Si il y a un acteur qui contribua fortement au succès de la scène ZX Spectrum tel qu'on l'a connu, c'est bien Ultimate Play the Game, autrement désigné sous le nom de Rare dans les années 90 et 2000 ! En effet, les gars de la petite ville d'Ashby en Angleterre auront apportés un soutient massif à l'appareil de Sinclair en y produisant un tas de jeux non seulement exclusifs mais en plus de qualité.
Soutient massif, et même un peu plus que de raison diront certains analystes et pour cause, puisque le développeur continuait d'exploiter le ZX Spectrum en 1988, alors même que l'Amiga de Commodore et le ST d'Atari s'étaient largement imposés sur le marché des micro-ordinateurs. Ceci n'ayant pas été fait par hasard puisque Sinclair, le producteur du ZXS et Ultimate Play the Game étant toutes deux des sociétés britanniques, le premier avait accepté de fournir gratuitement des kits de développement au second tandis qu'Atari, Commodore et Amstrad (mais aussi BBC Micro, ou encore le consortium à l'origine du MSX sur lesquels Ultimate Play the Game a développé aussi) échangeaient leurs kits contre des sommes extravagantes. Ce genre de pratique n'étonne plus personne puisqu'aujourd'hui encore la plupart des fabricants de consoles vendent à qui le veule leurs outils pour pouvoir développer leurs jeux, sauf en de rares exceptions comme pour Microsoft et SONY qui ont rendu gratuit aux petits studios indépendants les outils de création sur Xbox 360 et Playstation 4. Une façon comme une autre d'empêcher n'importe qui de pirater et/ou copier la technologie du voisin pour produire sa propre machine, je suppose.
Il n'empêche que ce fut pour les deux parties une alliance fructueuse, et après une année 1983 pleine de 6 bons petits jeux (dont 4 seront pleinement exclusifs au ZX), Ultimate Play the Game attaque sa seconde année d'existence en tant que producteur de jeux vidéo (entre 1982 et 1983, ils n'étaient que réparateur de borne d'arcade) avec le premier soft de ce qui est déjà prévu pour être une quadrilogie (une pentalogie en réalité, mais le cinquième jeu ne sera jamais commercialisé) : Sabrewulf, les origines de la série Sabreman.
Sabrewulf nous met donc dans la peau de Sabreman, un explorateur à la recherche de l'amulette ACG (référence au premier nom des développeur : Ashby Computers & Graphics) séparée en 4 morceaux qui sont cachés dans une vaste jungle tropicale. Bien entendu, jungle tropicale peuplée de créatures plus ou moins hostiles et avec lesquelles il faudra jongler entre pièges de Dame Nature et parcours pour le moins labyrinthique.
Ce qui choque au premier coup d’œil, c'est le foisonnement de couleur que dispense le jeu (ok, dit comme ça, en 2016, ça peut faire rigoler) dans sa version ZX Spectrum, étant donné que c'est ce support qui fut « lead » lors du développement, autant parler de celui-ci en priorité. C'est d'autant plus légitime qu'on peut y apporter une comparaison intéressante entre Sabrewulf et d'autres jeux de la même époque de l'appareil de Sinclair pour prouver la maitrise technique d'Ultimate. On étaient en effet habitués à voir des jeux avec des couleurs monochromes ou éventuellement bichromes pour les plus évolués. Un fond noir avec quelques pixels jaunes ou bleus pour donner forme aux personnage et aux décors, et c'était déjà pas mal. Mais là, les anglais papas de Donkey Kong Country donnent vie à un mélange de jaune, rose, vert, bleu et rouge particulièrement plaisant à voir à l'époque, rien que pour ça, Sabrewulf est vite fait repéré par les rares amoureux de jeux électroniques (oué, le mot « jeu vidéo » n'était pas vraiment usité en 1983). Et comme il était compliqué de faire mieux qu'une animation à deux frame, ce n'était pas vraiment le critère de sélection principal de ceux qui étaient exigeant en la matière. Sabrewulf s'impose tout naturellement.
Une fois porté un an plus tard sur Amstrad CPC et Commodore 64, le jeu n'aura pas la même aura princière puisque ces machines étaient déjà pourvues de jeu tout aussi jolis et colorés. Et c'est grâce à ça que Ultimate Play the Game put se construire une réputation, ils avaient l'art et la manière d'exploiter une machine potentiellement plus faible que les autres supports du marché pour en sortir des jeux graphiquement très intéressants.
Niveau gameplay, le jeu partage quelques caractéristiques d'un des touts premiers jeux de l'histoire d'Ultimate, lui aussi sorti sur ZX Spectrum : Atic Atac. Le jeu comporte une grande carte composée de 256 écrans parfois reliés entre eux, mais le plus souvent séparés par des obstacles tels des rochers ou une végétation luxuriante infranchissable. Vous devrez non seulement affronter la faune de la jungle (chauve-souris, araignées, serpents, félins divers) mais aussi trouver le moyen de dégager le chemin jusqu'à trouver les 4 morceaux de la fameuse amulette. Bloc de pierre à bouger, bouton à actionner, gros animaux endormis à faire fuir pour libérer le passage... du grand classique, quoique pas tellement que ça en 1984 puisque tout ou presque restait à inventer. Mais de l'efficace en toute situation !
Même le feu qui se déclenche totalement au hasard pourrait ralentir votre progression ! Parfois, votre machette d'explorateur et votre intelligence ne suffiront pas, comme face à ce loup argenté (bleuté en réalité, mais faut imaginer! ) rencontré au hasard sur les écrans de la carte. Invincible, ennemi mortel, rapide et mystérieux, il donne son nom au jeu, une sorte de mascotte légendaire et ultra charismatique pour un jeu d'époque, dont on ne connait rien mais qui reviendra dans un des autres très grands succès futurs d'Ultimate Play the Game/Rare, à savoir Killer Instinct (eh ben oui, le loup-garou Sabrewulf, c'est lui ! ) !
À noter l'existence d'un remake de ce jeu, sobrement intitulé Sabrewulf lui aussi, parut en 2004 sur Gameboy Advance et qui, d'un point de vue gameplay n'a pas grand chose à voir avec son modèle. Pas énormément de chose à dire sur ceci pour l'instant, on en reparlera probablement dans un autre article .
Ultimate Play the Game montre qu'au début des années 80, ils sont capables de produire des jeux ambitieux, exploitant le maximum des (très faibles) capacités techniques des machines d'époque et de faire preuve d'une belle créativité. Le jeu se démarquant sans mal de la masse absolument incroyable de clones de Space Invaders et autres Adventure qui inondèrent le marché entre 1978 et 1983, le studio anglais passe admirablement bien à travers le krash du jeu vidéo de cette même année 83 et continuera à faire parler l'innovation et le plaisir ludique grâce à des jeux au gameplay savoureux et à la technique sans reproche. Si leur tout premier jeu, Jet Pac aura bénéficié d'un succès commercial sans commune mesure (300 000 exemplaires vendus, incroyable quand on voit le score d'un certain Lightning Returns : Final Fantasy XIII aujourd'hui disponible sur un parc de console 80 fois plus conséquent...! ), c'est bel et bien Sabrewulf qui fera rentré Ultimate Play the Game dans la cour des grands et boostera sa popularité notamment outre Atlantique.
Quelle époque ! On achetait le jeu autant pour le packaging qui faisait rêver , que pour le contenu ... Avec toujours cette impression d'être pionniers puisque incompris du reste du monde ( parents ) ...
Être geek , c'était être condamné à être classé comme ado boutonneux introverti .
Rien compris
(mais je retenterais plus tard histoire de)
Être geek , c'était être condamné à être classé comme ado boutonneux introverti .
Bravo pour l'article, du super boulot