m’aperçois que j’ai finalement pas de mal à m’y replonger 20 ans après, comme quoi ), j’ai été plongé dans l’univers et l’ambiance si typique de la série, j’ai retrouvé un gameplay agréable et fun à jouer, et ça fait un bien fou. J’aurais tout de même aimé une traduction à la hauteur histoire de vraiment apprécier les dialogues, mais tant pis. C’est aussi ça, le « charme » des jeux rétro....
Enfin surtout, je sais que je radote, mais je ne peux m’empêcher de le comparer aux RPG actuels et de me dire que la plupart d’entre eux (notamment tous ceux jouant la carte du rétro et dont j’ai déjà largement parlé sur ce blog) arrivent à peine à la cheville d’un jeu sorti 20 ans plus tôt et déjà décrié à sa sortie ! T_T
Je vous laisse avec une sélection des musiques du jeu, signées bien évidemment par la talentueuse Michiko Naruke, compositrice attitrée de la série Je trouve l’OST globalement moins émouvante et prenante que celle du premier, mais retrouver son style fait toujours plaisir, et je trouve qu’elle a assez bien retranscrit l’ambiance nécessaire à ce deuxième épisode. Enjoy !
Histoire de s'occuper pendant le confinement, je vous partage une petite découverte sympa, à savoir un nouveau podcast lancé par les équipes de Third Edition (publication de divers livres sur le JV) et Wayô Records (spécialisé dans l'édition des musiques de JV et concerts), dont le sujet sera de mettre en avant certaines musiques de jeu ou certains compositeurs, via des invités qui, à priori, maîtrisent leur sujet ^^
Leur premier épisode concerne el famoso compositeur de Final Fantasy : Nobuo Uematsu. Mais pour une fois, ils ne s'attarderont pas sur son travail sur cette série mythique, mais sur les autres œuvres sur lesquelles il a travaillé, et qui restent encore assez méconnues.
Quoiqu'il en soit, c'est très intéressant surtout pour briser quelques idées préconçues sur le monsieur, et ça peut toujours s'écouter durant vos exercices de remise en forme (il faut bien se dérouiller un peu, puisqu'on ne peut pas sortir) ou une partie de votre jeu en ligne préféré
Sur ce, bon jeu, bon courage pour le confinement, et faites attention à vous !
Eh oui, Octopath Traveler, le fameux RPG old-school de Square-Enix qui aura beaucoup fait parler de lui jusqu’à sa sortie. Je le termine « enfin » (en même temps je ne me suis jamais pressé pour finir mes jeux ), et je me dis que c’est l’occasion de revenir dessus une fois de plus, après presque deux ans passés. Alors, le RPG old-school retrouve-t-il enfin ses lettres de noblesse ?
Note : Je considère que la plupart d’entre vous avez déjà fait le jeu, donc je me permet de spoiler sans vergogne. Pour les autres, à vous de voir si c’est gênant pour vous !
Un peu de contexte
En Janvier 2017, alors que Nintendo présente enfin les premiers jeux de la Switch (dont on ne savait jusque-là pas grand-chose si ce n’est beaucoup de mauvaises nouvelles) lors d’un Nintendo Direct, Square-Enix annonce un certain Project Octopath Traveler à destination « exclusive » (entre guillemets, car plus rien n’est exclusif en ce bas monde, n’est-ce pas) de la console hybride. Les premières images magnifiques à l’esthétique nostalgique reprenant les RPG de l’ère 16 bits, sublimées par un jeu d’ombres et lumières et un rendu simili-3D résumés sous le nom de « 2D-HD », conquirent immédiatement le cœur de millions d’amateurs de RPG et de nostalgiques de tous poils.
Moi, de mon côté, j’étais tout de même assez perplexe puisque s’agissant d’une production Square-Enix, et après un Bravely Default très décevant pour ma part (au point où j’ai complètement dédaigné Bravely Second. Visiblement, je n’ai rien manqué) et un Lost Sphear mollasson, j’avais moyennement confiance en la capacité de SE à faire revenir les RPG de la grande époque via des productions volontairement old-school et à « petits » budgets (entre guillemets, car à mon avis ça reste toujours un budget bien plus conséquent que beaucoup de productions de certains studios nippons).
Mais en entendant les features proposées par ce nouveau projet, j’avoue que le jeu a attisé ma curiosité, et j’ai voulu lui laisser sa chance : en effet, on nous promet 8 histoires différentes à suivre autour de 8 personnages distincts, ces derniers étant catégorisés en deux alignements « Noble » et « Rogue » qui influeront sur des capacités hors-combat, chaque personnage ayant la sienne. Ainsi on pourra acheter les possessions des NPCs pour les revendre ou plus simplement les voler, enquêter sur eux pour obtenir diverses informations, les séduire pour qu’ils se joignent à nous en combat, ou à l’inverse les provoquer en duel. Le système d’alignement fait que si vous échouez dans l’utilisation de ces capacités, vous perdrez en réputation au sein des habitants de la ville, ce qui n’est à priori pas bon signe.
Des aspects de gameplay bien rares dans les JRPG, et qui m’ont rappelé les jeux les plus expérimentaux de Squaresoft et notamment les SaGa, ce qui est plutôt une bonne chose tant la créativité laissait à désirer dans beaucoup de dernières productions.
Le jeu signe aussi le retour des classes interchangeables avec la possibilité de combiner les compétences entre elles, tout comme le système d’Exaltation qui est grosso modo le système de Brave de Bravely Default. La nouveauté du système de combat, c’est surtout ce système de « Break », idée plus ou moins reprise de FFXIII, où en exploitant les faiblesses des ennemis on peut casser la défense adverse, l’immobilisant quelques tours pendant qu’on lui inflige de gros dégâts.
Ça, c’était le jeu sur le papier. Et ça promettait du bon voire très bon, d’autant que de l’aveux des producteurs eux-mêmes, le jeu se voulait être l’héritier spirituel du sacro-saint Final Fantasy 6... Il n’en faut pas plus pour que la hype soit à son comble. La démo sortie début 2018 et proposant aux joueurs d’essayer le début des scénarios de Primrose et d’Olberic convaincra la plupart des curieux (pas moi, j’avais poney) que l’on avait affaire à un bon cru, avec des scénarios aux thèmes profonds et plus sombres qu’à l’accoutumée, loin des RPG gnangnans de ces dernières années.
Le jeu sortira finalement le 13 juillet 2018 mondialement, et les premières notes et avis de joueurs tombent. Au moins, une chose est sûre : Square-Enix sont des champions quand il s’agit de diviser leurs fans...
Les premiers visuels présagent du bon.
Quand Octo passe, Final Fantasy trépasse
Je vous passe les explications des grandes lignes du jeu pour en venir directement à ce que j’en pense. Sans surprise, mon avis ne diffère pas beaucoup de celui de la moyenne des gens : c’était sympa, mais... il y a encore beaucoup de choses à revoir.
Au final, j’avoue que je ne sais pas trop si je dois être content ou déçu.
Mais je suis au moins sûr d’une chose : Octopath Traveler n’a rien à voir avec FF6. Je le sentais déjà avec les informations que l’on avait sur le jeu avant sa sortie, ça s’est confirmé une fois le jeu commencé. Que ce soit dans le fond ou dans la forme, dans ses scénarios ou dans ses mécaniques, le jeu ne présente en réalité que peu de similitudes avec le fameux chef d’œuvre de Square si ce n’est son aspect graphique et, pourquoi pas, sa bande-son.
En revanche, comme je le dis plus haut, le jeu tient bien plus de la série SaGa (pour ceux qui ne connaîtraient pas ou peu, je vous conseille très vivement d’aller voir de quoi il retourne, par exemple en lisant ce dossier assez complet que la team de Game Forever a partagé il y a peu sur Gamekyo !) dans la liberté qu’il propose au joueur et le fait de proposer des mécaniques atypiques comme les différentes interactions avec les NPC. Je vois aussi une certaine inspiration de Live-A-Live (dont j’ai longuement parlé ici, je vous invite aussi vivement à découvrir le jeu) pour le fait de proposer plusieurs scénarios et personnages distincts, un peu comme les SaGa d’ailleurs.
En tout cas, si Octopath doit me rappeler des RPG de l’ère 16-bit de chez Square, ce serait plutôt ces derniers. Je n’arrive même pas à comprendre comment les producteurs ont pu se targuer autant de s’être inspiré de FF6, tant le jeu en est très éloigné, et même oserai-je dire indigne.
Mais il faut croire que citer ces inspirations n’aurait pas été particulièrement vendeur. Parler de FF6, c’était l’assurance d’attiser l’envie des fans du monde entier, et puisque le jeu s’est finalement vendu à plus d’un million d’exemplaires (pardon, deux !), il faut croire que l’audace a payé...
Personnellement, je trouve ça dommageable pour le jeu, qui souffre alors de la comparaison avec le RPG culte de la SNES, quand citer tout simplement ses autres inspirations aurait été plus judicieux et aurait pu mieux faire passer la pilule.
Car Octopath Traveler a de nombreux défauts, mais aussi pas mal de qualités. Et il serait dommage de passer à côté.
Quand Octo passe, les pixels se surpassent
Sa première qualité, à peu près tout le monde est d’accord dessus : les graphismes sont magnifiques (si on aime les pixels, bien sûr). Force est de constater que le compromis « 2D-HD » mis au point par les développeurs fait des merveilles, et donne au jeu un rendu vraiment unique et intéressant. Niveau artistique le jeu n’est pas en reste, les décors sont très fournis et agréables à l’œil, et les sprites des ennemis et boss sont tout simplement sublimes. Je citerais tout de même deux bémols : les zones de flous constantes qui à mon sens sont bien trop prononcées et gâchent les décors, et la luminosité globale bien sombre qui rend même parfois difficile l’exploration, notamment dans les grottes.
Deuxième point qui met tout le monde d’accord, ce sont bien évidemment les musiques. Dans un style orchestral assez proche de ce qui a été fait pour Bravely Default, je les trouve néanmoins moins grandiloquentes et un peu plus touchantes que dans ce dernier. J’avais peur aussi qu’elles soient un peu trop « académiques » (terme que j’utilise pour dire que la musique est bien écrite et agréable à écouter, mais colle trop aux standards demandés pour le jeu et manque de personnalité) comme beaucoup de musiques de jeux ou animés récents, c’est un peu le cas mais ça n’empêche pas les compositions d’être bien trouvées et de rester dans la tête.
Les OST des grands RPG SNES resteront plus marquantes pour moi, mais j’écoute volontiers les musiques d’Octopath Traveler en dehors du jeu.
Yasunori Nishiki, qui était jusque-là parfaitement méconnu quand bien même il n’en est pas à son coup d’essai, avait bossé auparavant sur divers jeux arcades pour Konami (Quiz Magic Academy, ça parle à quelqu’un ? Non ? ). Pour Octopath, il a tenu à laisser s’exprimer sa personnalité à travers la musique du jeu, et il a bien fait.
Y’a pas à dire, le jeu est de toute beauté.
Quand Octo passe, les voyageurs se lassent
Puis il y a tout le reste. Des bonnes voire très bonnes idées gâchées ou mal exploitées, ce qui fait qu’en dehors de son habillage graphique et sonore, Octopath est un titre bancal.
Laisser le joueur libre de déambuler dans les vastes terres d’Orsterra et de pouvoir suivre les différents scénarios dans l’ordre de son choix était une idée louable, et même bienvenue dans un genre où la linéarité est tristement la norme. Mais dans les faits, les limites de niveau pour chaque zone sont tellement abusées qu’il est quasi-impossible d’explorer comme on veut, nous obligeant à faire les chapitres de plusieurs personnages avant de pouvoir avancer.
Impossible donc de suivre tous les chapitres d’un seul personnage à la suite, puisque la limite de niveau pour le chapitre suivant est bien trop grande pour être comblée facilement avec du farm, et de toute façon les ennemis ne feraient qu’une bouchée d’une équipe avec un seul personnage, ou même deux.
Le postulat de départ qui voulait que l’on suive l’histoire de son choix est donc perdu, puisqu’il faut impérativement recruter au moins 4 personnages pour avancer. A ce stade, on finit donc par se dire qu’il vaut mieux suivre directement les 8 scénarios à la fois, et l’idée de départ du jeu perd tout son sens...
Pourquoi ne pas avoir fait tout simplement en sorte que les monstres gagnent en puissance en même temps que les héros, comme ça a été fait dans FF8 ou dans les Romancing Saga ? On y aurait gagné en liberté sans trop frustrer le joueur.
Et le jeu n’est ainsi qu’une succession d’idées aux bonnes intentions mais mal appliquées dans leur conception :
Avec la séparation par chapitres aux limites de niveau fixes, on se retrouve avec une structure hyper redondante de ville → investiguer en ville en utilisant une capacité → donjon → exploration libre et qui ne varie pas d’un chapitre à l’autre. On ne se promène sur la carte que pour aller à notre prochain objectif en récoltant les coffres au passage, si bien que l’exploration en devient indigeste.
Au lieu de cela, on aurait pu avoir un système d’évènement libre qui nous permette d’avancer selon nos choix et de varier les situations, chose d’autant plus possible avec les capacités utilisables en ville et le principe de réputation.
De nouveau, on se retrouve avec une idée sous-exploitée, les capacités n’ayant qu’un intérêt limité et certaines même carrément inutiles : acheter ou voler, la question ne se pose pas, puisque qu’il n’y a aucune distinction entre les deux si ce n’est que dans le premier cas on perd de l’argent. Idem pour le défi et la provocation, H’aanit se retrouve désavantagée par rapport à Olberic, puisqu’elle se retrouve obligée de combattre avec les bêtes qu’elle a capturé, limitant les points faibles qu’elle peut exploiter. Pour les capacités restantes, c’est vraiment kiff-kiff entre les deux, et tout cela dépend finalement beaucoup des niveaux des personnages (puisque même dans le cas d’un pourcentage de réussite, celui-ci augmente avec vos niveaux).
Là encore, j’aurais bien vu des capacités qui mettent en valeur le rôle des personnages et créé une vraie profondeur de gameplay : on aurait pu avoir un système de prix variables comme ça s’est vu dans certains jeux (je pense aux Star Ocean, par exemple), nous permettant de fouiner les offres à bas prix avec Tressa pour revendre les articles ailleurs avec un bénéfice.
Même chose pour le vol, qui à part récupérer des objets gratuitement n’offre rien de palpitant. C’est tellement dommage de n’avoir aucune réaction de la part des NPC alors qu’on les déleste de toutes leurs possessions, ça rend la chose très formelle. On se contente de récupérer les objets et puis basta. Cela aurait pu constituer des défis à réaliser pour Thérion, pour récolter des objets rares ou obtenir des points auprès d’une guilde ou que sais-je, avec peut-être le risque de finir en prison.
Il en va de même pour un peu toutes les capacités. Il y avait, à mon avis, matière à développer ces compétences pour en faire un véritable outil de progression pour rendre chaque scénario unique. Même chose pour le principe de réputation qui est un vrai gâchis, alors qu’il y avait moyen de rendre cette idée vraiment intéressante...
Le jeu tourne autour du thème du voyage. Effectivement, on ne va faire que ça... Un peu de variété n’aurait pas été du luxe !
Mais dans l’absolu, ça reste un ajout intéressant du jeu et à défaut d’ajouter des mécaniques profondes, ça permet de renouveler un peu le gameplay via diverses quêtes annexes, et surtout d’offrir un peu de liberté au joueur : si l’on souhaite faire un parcours précis, il faudra trouver quels objets à acheter/voler auprès de quels NPC, quels personnages séduire/guider pour nous épauler dans un combat à venir, quels personnages étudier ou défier pour obtenir certaines récompenses, etc.De ce côté c’est très bien fichu et on sent que le jeu a tout de même été pensé pour que le joueur puisse se créer ses défis, et c’est clairement une bonne chose (vous avez dit speedrun ?).
A l’inverse, à partir du moment où l’on fait le jeu à 100% en une run (faire les 8 scénarios à la fois, ouvrir tous les coffres et ramasser tous les objets, faire toutes les quêtes...), ces features paraissent complètement superficielles, et ne font que ressortir la répétitivité du jeu. C’est malheureusement ce qu’il se passe pour la plupart des joueurs, puisque le jeu nous pousse finalement à aller dans ce sens, avec la « vraie fin » du jeu qui ne se révèle qu’après avoir terminé les huit scénarios ainsi que le donjon secret qui exige d’être extrêmement bien préparé, et donc d’avoir parcouru le monde à la recherche des meilleurs équipements et classes... Un défi final qui reste fort appréciable cela dit, ne serait-ce que pour avoir l’occasion d’exploiter à fond le système de combat contre un boss particulièrement sadique (j’ai tenu le premier round mais pas le deuxième, je n’avais monté que la moitié de mes personnages au niveau 70 ).
Au final, le jeu n’a pas vraiment su gérer l’équilibrage (si j’ose dire) de sa liberté d’exploration et de ses phases scénaristiques, pourtant avancée comme argument de vente, et le jeu fini paradoxalement par être bien linéaire. C’est vraiment bête, car quitte à s’inspirer des RPG 16-bits autant aller jusqu’au bout, vu que ces derniers avaient réussi à éviter cet écueil...
Avec des compétences comme le marchandage, il y avait pourtant moyen de trouver des mécaniques de progression intéressantes et pas juste une succession de chapitres tous sur le même modèle...
Quand Octo passe, les combats sont efficaces
Le problème d’équilibrage s’étend aux combats, et notamment les boss : Comme je le disais, la limite de niveau nous oblige à faire les chapitres de notre niveau pour avancer, mais si on les fait tous, on finit alors par être bien trop puissant y compris pour la suite de l’aventure. On n’est alors jamais au bon niveau pour explorer une zone battre un boss, on est soit trop faible soit trop fort, ce qui n’empêche pas les ennemis d’être bien trop solides la plupart du temps.
Je trouve en effet que le système de « Break » est à la fois un point fort et un point faible du jeu : chercher les points faibles ennemis pour ensuite leur faire masse de dégâts une fois leur défense brisée peut être amusant (encore qu’à la longue, ça m’a plus ennuyé qu’autre chose), mais cela peut aussi être contraignant si notre équipe est mal disposée pour exploiter ces points faibles, certaines armes ou éléments étant circonscrits à des classes précises (ombre, lumière, vent) ou à l’usage trop limité (couteau, bâton) par manque de compétences associées.
Cela fait aussi que le moindre ennemi de base devient un tank qui met plusieurs tours à être vaincu, rendant les combats extrêmement longs… Déjà qu’ils sont bien fréquents !
Pour les boss en revanche, cela créé une difficulté bienvenue, certes parfois injuste si le niveau de l’équipe est trop faible (ou que le boss est juste complètement cracké, il y en a), mais au moins la plupart des combats poussent à exploiter le système de faiblesses et donc la versatilité des classes. Chaque boss a son pattern ou ses gimmicks (même si on retrouve souvent les mêmes, comme les faiblesses bloquées ou renouvelées régulièrement), et chacun est libre d’établir sa stratégie pour les vaincre. Sans offrir autant de possibilités que le système de jobs de FF5, les classes d’Octopath ont le mérite de proposer une certaine versatilité. J’aurais aimé tout de même qu’elles soient plus fournies en compétences actives ou même passives, mais j’imagine que c’est déjà pas mal.
Le système d’Exaltation quant à lui est simple à prendre en main et me paraît plus efficace que le système présent dans Bravely Default, puisque cette fois on n’est pas pénalisé par des tours en moins. Un bon point, donc.
Globalement, le jeu se défend donc très bien sur son système de combat qui offre pas mal de stratégie, mais se révèle vite lourdingue contre les ennemis normaux.
Un syndrome présent dans pas mal de RPG récents, où la résistance des ennemis et la fréquence des combats assez élevée achève de rendre l’exploration vraiment fastidieuse.
Chaque boss est une sorte de puzzle à résoudre. Et en plus, ils sont classes !
Quand Octo passe, la narration se casse
Jusque-là, on aurait encore affaire à un RPG sympa malgré ses lourdeurs dans la progression et l’exploration. Les défauts que j’ai cité jusqu’à maintenant auraient largement été compensés par l’univers proposé avec une inspiration issue du jeu de rôle papier et de la fantasy classique très réussie, ainsi que les fameux scénarios aux thèmes forts et aux protagonistes travaillés.
Et c’est là où on va vraiment aborder les choses qui fâchent...
Alors, tout d’abord, concernant le problème de manque de relations entre personnages, ce n’est pour moi pas forcément le pire. Ce n’était pas vraiment gênant dans les RPG old-school que les persos ne soient pas unis dans une quête commune ni même qu’ils ne se parlent pas beaucoup : des jeux comme les SaGa, Suikoden, Star Ocean et bien d’autres permettaient souvent de recruter plusieurs protagonistes sans qu’ils n’y aient particulièrement de synergie entre eux, et sans que ça ne pose problème. On peut aussi faire des jeux avec scénarios vraiment distincts comme Live-A-Live sans que les personnages ne se rencontrent (si ce n’est à la toute fin) tout en restant intéressant.
Mais il faut admettre qu’ici, c’est fait de façon assez bizarre. Les personnages en dehors de celui dont on fait le scénario sont réellement transparents et ça dérange. Lorsque l’on fait le scénario d’un personnage, les autres n’apparaissent jamais et ne réagissent donc pas aux situations. Il n’en est d’ailleurs jamais fait mention par le héros concerné (qui pourrait dire « moi et mes amis, on va battre ce monstre », il parlera toujours en se considérant seul… quand bien même il se retrouve en groupe la minute d’après pour faire face au boss) et cela créé des tas d’incohérences durant les différents scénarios. De nombreux JRPG où le joueur est libre de composer son équipe font l’effort de faire intervenir tous les personnages lors des cutscenes, le plus souvent chacun ayant leur mot à dire... Bizarre de ne pas retrouver ça ici alors que c’était possible avec seulement 8 personnages à gérer.
Si l’idée était compréhensible pour un jeu qui se vante de proposer 8 scénarios centrés autour de 8 personnages uniques, cela reste paradoxal quand comme dit plus haut, on ne peut pas faire le jeu en ne suivant le scénario que d’un seul personnage et que l’on est obligé de recruter les autres. Bref, il y avait sûrement moyen de mieux faire, tout en laissant la liberté au joueur de suivre les scénarios dans l’ordre qu’il le souhaite.
Mais ça reste un détail, l’arbre qui cache la forêt. Le vrai problème vient des différents scénarios eux-mêmes.
On est d’accord, ce ne sont pas les dialogues aléatoires entre membres de l’équipe qui vont sauver quelque chose.
Bon, je vais être honnête, je ne suis pas un expert en scénario. C’est même souvent quelque chose que je vois comme secondaire, les jeux n’ayant pour moi pas nécessairement besoin d’un scénario exceptionnel ou original pour être bons. Mais je sais encore dire quand un jeu est bien écrit, propose des idées narratives ou des thèmes intéressants, arrive à nous faire ressentir des choses. Ce n’est, à mon sens, pas le cas d’Octopath. Et ayant misé sa communication sur cet aspect, il était un peu normal que l’on s’attende à quelque chose de bien fichu de ce côté... Forcément, en citant FF6 comme inspiration, les joueurs s’attendaient à une grande épopée portée par des personnages forts et émouvants, unis dans un but commun par les liens qu’ils entretiendront tout au long de l’aventure. Octopath ne fait rien de tout ça, donc normal que les gens soient déçus !
Ça n’aura donc échappé à personne, la narration et la mise en scène sont extrêmement pauvres, loin d’un FF auquel pourtant le jeu a été comparé, et sont bien plus proche des RPG récents à tendance old-school comme par exemple The Alliance Alive dont j’ai parlé précédemment : Ça parle beaucoup mais sans arriver à dégager d’émotions, puisque ces jeux oublient qu’une histoire, avec des moyens aussi minimalistes soient-ils, ne se raconte pas seulement dans ses dialogues, mais aussi dans ses mimiques, sa gestuelle, sa musique, ses décors, et parfois même dans son gameplay.
Cela dit, les dialogues eux-mêmes ne sont pas dingues non plus. Sur la forme, les textes sont bien écrits (surtout en français qui bénéficie d’une traduction de qualité, même s’il me semble qu’elle prend parfois un peu trop de libertés) mais sur le fond c’est très cliché/bateau avec de grands discours pompeux sur la nécessité de sauver son prochain ou de se trouver une cause/un chemin de vie pour guider nos actions, et on touche même parfois le fond avec des moments dramatiques d’une niaiserie absolue...
Comment peut-on sincèrement y croire quand un énième traître, que l’on voyait déjà venir à des kilomètres, nous lance une tirade qui dit en substance : « Eh oui, je t’ai trahi ! Je t’ai fait croire que j’étais ton allié mais c’était pour mieux te poignarder dans le dos ! Nyahaha, je suis méchant ! *rire démoniaque* » ? Je pense en premier lieu à l’amant de Primrose, mais beaucoup d’autres antagonistes fonctionnent sur le même principe, comme le directeur Yvon, le mendiant malade dans un des chapitres d’Alfyn, etc.
Le seul à mon sens qui ne tombe pas dans ce travers est Erhardt, ancien compagnon d’armes d’Olberic, qui admet avoir tué le roi pour se venger mais cherche à expier son crime en venant en aide aux gens dans le besoin. C’est banal, mais au moins le personnage reste intéressant.
Malheureusement, aucun des scénarios ne parviendra à relever le niveau, malgré les thèmes abordés qui sont intéressants sur le papier mais exploités de façon complètement bidon. La conclusion du scénario de Primrose est affligeante de bêtise, quand on se rend compte de qui était derrière l’assassinat de son père et de ses motivations qui se résument à celles d’un psychopathe raté (« Je vous aime, je vous tuerai et vous serez à moi ! » Ça valait le coup de finir dans les clubs de danseuses, tiens...).
Donc en plus de verser dans la psychopathie et le féminicide, monsieur a des tendances pédophiles. Bravo !
Même si toutes ne versent pas autant dans la caricature, les conclusions de chaque scénario sont très prévisibles et surtout très consensuelles : le savoir est fait pour être partagé (Cyrus), toute vie mérite d’être sauvée (Alfyn), mettre son épée au service des faibles (Olberic), l’importance de faire confiance à soi et aux autres (Thérion)... Les questionnements des héros sont résolus de façon très simple en enfonçant des portes grandes ouvertes et n’apportent que peu de réflexion. Au final, on finit chaque scénario avec ce sentiment amer de « tout ça pour ça »... Le donjon ultime vient lier un peu le tout, mais sous ses airs de machination savamment construite se cache un but on ne peut plus commun de résurrection d’une divinité maléfique. Et dans le fond, l’implication des huit héros relève plus du hasard que du destin au sens fort. Mais c’est toujours ça de pris, et on aurait aimé que ce soit le véritable point final du jeu et pas un bonus finalement vite expédié...
On retrouve ce paradoxe tout le long du jeu, dans le scénario principal comme dans les quêtes annexes, qui peuvent évoquer des choses très dures (par exemple une femme qui cherche son mari pour s’apercevoir qu’il a été tué par des brigands), mais en les racontant de façon très manichéenne et caricaturale, donc simpliste.
Il y avait pourtant largement matière à faire des choses intéressantes avec l’univers du jeu et les motivations de départ de chaque personnage au travers de leurs questionnements, même les plus légers comme celui de Tressa, mais tout tombe à plat à chaque fois.
Au final, aucun des scénarios ne m’aura vraiment intéressé, et quand bien même j’aurais pu passer outre, ça n’en reste pas moins très frustrant de voir cet univers à priori cohérent et ces thèmes à priori intrigants finir en un tel gâchis.
Le pire c’est qu’en réalité, je ne suis même pas surpris par une telle pauvreté dans l’écriture. C’était déjà quelque chose que je reprochais à Bravely Default (on se rappelle qu’une partie de la team de BD est derrière Octopath) et c’était de toute façon un souci que j’avais constaté dans pas mal de JRPG de cette dernière décennie voire plus. Pour avoir touché à des jeux comme Luminous Arc, Sands of Destruction, Fire Emblem Awakening, un bon paquet de Tales of, Tokyo Mirage Sessions, j’en passe et des meilleures, on en est au même niveau caricatural d’écriture dans les personnages (quoique certains sont pires que d’autres).
Il faut croire que c’est un type d’écriture qui plaît au public japonais (ou à une partie du public je dirais, histoire de ne pas mettre tout le monde dans le même sac), ou l’exagération et l’exacerbation des émotions à outrance (quitte à en être ridicule) prend le pas sur toute forme de subtilité. Et c’est ce qui m’attriste le plus quand on sait ce dont ils étaient capables sur d’anciennes productions plus « sérieuses » (Xenogears, Final Fantasy Tactics, Suikoden, etc.), et que c’est un style qui visiblement ne les intéresse plus beaucoup. Pour le peu que j’ai vu des avis de joueurs japonais, l’écriture et les scénarios sont rarement cités comme des points faibles.
Octopath Traveler, présenté comme l’héritier des RPG 16-bits de Square, aurait pu être l’occasion de prouver qu’ils pouvaient encore écrire des personnages subtils sur des thèmes sombres, mais il est clair que ce n’était même pas dans leurs intentions.
Du coup, j’ai un peu perdu espoir quant à voir du changement dans les productions à venir...
La tentative de lier les 8 scénarios est louable, mais je ne l’ai pas trouvée très réussie.
Quand Octo passe, le futur du JRPG m’angoisse
Je suis donc, comme beaucoup de gens, très mitigé concernant Octopath Traveler.
Les promesses sur la narration et les différents scénarios ne sont pas tenues, mais celles sur le gameplay inspiré d’anciennes mécaniques le sont déjà plus (même si pas assez de mon point de vue), et le jeu s’en sort globalement bien malgré un rythme rébarbatif. J’ai trouvé en tout cas l’aventure plus intéressante et plaisante que sur Bravely Default ou Lost Sphear, ou même The Alliance Alive, et ce grâce aux mécaniques de jeu et toutes les possibilités qu’elles offrent (ce qui permet de mieux supporter les manquements de narration, si vous me suivez).
Mon expérience globale sur Octopath Traveler n’a donc pas été si désagréable. Il faut dire que j’avais été largement prévenu par les différents avis sur le jeu, donc je savais à quoi m’attendre. Du coup je n’ai pas été particulièrement déçu, si ce n’est de constater que l’on a une fois encore un jeu qui tente de faire revivre le RPG à l’ancienne sans comprendre ce qui en faisait réellement la force.
Mais au moins, on commence à avoir de bonnes idées de mécaniques (les scénarios multiples, la liberté d’exploration, les compétences de ville) qui sortent du carcan actuel et qui mériteraient juste d’être poussées plus loin dans leur concept. Tout ce que j’espère, c’est que le succès du jeu inspire les développeurs de chez Square-Enix ou d’ailleurs pour continuer dans cette direction et tenter de nouvelles choses.
D’un autre côté, il faudrait vraiment qu’ils revoient leurs méthodes de narrations et l’écriture de leurs personnages, parce que ça commence à devenir sérieusement difficile à digérer... Malheureusement, j’ai l’impression que ce n’est pas prêt de changer.
Je mets l’OST ici, histoire de finir quand même sur une note positive.
Résumé pour les flemmards des yeux : Bien :
- Un univers fantasy attrayant et plus réaliste
- Un mélange de pixels et HD réussi, très bonne DA d’une manière générale
- Une chouette OST
- Système de combat bien fichu et stratégique
- Enfin un RPG avec un peu de liberté
- Des mécaniques intéressantes (8 scénarios à suivre dans l’ordre de son choix, les interactions avec les NPC) que l’on aimerait voir plus développées dans d’autres jeux
- Les quêtes scénarisées
- Des thèmes scénaristiques intéressants... sur le papier
- L’incitation au voyage
- Le « meilleur » des RPG old-school de la décennie (en même temps, vu la concurrence...)
Pas bien :
- La limite de niveau qui oblige de recruter les autres personnages et de faire leurs scénarios
- Quand dans le même temps, il n’y a aucune interaction entre les différents personnages, en dehors de quelques scénettes optionnelles peu intéressantes !
- Exploration barbante, coupée par des combats longs et nombreux
- Rythme très redondant à cause du découpage identique de chaque chapitre
- Les capacités de ville des personnages sous-exploitées
- Un système de classe tout de même moins complet qu’un FF5/FFT
- Une mise en scène faiblarde, comme d’habitude
- L’écriture des personnages et des dialogues (le fond, pas la forme) est une catastrophe... au point de gâcher les quelques moments intéressants
- L’univers, les thèmes s’en retrouvent mal exploités, une vraie frustration
- Le donjon secret pas très passionnant, et pourtant essentiel pour connaître le fin mot de l’histoire
- Où est l’héritage de FF6 ?
Comme d’habitude, le débat est ouvert sur les avis de chacun en commentaire (mais soyez gentils, n’y allez pas trop fort avec les cailloux...)
Sur ce, merci d’avoir lu et à bientôt pour un prochain article !
Vous connaissez la chanson, j’ai fini le jeu et je vous propose de revenir dessus avec un petit article de derrière les fagots. C’est parti !
Rappel du titre :
The Alliance Alive est un RPG co-developpé par Furyu, Grezzo et Cattle Call (des anciens de Data East Corporation, si ça parle à des gens), sorti au départ sur 3DS (et uniquement en dématérialisé en Europe, ce qui a fait que j’ai fait l’impasse dessus). Cette version ayant obtenu son petit succès d’estime auprès des fans de RPG, Furyu s’est dit que ce serait cool de le ressortir sous la forme d’un remaster HD sur PS4, Switch et Steam. Grand bien leur en a pris.
On peut aussi voir le jeu comme une suite de Legend of Legacy du même studio, lui aussi RPG à l’ancienne sur 3DS, que j’avais bien apprécié malgré pas mal de lourdeurs. Les deux jeux se ressemblent beaucoup et partagent en grande partie le même staff, avec notamment :
- Matsuura Masakata à la direction.
- Kyoji Koizumi au game design (il a bossé notamment sur le battle system de Romancing Saga 2 et 3, dont Legend of Legacy et The Alliance Alive se sont largement inspirés)
- Masashi Hamauzu aux musiques (Saga Frontier 2, FFX, Sigma Harmonics, la trilogie FFXIII, etc.)
- Ryo Hirao au chara design.
On perd malheureusement la collaboration de Tomomi Kobayashi (artiste ayant œuvré sur le chara design des jeux SaGa), mais on gagne celle de Yoshitaka Murayama, scénariste et directeur des trois premiers Suikoden. Rien que ça.
Legend of Legacy était un premier projet qui fut en quelque sorte un « brouillon », dont la formule fut améliorée dans The Alliance Alive en prenant en compte le retour des fans. L’essai est-il transformé ? Nous allons voir ça de suite.
Note : N’ayant pas fait la version 3DS, je parlerai surtout ici du jeu en lui-même comme un nouveau jeu et non pas de la qualité ou des ajouts (il y en a ?) propres au remaster. Pas plus que je ne parlerai de la technique de la version Switch, parce que c’est pas mon délire. Déso pas déso.
Donc en résumé, que vaut-il ?
Ai-je vraiment besoin de répondre à cette question ?
Je pense que la plupart d’entre vous qui lisez ces lignes ont déjà touché au jeu depuis sa sortie (que ce soit la version originale ou le remaster) ou vous êtes suffisamment intéressés au jeu pour avoir déjà recueilli quelques avis.
Vous le savez donc, le jeu est bon, et j’ai bien sûr pris moi-même plaisir à y jouer. Maintenant, je ne vais pas vous mentir... je suis quand même pas mal resté sur ma faim.
Mais avant de pouvoir vous expliquer pourquoi, un petit rappel du jeu s’impose. (mais non, ce n’est pas du tout pour faire durer le suspense, voyons )
Le jeu, en gros
Si vous connaissez déjà le jeu, vous pouvez zapper toute cette partie, je donne mon avis plus bas.
Legend of Legacy se voulait être un héritier des RPG à l’ancienne, et réunissait donc les principaux ingrédients de ces derniers : une exploration en vue de dessus rappelant les RPG 2D, tout comme le style chibi et le chara design global des personnages ; des combats en tour-par-tour mettant en avant la complexité du système de combat et ses possibilités stratégiques ; mais aussi une aventure un peu moins portée sur ses personnages et un peu plus sur son univers (je n’ose dire scénario, car il était quand même assez limité).
En toute logique, The Alliance Alive reprend tous ces éléments et y ajoute une worldmap pour explorer un monde bien plus vaste bénéficiant cette fois de plusieurs villes, un petit paquet de cutscenes qui mettent cette fois plus en avant le scénario et les personnages, et plusieurs features notables :
- Le système de guildes : divisées en cinq catégories, elles apportent divers effets bénéfiques très utiles en combat pour peu que l’on soit dans leur champ d’effet, et on peut élargir ce champ d’effet en liant les guildes entre elles, c’est-à-dire en construisant d’autres guildes assez proches pour créer un réseau. Passé le premier tiers du jeu, on peut en effet construire une guilde sur des points spécifiques de la carte, mais seulement si l’on peut y placer un Guildmaster.
- Le recrutement : directement lié aux guildes, puisqu’il s’agit de garnir leurs effectifs en recrutant des NPC dans les différentes régions, un peu à la manière d’un Suikoden (si ce n’est que les personnages ne sont pas jouables dans votre équipe). Recruter un certain nombre de personnages permet aux guildes d’augmenter de niveau, ce qui offre de nouveaux bonus, ou la possibilité d’acheter de nouvelles armes et sorts, etc. Il y en a il me semble 167 en tout, donc assez pour s’amuser à les collecter, mais pas assez pour monter toutes les guildes au niveau maximum. De plus chaque NPC n’est « compatible » qu’avec certaines guildes, poussant clairement le joueur à faire des choix sur quelles guildes il veut augmenter en priorité. Les niveaux de guildes étant conservés en New Game +, on peut atteindre le niveau max et profiter des meilleurs effets au bout de quelques parties.
Le recrutement permet aussi de recruter des Guildmaster (en gros des NPC un peu plus importants que les autres), indispensables pour construire une nouvelle guilde sur la carte. De la même façon, le nombre de Guildmasters est limité, et vous ne pourrez pas remplir tous les points de construction de la carte.
- Les talents : en plus des techniques qui s’apprennent en combat, les personnages ont cette fois des Talents à disposition, que l’on peut acquérir en toute logique avec des points de talent obtenus en combat. Les Talents augmentent par exemple la fréquence de montée des stats, de l’apprentissage des skills, etc. ou permettent de réduire leur coût en SP, ou encore d’autres effets plus ou moins utiles comme se faire repérer moins facilement par les monstres ou obtenir des réductions en magasin.
Si l’on parvient à faire une chaîne de combat (engager un combat avec plusieurs ennemis à proximité), le nombre de Pt gagné à la fin des combats est augmenté.
Malheureusement, le nombre de Pt pour obtenir chaque Talent est faramineusement élevé et s’élève à plusieurs milliers de points, il est donc encore une fois impossible de tout avoir en une run.
- Les water devils et leurs antres : comme pas mal de RPG maintenant, The Alliance Alive propose des monstres bien plus balèzes que la normale, que le joueur devra esquiver en début de jeu avant qu’il ne devienne assez fort pour les vaincre. Ceux présent sur la carte sont plus un obstacle qu’autre chose et ne rapportent rien de vraiment intéressants une fois vaincus. En revanche, il existe à travers le monde des antres de différents niveaux, infestées de ces water devils. Il faut être bien préparé pour s’y attaquer, mais elles recèlent le plus souvent quelques objets sympathiques, des NPC à recruter, et la possibilité de faire des chaînes de batailles facilement, sauf que les combats deviennent de plus en plus durs à chaque chaîne. Et comme les water devils sont déjà passablement coriaces et dangereux, il faut savoir jauger jusqu’où on peut se permettre d’enchaîner les combats... Une fois le boss de l’antre vaincu, celle-ci disparaît de la carte et laisse place à un point de construction de guilde.
- L’Ignition et le Final Strike : là aussi comme pas mal de RPG récents, nous avons droit ici à une jauge d’Ignition qui une fois remplie déclenche un « super état » qui augmente les statistiques du personnage, mais aussi durant lequel il peut faire un Final Strike, technique spectaculaire très puissante liée à une arme mais qui brise cette dernière lorsqu’on l’utilise.
Des idées sympas donc, qui viennent combler le manque de features de Legend of Legacy, ce qui était son plus gros défaut et le rendait rébarbatif.
Le système de combat est quant à lui quasiment le même que dans Legend of Legacy, avec quelques améliorations bienvenues pour le rendre moins lourdingue. Mais l’idée de base, tirée des jeux SaGa, est toujours là, à savoir l’apprentissage des techniques d’armes et la montée de stats semi-aléatoires. C’est toujours aussi efficace et on apprécie toujours d’obtenir une nouvelle technique en plein combat, chacune pouvant bien sûr avoir des effets variés, comme viser une zone, infliger un débuff ou étourdir un ennemi.
Et c’est bien sûr équilibré en fonction du niveau de l’ennemi : affronter des ennemis forts augmentera bien plus vos chances d’une montée en stat ou d’apprendre une technique qu’un ennemi faible. Pas besoin de farmer donc, et même en avançant à son rythme on gagne toujours un peu quelque chose à la fin d’un combat.
On retrouve aussi le principe des formations, avec les trois rôles Attaque-Défense-Soutien, chaque rôle offrant divers bonus. On peut acquérir de nouveaux rôles avec d’autres bonus en améliorant la guilde des formations. Le rôle de défense est d’ailleurs particulièrement important, puisqu’il est le seul qui permet aux techniques de défense protéger toute l’équipe.
Utiliser une technique dans un rôle précis augmentera (aléatoirement, là encore) sa puissance dans ce rôle. Cela veut dire aussi que si vous utilisez par exemple une technique avec une forte stat en attaque mais que vous prenez un rôle de soutien, la technique risque de se révéler assez peu efficace.
Quoiqu’il en soit, combiné aux nombreuses techniques, il y a de quoi se faire plaisir au niveau des possibilités stratégiques.
Là encore, ce système de formations a eu droit à quelques améliorations par rapport au précédent jeu, le rendant plus agréable à utiliser.
Mais d’une manière générale, c’est toute la difficulté du jeu qui a été baissée, rendant les combats normaux assez simples pour la plupart (seuls les water devils sont corsés, et encore, une fois qu’on a le « niveau », ils deviennent bien faciles eux aussi), ce qui n’est pas forcément un mal vu que Legend of Legacy était particulièrement difficile.
The Alliance Alive a donc un système de jeu plutôt solide et agréable à jouer. Mais qu’en est-il de son scénario ?
Pour faire simple, l’univers du jeu comprend trois races : les humains, les hommes-bêtes, et les Daemons (ou Asmodians, apparemment selon JVC). Ce sont ces derniers qui sont au sommet de la hiérarchie, et se servent des hommes-bêtes comme hommes de mains pour régir grâce aux lois la vie des humains, qui se retrouvent en bas de l’échelle.
Les Daemons sont donc craints et respectés (même si on ne les voit presque jamais), et les hommes-bêtes sont dépeints comme des enflures de premières qui persécutent les pauvres humains qui sont pour une fois considérés comme une sous-race barbare, dominée par ses émotions et prompt à faire la guerre à la moindre occasion.
Surtout, le monde a été divisé par les Daemons en différentes régions au climat hostile, et séparés par le « Dark Current », un mur brumeux et toxique qui empêche la navigation entre les régions et favorise l’apparition des water devils. En bref, les humains vivent reclus dans leurs cités, persécutés par les hommes-bêtes, et donc ça va pas fort pour eux.
C’est dans ce contexte tristounet que le jeu commence alors dans la ville de Svalna sous une pluie éternelle, nous mettant très vite en compagnie de Galil et Azura, les deux « héros » du jeu qui rêveront bien sûr de sortir de cette misère et de pouvoir enfin admirer un ciel bleu. Ça tombe bien, la résistance s’organise dans leur ville.
Puis au bout de quelques heures de jeu, on passe à un autre groupe, Vivian et Ignace, Daemons de leur état (ou devrais-je dire « personnages moé/kawaii » avec des oreilles et une queue d’animal, parce que c’est indispensable dans tout JRPG de nos jours même si en vrai ce n’est pas logique parce qu’aucun autre Daemon dans le jeu n’a une telle apparence... bref ) mais moins à cheval sur les lois que leurs congénères. Vivian s’inquiète d’ailleurs de ce qu’il se passe à la surface du monde des humains et décide donc d’aller enquêter.
Puis une fois de plus on change de groupe pour faire connaissance avec Gene et Rachel, le premier étant un informateur s’étant rangé dans le camp des hommes-bêtes/Daemons et la seconde... le secondant dans sa tâche, mais contrebalançant le côté opportuniste et calculateur de Gene par sa jovialité et sa franchise.
Et on continue ainsi le jeu en alternant entre les groupes jusqu’à ce qu’ils finissent par se rejoindre, à la manière d’un Suikoden III ou d’un Wild Arms en leur temps (RIP petits anges partis trop tôt ) et finissent par former un groupe de 9 héros. Une chouette idée narrative, mis à part que cette fois il n’est pas possible de choisir soi-même le groupe que l’on veut diriger, ce qui fut ma foi un peu décevant...
Bon, et pourquoi t’as pas aimé alors ?
Eh bien le problème, c’est que ce « un peu décevant » peut s’appliquer à beaucoup d’aspects du jeu en fait.
Le jeu offre enfin un monde explorable via une world map, mais se contente en réalité de quatre régions (+ le donjon final) inutilement grandes (comprendre qu’on passe des heures à marcher alors qu’il n’y a qu’au mieux deux villes et 3-4 donjons par région), parfaitement séparées aux quatre coins du globe par le fameux Dark Current qui marque un peu trop bien sa délimitation, et que l’on visitera évidemment l’une après l’autre de la façon la plus banale qui soit. Bref, on a vu plus inspiré comme world map et comme rythme de progression (sérieusement, le premier Final Fantasy sur NES faisait mieux avec une carte du monde plus élaborée...), mais on va s’en contenter et être simplement heureux de revoir une world map et des véhicules dans un RPG.
La durée d’une partie peut tout de même être longue (une cinquantaine d’heure pour ma part), mais pas par l’abondance de lieux à visiter ou du scénario riche en évènements (non, pas vraiment, on va y revenir), plutôt par les nombreux combats assez chronophages, et bien sûr le backtracking à foison si l’on veut recruter un maximum de gens et fouiller un peu partout pour récupérer objets et magies.
Cela dit, c’est vraiment pour le plaisir de la collecte, car honnêtement je n’ai trouvé aucune utilité aux objets (à part les potions, bien sûr) : la plupart servent à du buff dont les effets sont quasi-imperceptibles en combat, et sont de toute façon relativement peu efficaces puisque ne pouvant viser qu’un seul de vos personnages. Les effets des guildes se montrent bien plus efficaces à ce niveau. Même chose pour les sorts, à part quelques-uns (dont logiquement les sorts de soin) leurs usages sont bien trop limités pour qu’on s’en serve réellement.
D’une manière générale, le jeu nous fait miroiter des tas de possibilités stratégiques avec les formations, la jauge d’Ignition et la multitude de skills, quand dans le fond le plus efficace reste d’avoir un gus en défense pour protéger l’équipe et éventuellement un autre en soutien pour le soin (il n’y a d’ailleurs pas de soin sur toute l’équipe dans le jeu, une horreur contre certains ennemis...), et le reste en attaque à utiliser les techniques les plus bourrines. Les monstres et boss n’ont aucun pattern ou point faible à deviner, il faut juste savoir encaisser leurs attaques et les tuer le plus rapidement possible pour éviter d’être submergé.
Il est aussi fort dommage que les techniques débloquées coûtent vite très cher en SP, rendant leur utilisation très limitée. Leurs effets ne sont pas non plus si variés que ça si on compare par exemple à un SaGa : tout au plus a-t-on droit à un effet « stun » ou une baisse de stat occasionnelle, mais qui ne semble évidemment pas fonctionner sur les ennemis les plus puissants, ceux sur lesquels on en aurait vraiment besoin... alors on se contente encore une fois d’utiliser les plus bourrines, qui restent les plus efficaces mais aussi les plus gourmandes en SP.
Dommage encore que malgré la multitude de Talents, si peu permettent réellement de customiser ou booster les stats du personnage. Et autant je comprends qu’on n’ait pas la possibilité d’apprendre tous les Talents en une run, autant j’ai trouvé leur coût abusé, si bien qu’on ne peut en apprendre qu’une quinzaine par personnages durant une première run normale sans farm intensif. Il y a pourtant des moyens de gagner plus de Pt (les chaînes, la guilde de reconnaissance), mais même comme ça je gagne au mieux 150-200 Pt par combat vers la fin du jeu, comment je fais s’il m’en faut 10000 voire plus pour acheter les Talents les plus intéressants, comme ceux qui justement diminuent le coût en SP des techniques ?
J’ai trouvé que c’était vraiment un des points les plus frustrants du jeu : pourquoi nous offrir tant de possibilités si dans le fond seules quelques-unes sont réellement efficaces ? Et pourquoi avoir limité autant l’apprentissage des Talents, ce qui réduit d’autant l’intérêt des possibilités offertes ? Bref, une fois de plus, tout ça est « un peu décevant ». Et une fois de plus, il faut visiblement s’en contenter car un JRPG avec un système de jeu agréable à jouer, ni trop complexe, ni trop bourrin, ça ne coure pas les rues de nos jours.
Au final, le jeu offre finalement assez peu l’opportunité de profiter de ces différentes possibilités. Les water devils et les antres, qui auraient pu être l’occasion de mettre ce point en avant, me paraissent être une fausse bonne idée.
Les premiers ne sont que des monstres très puissants qui obligent plus à être bien préparé qu’à déployer une stratégie spécifique pour les battre, et ils ne donnent de toute façon pas de grosses récompenses, mis à part que puisqu’ils sont plus puissants, la montée de stat et l’apprentissage de techniques sont facilités : en gros, ils sont bien pour farmer. Mais pour quoi faire ? On roule déjà en temps normal sur la plupart des ennemis du jeu...
Les secondes ne sont que des donjons sans véritable level design (les donjons normaux ne sont guère mieux, cela dit) et grouillant de water devils (combats longs et chiants en perspective), et il y en a beaucoup trop pour pas grand-chose.
C’est vraiment pas passionnant à faire, mais on se sent un peu obligé de les faire pour recruter quelques NPC paumés, récolter des Chaosium (gemmes violettes que l’on peut échanger contre du stuff) et créer de nouveaux points de constructions de guilde. On sent que c’est une idée qui était surtout là pour créer artificiellement du contenu sans consommer de gros moyens techniques, mais ils auraient pu à mon sens s’en sortir sans avoir recours à un tel artifice.
Le recrutement aussi est « un peu décevant » : on reprend le concept de Suikoden de pouvoir recruter de multiples personnages, mais on en retire tout le sel en ne proposant que des NPC sans attraits (pas de design ou personnalité propres, des NPC quoi) et parfaitement disposables. On les met dans une guilde au pif et on les oublie. Il n’y a pas non plus de spécificité qui rendrait stratégique leur disposition dans les guildes. Même traitement pour les Guildmaster, dont on aurait pu croire qu’ils seraient plus important qu’un membre de guilde classique.
Après, ça permet aussi au joueur de booster les guildes selon ses envies sans trop se prendre la tête, mais j’aurais aimé que les personnages recrutables aient un peu plus d’utilité... Autrement ça aurait tout aussi bien pu être des objets servant à booster les guildes.
Les conditions de recrutement sont elles aussi simplissimes puisqu’il suffit le plus souvent de leur parler, on recrute d’ailleurs souvent un groupe de 3-4 NPC d’un coup plutôt qu’un seul à la fois. Même pour les cas plus obscurs, il suffit généralement de revenir plus tard dans le jeu et de parler au NPC concerné pour pouvoir le recruter. Un bon point pour certains sans doute, pour ma part j’avoue que j’aimais bien les conditions de recrutement variées des Suikoden/Radiata etc. qui parfois jouaient avec le game design, quitte à être vraiment obscures et à risquer de louper le personnage. Il n’y a bien sûr pas de ça ici, et le fait que le recrutement ne soit qu’une formalité le rend moins passionnant de mon point de vue. Ça reste toujours plaisant d’aller « collectionner » les personnages à travers le globe, c’est juste dommage qu’ils ne soient pas exploités plus que ça.
En dehors des NPC, il y a en tout 12 personnages jouables dans le jeu, dont 9 composants l’équipe de départ (une fois les trois groupes réunis, donc) et 3 optionnels que le joueur peut recruter (encore une fois, ce n’est pas très compliqué). C’est tout à fait correct pour un RPG normal, mais pour un jeu qui se vantait d’avoir des inspirations Suikoden, forcément c’est « un peu décevant », encore une fois.
Reste alors l’aspect primordial (ou pas) de tout JRPG qui se respecte : le scénario, sa mise en scène et ses personnages. Eh, on a le scénariste des Suikoden derrière, on peut bien s’attendre à quelque chose d’un peu incroyable, non ?
Malheureusement, vous savez bien ce que je vais dire… Une fois de plus, c’est « un peu décevant ». Oui, un peu seulement, car je vous avouerai que je ne m’attendais de toute façon pas à grand-chose vu les maigres ambitions du titre (que je ne lui reproche pas, tout le monde n’a pas les moyens d’un Square-Enix ou d’un Monolith Soft). Mais le fait est que, passé la mise en place de son univers aux notions inutilement compliquées et blindé de termes barbares à consonance anglophone (Daemon, Dark Current, Ether Gear ou Etheract…), le cheminement du jeu est extrêmement classique.
On se contente d’aller de continent en continent qui, je le rappelle, sont parfaitement séparés aux quatre coins du globe, pour trouver et détruire les Ether Gear et au passage résoudre les problèmes des autochtones généralement en prise avec les hommes-bêtes, et par conséquent, les Daemons.
Comble du comble, on ne voit d’ailleurs quasiment jamais ces derniers, car hormis Vivian et Ignace qui n’ont de Daemon que le nom, les autres se résument à Rouge, un énième clown sadique pas bien intéressant, Grossa, le juge impassible chargé d’appliquer la loi Daemon qui finira évidemment par douter du bien-fondé des lois quand celles-ci ne favorisent pas l’ordre si cher aux Daemons mais bien les plans mégalomanes et nihilistes du méchant du jeu (comme 99 % des méchants de JRPG, super original donc), qui sera donc le dernier Daemon que nous verrons dans le jeu.
Pour une espèce censée marquer le monde par sa domination, ça fait léger, et ça n’impose pas vraiment.
Le début du jeu nous décrit d’ailleurs une situation catastrophique pour les humains, mais on ne ressent cela à aucun moment du jeu, ces derniers ayant l’air de vivre plutôt normalement si on excepte les conditions météo déréglées et les emprisonnements réguliers. On reste donc sur quelque chose d’assez gentillet, comme le montre la plupart des dialogues avec les NPC teintés plus souvent d’humour que d’amertume ou de souffrance.
Ce n’est pas forcément quelque chose qui me dérange, pas plus qu’un scénario qui se cantonne au classicisme, mais le problème ici, c’est qu’il n’y a pas non plus des masses de péripéties ou de scènes pour nous raconter le passif des personnages ou leur faire vivre des aventures un tant soit peu marquantes.
Au final, le jeu ne raconte pas grand-chose, ce qui est fort dommage au vu du pitch de départ : l’interrogation sur ce qui a poussé les Daemons à considérer les humains comme races inférieures nécessitant d’être contrôlées par l’ordre (par opposition au chaos inhérent aux humains… mouais) n’étant jamais résolue, on doit prendre ce fait pour argent comptant avec comme seule clé de compréhension la sempiternelle rengaine du « les humains c’est rien que des vilains qui pensent qu’à polluer et faire la guerre ».
On se rappelle alors que le scénario est signé par l’auteur derrière ceux des Suikoden, dont le 2 réputé pour avoir un des meilleurs scénarios qui soit dans un JRPG. Et on a mal au cœur en l’ajoutant à la longue liste des vieilles gloires d’antan dont le talent s’est vraisemblablement émoussé au fil du temps…
Ce n’est pas le seul grand homme à fournir un travail « un peu décevant », d’ailleurs. Même si personnellement je n’ai jamais été particulièrement amateur du style musical de Hamauzu, j’ai apprécié pas mal de ses pistes composées pour FFX, XIII ou même Legend of Legacy. Mais dans The Alliance Alive, j’ai trouvé l’OST trop discrète voire mollassonne, y compris pour les combats et les boss à cause d’un manque de punch flagrant (un comble !). Rien ne se dégage vraiment de ces pistes monotones, on n’en retient certaines que parce qu’elles nous sont rabâchées en boucle. Et surtout, aucune n’arrive vraiment à souligner les rares moments forts du scénario, déjà pas bien aidé par sa mise en scène minimaliste.
Le jeu ne sera malheureusement pas plus marquant par ses personnages, quoique plutôt sympas grâce à leur chara design (enfin, ils ont l’air d’être tirés d’un univers de fantasy et pas d’une revue fashion japonaise !) qui s’avère aussi être leur point faible. Outre la faible mise en avant de leur background durant le jeu comme je l’ai évoqué (peu d’infos sur leur passé ou leurs relations, la plupart de leurs dialogues étant pour lancer une banalité servant à mettre en avant leur caractère toujours aussi cliché). Ils dégagent malheureusement peu d’émotions à cause de leur regard constamment à moitié endormi, leur seule variante de visage étant pour sourire (c’est déjà ça !), le reste (la peur, la surprise…) étant simplement suggéré par les tristement surexploitées émoticônes et autres points d’exclamation (pour rappel, FF5 faisait mieux avec des animations spécifiques pour chaque émotion des héros...).
Ce n’était pas forcément dérangeant dans Legend of Legacy qui n’avait volontairement pas mis ses personnages en avant et leur offrait peu d’occasions de parler, c’est bien plus dommageable ici maintenant que le jeu est bourré de dialogues et profite d’un soupçon de mise en scène que n’avait pas son prédécesseur. Évidemment l’absence de doublages n’arrange rien, même si pour le coup ça ne m’a pas manqué tout simplement parce que je n’ai jamais trouvé ça indispensable, surtout dans un jeu rétro (ou qui fait semblant de l’être).
Et si ce n’était pas forcément là où j’attendais le jeu, ça commence tout de même à faire beaucoup de choses « un peu décevantes » dont il va falloir se contenter...
Alors non, je n’ai pas détesté le jeu, loin de là. J’ai été ravi de retrouver un univers s’éloignant un peu des clichés actuels, des mécaniques disparues qui restent pourtant fun à jouer (le système de combat et d’évolution, le recrutement...) et d’une manière générale je salue avec joie la sortie d’un RPG qui essaie tant bien que mal de revenir aux sources du genre et à ce qui a fait la force de celui-ci.
Sincèrement, j’ai bien aimé, bien plus que Lost Sphear dans le même genre ou encore Bravely Default, pour lequel je pourrai citer exactement les mêmes défauts et plus encore. Et bien évidemment The Alliance Alive reste une bien meilleure expérience que son grand-frère, qui m’avait déjà laissé une bonne impression malgré ses lourdeurs de gameplay.
Mais dans le même temps, je n’arrive pas à être véritablement enthousiaste sur le jeu. Les retours de la plupart des gens laissaient présager une expérience solide et complète, ça n’a pas été vraiment le cas de mon point de vue, comme vous avez pu le constater. Le jeu propose de bonnes idées, pour la plupart issues d’autres jeux plus ou moins anciens, mais ces idées sont généralement bien mieux maîtrisées dans ces derniers. Il en va de même pour l’univers du jeu, son scénario et ses personnages, intrigants au départ mais qui se montrent creux sur la longueur.
Résultat, au lieu de me faire revivre les sensations des JRPG durant leur heure de gloire, il ne fait que raviver encore plus le regret de leur disparition, et l’amertume de constater encore que même avec la meilleure volonté du monde et l’embauche d’ancien créatifs de renom, les développeurs japonais ne sont plus capables de recréer les univers enchanteurs et attachants qui étaient pourtant représentatifs du genre.
On me trouvera peut-être trop exigeant ou juste blasé, voire injuste envers ce pauvre jeu qui n’affichait de toute façon pas l’ambition d’un Xenoblade. Mais mis à part ce dernier et une poignée d’autres, auxquels j’ai de toute façon envie de reprocher un certain nombre de travers du JRPG moderne, les prétendants aux arguments solides ne sont pas bien nombreux. Du coup, j’attends beaucoup des jeux à l’ancienne comme The Alliance Alive qui essayent de faire revivre le genre autrement que par du drama surjoué pour enrober un scénario faussement compliqué et des avalanches de personnages moé sans une once de profondeur. Mais là, je commence à en avoir un peu marre de devoir me contenter de jeux « un peu décevants »...
Malgré tout, je conseille bien sûr le jeu à ceux ou celles assez curieux pour se laisser tenter. Le jeu reste sympa à faire, il ne faut juste pas s’attendre à un grand jeu. Quant à moi, je commence à me demander sérieusement s’il faut continuer à espérer quoique ce soit pour les futures productions de ce genre...
Quoiqu’il en soit, le prochain article sera, si tout se passe comme prévu, réservé à un autre RPG récent au style rétro qui a fait beaucoup parler de lui... Le verdict sera-t-il meilleur ? Pas sûr...
Dans tous les cas, bon surf sur le site !
Résumé pour les flemmards des yeux : Bien :
- Une nouvelle tentative de redorer le blason du JRPG, avec des grands noms à la conception
- Le retour de mécaniques sympas (l’apprentissage aléatoire à la SaGa, le recrutement à la Suikoden...)
- Enfin un chara design qui s’éloigne de la « J-Pop »
- Une mappemonde à parcourir ! Et des véhicules !
- On peut accélérer les combats
- Des nouvelles idées sympa, comme les guildes
- Plus facile que son prédécesseur, mais c’est une bonne chose
- Le gameplay est fluidifié aussi, c’est plus agréable à jouer
- En gros, c’est Legend of Legacy en mieux
Pas bien :
- Un univers cool sur le papier, mais qui se révèle bien creux
- Même chose pour le scénario, qui promettait d’être original mais ne raconte au final pas grand-chose. Un comble venant du scénariste des Suikoden...
- Même chose encore pour les personnages, qui parlent beaucoup pour ne rien dire sans qu’on apprenne grand-chose sur eux
- Mise en scène faiblarde. Mais on commence à être habitués...
- Une OST molle, qui peine à rendre l’univers du jeu vivant
- Les NPC recrutés sans véritable intérêt : on les met dans une guilde et basta
- Beaucoup de possibilités offertes pour les combats, mais bien peu sont réellement utiles
- Obtention des Talents frustrante car trop limitée
- Les water devils et les antres, la fausse bonne idée
- Mappemonde vide et inutilement grande
- Un cheminement ultra-redondant
- Au final, le temps de jeu passe surtout dans les nombreux combats et les longs déplacements
- Une énième tentative de redorer le blason du JRPG... qui tombe à l’eau
J’attends votre avis sur le jeu dans les commentaires !
Le scénario, ou pour certains le non-scénario, est l’aspect le plus décevant de Final Fantasy V.
On retrouve une histoire basée sur les 4 cristaux élémentaires qui défaillissent les uns après les autres, menant à la libération d’un mage maléfique du nom d’Exdeath. Notre groupe de quatre héros, qui se rencontrent dès les premières minutes de jeu, vont bien évidemment tout faire pour l’empêcher de mener à bien son plan machiavélique : prendre le contrôle du Néant et devenir le mage le plus puissant du monde.
Un scénario d’un classicisme absolu qui renvoie le joueur aux prémices de la série, faisant fi de l’évolution apportée par le dernier épisode. Forcément, après avoir suivi les états-d’âme de Cecil dans FF4 ou les relations complexes de Terra, Locke, Celes et toute la clique de FF6, le scénario et les personnages de FF5 paraissent bien creux.
Cela tiens d’abord à une chose : dans FF4 et FF6, chaque personnage incarnait un des fameux jobs propre à la série, et le personnage était construit autour : Cecil est un Chevalier Noir qui doute de ses actes et prend le chemin de la rédemption en devenant paladin, Locke est un Voleur qui se considère comme un « chasseur de trésors », Celes est devenue Mage Runique après avoir subi des expériences de l’empire, Mash/Sabin fuit ses responsabilités royales pour suivre la voie libre de Moine, etc.
Forcément, ce n’est plus possible dans FFV, où chaque personnage doit pouvoir incarner n’importe quel job à tout moment. Ils ont donc un background léger, mais c’est tout : Butz est orphelin et parcours le monde suite aux dernières volontés de son père, dont on apprendra qu’il était l’un des 4 héros de la lumière précédents ayant scellé Exdeath ; Lenna est la princesse de Tycoon et incarne la femme douce du groupe ; Galuf est amnésique, et l’on finira par découvrir qu’il vient d’une autre planète, d’où vient aussi Exdeath qu’il a scellé avec les autres héros de la lumière ; Faris est une jeune femme s’habillant en homme (eh non, Cloud n’a pas inventé le travestissement dans la série) pour se faire respecter par les pirates qui l’ont recueilli ; et Krile est la petite-fille de Galuf et peut parler aux animaux.
Et malheureusement, le jeu prendra rarement la peine d’étoffer plus que ça ce background, quand bien même il existe plusieurs cutscenes optionnelles racontant le passé de chacun : la peur des hauteurs de Butz et le décès de sa mère, le passé commun de Lenna et Faris et comment cette dernière a été recueillie par les pirates, ainsi que le passé de Galuf et sa relation avec Krile.
Le jeu n’est cependant pas exempt de scènes marquantes, et celle de la mort de Galuf est sûrement celle que l’on retiendra le plus. Certes, on commence à avoir l’habitude avec Sakaguchi qui déjà à l’époque avait la réputation de prendre un malin plaisir à tourmenter les joueurs en faisant mourir l’un ou l’autre de ses personnages. Mais la mort de Galuf aura créé un véritable ascenseur émotionnel, pas seulement à cause de notre attachement pour ce vieillard bon vivant, mais parce que sa mort signifiait la disparition totale de tous les niveaux et compétences durement acquis au fil du jeu... ce qui n’arrivera heureusement pas, car tout sera transmis tel quel à Krile. Ouf !
Il n’empêche que cette scène est spectaculaire à plus d’un titre, et est notamment le parfait exemple de comment l’équipe des Final Fantasy utilisait de façon ingénieuse le game design du jeu comme outil de narration : tentant de protéger ses amis dans un ultime effort, Galuf affronte Exdeath, pourtant bien plus fort. Ce dernier lance ses meilleures attaques, si bien que Galuf tombe vite à 0 HP mais... ne meurt pas. Le joueur, participant au combat au lieu d’être simplement passif, prend ainsi toute la mesure de l’effort surhumain réalisé par Galuf. C’était un excellent moyen de contourner les limitations techniques de la console qui ne permettaient pas une narration plus ambitieuse, et Sakaguchi et son équipe l’avaient très bien compris.
Dans plusieurs autres scènes, le jeu utilise un élément de gameplay pour renforcer sa narration, comme lorsque Lenna marche volontairement dans les plantes empoisonnées pour récupérer l’herbe qui soignera son dragon, chaque pas qu’elle fait « brouillant » l’écran pour symboliser la douleur, comme c’était le cas dans le reste du donjon. La mise en scène était minimaliste, mais savait raconter des choses avec peu grâce à la symbiose entre la narration et le design du jeu.
Mais pour le reste, l’histoire de FFV n’est racontée que par des micro-détails qui échappent à l’attention du joueur lambda, et qui nécessitent parfois une bonne dose d’attention et d’imagination pour être perçus. Ainsi faut-il écouter attentivement les habitants des villages pour en apprendre plus sur la région ou les monstres dangereux qui y rôdent. Il y a aussi les boss « scénarisés » comme Siren ou Magisa qui donnent envie de s’interroger sur le lore du jeu : d’où viennent-elles et que cherchent-elles ? Dans les faits, ces boss étaient surtout là pour créer du drame autour des personnages : la première fait voir des illusions aux héros pour leur voler leur âme, Galuf échappant au maléfice car amnésique ; et la seconde tente de kidnapper Lenna, finalement sauvée de justesse par Faris.
On pense aussi vers la fin du jeu aux quelques mentions du nom « Enuo », un sorcier qui aurait tenté d’acquérir le pouvoir du Néant il y a 1000 ans, avant d’être arrêté puis scellé par les héros d’alors grâce aux 12 armes légendaires. Une sorte de Exdeath avant l’heure, dont on n’apprendra finalement pas grand-chose.
En bref, le jeu distille son background par microgouttes et on passe facilement à côté, donnant l’impression que l’univers du jeu est creux.
Siren et Magisa, deux boss énigmatiques dont le background ne sera pas vraiment étoffé dans le jeu, comme beaucoup d’autres.
Mais cela n’empêche pas le scénario de réserver quelques surprises pour le joueur, comme l’apparition de la forteresse volante où se cache le cristal de terre (le côté SF de la série revendiqué par Sakaguchi depuis ses débuts), l’origine de Faris, le voyage vers le monde de Galuf et encore une fois le sacrifice de ce dernier (et des autres anciens héros, tant qu’à faire), avant qu’Exdeath ne parvienne à mettre son plan à exécution et ne fusionne les deux mondes... pour finir par une confrontation épique dans le Néant, comme Square a su si bien le faire dans les précédents épisodes et continuera de le faire dans les suivants.
De même, le joueur traversera divers lieux emblématiques comme la bibliothèque des anciens, le cimetière des navires, le navire thermique et la fuite du château de Karnak, la forêt de Mua, et bien d’autres.
C’est aussi un jeu qui amène tout un lot de personnages marquants : Cid et Mid qui s’occuperont bien entendu des vaisseaux et aéronefs, le sage-tortue badass Ghido, les Mogs qui signent leur retour depuis FF3 et deviendront par la suite indissociables de la série, et bien entendu Gilgamesh, imprévisible sbire d’Exdeath et l’un des gros comic-relief du jeu, que l’on combat à plusieurs reprises aux moments où on s’y attend le moins. Il tentera à chaque fois de surprendre les héros avec un nouveau stratagème qui tombera à l’eau (Excalipur, encore une fois...), et finira par se prendre d’affection pour eux au point de se sacrifier pour les sauver.
Le jeu du point de vue de notre cher Gilgaga...
Exdeath, il faut l’admettre, est l’archétype du méchant vraiment méchant. Aucune subtilité n’est permise, aucune nuance de gris, il est le mal incarné. Littéralement, puisque le jeu nous apprend autour d’un rapide dialogue qu’il s’agit d’une entité sombre créé par les habitants de la planète de Galuf, qui tentaient de sceller au sein de l’arbre de vie tous les mauvais esprits de leur monde. C’est donc, par essence, un véritable condensé de haine, créé accidentellement par l’égoïsme des hommes.
Exdeath a la classe, mais n’a pas une psychologie très fouillée.
On peut tout de même creuser un peu et voir un certain nombre de thèmes se dégageant du scénario : Exdeath et son obsession pour le « Néant », dépeinte dans le jeu comme une force semblable au vide qui existait avant l’arrivée du Big Bang ; la sempiternelle question de la raison d’être des héros, que Butz se posera régulièrement au cours du jeu ; une pointe d’écologie avec le mauvais usage des cristaux à Wolse et à Karnak, ce qui participera à leur destruction ; la question de la morale de la science, qui peut être utilisée à bon ou mauvais escient, que l’on retrouve lors des errements de Cid ; et enfin le passage de générations, symbolisé par la mort des anciens Héros de la lumière et notamment celle de Galuf...
Malheureusement, il est vrai que tous ces thèmes ne sont pas vraiment mis en avant au cours du jeu, et entre sa tournure classique et son ton léger, beaucoup de joueurs ont eu du mal à prendre le scénario au sérieux.
Mais peut-être que pour une fois, avoir un méchant torturé et complexe et des héros aux motivations profondes n’était pas le plus important. Peut-être qu’Exdeath n’était finalement là que pour appuyer la quête des héros et leur donner un but à atteindre, symbolisant les épreuves qu’ils doivent endurer et leur évolution au cours du jeu. Le plus important, dans le fond, ne serait-ce pas plutôt les joies et les peines que vivent les héros, et la façon dont ils grandissent de cette aventure ?
Final Fantasy V est donc comme tous les épisodes de la saga : un grand voyage plein d’émotion et de rencontres pour le joueur, pêchant seulement par un scénario un peu trop classique et des interactions entre les personnages réduites à leur strict minimum.
Mais si ce manque d’originalité dans le scénario dessert le jeu et en fait l’un des FF les moins intéressant pour certains, pour les autres cela rend l’univers de FFV plus accessible et surtout moins prise de tête. On se contente de profiter de l’univers attachant et des mécaniques de jeu, sans se farcir les états-d’âme d’un ex-soldat devenu mercenaire-terroriste pour fuir son passé, tout en étant manipulé par ses propres souvenirs (au hasard, hein).
La réception du jeu par le public : deux pays, deux visions
Jusqu’ici, la sortie de chaque nouveau Final Fantasy était accueillie au Japon par de très bonnes ventes allant crescendo, dépassant même le million avec FF3, mais sans jamais parvenir à titiller celles de Dragon Quest. La série de Square était vu comme plus high-tech, mais aussi plus complexe que celle d’Enix, et donc moins accessible au grand public. Mais quand FFV débarque au Japon, ce dernier démarre en trombe, atteignant en quelques jours les 900 000 exemplaires.
Il finira par atteindre les 2,4 millions de cartouches vendues, touchant enfin du bout des doigts son concurrent de toujours, Dragon Quest V s’étant écoulé à quelques 2,8 millions depuis sa sortie quelques mois auparavant.
C’est le premier opus de la franchise à enfin jouer dans la même cour que son rival, avant de le surpasser (et pas qu’un peu !) avec Final Fantasy VII, notamment grâce à sa sortie mondiale.
Difficile de comprendre les raisons exactes d’un tel succès, mais il faut croire que le travail de Sakaguchi et son équipe et la réputation de la série acquise avec ses 4 épisodes précédents a fini par porter ses fruits. Pourtant un peu moins bien noté par la presse que son prédécesseur (34/40 dans le Famitsu de l’époque, contre 35/40 pour FF4), Final Fantasy V aura su attirer l’œil de nombreux jeunes joueurs, et aura servi de porte d’entrée dans la franchise pour beaucoup de gens. Et pour ces joueurs, le jeu fut l’un des plus marquant de la console (au point d’inspirer à certains leur vocation...).
Lorsque le magazine Famitsu propose un vote à ses lecteurs pour savoir, sur chaque console, quels sont les titres qui les ont le plus marqués, le classement sur Super Famicom prend cette forme : Super Mario World, Dragon Quest V, et... Final Fantasy V. Même si FF6 reste bien sûr en en tête des classements des meilleurs jeux de la machine, c’est FF5 qui ravive le plus les souvenir des joueurs japonais concernant la 16-bit de Nintendo.
Quant à l’inverse, en Occident, lorsque l’on propose des classements des meilleurs jeux Super NES ou des plus grands RPGs de tous les temps, FF4 et FF6 figurent évidemment en bonne place, mais FF5 se retrouve généralement plus bas dans le classement, voire n’est pas mentionné du tout...
85 chefs d’œuvres de la SNES selon ce classement japonais.
Au Japon, FF5 est donc un RPG culte de la Super Famicom. Mais en occident... c’est pas vraiment ça.
Je ne pense pas me tromper si je vous dis que pour beaucoup de gens, quand on demande quel est le meilleur FF, on pense d’abord au 6, 7, 8, 9, 10, etc. selon les goûts. FF5 est rarement cité comme une référence. Tout le monde reconnaît les qualités du système de jobs, mais pas vraiment le reste. Il est considéré, autant par les américains que par les européens comme parmi les moins intéressants, parfois relégué au même rang que les trois premiers. C’est un peu le vilain petit canard des opus SNES. Première raison invoquée : le scénario trop classique et le ton globalement très léger, lorsqu’on le compare à FF4 et FF6, qui ont des thèmes forts bien plus dramatiques.
Mais une autre raison peut expliquer ce désamour par le public occidental : Des trois épisodes SNES, c’est le seul à ne jamais être sorti en occident, ou en tout cas aux États-Unis.
Des jeux qui ne sont pas sortis du Japon, c’était tristement monnaie courante à l’époque. Pourtant, Squaresoft avait bien l’intention de localiser FF5, et s’y est même pris à plusieurs reprises, en songeant notamment à une version PC. À une certaine époque, il avait même été envisagé de le localiser sous le nom de « Final Fantasy Extreme » pour mettre en avant son système de job. Mais le temps passa et FF6 eu le temps de sortir avant que FF5 ne daigne se montrer.
L’une des principales raisons cette absence de localisation a été la complexité du jeu. Ted Woolsey, traducteur chez Square à partir de 1991, témoigne en disant que le jeu était très bon, mais n’avait pas fait l’unanimité au sein de l’équipe de localisation, certains le trouvant encore trop complexe dans ses mécaniques et son scénario pour le joueur américain.
Le problème avait déjà été présent avec FF4, qui est sorti aux US dans une version simplifiée, et la branche américaine persistera dans son préjugé en demandant la création d’un RPG pour débutants, qui fut Final Fantasy Mystic Quest (Mystic Quest Legends en Europe). Leur but avoué était de créer une porte d’entrée pour le genre aux États-Unis qui permettrait peut-être plus tard de localiser FF5 et les futurs titres de Square, une fois que le public se serait élargi. Un objectif que le jeu n’a malheureusement pas su remplir, et qui ne sera véritablement réalisé qu’avec, encore une fois, la sortie de Final Fantasy VII.
C’était donc une question d’accessibilité, mais surtout de considérations marketing : si à l’époque les RPG avaient largement la côte au Japon, c’était moins le cas aux US, où ce type de jeu faisait au mieux des ventes correctes.
On peut aussi y voir l’un des premiers exemples d’une mauvaise compréhension du marché : tout le monde n’avait pas acheté Final Fantasy IV, mais tous ceux qui l’avaient fait voulaient sa suite ! Et si la numérotation modifiée de FF4 et 6 pour le marché américain (devenus FF2 et 3) a pu faire illusion un moment, la sortie de Final Fantasy VII aura levé le doute chez les fans. Il existait donc des épisodes Final Fantasy qui n’étaient pas sortis en occident... Au final, l’absence de localisation de Final Fantasy V, remplacé par un Final Fantasy Mystic Quest « du pauvre », en aura frustré plus d’un.
Fort heureusement, ça n’a pas duré bien longtemps : alors qu’à la fin des années 90, Internet commence tout juste à s’installer dans les chaumières, des bidouilleurs en informatique forts doués mettent au point des programmes qui reproduisent le comportement des consoles de jeux : les émulateurs. Viennent ensuite très vite les premiers hacks des jeux, mais plus souvent pour faire des « blagues » que pour vraiment apporter une plus-value au jeu lui-même... Jusqu’à Final Fantasy V. Puisque le jeu n’avait pas eu le droit de sortir en Occident, pourquoi ne pas se charger nous-même de le traduire ? Ainsi naquit la fan translation de FF5, grâce aux talents d’une poignée de lycéens.
Et si ce ne fut pas la première fan trad pour un jeu vidéo, ce fut sûrement la plus retentissante, à la fois par l’excellent travail réalisé et par la popularité du jeu et de la série, préfigurant de nombreuses futures fan trads et montrant au passage que ce que les éditeurs ne voulaient pas faire, les fans étaient capables de le faire eux-mêmes (dans une certaine forme d’illégalité, certes).
Quoiqu’il en soit, cette fan trad de FF5 a été la porte d’accès au saint graal perdu pour de nombreux joueurs, qui encore aujourd’hui gardent en tête les noms et termes de cette traduction plutôt que ceux des futures traductions officielles : nous nous souvenons d’abord de « Cara » plutôt que de Krile, tout comme pour beaucoup d’entre nous, Riesz de Seiken Densetsu 3 s’appelle « Lise ».
Pour tous les autres, ceux qui avaient trop peur de bidouiller des programmes louches sur leurs ordinateurs ou qui n’en avaient tout simplement pas entendu parler, Square localisera enfin Final Fantasy V dans une réédition nommée « Anthology » sur Playstation, avec une mauvaise surprise : en plus de latences et chargements pourtant inexistants dans la version SNES, la version PSX se coltine une traduction d’une qualité lamentable. Il était officiellement possible de jouer au jeu, y compris en Europe, mais on ne peut pas dire que ce soit dans de bonnes conditions. D’une certaine façon, cela a contribué à entacher un peu plus la réputation du jeu...
Il faudra attendre 2006 et la sortie de remakes Gameboy Advance des opus SNES pour pouvoir enfin jouer à FF5 avec une version officielle de bonne qualité.
La traduction de la version PS1 dans toute sa splendeur.
Mais le mal était fait : les joueurs occidentaux, pourtant jeunes à l’époque de FF4 et FF6, ont grandi, et se sont construits un esprit critique. Après les trois claques techniques et narratives des épisodes Playstation, voir débarquer un épisode vieillot tout en pixels pour lequel on n’avait aucun attachement ne risquait pas de jouer en sa faveur.
Mais dans le fond, que ce serait-il passé si Final Fantasy V avait réussi sa localisation en Occident sur Super NES ? Les joueurs occidentaux auraient-ils critiqués de la même façon son univers simpliste et ses personnages peu fouillés ? Ou se seraient-ils laissés portés par l’onirisme du titre et les possibilités quasi infinies de son système de job, pour en faire l’un de leurs meilleurs souvenirs de joueurs, au même titre que les deux autres épisodes sur la machine ?
Personnellement, ayant joué au jeu « à l’époque » sur émulateur après avoir fait FF7 et FF6, je connais ma réponse. À vous de me donner la vôtre
Un héritage fort
Final Fantasy V est donc loin d’être l’opus mineur dont il a malheureusement la réputation.
Toujours culte au Japon, il regagne un peu en popularité en occident, en partie grâce à la communauté du jeu autour du speedrun et autres évènements du genre. Il étonne encore aujourd’hui par la versatilité de son gameplay et toutes les possibilités offertes par le jeu. Et bien sûr, il tient une place de choix dans le cœur des fans pour tout ce qu’il a apporté à la série, voire au J-RPG en général : le système de jobs, les mécaniques de jeu, son univers, les super-boss, des personnages emblématiques comme Gilgamesh ou les Mogs et des tonnes d’autres choses qui deviendront récurrentes dans la série.
Il a été le dernier projet où Sakaguchi était au poste de director (réalisateur), et deviendra producer (chef de projet) par la suite sur la série, laissant Kitase prendre son ancien poste, mais sans que ça change quoique ce soit à ses fonctions réelles. Mais ce changement de poste marque tout de même un tournant important pour le créateur, qui s’éloignera dorénavant de la formule « classique » et fera en sorte que chaque future itération de la licence repousse les limites techniques et narratives et donne le meilleur d’elle-même.
Comme si finalement il avait senti qu’avec FF5, il avait atteint le summum de ce qu’il pouvait faire avec les mécaniques et l’univers d’origine de la série, et qu’il fallait maintenant qu’elle prenne un nouveau tournant : FF6 se démarquera à plus d’un titre de ses prédécesseurs, avec un univers quasi-futuriste qui abandonne les cristaux, piliers de la franchise, des personnages extrêmement travaillés et un sens de la mise en scène poussé à son paroxysme, et un habillage graphique sublime qui s’efforcera de faire oublier l’aspect « case par case » des RPG jusqu’à alors. Une direction qui sera accentuée à chaque nouveau volet de la série pour finalement totalement s’écarter de ses origines.
Final Fantasy V n’est peut-être pas le meilleur de toute la franchise, mais il reste indéniablement l’un des plus importants de son histoire. Accueillant dans son équipe nombre de stars du staff de Squaresoft, du présent ou du futur, il est le premier épisode à rivaliser enfin avec Dragon Quest, et à la fois le dernier épisode traditionnel, rassemblant en un seul jeu le meilleur de la série jusqu’alors. Il aura, comme tous les autres épisodes de la franchise, apporté de nombreuses choses à l’univers de la série et au genre du J-RPG. Il aura aussi contribué, malgré lui, à l’essor de l’émulation et de la traduction non-officielle de jeux par des fans.
Et quoiqu’il en soit, il aura marqué et marque sûrement encore maintenant de nombreux joueurs.
En faites-vous partie ?
J’espère de mon côté que cette grosse rétrospective vous aura plu, je ne risque pas de recommencer de gros articles de ce genre de sitôt vu la quantité de travail que ça demande !
Mais peut-être à l’occasion, si je trouve le temps et le courage, je pourrais me lancer dans la rétrospective d’autres épisodes ou sagas de jeux.
Je vous invite dans tous les cas à discuter du jeu en commentaire, de vos souvenirs et expériences, de vos musiques préférées, de vos moments marquants ou des meilleures techniques que vous avez trouvé pour « casser le jeu », bref à vous souvenir du jeu et de ce qu’il vous a apporté !
Sur ce, see you next time pour un prochain article !
Sans crier gare, voici une rétrospective sur Final Fantasy V sorti de nulle part
Faisant fi de toute la hype autour de FF7 Remake (parce que je suis un hipster ), je me suis replongé dans le jeu en ce début d’année 2020, parce que ça faisait longtemps que j’en avais envie et la lecture d’un certain bouquin aura été un prétexte supplémentaire... (j’en profite pour remercier encore Anakaris pour le concours retrogamekyo de l’année dernière au passage !)
Du coup, je me suis dit que ce serait l’occasion de lui redonner un quart d’heure de gloire, lui qui a été longtemps considéré comme le « moins bon » de la trilogie FF sur Super Nintendo. Loin s’en faut, nous verrons qu’il a été l’un des titres les plus ambitieux de Sakaguchi et de son équipe, et marque le point culminant des débuts de la saga.
Je vous propose donc une petite analyse rétrospective du jeu, agrémentée d'infos autour du jeu et de sa conception dont la grande majorité sont issues de ce bouquin : Chris Kohler – Final Fantasy V.
On abordera le jeu dans son ensemble, des anecdotes sur sa conception à ce qu’il a apporté à la série et l’industrie, en décortiquant bien sûr au passage les différents aspects du jeu. Du coup, ça va spoiler sévère et sans prévenir, mais je doute que ça dérange la plupart d’entre vous (Pour les autres, allez donc faire le jeu, nomdidiou !)
Je vous offre par ailleurs ma plus grande prestation d’écriture de pavé jusqu’ici (18 pages !!), donc histoire de vous laisser le temps de digérer tout ça (et de me laisser le temps de préparer la fin, aussi), je vous propose de diviser ça en deux parties, dont la deuxième arrivera demain.
Allez, prêts à (re)découvrir l’un des opus les plus mesestimés de la série ?
Note : les mots soulignés sont des liens vers des vidéos ou articles, n’hésitez pas à cliquer dessus !
Final Fantasy V Titre original : ファイナルファンタジーV Fainaru Fantajii Faivu (téma l’accent parfait)
Consoles : Super Famicom, Playstation, Gameboy Advance, VC, smartphones, Steam
Développé par : Squaresoft
Edité par : Squaresoft/Square-Enix
Sortie initiale : 6 décembre 1992
Genèse du jeu
En 1991 sort Final Fantasy IV sur SNES, faisant entrer de plein pied la jeune série de Square dans l’ère 16 bits. Des graphismes et musiques améliorés grâce au nouveau support, une aventure encore plus longue et surtout, enfin des prémices de mise en scène qui permettront à la saga de mettre en avant ses personnages autour d’un scénario bien construit, chose encore difficile sur la 8-bit de Nintendo. Le jeu est évidemment un succès et bat encore le record de vente du précédent épisode, récoltant les meilleures notes et critiques de la série jusque-là. Mais ce n’est pas suffisant pour battre le rival de toujours, Dragon Quest, dont le dernier épisode en date (le 4) cartonne à 3 millions de ventes.
En toute logique, l’équipe de Sakaguchi s’attèle donc rapidement à un nouvel épisode, mais comment faire pour qu’il soit encore plus marquant que le précédent et rivalise enfin avec la série phare d’Enix ?
La réponse est simple : cumuler les deux points de la série jusqu’à maintenant, à savoir sa narration et sa mise en scène dramatique, et son iconique système de job interchangeables qui avait été mis de côté pour FF4.
Les jobs de FF1 ont été imaginés en réponse aux deux premiers Dragon Quest qui imposaient une poignée de personnages aux rôles définis ; le système de FF3, avec la possibilité de changer de job à tout moment, venait en réponse à Dragon Quest III qui lui mettait en place son système de classes recrutables... Que pouvait trouver Sakaguchi de mieux pour FF5 ?
Là encore, la réponse paraît simple : augmenter encore le nombre de jobs bien sûr, ainsi que le nombre de leurs capacités uniques que l’on acquerra alors au fur et à mesure du jeu. Mais ce ne sera peut-être pas suffisant pour surprendre les joueurs... Et si on faisait en sorte qu’en apprenant des capacités avec un job, on puisse les utiliser avec un autre job ? L’idée du siècle venait de naître.
La Dream Team
Pour mener à bien cette cinquième itération de la fantaisie finale et en faire le meilleur épisode jusqu’alors, Sakaguchi s’entoure évidemment de la crème de la crème au sein de la boîte. On retrouve bien sûr la sainte trinité de la série, avec Amano au chara design, Uematsu à la musique, et Sakaguchi himself à la réalisation. Il sera aidé par Yoshinori Kitase au scénario, notamment pour écrire les passages humoristiques et compenser le ton dramatique des moments imaginés par Sakaguchi. Il s’est d’ailleurs créé une sorte de rivalité amicale entre les deux employés, qui essayaient chacun leur tour de surprendre l’autre avec une nouvelle scène !
Le complexe système d’interactions entre les jobs sera mis en place par un autre ancien de Square, Hiroyuki Ito, qui avait déjà créé le système ATB si cher à la série et officiera plus tard sur les battle systems de Chrono Trigger ou FF Tactics, voire sur FF9 en tant que réalisateur. Il sera aidé pour le battle system de FF5 par Akihiko Matsui.
Mais FFV est surtout connu pour avoir accueilli des futurs talents de Square : c’est donc le premier travail de Yasunori Mitsuda, ici en tant que sound designer, tâche qu’il détestera au point de « menacer » de quitter la boîte si on ne le mettait pas ensuite à la composition musicale sur un autre projet... (au hasard, Chrono Trigger ) ; de même pour un certain Tetsuya Nomura, qui fait partie ici de l’équipe affectée au monster design, donnant naissance à quelques créatures emblématiques comme le Tonberry ! Il aura aussi influencé les Mogs, autre mascotte de la série qui fait son grand retour dans FF5 depuis son apparition discrète dans FF3.
On retrouve aussi Tetsuya Takahashi, futur génial créateur de Xenogears et de toute la saga qui s’ensuivra (et accessoirement actuel président de Monolith Software), qui n’est certes pas tout nouveau chez Square mais travaille pour l’instant sur le design des environnements.
Au total, c’est une équipe d’environ 45 personnes qui s’attèleront à la tâche. Et elle est ardue, puisqu’il faudra boucler le projet en tout juste un an, et surtout se creuser la tête pour que le jeu soit encore plus marquant que son prédécesseur et repousse à nouveau les limites du genre.
De nombreuses idées de game design seront intégrées (j’en parlerais plus loin) et deviendront récurrentes dans la série.
Habituellement, sur un projet classique, certaines tâches sont effectuées en amont du développement, comme les concept arts ou la composition des musiques. Et une fois ces tâches terminées, les employés étaient affectés à d’autres projets dont le développement débutait. Mais pour les Final Fantasy, Sakaguchi tenait à ce que tous les employés présents sur le projet restent jusqu’au bout. Ainsi, les gens comme Uematsu ou Nomura qui finissaient leur travail assez tôt dans la production du jeu étaient ensuite affectés à d’autres tâches, et notamment le debug du jeu, puisqu’il n’y avait pas encore de département d’assurance qualité chez Square à l’époque. Pour Sakaguchi, il était important que chaque membre du développement d’un Final Fantasy soit impliqué entièrement dans le projet. Faire travailler tout le monde sur le debug, c’était une manière de faire en sorte que chaque membre de l’équipe s’approprie le jeu et le connaisse sur le bout des doigts.
Un travail d’orfèvre
Quoique visibles, l’évolution entre FF5 et son prédécesseur n’en reste pas moins subtile. Graphiquement, les deux jeux sont encore très proches même si de nombreux effets sont améliorés, tous comme les décors qui gagnent en détails.
Le Mode 7 de la console sera de nouveau peu exploité, présent principalement durant les phases en aéronef, mais cette fois avec un effet bombé de la carte, donnant un peu plus l’impression de voler à travers le globe.
Les mécaniques principales de la série demeurent elle aussi inchangées, et reprennent le système ATB implanté dans le volet précédent. De même que les bases de l’univers : on retrouve une histoire centrée sur les cristaux élémentaires et les 4 guerriers de la lumière, et la quête pour l’éradication d’une entité maléfique. Les personnages jouables sont donc de nouveaux réduits au nombre de 4 (enfin, 5) pour coller avec le retour du système de jobs, la principale différence avec les anciens épisodes étant qu’ils sont cette fois dotés de leur propre personnalité.
C’était le souhait depuis longtemps de Sakaguchi et son équipe que de créer des véritables histoires pleines de drames autour des personnages. Cela tient d’abord bien sûr à leur volonté de se démarquer de leur rival Dragon Quest, où les héros ne font que suivre une grande quête sans que soit mis en avant leur personnalité ou l’interaction entre les membres du groupe.
Mais cela tient aussi de leur amour du cinéma : FF4 s’ouvrait lentement sur le vol du bataillon d’aéronefs dirigés par Cecil, FF5 aura droit à sa longue introduction aux inspirations clairement cinématographiques : le fondu d’ouverture, le travelling vers le sommet du château, le cri du dragon et l’arrivée du roi de Tycoon puis de sa fille Lenna, qui sans le savoir verra son père pour la dernière fois... Le tout merveilleusement soutenu par la musique d‘Uematsu, qui suit parfaitement le déroulement de la scène, s’intensifiant lors de la chute du météore ou reprenant le thème principal plein d’espoir alors que l’on voit le héros du jeu, Butz, se reposer au fond d’un bois avant que le météore ne s’écrase et qu’il ne se décide à aller enquêter.
Côté musique d’ailleurs, Uematsu avait confié que lors du développement de FF4, il avait eu l’occasion d’entendre le travail de Yuzo Koshiro sur un certain Actraiser, et fut bluffé par la qualité sonore des musiques venant de la machine, au point de finir déçu de la sonorité de ses compositions pour FF4 et de demander à l’équipe sonore d’en améliorer la qualité à la hâte alors que le développement du jeu touchait à sa fin !
Pour FF5, il n’était donc pas question de se reposer sur ses lauriers, et il a travaillé d’arrache-pied pour augmenter encore d’un cran la qualité sonore, chose que l’on peut ressentir sur certaines pistes du jeu, dont l’intro notamment.
En dehors de ça, le jeu offre comme à l’accoutumée nombre de pistes marquantes grâce au talent du compositeur : Le Main Theme bien sûr, mais aussi beaucoup d’autres comme le Theme de Lenna, The dragon spreads it's wings, Lands unknown ou la nouvelle version du thème du chocobo façon Mambo. Et impossible de ne pas citer aussi Dear Friends, qui me fait pleurer à chaque fois.
Mais aujourd’hui, s’il y a bien un thème considéré comme représentatif du jeu et devenu culte dans la série, c’est Battle on the Big Bridge, qui flirte déjà avec le style rock progressif si cher à Uematsu.
L’OST du jeu finira par comprendre 56 pistes, marquant un nouveau record pour la série.
Des exploits de ce genre, l’équipe de FF5 en réalise quelques autres : chacun des 5 personnages jouables dispose de son propre aspect pour chacun des 22 jobs du jeu et donc de son propre sprite ! Ce à quoi il faut ajouter les différentes animations pour chacun des jobs... Kazuko Shibuya, la pixel artist attitrée de la série depuis le premier épisode, réalise un travail colossal dont elle se souviendra comme le plus laborieux de toute sa carrière.
Kazuko Shibuya dévoile lors d’une interview ses vieux supports de travail.
Le système de jobs, quintessence du gameplay
Le gros attrait du jeu devait être son nouveau système de job, et tous les efforts de l’équipe se sont donc concentrés dessus. Les jobs classiques (guerrier, moine, voleur, mage blanc, noir, et rouge) ainsi qu’une bonne partie des jobs de FF3 font donc leur grand retour, et s’y ajoute une poignée de nouveaux : Danseur, Dompteur, Chrono-mage, Samouraï, Mage Knight, Alchimiste...
Cette fois, pas question de faire comme FF3 aux classes volontairement très inégales : il faut que chaque job de FF5 soit original et utile, et puisse servir tout le long du jeu. D’ailleurs, puisque les jobs sont récupérés via les fragments de cristaux, la quasi-totalité des jobs sera accessible dès le premier tiers du jeu atteint. Il ne restera plus au joueur que de composer l’équipe de ses rêves en fonction de ses besoins dans le jeu.
Et on peut dire que Sakaguchi et son équipe ont rivalisé d’ingéniosité pour rendre toutes les classes aussi attrayantes que possible. Si les jobs « classiques » nous sont globalement déjà connus, les nouveaux ajoutent tout un tas d’aspects de gameplay tous aussi amusants les uns que les autres : le Dompteur peut contrôler les monstres et les capturer pour les relâcher sur l’ennemi ; le Danseur lance un effet aléatoire parmi quatre, avec une certaine chance de tomber sur la puissante « Danse de l’épée » (probabilité que l’on peut augmenter avec certains équipements de fin du jeu) ; le Mage Knight peut associer un sort de magie noire à son arme pour un effet dévastateur ; l’Alchimiste peut mixer des ingrédients pour créer des potions extrêmement utiles ; le Barde entonne des chants qui boosteront l’équipe, etc.
Mais deux jobs sortent principalement du lot pour leur inventivité : le Mage Bleu, que l’on obtient avec le premier cristal et qui permet d’apprendre certaines compétences ennemies aux effets très variés. C’est alors un vrai jeu dans le jeu que de chercher les monstres chez qui on peut apprendre une compétence !
Ensuite le Mime, qui lui est caché quelque part dans le dernier monde, et qui non content d’offrir une des capacités les plus utiles du jeu (Mimer, qui permet de reproduire la dernière action d’un personnage, que ce soit une magie ou une compétence d’un autre job comme « Volée » du Rôdeur) permet aussi d’associer trois compétences d’autres jobs, alors que toutes les autres classes du jeu ne peuvent en avoir qu’une seule supplémentaire !
Deux idées géniales qui seront bien sûr reprises par la suite dans les jeux de la série.
Mais un dernier coup de génie vient à l’un des développeurs alors que le jeu est dans sa dernière phase de développement : faire en sorte que le job de départ « Freelancer » puisse bénéficier de toutes les compétences apprises avec les autres classes ! On commencerait ainsi le jeu avec cette classe faible et sans particularités, pour le finir avec cette même classe devenue surpuissante grâce aux capacités acquises entre temps... et la boucle serait bouclée.
Ce n’était certainement pas le bon moment pour revenir sur le développement et intégrer cette idée... mais elle était trop bonne pour être ignorée et l’équipe fit donc tout son possible pour la mettre en place avant la sortie du jeu. Et ils ont bien fait : sorte d’ultime récompense pour les efforts du joueur dans l’utilisation des jobs et de leurs capacités, le système de jobs n’aurait peut-être pas eu toute sa saveur sans cet aspect.
Les 22 classes du jeu, toutes uniques dans leur style de combat.
Pour autant, tous les défis du jeu peuvent être réalisés sans cette astuce, en tirant parti des spécificités de chaque job et de la possibilité de leur associer les capacités précédemment apprises. C’est quelque chose dont on ne se rend pas forcément compte dans une partie normale de FF5, mais lorsqu’on tente certains défis du jeu, on constate à quel point le système est versatile et permet de nombreuses possibi-lités. Chaque joueur ira chercher les différentes combinaisons possibles pour trouver la meilleure : un petit coup de « Célérité » + « Sorcellerie » + « Météore » voire « Bahamut » vous assurera de bons gros dégâts magiques. Ou mixez une « Puissance du dragon » avec l’Alchimiste et donnez-la à un Berserker qui tient sa hache à deux mains, et c’est le 9999 de dégâts assuré. À moins que vous n’optiez pour la combinaison ultime, « Volée » + « Magilame » + « Deux armes », qui ne fera qu’une bouchée de la plupart des boss...
C’est aussi là où l’on constate à quel point l’équilibrage est parfait : lorsque l’on est coincé contre un ennemi ou un boss, il peut suffire d’un peu de grinding pour s’en sortir, comme dans n’importe quel RPG... mais on peut aussi simplement changer sa stratégie en choisissant d’autres jobs pour s’adapter en fonction de l’ennemi : Shiva et ses sbires peuvent paraître difficile à vaincre pour un groupe normal, mais une équipe de mages noirs, ou mieux, de chevaliers mages, en viendra vite à bout.
De nombreux ennemis et boss du jeu vont ainsi avoir leurs spécificités, leurs points faibles et leurs patterns, qu’il va falloir analyser pour les appréhender au mieux, pour toujours pousser le joueur à changer sa stratégie et expérimenter des choses. Le plus souvent d’ailleurs, il existe plusieurs façons de les battre : Byblos est vulnérable au feu, mais il s’avère aussi faible face à la Magie Bleue « Griffe mortelle », qui le laisse à seulement quelques PV...
Ni trop facile ni trop difficile, il n’y a jamais vraiment besoin de faire du grinding pour avancer dans le jeu, même si ça reste une option pour avancer. Le jeu laisse cette liberté aux joueurs, mais en profitant de la synergie entre les jobs, on peut venir à bout de tous les obstacles.
Cela peut même aller plus loin : en dehors des jobs, le jeu offre nombre d’outils plus ou moins évidents pour augmenter encore le nombre de possibilités. Par exemple, si pour X raison le joueur ne peut ou ne veut pas utiliser de magies, il est toujours possible de casser des Bâtons de mages pour lancer un sort élémental. D’autres pièces d’équipement peuvent aussi avoir l’effet d’un sort s’ils sont utilisés comme des objets en combat. Et si vous recherchez ces équipements en grand nombre, vous trouverez sûrement quelque part dans le jeu un ennemi chez qui vous pourrez le voler...
Il en va de même pour certaines compétences ou sorts, qui peuvent avoir des effets inattendus : Gobelipunch est la première Magie Bleue que l’on peut apprendre et semble bien faible de prime abord. Elle possède pourtant deux atouts : ses dégâts sont calculés sur la base de la statistique d’attaque de votre arme, et non sur ses dégâts réels. Ainsi, on peut tirer parti de la grosse statistique d’attaque d’Excalipur (fausse Excalibur donnée par Gilgamesh qui ne fait qu’un point de dégât !) en contournant le malus de dégâts. L’autre effet kiss-cool, c’est que la puissance de Gobelipunch est décuplée si la cible a exactement le même niveau que le lanceur du sort. Et il y a bien quelques moyens pour modifier le niveau des ennemis dans le jeu...
On se rend alors compte que le système de job, combinés à la multitude d’outils offerts par le jeu, réalise une telle prouesse en termes de liberté de gameplay, qui fait que l’on peut littéralement finir le jeu avec n’importe quelle combinaison de job, sans en changer au cours du jeu. Même si selon votre équipe, la tâche sera plus ou moins ardue, bien sûr.
Avec le temps, cela a donné lieu à des évènements comme la Four Jobs Fiesta, dont le principe est de finir le jeu le plus vite possible en utilisant seulement 4 jobs tirés au sort. Avec des défis de ce genre, on se surprend à trouver une utilité à des aspects du jeu qui ne sont pourtant pas les plus efficaces lors d’une run normale !
En bref, les possibilités offertes par le jeu et son système de jobs sont énormes et sont indéniablement l’aspect le plus fun du jeu. Ce n’est pas pour rien que ce système sera souvent repris par la suite dans les FF Tactics et autres spin-off de la licence, jusque dans les tous récents Bravely Default et Octopath Traveler, avec malheureusement moins de possibilités.
Peaufiné et exemplaire, cet incroyable système de jobs n’est pourtant pas la seule chose que le jeu a à offrir...
Un exemple en terme de rythme et de variété
Les séries Final Fantasy et Dragon Quest ont toujours fait preuve d’un excellent sens du rythme, en brisant régulièrement la linéarité de leur progression et en cherchant constamment à surprendre le joueur en lui amenant de nouvelles situations. Et Sakaguchi avait parfaitement compris comment se servir d’outils de gameplay pour donner subtilement vie à son univers.
Ainsi le chocobo ou l’aéronef sont à la fois un outil de progression, un sentiment de liberté pour le joueur, et une marque distinctive de la série. On retrouve chez Sakaguchi la même conception du game design que chez Shigeru Miyamoto : il ne travaillait pas à construire des univers ou des personnages marquants, mais à créer des éléments de design que l’on ne remarquait plus tellement ils étaient fondus dans l’univers du jeu.
Et Final Fantasy V hérite de la structure et du rythme élaborés dans les épisodes précédents, avec bien sûr de nombreuses améliorations.
Dans Final Fantasy V, on commence l’aventure de façon classique à chercher les 4 cristaux, mais avec le temps ils deviennent de moins en moins faciles à atteindre. Alors que le joueur croit enfin arriver au dernier cristal après avoir traversé le désert, voilà que surgit soudain une forteresse volante ! C’est le moment où le joueur met enfin la main sur l’aéronef, mais il faudra tout de même trouver de l’Adamantite pour l’améliorer et parvenir à rejoindre la forteresse.
Jusque-là, le premier monde fait monter le joueur en puissance et lui donne un avant-goût de ce qu’il sera à la fin du jeu. Puis il se retrouve dans le deuxième monde, et se retrouve soudainement « faible » : il faut retrouver Galuf, sortir vivant du château d’Exdeath et fuir par le grand pont où plusieurs monstres essayeront de nous arrêter, avec un final dantesque contre Gilgamesh. Il faut ensuite traverser une série d’épreuve avant de pouvoir retrouver un moyen de transport (le dragon). Puis quand on pense pouvoir enfin mettre la main sur un nouvel aéronef, on a finalement droit à un sous-marin pour explorer les profondeurs, une première dans la série. Et lorsque l’on croit arriver enfin au donjon final et à la confrontation contre Exdeath, le jeu nous propulse de nouveau dans le monde d’origine... qui semble étrangement changé.
La surprise des nouveaux mondes explorables, c’était déjà quelque chose de présent dans la série : le 3 surprenait en nous faisant comprendre que le monde sur lequel nous étions au départ n’était qu’un « minuscule » continent flottant, le vrai monde étant bien plus vaste. Dans le 4, le jeu nous faisait passer du monde normal au monde souterrain, puis se terminait carrément sur la lune...
Mais dans FF5, le changement entre chaque monde apporte une nouvelle dimension à la progression : alors que dans la plupart des RPG d’alors, progresser dans l’aventure signifiait devenir plus fort, FF5 est un des premiers jeux à casser cette progression et à remettre le joueur dans une position de faiblesse, le poussant d’autant plus à vouloir récupérer ce qui lui a été retiré. Quelque chose qui deviendra récurrent dans nombre de jeux par la suite.
De la même façon, FF5 brisera la linéarité du jeu en proposant divers objectifs annexes. Dans le premier monde, une fois l’aéronef acquis, on peut faire un tour à la ville de Lix, ville natale de Butz. Ce n’est absolument pas nécessaire pour faire avancer le scénario et on peut tout à fait continuer le jeu sans même faire attention à cette ville, qui est surtout l’occasion d’en apprendre un peu plus sur notre héros. D’autres scénettes se dévoileront pour les joueurs les plus fouineurs : Avez-vous pensé à revenir dans la caverne des pirates au début du jeu, pour constater que votre chocobo blessé a été recueilli par ces derniers ? Ou à retourner au château de Tycoon une fois en possession du Dragon pour en savoir plus sur le passé de Lenna ?
Sakaguchi partait du principe que les joueurs aimaient explorer et revenir sur leur pas pour s’approprier l’univers du jeu, et il récompensait cela en offrant un bout d’histoire ou en changeant le dialogue des NPC. Ainsi, à plusieurs reprises le joueur aura ainsi l’occasion de s’aventurer hors des sentiers battus ou de revenir sur ses pas, et sera généralement récompensé par une mini-cutscene, un objet ou équipement utile, voire même une invocation.
De la même façon, le jeu mettra régulièrement sur la route du joueur des monstres à priori plus forts que votre équipe, mais qui cachent bien souvent des trésors inestimables. Certains peuvent être vaincus, malgré leur apparente difficulté, avec un peu de grinding ou en tirant profit du système de job, mais vous serez contraints de fuir pour d’autres.
Sakaguchi ne laissait rien au hasard, et chaque ennemi, chaque équipement pouvait avoir son utilité. On trouve par exemple dans les sous-sols du château de Bal un ennemi nommé « Objet d’Art », qui a la fâcheuse tendance à être franchement solide et à transformer vos héros en pierre. Mais ils sont eux-mêmes sensibles à l’objet « Défigeur » qui les tue en un coup. Ou carrément au sort « Nv 5 Hadès », puisqu’ils sont tous de niveau 45... Et comme par hasard, ces ennemis donnent une bonne petite somme en ABP, 4 pour un petit groupe, et 8 dans le meilleur des cas !
Régulièrement au cours du jeu, Sakaguchi et son équipe ont prévu des endroits au cours du jeu pour faire évoluer rapidement son équipe pour les joueurs qui sauront les dénicher. Comme cette « caverne aux gils » située près du château de Bal encore une fois, où chaque pas dans la caverne multiplie le montant de gils ramassé au départ... Mais cette caverne est gardée par la Gilkhélone, un ennemi redoutable qu’il faudra pouvoir vaincre pour profiter du butin !
De l’utilisation intelligente des outils de programmation
Des situations comme celles-ci, où les développeurs s’amusent avec leurs outils de programmation pour créer des défis aux joueurs, le jeu en offre une pelletée. L’une des scènes phares du jeu a d’ailleurs été imaginée par Sakaguchi et Kitase alors qu’un des développeurs leur a présenté la possibilité de mettre un timer dans le jeu.
Très séduits par l’idée, les deux hommes deviennent vite accros au concept qui permet de créer une nouvelle tension chez le joueur, qui jusqu’ici avait encore le droit de prendre son temps en combat. Ici, plus question de lambiner ! Mais plus que l’idée de devoir courir comme un demeuré pour atteindre la sortie au plus vite, c’était de profiter de ce système pour récompenser la prise de risque du joueur qui les emballait plus que tout.
Ainsi naquit la séquence de la fuite du château de Karnak, où le joueur n’a que dix minutes pour sortir du château en vie... ce qui serait largement suffisant si l’on se contentait de courir vers la sortie, mais le château regorge de coffres contenant des objets très utiles, gardés par des monstres bien costauds ! Idem pour le boss qui vous attend à la sortie du donjon, redoutable mais qui détient une magie bleue fort utile. Néanmoins, il reste très difficile de sortir du château à temps en emportant tous ses trésors, le joueur se retrouve donc confronté à des choix cornéliens.
C’est la première fois dans un Final Fantasy qu’apparaissait une séquence chronométrée. Le jeu en proposera deux autres : le combat contre Odin à vaincre en moins d’une minute, et la tour de Wolse submergée et le combat contre Gogo, permettant de récupérer le job de Mime. Sakaguchi et Kitase ont vite compris qu’il ne fallait pas abuser de ce système, mais par la suite, ces scènes chronométrées deviendront une constante dans la série.
D’autres donjons et endroits du jeu utiliseront quelques astuces de programmation pour proposer une expérience amusante : la palme revient sûrement à la Tour Fourchue, donjon du dernier monde où l’on doit diviser notre équipe en deux groupes, l’une constituée de guerriers et l’autre de mages. En effet, la tour est divisée en deux branches, l’une grouillant de monstres sensibles à la magie et l’autre de monstres sensibles aux attaques physiques. Et si le joueur a le malheur de frapper l’ennemi avec le mauvais type d’attaque, il risque de le payer très cher...
Ce genre d’idées seront reprises dans les futurs jeux de la série, qui ajouteront eux-mêmes d’autres idées pour changer le rythme du jeu. Je pense par exemple à FF6 et son donjon final où l’on doit diviser nos héros en trois groupes que l’on contrôlera à tour de rôle.
Un game design foisonnant d’idées
Le jeu fourmille ainsi d’idées de game design, que ce soit pour pimenter la progression du jeu, offrir de la variété au joueur ou lui proposer des cadeaux pour le moins originaux. Le jeu cache ainsi deux armes célèbres dans l’un des villages vers la fin du jeu : La Brave Sword (Lame des Braves) et le Chicken Knife (Couteau Couard). La première est très puissante si vous n’avez fui aucun combat durant le jeu, mais perd en puissance à chaque combat fui. Le second, c’est l’inverse : plus vous fuyez de combats, plus il devient puissant ! On ne peut choisir que l’un des deux, mais selon votre style de jeu, le choix paraîtra plus qu’évident.
Dans le même genre, on trouve des « cadeaux empoisonnés » dans le jeu, qui sont les trois équipements maudits : le Thornlet (Couronne d’épines), le Bone Mail (Cotte de Zombie) et le Cursed Ring (Anneau Maudit). Ce sont les meilleurs équipements du jeu en termes de défense, mais ont tous un gros inconvénient qui handicaperont le personnage équipé. Mais le jeu propose bien sûr de contourner d’une façon ou d’une autre ces inconvénients... Là encore, ces équipements deviendront célèbres et l’idée sera reprise dans les opus suivant de la franchise.
Mais s’il y a bien une idée de game design qui aura fait la réputation de Final Fantasy, ce sont les super boss ! Sur les précédents FF, l’équipe de développement était très fière de son système de jeu, et prenait beaucoup de plaisir à imaginer et tester toutes les possibilités du système pour vaincre des ennemis de plus en plus fort, et espéraient que les joueurs ressentent la même chose. Mais pour FF3, ça ne s’est pas tout à fait passé comme prévu : beaucoup de joueurs japonais se sont plaints que le boss final était trop difficile à battre.
Sakaguchi, comprenant vite qu’un joueur mécontent est un joueur qui risque de ne plus acheter ses jeux, choisit de simplifier les combats pour les épisodes suivants, mais garde en tête que ce serait quand même chouette d’avoir des ennemis surpuissants qui obligerait le joueur à tirer parti du meilleur du système de jeu pour les vaincre. Alors pourquoi ne simplement pas les proposer comme des combats optionnels ? C’est ainsi que l’on retrouve à plusieurs reprises des ennemis très forts, comme je l’ai déjà mentionné, mais surtout la présence de deux boss dans le dernier donjon du jeu qui semblent impossible à battre : Omega et Shinryu.
Pour les téméraires qui veulent absolument vaincre ces deux boss, pas de concession possible : foncer dans le tas avec une team surpuissante ne servirait à rien, il faut impérativement tirer partie du système de jeu. C’est ce qui fait tout le sel de ces combats. Et quelle satisfaction lorsque l’on trouve enfin la combinaison ultime qui permet d’atomiser ces satanés boss en moins de deux !
D’ailleurs, cette satisfaction, c’est à peu près la seule chose que gagnera le joueur : aucun des deux ne donnera de grosse récompense une fois vaincu (Shinryu donne bien la Ragnarok, mais est-elle vraiment utile puisque vous êtes parvenu à le battre, et que de toute façon vous êtes à la fin du jeu ?...). Mais le joueur est un être fier, et nul doute qu’il conservera précieusement sa sauvegarde pour preuve de sa réussite face au plus gros défi du jeu. Une façon de pouvoir crâner auprès de ses amis, une vingtaine d’année avant l’arrivée des succès...
Très appréciés des joueurs, les super-boss deviendront eux aussi récurrents dans la série, jusqu’à même devenir un standard du J-RPG en général, puisque de nombreux jeux reprendront l’idée. C’est en cela que la série Final Fantasy se montre extraordinaire : elle a su montrer l’exemple et inspirer de nombreuses créations futures. Et FF5 y aura contribué autant que les autres épisodes de la série.
La suite demain ! On parlera du scénario et de l’univers du jeu, ainsi que de la sortie du jeu au Japon et en Occident. Stay tuned !
Le jeu du jour ne sera pas vraiment une découverte pour certains, mais je préfère garder ce format pour parler du jeu et en profiter cette fois pour partager un peu mon ressenti sur le J-RPG « moderne » (disons post-2008 à peu près).
Et puisqu’il s’agit de mon ressenti et pas de la vraie vérité véritable, vous avez le droit de venir me contredire en commentaire Après est-ce que je vous écouterais, ça c’est une autre histoire
Avalon Code Titre original : Avalon Code
Consoles : Nintendo DS
Développé par : Matrix Software
Edité par : Marvelous Entertainment
Sortie japonaise : mars 2010 (novembre 2008 au Japon)
Petite playlist issue du jeu pour l’ambiance : Ville (malheureusement le rip n’est pas terrible, ça sonne mieux en jeu) Plaines Caverne Forêt Boss
Tout d’abord, petite remise en contexte de l’époque : après avoir vécu un long âge d’or depuis la SNES jusqu’à la PS2, le genre RPG entre dans la « next-gen » qui arrive entre 2005 et 2006. Les premiers jeux sortis sur consoles HD se débrouillent bien pour exploiter les capacités des consoles, mais on attendait mieux. On leur reproche aussi beaucoup d’être soit trop bancals dans leur concept, soit au contraire pas assez originaux, trop classiques. Bref, le grand public se désintéresse du genre, et vu que les ventes ne suivent plus par rapport aux coûts de production qui ont explosé sur next-gen (surtout pour un RPG, au contenu conséquent censé durer plusieurs dizaines d’heures), la plupart des éditeurs laissent tomber ou mettent de côté le RPG, qui finit progressivement par décliner (n’oubliez pas que FFXIII tarde beaucoup à sortir, et qu’il ne parviendra pas non plus à faire l’unanimité).
Mais le JRPG n’est pas mort ! Ce sont les petits studios qui s’en emparent et tentent de redorer son blason : aux alentours de 2008, si on omet Square-Enix qui continue d’en faire son genre de prédilection (pour le meilleur et pour le pire), les nouveaux ambassadeurs du JRPG s’appellent maintenant Sega (non non, pas celui que vous avez connu et qui tenait la dragée haute à Nintendo, l’autre, celui qui a édité Shining Resonance, 7th Dragon et Sands of Destruction...), Atlus, mais aussi Falcom, Gust, Nippon Ichi Software, Idea Factory, Compile Hearts (sic), Imageepoch (sic bis) ou encore Marvelous dont il va être ici question.
La plupart de ces studios japonais ne parviennent pas à suivre les contraintes de production des jeux next-gen, ni à être vraiment attirés par la « new gen » de Nintendo et son gameplay novateur basé sur la détection de mouvement, qui constitue tout de même un frein dès qu’il s’agit de lui trouver une utilité dans des jeux au fonctionnement encore très classique. De façon assez logique, ils se ruent donc en masse sur la console la plus vendue du moment, la Nintendo DS, ou sinon sur sa concurrente directe la PSP. Deux consoles qui ont le mérite d’être accessibles à tous types de gameplay et moins exigeantes sur la technique que les nouvelles consoles de salon. Est-ce pour autant que tous les RPG qui ont déferlés sur ces consoles, hors remakes et portages, étaient de qualité ? Pas sûr.
C’est dans ce contexte à la fois de forte concurrence et d’absence de titre culte sur DS que sort un nouveau challenger prometteur signé Marvelous : Avalon Code.
Héros ou héroïne, votre choix changera les relations que vous pouvez avoir avec les PNJ.
Avalon Code avait tout pour me plaire. Et honnêtement, vu mes derniers jeux sur DS fait en 2019 (pour rappel : Nostalgio no Kaze, Summon Night ou Pokémon Conquest), j’avais besoin d’un truc sympa qui me remonte le moral. Et qui me fasse dire que la console avait bien eu droit à quelques perles RPG...
Et honnêtement, mon impression de départ était bonne. Le jeu avait été plutôt bien noté (en tout cas sur JV.com) et semble apprécié par pas mal de gens, et les images du jeu et le pitch laissaient présager d’un jeu ambitieux et original.
Le pitch est justement caractéristique de cette époque du JRPG, portée par une volonté de renverser les clichés établis : dans Avalon Code, le monde est déjà au bord de la destruction. Il s’agit d’un cycle naturel et nécessaire, et à chaque fois un « élu » est choisi pour parcourir le monde et préserver chaque élément qu’il juge essentiel de conserver pour le monde suivant. Le joueur est donc cet élu (ou élue, puisqu’on a le choix entre une fille ou un garçon), interpellé par l’esprit du feu qui lui remet très vite le livre des prophéties qui servira à compiler les informations du monde avant que celui-ci ne soit détruit puis reconstruit.
Pas mal, hein ? Bon, en vrai je ne m’attendais pas à une révolution, d’autres titres ayant déjà tenté un pitch similaire à base de destruction du monde sans donner un résultat satisfaisant (au hasard, Sands of Destruction), et effectivement le scénario d’Avalon Code ne décolle jamais vraiment. Les premiers chapitres vont simplement consister à récupérer les quatre esprits élémentaux à divers endroits du jeu pour soutenir le héros dans sa tâche (spoiler évident : il faudra de nouveaux les récupérer dans les derniers chapitres du jeu... recyclage, quand tu nous tiens). On croisera aussi des méchants très méchants venus de l’empire voisin, on sympathisera avec les habitants de la ville sans que le jeu prenne vraiment le temps de les développer, avant que tout ne bascule vers le mélodrame pour les derniers chapitres du jeu. Et on finit malgré tout par sauver le monde, ou en tout cas par l’empêcher d’être détruit plus tôt que prévu.
Bref le scénario ne brille pas par ses plot-twist prévisibles et ne tiens pas non plus sa promesse de briser les clichés, mais au moins il a le mérite de donner au jeu d’excellentes idées de gameplay : la première, c’est cette idée de compiler les informations du monde avant sa destruction. En soi, ça veut surtout dire que l’on va fouiller partout pour noter les moindres détails des décors et tabasser à coup de bouquin (ouais carrément) tous les personnages et ennemis rencontrés dans le jeu pour les enregistrer et obtenir des informations capitales sur eux.
Mais la deuxième idée géniale, c’est qu’en tant que détenteur du livre des prophéties, on a la possibilité de modifier l’essence des choses, et plus exactement de réécrire leur « code » (d’où le titre du jeu, c’est fou non ?).
On peut manipuler les codes à sa guise. Enfin, façon de parler...
Concrètement, chaque équipement, personnage ou ennemi du jeu dispose d’une grille de « codes », des genres de blocs façon tetris que l’on peut ajouter ou retirer à loisir, et qui symbolisent une caractéristique particulière. Il y a bien sûr les codes élémentaux (feu, eau, lumière, ténèbres...), les codes de matériaux (bronze, argent, pierre...) et tous les autres qui vont symboliser des concepts (liberté, justice, gloire, maladie...). Il suffit donc de mettre un code « feu » a une arme pour qu’elle prenne l’élément feu, ou de retirer l’élément « roche » d’un ennemi pour lui retirer sa résistance, voire lui ajouter le code « maladie » pour l’affaiblir encore plus.
En plus de ça, on peut créer des attributs spécifiques en combinant les bons codes sur la grille, ou dans le cas des équipements, en obtenir des plus puissants créé par la combinaison de plusieurs codes. Une mécanique qui se révèlera indispensable au cours du jeu pour évoluer et débloquer certains codes verrouillés.
Une idée de départ très ingénieuse donc, qui offre pas mal de possibilités en termes de personnalisation et autres. Et tout ça en utilisant l’écran tactile et le stylet, bien sûr ! Heureusement, le jeu fait le bon choix de laisser les contrôles du personnage (déplacements, attaques...) sur les boutons de la console.
Je découvrirai en plus en avançant dans le jeu que ce dernier est très complet, avec des tonnes d’éléments à inspecter pour remplir le livre, quelques mini-jeux malheureusement un peu ratés et une pléthore d’objectifs annexes dont, Marvelous oblige, une composante « drague », où l’on peut séduire l’élu-e de son cœur en allant régulièrement lui parler et en lui offrant des cadeaux... Ah, si seulement la séduction dans la vraie vie était si simple !
Cerise sur le gâteau, le jeu est loin d’être moche, en tout cas au regard de ce que peut faire la DS concernant la 3D. Les personnages sont correctement modélisés et reconnaissables, avec un chara design plutôt sympathique (seule fois où j’apprécierai le style de HACCAN, je pense...). Les musiques sont plutôt réussies aussi, quoiqu’un brin « clichées » si on se réfère au genre fantasy.
Elles me faisaient furieusement penser à celles de Summon Night X sur la même console... et il s’agit en effet de la même personne, Minako Adachi. Vous ne savez pas qui c’est ? Eh bien elle a bossé sur la plupart des Summon Night, mais aussi sur les Zelda Oracle of Ages/Seasons. A moins que vous ne la connaissiez déjà sans le savoir pour ses compositions sur les jeux Pokémon depuis les versions Noir et Blanc, jusqu’à Epée et Bouclier sortis tout récemment...
On s’en sort donc plutôt bien musicalement, si on excepte les musiques de donjons qui sont rarement marquantes comparées au reste de l’OST.
Le jeu commence donc sous de bons auspices, il ne manquait donc plus qu’à voir ce que donnait l’exploration et le gameplay sur le long terme. ...Ai-je vraiment besoin de vous dire ce qu’il s’est passé ensuite ?
L’idée des éléments à consigner dans le livre est bonne, et pourtant...
Vous vous en doutez vu la tournure que prend l’article, j’ai vite déchanté. Passé les beaux modèles 3D et la mise en scène efficace, le jeu déçoit graphiquement avec des zones vides et fades, si on excepte la ville centrale qui s’en sort bien et est assez détaillée.
Mais c’est bien loin de la « grande aventure » que je m’étais naïvement imaginée. Bon, ce n’est pas si grave et ce n’est pas ça qui va gâcher le jeu, mais mine de rien ça rend déjà l’exploration pas très passionnante.
Le pire vient plutôt des « donjons », qui ne s’avèrent être que des successions de salles qui se ressemblent toutes plus ou moins, avec un objectif chronométré à remplir, généralement tuer tous les monstres ou activer tous les interrupteurs. Et loin d’être amusants, ces défis sont vite très rébarbatifs avec musique des plus agaçantes.
En fait, ces défis auraient pu n’être qu’une formalité un peu ennuyeuse si le jeu ne se coltinait pas une maniabilité ultra-rigide, des boîtes de collisions un peu hasardeuses, et un héros aussi fragile qu’une feuille en papier de riz. Les points de vie partent très vite, et il n’y a que deux façons de les regagner : soit en utilisant un objet de soin via le livre des prophéties (très coûteux en MP, donc à usage limité), soit en réalisant un « judgment link », une technique qui prend la forme d’un mini-jeu où il faut faire rebondir plusieurs fois un ennemi le plus haut possible en le frappant juste avant qu’il ne touche le sol...
Ça paraît amusant au départ, mais ça se révèle vite lourdingue à jouer et peu intéressant, en plus de casser complètement le rythme des combats. Mais vu que c’est la façon la plus « efficace » pour se régénérer... Bah en fait on a plus vite fait de mourir et de recommencer au début de la zone en cours, et de prier pour ne pas trop se prendre de coups la prochaine fois.
Pour éviter ces nombreux game over « voulus », on abusera donc du temps de récupération ridicule des ennemis pour leur infliger très vite beaucoup de dégâts, notamment grâce à la technique tournoyante de l’épée complètement cheatée (et accessoirement seule arme véritablement efficace du jeu car étant la plus maniable, vous n’utiliserez les autres que pour résoudre les énigmes).
Au final, les combats en deviennent parfois trop faciles, parfois horribles, et donc globalement très mal fichus. A ce titre, le boss final est une vaste blague : quasi-intuable si vous essayez de le battre normalement car ses attaques sont impossibles à esquiver, il devient inoffensif si vous vous équipez d’un simple bouclier... ce qui annule les dégâts des attaques quand vous l’utilisez. Plus qu’à bourriner le boss à mort ensuite. Passionnant.
A noter que c’est pareil pour tous les boss en fait, mais je n’ai évidemment vu cette « astuce » qu’à la fin du jeu...
En effet, le jeu souffre aussi d’un manque d’indications constant. Les commandes de bases sont rapidement expliquées en début de jeu, mais beaucoup d’informations essentielles, comme les effets secondaires des armes et équipements, ou les informations relatives aux personnages, ne sont pas directement mentionnées. Il m’a fallu le temps de comprendre que pour avoir ces informations, il fallait toucher au stylet le charabia illisible que l’on trouve sous l’image du personnage/équipement/ennemi dans le livre, et qui semblait n’être qu’un élément de décoration...
Parce oui, l’habillage du jeu est très réussi et notamment le livre des prophéties associé à l’écran du bas de la console, mais les développeurs ont en revanche oublié un truc bien plus primordial : l’ergonomie. Et c’est vraiment là que le jeu passe de « jeu génial » à « jeu pourri ». Croyez-moi, j’en suis le premier chagriné...
Il y a un paquet de quêtes annexes. Mais je n’ai pas eu le courage de toutes les faire...
Plus que dans les donjons barbants et inutilement longs, c’est dans le « menu » du jeu, à savoir le livre des prophéties, que l’on passe le plus de temps. Puisque chaque élément du jeu peut être conservé dans le livre, cela fait vite un paquet de pages à parcourir. Et pour rappel, chaque page a aussi sa grille de code que l’on doit modifier pour avancer et résoudre certaines énigmes ou juste se créer des objets plus puissants. Donc on passe constamment son temps à tourner les pages du bouquin pour chercher l’élément qui nous intéresse, avec pour seule aide le sommaire qui est uniquement par catégories... Donc si on a besoin d’avoir la page d’un personnage, il faut aller dans la catégorie personnage, puis faire tourner les pages une à une (avec l’animation et le chargement d’une nouvelle page à chaque fois) jusqu’à trouver le personnage qui vous intéresse. Fastidieux, hein ? Alors imaginez ce que c’est vers la fin du jeu, quand on a rempli le livre de pleins de personnages, objets, ennemis différents... Chercher la page voulue devient un vrai calvaire.
Et visiblement fiers de leur bouquin, les gens de chez Matrix Software se sont dit que le joueur adorerait y passer le plus clair de son temps. Du coup, ils se dont aussi que n’avoir que 4 emplacements pour stocker les « codes » serait suffisant... Oui, seulement 4, tout le reste ne peut être stocké que dans les grilles de code des différentes pages ! Je ne vous dis pas l’horreur pour gérer ça dans les menus, surtout quand on a des formules de plus en plus complexes pour créer des nouveaux équipements, allant jusqu’à 12 codes !
C’est le véritablement le pire problème du jeu, au point de me faire douter de la bonne volonté des développeurs : si le jeu tourne autour du principe de l’utilisation des codes, pourquoi personne n’a pensé à faciliter un minimum la tâche concernant leur gestion ?
Et puis, histoire de gâcher un dernier truc : c’était une bonne idée d’intégrer plein d’éléments à inspecter pour les compiler dans le livre de prophéties, mais ça aurait été mieux de les rendre plus évidents, ou en tout cas de faciliter un peu la recherche avec l’apparition d’une icône quand on est à proximité... parce que marteler le bouton A sur le moindre caillou ou la moindre touffe d’herbe à chaque écran (il y a 3 ou 4 éléments à trouver par écran, et il y a BEAUCOUP d’écrans dans le jeu), c’est tout sauf amusant. Bien courageux seront ceux qui visent le 100% et la meilleure fin du jeu... Moi, je me suis contenté de le finir au plus vite.
Les environnements sont vides et le level design quasi-inexistant.
Mais soyons cléments, après tout comme on l’a vu, tout n’est pas à jeter dans le jeu. C’est juste frustrant de voir tout ce potentiel gâché par un game design boiteux et un univers sous-exploité. Frustrant de se dire qu’il n’y a pas si longtemps (par rapport à 2010 j’entends), les studios japonais avaient le talent pour créer des jeux simples mais funs avec des idées originales ou au contraire des game systems complexes et prenants, et que ces mêmes talents ne sont maintenant plus capables de sortir de jeu sans qu’il se retrouve avec des tares flagrantes, même en prenant la « voie de facilité » qu’est le développement sur une console en retard technique. Je veux dire, Matrix Software, ce sont les gens derrière Alundra quoi... Et depuis ce dernier, on ne peut pas dire qu’ils aient particulièrement brillé dans le monde vidéoludique, hormis pour les portages et remakes de jeux FF ou Dragon Quest.
On pourrait prendre Avalon Code comme un simple jeu mal fichu, comme il y en a eu des dizaines sur DS ou ailleurs. Mais pour moi, il est symptomatique de son époque, et s’ajoute à la liste des titres (je pense à Sands of destruction et Luminous Arc notamment) qui pensaient révolutionner ou redémocratiser le genre sur la machine mais se seront pris les pieds dans le tapis, ne convaincant au mieux que quelques fans peu exigeants. Symptomatique aussi de cette époque charnière dans le JRPG, qui préfèrent dorénavant se concentrer sur les personnages quitte à en faire des clichés vivants et échouent sur la plupart de leurs autres aspects (gameplay, technique, cohérence de l’univers...), achevant l’inexorable retour du RPG vers un genre de niche. Triste époque...
Quand à la PSP, j’avoue ne jamais avoir eu l’occasion de toucher aux multiples RPG qu’elle a accueilli, et de loin ces derniers me paraissent un poil meilleurs. Mais ils prendront de toute façon progressivement la même direction...
J’espère néanmoins que vous aurez apprécié la lecture de mes élucubrations RPGesques, et encore une fois n’hésitez pas à partager votre point de vue en commentaire ! Sur ce, bon dimanche !
Un article très rapide pour relayer l'info pour ceux que ça intéresse, l'AGDQ viens donc de débuter aujourd'hui ! Là on est sur Metroid Zero Mission (edit : c'est fini, désolé !), puis viendront Megaman 7, Ratchet & Clank Future: Tools of Destruction, Star Wars - Escape from Yavin 4: The Lost Maps et The Binding Of Isaac Afterbirth+.
Il y aura bien sûr des grosses cartouches pour toute la semaine de l'évènement, avec pêle-mêle du Actraiser, du Bayonetta 2, du Castlevania IV, du Sonic CD, du FFVIII, du MGS3, du Mario Maker 2 et du FE Three Houses pour les plus récents, avec aussi des marathons Zelda (volets NES et SNES) ou Megaman.
Je vous mets ici le French restream :
[video]http://www.twitch.tv/lefrenchrestream[/video]
Pour ceux qui ne connaîtraient pas, il s'agit d'un gros évènements organisé deux fois par an autour du speedrun, rassemblant des runners de tous horizons sur des tonnes de jeux différents, pour un festival de skill et de situations improbables.
Le tout est organisé de façon à récolter un max de dons pour la prévention contre le cancer, avec lots à gagner ou possibilité d'ajouter certaines règles à certains runners pour pimenter les runs.
Que vous soyez amateur de speedrun ou non, ça vaut toujours le coup d'y jeter un oeil
Enjoy!
On repart pour une découverte RPG, qui aurait dû arriver fin 2019 mais finalement le jeu a été plus long à finir que prévu ^^’
Et cette fois je vais parler d’un jeu un peu plus obscur, probablement connu uniquement des fans de retrogaming et d’émulation de vieux RPGs, et de quelques nostalgiques japonais. Car quand on pense aux RPG de la SNES, on pense irrémédiablement aux chefs-d’œuvre de Squaresoft (les FF, Chrono Trigger, Secret of Mana & Seiken Densetsu 3, les Romancing Saga, Front Mission, Bahamut Lagoon, Live-A-Live...) ou ceux d’Enix (Les Dragon Quest, Illusion of Time, Terranigma…) et aux quelques autres titres marquants de grands éditeurs et qui ont fait leurs premières armes sur la console : Tales of Phantasia, Star Ocean, Breath of Fire, Shin Megami Tensei, Lufia, et j’en passe. Arrêtez de baver, je vous vois et c’est dégueulasse (enfin, même si je vous comprends).
Mais ça, c’est la partie visible de l’iceberg, et constitue les titres qui ont acquis leur réputation (en dehors du fait d’être bons, bien sûr) pour leur rattachement à une grande série, un grand éditeur, ou tout simplement par leur sortie en occident. En réalité, les J-RPG sur Super Famicom (et uniquement sur cette dernière !) se comptent par centaines. Vous pensiez tout connaître des RPG japonais sur SNES ? Vous n’avez encore rien vu...
Energy Breaker Titre original : Energy Breaker
Consoles : Super Famicom
Développé par : Neverland
Edité par : Taito
Sortie japonaise : juillet 1996
Vous ne connaissez sûrement pas Energy Breaker. En fait, on ne peut pas vraiment dire qu’il soit connu même au Japon. Normal, il sort en 1996, dans la toute fin de vie de la console, après une avalanche de RPG plus ou moins marquants et une génération 32 bits de plus en plus forte (en occident, la SNES est déjà quasiment morte, mais au Japon, elle fait de la résistance en proposant la plupart de ses meilleurs jeux). Le jeu lui-même, quoique bon, souffre tout de même de certains défauts qui l’empêche de devenir un incontournable de la console. Mais il ne sort pas non plus totalement de nulle part, puisqu’il a été développé par les gars de Neverland, les mêmes qui ont accouché des deux Lufia, et dont Energy Breaker partagera de discrets points communs (il se murmure que le jeu se déroulerait dans l’univers des Lufia, mais avec sa propre histoire).
Pour être honnête, le jeu est bon, mais pas exceptionnel. Malgré ça, je garde une affection toute particulière pour ce Energy Breaker. J’en avais entendu parler alors que je découvrais tout juste l’émulation et les grands hits des RPGs jamais sortis en France (comme ceux cités dans mon intro). Je n’ai pourtant jamais pris la peine de l’essayer, mais j’avais particulièrement accroché aux musiques, et il était clair que je le ferais un jour (j’aurais mis plus de 15 ans, mine de rien...). Surtout, il est témoin de cette époque bénie où les RPGs tentaient systématiquement de nouvelles choses, repoussant autant que leurs moyens le permettaient les limites techniques des consoles, proposant des univers toujours plus fouillés et cherchant toujours à se démarquer des autres par l’originalité de leur gameplay.
Energy Breaker est de cet acabit-là.
Il est fichtrement beau pour la console, avec des sprites grands et détaillés, de nombreuses animations en combats (pour une même technique, chaque personnage a sa propre animation voire son propre effet !), des effets de combat exploitant à merveille les capacités de la console, et des décors en 3D isométrique fourmillants de détails, malheureusement un peu gâchés par ce disgracieux fond monochrome en arrière-plan. D’accord, on a vu plus beau sur la console, mais on reste quand même dans le haut du panier.
Il a aussi comme je le disais d’excellentes compositions qui restent pour la plupart en tête. Certaines sont du vrai miel pour les oreilles (The Prayer Bell do not Toll, The Sky’s Brilliance, Wind that Whips the Wilderness) et témoignent de compositions travaillées, d’autres sont plus simples mais restent agréables (The Bottom of Cold Skies, The Guiding Fortune Teller, Berserker), le tout avec un panel varié de musiques mélancoliques, douces, inquiétantes ou survoltées. Un bémol tout de même, des boucles trop courtes rendant la plupart des pistes très répétitives voire agaçantes, un défaut malheureusement récurrent à l’époque. (Cliquez sur les noms de pistes pour les écouter !)
Graphiquement, c’est pas moche du tout.
Niveau scénario, rien de révolutionnaire quand bien même le jeu se démarque un peu de la plupart des productions de l’époque avec une narration un poil plus poussée et des thèmes peu courant à l’époque (qui deviendront quand même une norme dans les RPG à venir type Tales of). On met donc de côté la sempiternelle quête pour aller vaincre le roi du mal pour donner des motivations plus complexes aux héros et aux antagonistes, qui paraissent du coup plus « humains » (si on omet le fait qu’ils n’ont plus aucun scrupule à sacrifier des populations entières pour servir leurs intérêts, bien sûr).
L’histoire nous fait d’abord partir sur les traces des souvenirs de l’héroïne, guidée par les conseils d’une jeune voyante, dont le destin est visiblement lié à celui d’un certain Leon qui s’avère bien entendu être dans le camp des méchants. De fil en aiguille on rencontrera de nouveaux antagonistes, et le jeu s’attardera sur les motivations de chacun, avant d’être confronté au principal méchant, sorte d’entité divine qui veut bien entendu éradiquer l’humanité, ça ça ne change pas. Le tout évidemment dans un univers fantasy à base de joyaux élémentaires et de divinités protectrices, avec une pointe de voyage temporel et donc de SF. Si le ton du jeu se veut plutôt enjoué grâce au caractère des personnages et à leurs chamailleries constantes, il sait se montrer plus grave par moment.
Bon, pour être franc, j’ai trouvé le scénario un brin difficile à suivre, la faute à des dialogues qui ont passent parfois du coq à l’âne et d’une mise en scène encore trop minimaliste pour l’époque, malgré la tentative assez réussie de rendre les personnages très vivants dans leurs répliques. En revanche, ils auraient mérité un peu plus d’animations pour montrer leurs émotions, car les petites bulles et icônes, c‘est sympa mais assez limité pour mettre en scène les états-d’âme d’un personnage.
Malgré tout, pour un jeu de l’époque, ces derniers sont plutôt bien travaillés et originaux : ainsi nous suivrons les aventures de Myra, une héroïne amnésique mais insouciante ; Leonard, un vieil inventeur en quête d’une fleur pouvant faire revivre sa dulcinée ; Star, un jeune-homme devenu immortel et capable de se transformer en monstre malgré lui ; et Dorothy la gamine espiègle capable de contrôler un dragon, qui reste tout de même un poil plus mature que la moyenne.
A part cette dernière, tous ont plus de 20 ans, fait rare pour un RPG japonais ! Les antagonistes ne sont pas en reste non plus, et globalement tous les personnages s’éloignent un peu (mais pas trop) des clichés du genre, même encore aujourd’hui.
Le jeu ne s’épanche pas en torrents de dialogues (tant mieux !), pourtant ils suffisent à insuffler une âme et un caractère aux personnages. Cerise sur le gâteau, on a parfois droit lorsqu’on fouille certains éléments de décors à des détails supplémentaires ou des remarques de l’héroïne, quelques-unes étant particulièrement touchantes. Bref, une manière très ingénieuse d’utiliser cet aspect de gameplay à priori secondaire pour venir étoffer de façon subtile, au compte-goutte, le background des personnages.
Comme de coutume déjà à l’époque, le chara design est signé d’un grand maître du manga, et c’est cette fois Yasuhiro Nightow, auteur entre autres de Trigun, qui s’y colle. Le trait est très anguleux et caractéristique de l’époque mais sied parfaitement à l’univers du jeu, et faute de pouvoir vraiment profiter du style du monsieur vu que la console ne permet pas encore d’afficher de grands artworks, on aura au moins les visages des personnages dans le menu.
Le premier donjon du jeu a une ambiance très réussie, avec de chouettes effets de lumière.
Le gameplay en revanche est probablement l’aspect le plus surprenant du jeu ! Le plus déroutant aussi, et il est bien difficile de le prendre en main sans explications venant du manuel ou d’une FAQ.
Déjà, le jeu fait le pari audacieux de mélanger RPG classique pour l’exploration (on peut se déplacer librement entre les villes et donjons, parler aux NPCs, interagir avec les objets) et tactical pour les combats, un peu comme ce qu’il s’était fait pour Shining Force 2 ou Bahamut Lagoon. Les combats arrivent sans transition dans la zone où vous vous trouvez, et le terrain a évidemment une influence sur votre stratégie ainsi que le placement des unités (les attaques de dos font plus de dégâts, un personnage attaqué de face peut contre-attaquer, etc.).
Le premier point qui surprend lors de l’exploration est la quantité ahurissante d’objets de décor avec lesquels interagir ! Bien sûr ce n’est pas nouveau et ça a toujours existé dans les RPGs depuis Dragon Quest, mais ici tout élément de décor peut donner lieu à un dialogue certes banal (avec quelques remarques touchantes comme dit plus haut), et notre curiosité est très souvent récompensée par un objet.
Mais le jeu trouve principalement son originalité dans son système de combat, et notamment le système de « balance » ou « Bal », qui correspond grosso modo à des points d’actions. Chaque personnage, si l’on excepte le robot qui ne peut pas prendre de dégâts mais en contrepartie ne peut pas attaquer (en gros il sert de « mur » pour protéger les alliés), a un nombre de « Bal » fixe tout le long du jeu, et chaque action lui coûte un certain nombre de Bal, le déplacement étant finalement assez coûteux (5 Bal). Vous pouvez donc choisir de vous déplacer et d’attaquer une fois, ou de rester sur place et d’enchaîner deux, trois, voire quatre attaques, ou de vous déplacer deux fois… L’ennemi peut faire de même bien sûr !
Mais là où le système se montre vraiment différent des autres, c’est que la « balance » est directement liée à votre santé : en prenant des dégâts, votre montant maximum de « Bal » diminue, et donc le nombre d’actions possibles pendant votre tour aussi... au point où s’il ne vous reste que très peu de PV, vous ne pourrez même plus bouger si ce n’est pour vous lancer un objet de soin !
Il est donc indispensable de se soigner régulièrement. Mais puisque ça s’applique aussi aux ennemis, ça change un peu les stratégies habituelles puisqu’il devient alors utile de faire des dégâts à tous les adversaires pour limiter leur potentiel d’action, plutôt que de s’acharner sur un seul.
Dans l’absolu, le jeu n’est de toute façon pas extraordinairement difficile, les ennemis meurent assez rapidement, sauf dans le dernier tiers du jeu où ils deviennent solides, nombreux, et avec la fâcheuse manie de booster leurs stats/diminuer les vôtres, ce qui a tendance à rendre les combats interminables. Ou plutôt, à vous précipiter vers la défaite, car les combats ont tous un nombre de tours limités ! Dans quelques rares cas où il vous faudra survivre un certain nombre de tours pour remporter la victoire, dépasser la limite de tour amène directement le Game Over. Heureusement, on peut sauvegarder le jeu à tout moment, avec même un fichier spécifique pour les combats, et donc reprendre rapidement le jeu avec une meilleure stratégie, le level grinding n’étant pas vraiment nécessaire pour avancer.
Autre aspect très surprenant, le système d’énergie (il faut bien que le nom du titre serve à quelque chose...) et l’acquisition de nouveaux sorts/attaques. Chaque personnage dispose d’un certain montant pour chacune des 4 énergies élémentales (eau, feu, terre, vent, les classiques), chacune divisée en ombre et lumière. Ce montant est symbolisé par des colonnes rectangulaires pour chaque élément, et peut être réparti au bon vouloir du joueur dans la limite du montant maximum, qui augmente au passage de niveau ou grâce à certains objets.
Les taux n’ont qu’une très légère influence sur la montée en stats de vos personnages, leur véritable utilité est de rendre possible l’apprentissage des nouvelles techniques. Plus d’une vingtaine de parchemins sont disséminés à travers le jeu, et chacun indique les montants nécessaires dans chaque élément pour apprendre une technique/un sort. Une fois qu’un personnage a les montants indiqués, il apprendra aléatoirement la technique après une action en combat, si bien sûr il peut l’apprendre (chose indiquée par le « S » présent sur les personnages lorsqu’on sélectionne un parchemin dans le menu). Il n’est pas nécessaire d’avoir le parchemin pour apprendre la technique, mais ce sont les seuls moyens (hors soluce) pour savoir comment obtenir les techniques.
Le système paraît tordu, c’est vrai qu’il l’est, en tout cas tant qu’on reste sans explication vu que le jeu n’en offre pas. D’une manière générale, le système de jeu est intéressant mais assez abscons, on met du temps à comprendre les contrôles, à savoir à quoi sert telle ou telle stat, ou à trouver comment accéder à telle option dans le menu... Vous comprenez maintenant pourquoi je disais que le manuel du jeu ou un guide était indispensable pour appréhender correctement les commandes. Une fois que c’est fait, les passages dans les menus resteront un peu fastidieux mais seront bien moins prise de tête.
Les menus sont horriblement abscons… mais on s’y fait.
Quoiqu’il en soit, malgré la complexité de sa prise en main, le système de jeu est vraiment sympa une fois assimilé et promet de nombreuses possibilités. Enfin, il aurait dû... Car si au début du jeu on joue beaucoup avec les taux élémentaux pour essayer de débloquer telle ou telle technique, en étant parfois obligé d’en perdre une au profit d’une autre (vous ne pouvez pas utiliser une technique tant que vous n’avez pas les bons montants), on se contente finalement dès la moitié du jeu d’augmenter un peu au pif nos stats élémentales à chaque niveau, et ce jusqu’à ce qu’on ait la possibilité d’utiliser toutes les techniques, certaines n’étant finalement pas si utiles. Une idée qui aurait donc gagné à être mieux exploitée.
Au rayon des idées gâchées, il faut aussi citer la possibilité offerte par le jeu de parler à la plupart des NPC avec un ton défini : neutre, en colère, ou charmeur. On peut aussi leur offrir un objet de notre inventaire. Mais ce qui aurait pu donner lieu à des centaines de dialogues et situations originales en fonction du ton employé s’avère vite être de l’esbroufe, car on s’aperçoit bien vite que la réponse de notre interlocuteur ne change pas quel que soit le ton employé... Ce système ne sera véritablement utile qu’à deux-trois endroits spécifiques dans le jeu. Un vrai gâchis.
Puisque l’on est dans le paragraphe des défauts et autres choses mal fichues, citons cet inventaire bien trop limité vu les kilotonnes d’objets que l’on ramasse à force d’inspecter chaque élément de décor du jeu ! Le jeu réglera en partie le problème avec des boîtes de rangement qui rajoutent un volet d’inventaire tout en prenant une place dans ce dernier... Pas super pratique.
Citons aussi l’absence d’indications claires après les cutscenes pour savoir où aller, qui font que l’on se retrouve régulièrement à parler un peu à tout le monde dans l’espoir de faire avancer quelque chose (là encore, un défaut malheureusement souvent présent à l’époque), et c’est encore pire à la fin du jeu où l’on est complètement lâché dans la nature sans savoir où aller, et il faut avoir bien mémorisé les lieux marquants traversés au cours de l’aventure pour savoir que l’on doit y retourner pour faire avancer le scénario.
Il y a aussi la grande linéarité du jeu, qui ne propose rien pour varier le gameplay hormis quelques objectifs de combats spécifiques, et la quasi-absence de quêtes annexes. Il y a bien l’équivalent d’un New Game + pour la rejouabilité, mais qui ne permet que de commencer le jeu en étant plein aux as pour se fournir plus facilement en équipement et ainsi rouler sur le jeu.
Enfin, tous les lieux du jeu se situent sur une île, et sont donc assez peu nombreux avec pas mal d’aller-retours au cours du scénario, avec au final un sentiment d’étroitesse de l’univers. Mais cela n’empêche pas le jeu d’avoir une durée de vie honorable pour l’époque, autour des 30 heures.
Le système de combat mélange habilement combat classique de RPG et éléments de tactical.
Malgré ces défauts, on ressort satisfait d’avoir parcouru Energy Breaker. Certes, il n’a pas la perfection narrative d’un Final Fantasy, la simplicité de gameplay d’un Secret of Mana, ou un univers aussi attachant et familier qu’un Chrono Trigger, qui restent indéniablement les ténors du genre. Manquant de peu le coup de génie à cause de ses idées mal exploitées, il n’est finalement pas étonnant qu’il soit resté si méconnu, dans l’ombre des nombreuses pépites et jeux mythiques de la console en matière de J-RPG. Mais il a des qualités indéniables, et on ne peut s’empêcher d’être surpris par tel ou tel détail, que ce soit ses graphismes léchés, ses animations classes, sa bande son émouvante, ses thèmes narratifs qui tentent de nouvelles choses, ou juste son côté atypique. Surtout, il est représentatif de son époque, sous le signe de l’innovation et de la créativité, et mérite à mon sens de faire partie des joyaux oubliés de la console.
Le jeu dispose depuis peu d’une fan trad en anglais de qualité, le rendant plus accessible aux curieux. A vous de voir si avez envie d’en faire partie
Voilà pour mes découvertes de jeux japonais, je pense me consacrer un peu plus cette année à des RPGs plus populaires, si tant est que j’arrive à trouver le temps d’en parler… Mais il y en a un paquet que je dois rattraper, et une pelletée d’autre qui mériteraient de toute façon une petite rétrospective ou quelque chose dans le genre. Vous verrez
Dans tous les cas, si vous avez des conseils à donner sur le style ou la mise en page, je suis toujours preneur ! Sur ce, bonne année à tous et à toutes, et surtout bon jeu !