Noir, blanc, et beaucoup de rouge dans l’esprit
Quand on pense à Ninja Gaiden, on imagine des réflexes surhumains, des sabres qui sifflent, et une difficulté qui fait trembler les pouces. Pas exactement le genre d’expérience qu’on s’attend à trouver sur Game Boy, la console des gosses sages et des piles à plat. Et pourtant… en 1991, Natsume a tenté le pari : faire tenir Ryu Hayabusa dans un écran monochrome. Résultat ? Ninja Gaiden Shadow(NB : nom US que l'on utilisera durant ce test car je l'aime bien) – un petit concentré d’action pure, peut-être un peu bridé, mais diablement efficace.
La boite sur Game Boy aux USA
Une ombre avant la tempête
Ici, pas question de sauver le monde en 12 cinématiques ou de jongler entre les murs : Shadow joue la carte du préquel. Avant les drames épiques de la NES, Ryu nettoyait déjà les rues d’une ville gangrenée par le mal. Cinq niveaux, cinq boss, une seule mission : tailler dans le vif avant que l’ombre ne dévore tout.
L’histoire tient sur un timbre-poste, mais ce n’est pas grave : ce qui compte, c’est le feeling manette en main.
Une leçon de minimalisme ninja
On ne va pas se mentir : la Game Boy n’était pas le temple du réflexe millimétré ni du gameplay acrobatique. Et pourtant, Ninja Gaiden Shadow s’en sort avec les honneurs. Les sprites sont massifs, lisibles, et les coups de sabre claquent avec une autorité surprenante pour une console aussi frêle. Natsume, aux commandes, a taillé dans le gras et gardé l’essentiel : la pure action.
Mais attention — ne vous attendez pas à une version miniature des épisodes NES. Shadow n’en est pas un simple portage : c’est un spin-off dépouillé, presque contemplatif, où la nervosité laisse place à la précision.
Oubliez les courses murales, les double-sauts ou les enchaînements acrobatiques : ici, Ryu avance lentement, s’accroche à une corniche, balance un shuriken ou un parchemin de feu, puis repart tailler du démon.
Ce n’est pas du Ninja Gaiden II dans la poche, mais une sorte de proto-Gaiden, plus méthodique, plus posé — et parfois, étonnamment zen.
Le grappin (ou plutôt le « ninja hook ») joue un rôle central : c’est votre seule vraie fantaisie mécanique. Il permet de s’accrocher à certains plafonds pour contourner les ennemis ou traverser des gouffres, et donne au jeu un rythme unique, presque stratégique.
Certes, son usage est limité à des points précis — on n’est pas dans Bionic Commando — mais chaque occasion de l’utiliser apporte un petit frisson d’agilité bienvenue. C’est là que Shadow trouve sa personnalité.
Côté arsenal, Ryu conserve ses parchemins pour lancer des attaques spéciales : des boules de feu ou des shurikens à usage limité, à gérer avec soin. Pas de pluie d’items ni d’armes secondaires variées comme sur NES : ici, la sobriété règne.
Et c’est sans doute ce qui rend le jeu si singulier : Natsume ne cherche pas à tout copier, mais à condenser l’esprit Ninja Gaiden dans une expérience compacte et maîtrisée.
Chaque niveau se traverse comme un duel entre patience et réflexe, chaque saut doit être pesé, chaque coup porté avec intention. On est loin de la frénésie des consoles de salon, mais jamais loin de la tension qui fait le sel de la série.
Bande-son : le souffle du dragon
La musique, elle, mérite les honneurs. Sur cette pauvre puce sonore de Game Boy, les compositeurs ont tiré de véritables hymnes ninja. Ça pulse, ça groove, et ça colle parfaitement à l’ambiance : entre tension urbaine et adrénaline pixelisée.
Impossible de ne pas hocher la tête quand la mélodie du premier niveau démarre. C’est le genre de thème qui vous reste en tête toute la journée, et qui vous donne envie de sortir dans la rue avec un bandeau sur le front.
Les bons points
+ Des graphismes nets et bien dessinés, lisibles en toute circonstance — du bon travail de Natsume.
+ Une vraie identité Ninja Gaiden, même en version miniature : ennemis, décors, ambiance… tout est là.
+ Une bande-son nerveuse et entraînante, typique de Tecmo, qui accompagne bien l’action.
+ Un gameplay simple mais bien pensé, avec un vrai feeling dans les coups de sabre.
+ Le grappin, limité mais bien exploité, ajoute juste ce qu’il faut de variété.
Les petits regrets
– Cinq niveaux seulement : le jeu se termine vite, trop vite.
– Un rythme plus lent que sur NES, sans les acrobaties ni la fluidité des épisodes principaux.
– Plus limité niveau gameplay que sur NES quand même.
– Peu de mise en scène, pas de cinématiques ou d’histoire développée : on enchaîne simplement les stages.
– Une difficulté un peu plate, qui monte tardivement sans jamais vraiment surprendre.
. Verdict
Ninja Gaiden Shadow n’est pas un grand ninja game, mais c’est un bon jeu d’action Game Boy, solide et efficace.
Moins spectaculaire que ses modèles de salon, il garde l’essentiel : la précision, la rigueur, et une ambiance fidèle à la série.
Un petit plaisir monochrome qui fait honneur à la licence, sans chercher à en faire trop.
Quant à Tomonobu Itagaki, même s’il n’a pas travaillé sur ce volet, impossible de ne pas penser à son héritage : cette idée que le style et la maîtrise valent mieux que la démesure.
Un rappel simple, mais juste.
Court, carré, efficace. Un vrai ninja de poche — sans fioritures, mais avec du respect. Cet article est un hommage à Tomonobu Itagaki qui vient de nous quitter et qui a prouvé durant sa carrière qu’on pouvait manier la manette comme un katana.
Fiche technique: Titre original : Ninja Ryukenden GB Développeur: Natsume Editeur: Tecmo Genre: Action Année de sortie : 1991 Autres supports: - Nombre de joueur(s): 1 Localisation:
NOTE PRESSE (Joystick 024 - Février 1992)
Screenshots:
Test de l'émission Micro Kid's (France 3) - septembre 1992
Fini un nbr incalculable de fois au collège. J connais toutes les chansons par coeur. Le générique de fin était le meilleur du monde à mes yeux. Je ne comprenais même pas comment on pouvait choisir de jouer à dr mario quand en fait t’avais ce chef d’œuvre.
Il avait un surnom que j'ai oublié.
L’un de mes meilleurs souvenir vidéo ludique.
Merci pour l’hommage!
#jemycrois