Fin 1995, et depuis la sortie de Lands of Lore deux ans plus tôt, les RPG en vue de face et de qualité (si possible, merci) se faisaient un poil discret sur PC (je déteste les gens qui écrivent ''Pécé'', tout comme ceux qui écrivent ''Dévédé'' ou encore Trois-dé-èsse histoire de se donner un genre, c'était le ch'ti coup de gueule du jour ). Le tant attendu Dungeon Master 2 qui fit polémique se foutait bien de la gueule du monde à l'époque : d'abord édité au Japon en 1993 (après 4 ans de développement, quand même), on se demande encore pourquoi vu que 95% de ses ventes se firent en occident (et que tout le monde se doutait que ça allait se passer comme ça), là où il fut sorti très tardivement, en 1995 donc et n'apportant pas vraiment son lot d'innovation et de qualité promis. Tandis que Lands of Lore 2 subissait d'incessant report pour finalement pointer le bout de sa truffe en 1997 à la place du 1994 prévu.
Et encore, c'est sans parler de Stonekeeper, à l'époque jeu vidéo ayant eu le plus long développement au monde (5 ans, au lieux des 9 mois initialement prévus), devant coûter selon les prévisions 50.000 $, et finalement ayant ponctionnés à ses investisseurs pas moins de 5 millions de billets verts...
Bref, les amateurs de dungeon-crawling sur PC en avait ras le cul d'attendre, d'être déçus, et de subir polémiques et embrouilles autour de leur jeu favoris.
C'est donc un peu pour cela que la nouvelle production de SSI était vu comme une très bonne chose, et pas forcément à tord vu que les diverses preview de la presse d'époque était tout à fait optimistes. Ne pouvant plus bénéficier des licences de TSR (Tactical Studies Rules, la fameuse société créatrice des univers Dungeon & Dragon, Forgotten Realms et Lancedragon entre autre), Strategic Simulations Inc avait décidé de se retrousser les manches afin de créer ses propres produits.
Naquit alors le monde d'Aden, avec tout ce qu'il faut de troll des cavernes, gobelins, fées, elfes, châteaux hantées, trésors perdus et tout le toutim. Menacé, évidemment, (sinon qu'est-ce qu'on viendrait foutre dans un monde magique où la paix règne?), par le vil Anthrax (nan, pas le groupe de thrash metal, n'allait pas encore dire que le metal provoque violence et mal-être et fait sombrer les jeunes dans la drogue, namého!). Le Royaume du nord est prêts à sombrer sous les assauts des armées maléfiques d'Anthrax, et en ce jour maudit, un avant-poste stratégiquement essentiel vient de tomber entre leur mains. Mais tout est très flou, et après enquête, il s'avère que l'avant-poste ne fut pas pris d'assaut par hasard, on a ouvert une brèche sciemment aux forces du mal, il vous incombe alors la tâche de reconquérir ce lieu et de découvrir la vérité sur cette trahison!
Les auteurs du jeu n'ont pas tergiverser fort longtemps: pourfendre, écraser, carboniser et exploser, telle seront vos moyens principaux pour reprendre ce qui appartient à la race humaine. Le tout en résolvant énigmes diverses et en récoltant moult trésor, classique mais efficace.
Pour parcourir le donjon, 6 personnages se joindront à vous, et deux autres pourront être recrutés à votre guise. La création de l'aventurier (façon jeu de rôle plateau à l'ancienne, mon univers quoi, mais bon, on s'en fout de moi hein ) est complète et facile d'accès avec ce qu'il faut de caractéristiques physiques (force, adresse...) mais aussi tout un panel de compétence. Le tout étant très variable selon le choix que vous ferez parmi une proposition de 10 races distinctes avec autant de profession, ce qui n'en finit pas de différencier les statistiques chiffrés de votre avatar. Ajouter à cela un joli éventail d'équipements et vous aurez de quoi faire pour convaincre un initié aux jeu de rôle.
Ce qui est d'ailleurs plus qu'appréciable et notable, c'est la prise en compte réelle de ces spécificités en jeu. Ainsi, pour ouvrir un coffre, il faudra que le personnage utilisé détienne la compétence ''crochetage de serrures'', compétence qu'un troll berserk ne pourra pas acquérir, fort logiquement; de la même manière, si un sort vous menace lors de l'ouverture d'une porte maudite, la compétence ''désenchantement'' vous sera d'un grand secours.
Le système de combat est efficace est bien étudié, en semi-temps réel. À distance, les ennemis pourront vous atteindre avec des projectiles, tout comme vous d'ailleurs pourrez les toucher avec sorts et autre arbalestrie, façon FPS. Mais une fois au corps à corps, le combat passe en mode tour par tour où le choix de vos actions différera selon votre race, votre équipements et votre job. Tentative d'attaque critique (échoue souvent mais frappe très fort), protection derrière un bouclier, mode berserk, ou encore listing de sort (avec en sus joli effet graphique en sprite large et colorés), les possibilités sont vastes et rarement identique d'un personnage à l'autre. Malheureusement, on notera le peu de sort total disponible, quand bien même chacun d'entre eux dispose de plusieurs level de puissance.
Si le système de combat est sympathique, plusieurs détails cumulés viennent gâcher la fête. Comme sus-cité, les sorts, assez peu nombreux donc, mais aussi l’absence d'un quelconque système de crafting afin de mêler les équipements pour en créer d'autre. Aussi, la map qui se dessine au fur et à mesure de votre progression, carrément dégueulasse et illisible, inutile (et pourtant, sur certain level, on en aurait bien besoin tant ça devient facilement labyrinthique!). La fiche de personnage qui se sépare en 4 sacs à objets, et entre lesquels il faut naviguer en cliquant à chaque fois sur un bouton pour visualiser le contenu du sac suivant, peu pratique et multipliant à outrance le nombre de mouvement de souris à effectuer pour sélectionner la moindre potion... Enfin, le nombre de sauvegarde autorisée, au nombre trop restreint de 4 (on est pas sur Super Nintendo avec de vieille cartouche 16mg, que diable! Mais sur PC. Et en 1995, un jeu comme Star Wars: Dark Forces permettait un nombre de sauvegarde tout simplement illimité...). C'est pas un problème si épineux que cela, mais dans un dungeon-RPG, c'est toujours bien d'avoir quelques portes de secours... Reste la bonne idée de devoir s'arrêter de temps en temps à la boutique afin d'y faire identifier ses objets et armes nouvellement acquises par un sage afin d'en déterminer les caractéristiques (sans ça, on ne peut les utiliser), ce qui est une phase bien connue de l'aventure de tout bon roliste sur table qui se respecte.
Outre tout cela, le jeu reste globalement agréable à parcourir, sans trop de difficulté et avec la présence de monstre bien dosée. À noter une version française plutôt bien écrite.
Niveau graphisme, c'est pas glorieux. Le jeu supporte un format d'affichage vidéo classique pour l'époque, à savoir un VGA en 320x200 pixels, ce qui n'est pas un drame en soit lorsque cette résolution est bien utilisée. Or, pour Thunderscape, ce n'est pas le cas. On a parfois l'impression de courir un peu trop sur les murs tant l'écran semble étroit, et une résolution un peu plus élevée n'aurait pas était de refus. Sur une bécane de moyenne puissance d'époque (486 SX cadencé à 25mhz avec 4mo de RAM), il était quand même nécessaire d'installer l'intégralité du jeu et ses 80mo de données ou presque sur le disque dur, et ça, ça mérite un gros coup de boule pour ce que ça nous donne en échange ! Forte pixelisation, panel de couleur peu étendu, variété visuelle du bestiaire peu convaincante (les streum sont au nombre de 30 avec parfois des légers détails qui différencient un troll d'un troll guerrier, comme la hache à la place de la massue et rien d'autre...), entre mauvaise optimisation et recherche artistique paresseuse, World of Aden a peu de chose pour lui d'un point de vue graphique.
C'est très con parce que Thunderscape avait du potentiel. Pour ce qui connaisse pas l'univers dépeint dans cette œuvre, il faut savoir que ce n'est pas tout à fait un trip heroic-fantasy classique. Thunderscape présente quelques touches de steampunk et de révolution industrielle dans son background, et des armes s'apparentant à des ''canons à foudre'' sont présentes ! De quoi apporter de la personnalité à l'aspect visuel du soft, ce que SSI ne fit pas vraiment.
Le soft continue de se fourvoyer et de perdre le joueur entre choix de conception hasardeux et qualité variable avec la bande-son. Les bruitages et voix collées à chaque monstres et personnages sont de bonne facture. Mais les musiques sont étrangement hors de propos. Bâties sur une composition de guitare électrique bien souvent, elles distillent une ambiance sombre et pesante mais aussi un peu planante, pas forcément typique de ce qu'on pourrait attendre de nos pérégrinations au fin fond d'un donjon lugubre hanté par des trolls et des dragons. C'est très compliqué à expliquer par les mots, mais on sent bien que les musiques, de qualité honnête quoique répétitives, sont pourtant pas taillées pour accompagner un jeu tel que World of Aden : Thunderscape. Et la meilleure façon de vous prouver cela, c'est tout simplement de vous faire écouter le tout, que je vous propose en fin de review.
Difficile ainsi de juger ce World of Aden : Thunderscape. Déception sur la forme mais pas sur le fond (ce qui est rare dans ce sens), l'enrobage technique du soft pêche par paresse et manque d'ambition, bien qu'il y ait un semblant de matière à exploiter à la base. Pourtant, le gameplay reste complet et bien construit, avec une gestion du personnage et de ses statistiques simple et efficace qui permet de vraiment ressentir la différence de ses choix d'évolution en combat. Le côté RPG est on ne peut plus présent et l'ambiance à ce petit quelque chose de sympathique malgré une musique pas tout à fait dans les tons. C'est ainsi que malgré la faible présence de concurrence solide dans les environs immédiats du mois de novembre 1995, World of Aden : Thunderscape ne se pose pas forcément pour autant comme un jeu de qualité et un bon choix afin d'assouvir son besoin de dungeon-crawler sur PC. Dommage, car il y avait une brèche, que SSI n'a pas su exploiter.
Ah sympa, je connaissais pas celui-là... En même temps, le seul jeu du genre que j'avais c'était Land of Lore et je l'avais testé que vite fait vu qu'il tournait super mal sur mon PC de merde à l'époque.
En tout cas j'aime bien tes tests.
sorow c'est un genre assez particulier c'est vrai, c'est un peu l'ancêtre des dungeon-RPG à la Dark Cloud (grosso merdo hein^^) merci beaucoup en tout cas
Furtifdor une review plus modeste qu'hier, j'espère qu'elle te fait pas peur celle-là
Très bon article et très bien écrit
En tout cas j'aime bien tes tests.