Il y a de ces moments particulièrement excitants dans la vie d'un joueur (un vrai, celui qui s'investit pleinement dans son loisir favoris). Parmi lesquels les quelques mois précédents l'annonce ou la sortie d'une nouvelle machine. C'est un phénomène étrange où les déceptions de la génération d'avant sont balayées pour faire place à de nouveaux espoirs. Des projets touts beaux touts neufs sont dévoilés, certains éditeurs décriés regagnent la sympathie du public et d'autres se font doucement oublier. Plus que tout, c'est souvent les claques technologiques qui marquent les esprits. L'annonce d'un nouvel hardware est l'occasion pour les constructeurs de faire valoir leur savoir-faire en terme de conception et d'innovation. Les quelques premiers jeux d'envergure montrés en même temps que la nouvelle machine donne souvent le ton, la stratégie du constructeur. Il convient de faire les choses bien, de taper fort tout en garantissant de la variété et en prenant soin de garder quelques cartouches pour la suite des opérations. Bref, le launch d'une nouvelle console n'est pas laissé au hasard. Aussi, quand à l'E3 1996 et au Nintendo Spaceworld (Shoshinkai) suivant, la firme au plombier moustachu accompagnée de LucasArts nous montre des batailles spatiales sensationnelles et une folle virée dans un snowspeeder à travers les quatre grandes pattes d'acier d'un colossal quadripode impérial sur Hoth, le monde entier est en émois.
En perte de vitesse et à la veille d'une nouvelle trilogie sur grand écran, la saga Star Wars cherche un nouveau souffle. Le prochain film n'arrivera pas avant 1999 mais la compagnie de George Lucas tient à maintenir en vie la Guerre des Étoiles. De nombreuses adaptions des trois premiers films ont déjà été faites tandis que la simulation de pilote d'engin spatial a déjà donné naissance à beaucoup de bon jeux. Il faut du neuf, il faut créer autre chose. Ainsi, au milieux des années 90, un projet multimédia est mis sur pied. Tout d'abord, un roman est écrit par Steve Perry (auteur de nombreux romans Conan le barbare. Sa fille, Stephani Danelle Perry suivra le même chemin en écrivant les très sympathiques romans sur Resident Evil, directement adaptés des jeux vidéo). Ce roman, c'est bien entendu Shadow of the Empire, mettant en scène en bonne partie le prince Xizor, Falleen (une race reptilienne) de son état et chef du plus grand cartel criminel de la galaxie: Black Sun. Même Jabba le Hutt à côté passe pour un rigolo. L'ambition de Xizor ? Évincer le terrible Darth Vador pour prendre sa place auprès de l'Empereur Palpatine. Rien que ça. Ces évènements se passent entre L'Empire contre-attaque et Le Retour du Jedi, vient s'implémenter dans cette intrigue bien connue le nouveau personnage central: Dash Rendar. D'aucun dirait qu'il s'agit là d'un bête clone de Han Solo, Rendar est en réalité plus vindicatif et catégorique dans sa façon de lutter contre l'Empire. Plus solitaire aussi, il aide la Rébellion plus par obligation et par honneur que par choix. Ayant une dette envers Han Solo, prisonnier de la carbonite dans le palais de Jabba, le roman fait s'entrecroiser habilement la vie de Rendar au conflit opposant la Rébellion, l'Empire, le conglomérat criminel de Xizor et le reste des fripouilles de la Galaxie pour un joyeux bordel particulièrement palpitant.
L'incroyable machine marketing de Lucas produit en parallèle des comics, des figurines, des maquettes de vaisseaux fraichement inventé pour l'occasion, un set de cartes à collectionner, un tas d'autre chose, et bien sûr, un jeu vidéo. Ayant déjà bénéficié de la très bonne trilogie de run'n gun Super Star Wars sur Super Nintendo, l'entreprise de Kyoto s'octroie tout naturellement les faveurs de LucasArts pour ce Shadow of the Empire, promis comme jeu de lancement à la Nintendo 64. Outre les films eux-même, Shadow of the Empire est probablement encore à ce jour le projet multimédia le plus ambitieux et vaste que Lucasfilm ai mis en place autour de la saga Star Wars (viendra seulement plus tard La Guerre des Clones), tant les produits dérivés se sont fait légion. John Williams, le patron, le big boss, le grand maître en personne a suggéré aux têtes pensantes du projet Shadow of the Empire de produire une bande-son pour accompagner le roman, fait absolument unique. Malheureusement, ce ne sera pas le sieur mainte fois récompensé d'un Oscar qui produira les dites musiques mais Joel McNelly (compositeur pour le film Virus... oué, ça aurait put être moins pire).
LucasArts est d'une ambition dévorante et cela se voit avec Shadow of the Empire qui nous propose deux phases de gameplay bien distincte pour un jeu rempli d'action. Premier level, et déjà une gifle nous est infligé. Pensez donc, nous sommes en décembre 1996 (joli timing pour toucher le jackpot), le monde des consoles de salon a encore tout à apprendre de la 3D. Deux ans avant Rogue Squadron, le jeu nous met dans la carcasse d'un snowspeeder T-47 de la Rébellion. Nous sommes pris entre deux feux, d'un côté les rebelles que nous étions venu ravitailler en vivres et en armement, de l'autre les effrayantes machines de guerre de l'Empire qui viennent d'attaquer la planète glacière Hoth. Dès la première minute du jeu, nous sommes englouti dans une vague d'action pure grisante. La musique, les bruitages, la sensation de vol, la 3D révolutionnaire, les cercles que l'ont décrit autour des TB-TT pour immobiliser leur pattes avec notre câble de remorquage et les faire chuter afin de les détruire... Une des meilleurs scènes d'action de la trilogie originale toute entière nous est offert au commencement du jeu, et c'est à nous de reproduire les prouesses héroïques de Luke Skywalker vues dans le film ! Les phases de pilotage se répètent régulièrement durant tout le jeu. Au programme: batailles au milieu d'un champ d'astéroïdes, course de Swoop bike, destruction de réacteur spatial... Les moments ébahissants sont multipliés! Pour lutter contre l'Empire, Dash dispose d'ailleurs de son propre vaisseau, nommé l'Outrider. En réalité, un cargo de type YT-2400 de la Corporation Technique Corelienne (le Faucon Millénium provient de la même société d'astronautique, c'est un modèle YT-1300). Chaque véhicule propose une vision intérieure avec cockpit, offrant un sacré apport à l'immersion. Un régal d'autant que la réalisation de ces derniers se montre en tout point fidèle aux modèles originaux.
La fuite de Hoth se poursuit à pied, donnant lieux à la seconde phase de gameplay prépondérante dans Shadow of the Empire. À première vue, tout va bien. Nous sommes probablement encore enivré de la fabuleuse virée effectuée dans notre engin spatial et les environnements variés garantissent une ambiance typique Star Wars. Délectable. Mais très vite, on déchante. La difficulté explose dans ces phases de shooter à pied. La maniabilité devient imprécise, le personnage est un tantinet pataud ce qui rend les gunfight maladroits. Et les impériaux, contrairement aux long-métrages, savent viser juste, dans ce jeu ! La visée assistée (Dieu merci ! ou plutôt, merci à la Force !) contrebalancera certainement une gestion des sauts catastrophiques ou certains passages à déambuler sur des corniches très étroites avec rien de moins que le vide mortel autour de vous. Votre pire cauchemar sera de bondir de plate-forme en plate-forme quand celles-ci seront mouvantes. Comme dans ce niveau de Ord Mantell où vous devrez jouer les kamikazes entre trains à répulseur en pleine course!
Quant aux boss, ils sont sans pitié. Le premier n'est rien d'autre qu'un TR-TT, le genre de machine de guerre que même un Maître Jedi ne s'amuserait pas à affronter seul. Alors un être dépourvu de la Force ... Le droïde assassin IG-88 (visible dans L'Empire contre-attaque) sera également l'un-d'eux et cloturant le niveau d'Ord Mantell cité ci-dessus, il est d'une difficulté atroce. Le combat se déroulant dans une décharge, les lieux étant étroits et obstrués par des monticules d'ordure, il vous sera délicat de gérer la caméra et le déplacement de votre personnage. Un passage étonnamment stressant. Heureusement, votre arsenal se verra vite consolider par un lance-roquette, un lance-flamme, et même un jetpack façon Boba Fett (étrangement très maniable. On aurait put craindre le pire au vu des performances du personnages lors des phases de plate-forme).
En adéquation avec son gameplay bipolaire, la technique de Shadow of the Empire souffle le chaud et le froid. Les phases de combats spatiaux sont jouissives, aussi bien à contempler qu'à jouer. La performance préfigure le légendaire Rogue Squadron qu'on verra débarquer un peu plus tard sur la même console. La modélisation des différents engins et les éclats lumineux des turbolaser font preuve d'un soin évident. En revanche, une fois n'est pas coutume, les phases d'action à pied posent quelques menus soucis. Les décors sont variés, c'est là l'avantage de situer son intrigue dans le bel univers qu'est Star Wars. Mais ils restent un peu vides et certains lots de textures ne sont pas des plus heureux. L'animation du personnage est relativement bien fichue quoique un peu saccadée par moment et quelques autres détails fâcheux peuvent venir ternir le plaisir de jeu. La redondance des ennemis qui nous offre un grossier swap color pour se déguiser et nous faire croire que le bestiaire est très varié, par exemple. À cela, ajoutons moult petit bug de collision et d'affichage pas très grave (aucun ne font crasher le jeu ou ne vous force à recourir au reset pour s'en sortir) mais qui à la longue peuvent définitivement faire pencher la balance vers le Côté Obscur. C'est des défauts de jeunesse typiques d'un jeu 3D de milieux d'année 90. À une époque où la plupart des développeurs tâtaient encore le terrain. La Nintendo 64 avait de la puissance hardware à revendre. Et pour cause, Shadow of the Empire gèrent relativement bien sa 3D malgré tout, avec une utilisation généreuse des hauteurs pour un level design parfois tortueux mais tout sauf plat. Si on remet correctement les choses dans son contexte, proposer un jeu en full 3D avec caméra libre dés 1996 sur console, ce n'était pas donné à tout le monde. Beaucoup de studio, pourtant réputés pour leur maitrise technique (Squaresoft, Capcom...), opterons pour des décors précalculés en 2D avec caméra fixe et personnage en 3D sommaire pour se faciliter la tâche sur une Playstation peut-être un peu moins rigoureuse et performante que la machine aux 64-bits de Big N.
De sa communication agressive aux milieux des années 90 à sa sortie sans cesse repoussée en France, la Nintendo 64 a longtemps existé sous une forme spectrale. Hantant la presse du jeu vidéo par des publicités étonnantes de suffisance et de roublardise et des scoops fabriqués de toutes pièces par les équipes de communication de Nintendo. Forcé de lutter pour rattraper un retard qui se faisait déjà gargantuesque en 1996 face au rouleau compresseur Playstation, Nintendo désire en finir avec son statut de gentil petit écolier propre sur lui. La Nintendo 64 opte pour une approche offensive et s'accompagne d'une série exubérante de pub choc pour dénigrer sèchement la concurrence (les consoles 32-bits, le CD-Rom, la full 3D très rares sur les machines concurrentes, l'absence de grandes licences fédératrices... presque tous les arguments furent utilisés pour incendier les Playstation de SONY et Saturn de SEGA). Aussi, la Nintendo 64 veut se tailler une part du gâteau de la modernité et veut se faire passer pour un objet de consommation cool. La Playstation a sut attirer un public adolescent avide de nouvelle technologie avec des jeux à l'aspect visuel plus mature que d'ordinaire et des sensations de jeu ébouriffantes (parfois au détriment du gameplay pur ou de la durée de vie, je l'accorde). Pour cela, Nintendo lance la production (en interne, ou par commandes interposées aux éditeurs tiers) de quelques jeux ''cool'', ''adultes''. On peut citer Killer Instinct Gold, Wave Race 64 ou encore Cruis'n USA, tout trois commercialisés pour le launch de la machine. D'autres suivront peu après avec notamment une avalanche de FPS pour la plupart issus du monde du PC (Hexen, Doom 64, Duke Nukem 64, GoldenEye 007...), prouvant le forcing intensif de Nintendo à vouloir ravir la vedette à la Playstation qui cumulait les jeux sombres et percutants comme des perles sur un chapelet de prière.
Shadow of the Empire faisait parti de ces jeux cool censé façonner l'imagerie de la Nintendo 64 d'impertinence et de glorifier Nintendo aux yeux d'un public devenu adulescent entre la sortie de la Super Nintendo et 1996. L'objectif est atteint mais le jeu n'est pas pour autant exempt de tout reproche. Offrant des séquences proprement époustouflantes pour un jeu de 1996, il alterne avec des phases peu maniables et frustrantes. La touche visuelle Star Wars fait bien son office mais techniquement, là encore, le jeu présente plusieurs lacunes. Trop de faiblesse qui l'empêche de briguer le rang de hit, Shadow of the Empire reste un jeu intéressant et honnête malgré tout.
Anakaris Je dis juste respect car moi perso je pourrait pas écrire des pavés pareil pour les jeux que tu test, ça m'est tout simplement impossible. RESPECT
sussudio pavés ne veut pas forcément dire article intéressant, mais c'est en tout cas ce que je m'évertue à faire sans concession sur Retro Gamekyo j'espère que c'est réussi !
Qu'est ce que j'aimais ce jeu bordel, c'était le début de la 3D et on retrouvait bien l'ambiance de Star Wars, en terme de décors et de musique, on s'y croyait.
Puis comme tu le dis, le jeu avait aussi le mérite de bien s'intercaler entre les films, entre les épisodes V et VI. Il est adapté d'un roman mais je pense que ça aurait pu être intéressant de voir ça aussi dans un autre média, un petit film d'animation ou autre chose dans le genre. Dommage que Disney ait décidé de faire une croix sur tout ça.
Je me souviens que le combat contre boba fett était juste impossible. Heureusement qu'il y avait des cheats pour ce jeu.
"LucasArts et Nintendo osent la 3d en 1996 sur console de salon !"; moi ce qui m'avais étonné également c'est qu'ils avaient réussir à faire entrer une bande son orchestrale streamée en 1996 sur N64 alors que les cartouches ne dépassaient pas 16MO à l'époque!
Alors certes, ça sonne ultra compressé et par rapport à la version PC, on n'a pas les morceaux en entiers mais comparé au son "midi" de Mario 64 et consorts ça faisait quand même de l'effet de pouvoir entendre des bribes des musiques iconiques de star wars!
Je ne pense pas que j'aurais du mal à m'y remettre aujourd'hui, mais comme beaucoup de monde j'en garde des bons souvenirs et une certaine nostalgie.
Je me souviendrai toujours des infâmes égouts qui m'ont terrifié comme pas permis avec les monstruosités ayant élu domicile (même les bruitages me faisaient quitter la salle ). Je ne suis pas surpris qu'on trouve une jouabilité assez imprécise (comme le cas de pas mal de jeux 3D ambitieux pour l'époque), mais j'ai souvenir que la sensation de tir et de viser était pas mal.
link80 oui, IG88 dans la décharge de Ord Mantell comme évoqué dans le test
Les boss sont tous durs dans ce jeu, mais il est vrai que celui-là en particuliers m'a vraiment beaucoup rebuté. Si bien que j'ai vite lâché le jeu à l'époque au profit principalement de Ocarina of Time sur la même console, même si j'étais (et suis encore) ultra fan de Star Wars
spawnini À elle seule l'intrigue du jeu et plus encore du roman aurai pourtant put donner un film à l'époque, en 1996, bien avant que Disney ne débarque sur Terre et y aille de leur spin off un peu fourre-tout.
Disney n'a pas eu la primeur des spin-off et des histoires parallèles intéressantes, mais hélas à l'époque tonton Lucas ne voulait strictement rien entendre x)
Puis comme tu le dis, le jeu avait aussi le mérite de bien s'intercaler entre les films, entre les épisodes V et VI. Il est adapté d'un roman mais je pense que ça aurait pu être intéressant de voir ça aussi dans un autre média, un petit film d'animation ou autre chose dans le genre. Dommage que Disney ait décidé de faire une croix sur tout ça.
"LucasArts et Nintendo osent la 3d en 1996 sur console de salon !"; moi ce qui m'avais étonné également c'est qu'ils avaient réussir à faire entrer une bande son orchestrale streamée en 1996 sur N64 alors que les cartouches ne dépassaient pas 16MO à l'époque!
Alors certes, ça sonne ultra compressé et par rapport à la version PC, on n'a pas les morceaux en entiers mais comparé au son "midi" de Mario 64 et consorts ça faisait quand même de l'effet de pouvoir entendre des bribes des musiques iconiques de star wars!
Je me souviendrai toujours des infâmes égouts qui m'ont terrifié comme pas permis avec les monstruosités ayant élu domicile (même les bruitages me faisaient quitter la salle
Je me souviens d'un combat contre un robot dans un genre de déchetterie... horrible...
Les boss sont tous durs dans ce jeu, mais il est vrai que celui-là en particuliers m'a vraiment beaucoup rebuté. Si bien que j'ai vite lâché le jeu à l'époque au profit principalement de Ocarina of Time sur la même console, même si j'étais (et suis encore) ultra fan de Star Wars
Disney n'a pas eu la primeur des spin-off et des histoires parallèles intéressantes, mais hélas à l'époque tonton Lucas ne voulait strictement rien entendre x)