Le troisième épisode de la saga diabolique Devil May Cry arrive enfin en Europe. Cet opus se devait de relever le niveau afin de ne pas faire plonger la série dans les ténèbres. Mission accomplie ?
Au fil des années,
Capcom est devenu l’une des sociétés qui comptent le plus grand nombre de franchises de jeux vidéo adulées par le grand public. Ainsi,
Resident Evil,
Onimusha,
Megaman, ou
Street Fighter sont autant de séries devenues aujourd’hui mythiques et s’imposent comme de véritables piliers du jeu vidéo. Mais
Capcom est également expert en recyclage dès qu’il s’agit de rentabiliser ces mêmes franchises et finit parfois par démystifier certaines oeuvres. Les derniers épisodes de
Megaman ne font clairement pas l’unanimité, la série
Resident Evil renaît à peine après un quatrième opus époustouflant, mais qui a demandé des années de réflexion et de travail acharné, la série
Street Fighter, quant à elle, n’en finit plus de se cloner. Bref,
Capcom peine à relancer l’intérêt de ses séries phares. Et si l’en est une qui n’a clairement pas le droit de décevoir à nouveau, c’est bien
Devil May Cry. Après un second opus totalement loupé, avec des angles de caméras scandaleux, un scénario inexistant et des graphismes tout juste moyens, les développeurs se devaient de proposer aux joueurs du monde entier la digne suite du premier opus qui reste encore et toujours une des références en matière de jeu d’action survitaminé. C’est ainsi qu’arrive enfin le tant attendu et également tant redouté
Devil May Cry 3 : Dante’s Awakening. C’est donc non sans une certaine fébrilité et une exaltation indubitable que nous enfournons le précieux DVD dans la console. Le diable va-t-il encore nous faire pleurer ?
Let’s Rock Baby !
A l’instar du second opus, ce
Devil May Cry 3 : Dante’s Awakening donne immédiatement le choix du mode d’affichage. Evidemment, nous nous ruons sur le sacro-saint 60Hz dont l’absence avait tant porté préjudice au premier épisode. Puis vient ensuite l’intro du jeu, réalisée en image de synthèse et proposée en Dolby Digital. Dante et Vergil se battent à mort et c’est Vergil qui a le dernier mot en laissant Dante gésir dans une mare de sang. Flashback. Nous retrouvons Dante dans son petit domicile (qui n’est pas encore le magasin que nous connaissons) qui reçoit rapidement la visite de nombreux démons dont il faudra évidemment venir à bout. Autant vous le dire tout de suite, ce premier contact avec le jeune Dante s’avère on ne peut plus décevant. Graphiquement, le titre souffre d’un
aliasing tenace et ravageur, mais les graphismes tout comme le design général de Dante laissent perplexes. La
cut-scene à laquelle nous assistons souffre également d’une mise en scène déplorable mettant aux prises Dante et divers démons, le tout avec un bout de pizza en fil rouge. L’attitude nonchalante et classe du vieux Dante de
Devil May Cry semble ici avoir laissé place à une arrogance et une jactance des plus puériles. La
cut-scene s’achève enfin, nous pouvons enfin reprendre le contrôle des fidèles Ebony & Ivory et encore une fois le doute s’installe. Les angles de caméra ne sont pas des plus judicieux et l’action est certes frénétique, mais terriblement brouillonne, le tout agrémenté d’une musique Metal assourdissante dont les trois accords feront rapidement exploser vos crânes. Une fois le ménage terminé, Dante enfile enfin sa veste et se prépare à cette nouvelle aventure. Sachez qu’au départ, vous débuterez avec le mode de difficulté normal qui correspond en fait au mode difficile dans la version japonaise du soft. Ainsi, si Dante parait immortel de par son attitude dans les
cut-scenes (il se fait notamment transpercer par plusieurs lames dans la première sans pour autant que cela ne suscite chez lui la moindre forme de douleur), il en sera totalement différemment durant vos aventures. En effet, la maigre barre de vie du jeune démon ne vous permettra absolument pas de foncer dans le tas tête baissée, sans quoi la mort vous fauchera sans aucune hésitation. Il faudra donc garder ses distances et attaquer au moment opportun. Après avoir perdu la vie à plusieurs reprises, vous aurez la joie et le bonheur non dissimulé de débloquer le mode de difficulté facile. Ravalez alors votre fierté et recommencez le jeu sans quoi vous serez en proie à de terribles crises de nerfs tant le soft s’avère difficile. En mode facile, la difficulté est raisonnable et permet de réellement prendre son pied en retrouvant cette impression de puissance que l’on aime tant dans
Devil May Cry.
Cet opus vous proposera d’opter pour quatre styles différents (d’autres viendront par la suite se greffer à la liste), chacun proposant sa spécialité. Ainsi, le mode Gunslinger vous permettra grâce à la touche Rond de tirer dans deux directions différentes en orientant le stick analogique gauche. Swordmaster vous offrira de nouvelles combos réalisables avec votre épée tandis que Trickster et Royal Guard influeront respectivement sur votre style au combat et vos capacités de défense. Un didacticiel fort utile vous guidera également à travers vos premiers pas dans l’aventure. Une excellente nouveauté apportée par cet épisode est qu’il permet, par simple pression sur les touches R2 ou L2, de switcher entre vos différentes épées et armes à feu, sans avoir à passer par un fastidieux menu. À chaque début de chapitre (ou bien à chaque sablier rencontré dans le jeu), vous prendrez donc le soin d’attribuer judicieusement deux armes et deux lames à Dante. Ceci augmente considérablement le nombre de combos que vous pourrez réaliser au combat en
switchant plusieurs fois durant un même affrontement par exemple. De même, la croix de direction vous permettra d’accéder rapidement à la map, à l’écran des objets et à d’autres informations diverses. Le système de combat est quant à lui fluide et précis et répond au doigt et à la gâchette. Ainsi, vous prendrez un malin plaisir à envoyer votre adversaire dans les airs par un coup de sabre, puis à le maintenir en suspension grâce à une rafle de balles pour enfin l’achever au sol par deux projectiles bien placés suivis d’un violent coup de pied. Rien ne vous empêche également de sauter sur son dos et d’évoluer entre les ennemis sur votre skateboard démoniaque, shootant à tout va, avant de laisser votre planche s’écraser contre le mur. Les possibilités sont très nombreuses et on se plaît à les découvrir au fur et à mesure des évènements.
Evidemment, votre style sera noté et vous octroiera les fameux orbes rouges qui vous permettent d’acquérir des objets, d’acheter de nouvelles actions ou encore d’améliorer votre puissance de feu. A vous donc de gérer au mieux vos combats pour obtenir un maximum d’orbes pour faire augmenter votre panel de techniques. Le jeu vous mettra aux prises avec le frère jumeau de Dante, Vergil, et la majeure partie de l’action se déroulera dans une tour représentant le couloir entre le monde des mortels et celui des démons. A vous d’empêcher Vergil de briser le sort de votre père Sparda, et ainsi faire revenir les démons sur la planète. Un nouveau personnage féminin, Mary, fait également son apparition dans cet opus et vous n’aurez de cesse de vous croiser au fil du temps. Bref, la trame de ce
Devil May Cry est classique, mettant en cause la lutte éternelle entre le Bien et le Mal. Durant votre périple, vous serez souvent également confronté à un large panel de boss plus ou moins gigantesques qui donneront lieu à des affrontements évidemment dantesques, mais pas toujours des plus passionnants. Chacun possède son point faible qu’il vous faudra découvrir et exploiter sans relâche durant tout le combat. A noter que lorsque vous mourez dans le jeu, vous devrez recommencer le niveau entier, ce qui est particulièrement rageant dans les niveaux relativement longs. Le soft brille donc de par ses qualités de
gameplay jouissif et de par le pied indéniable que l’on prend à contrôler ce personnage puissant et stylé.
Des larmes de tristesse
Cependant, ce nouvel opus souffre d’une quantité de défauts non négligeables qui en feront pâlir plus d’un. Tout d'abord, la réalisation ne fait pas dans le sublime et l’on évolue parfois (pour ne pas dire souvent) dans des décors fades aux textures pauvres. Les différentes
cut-scenes qui ponctuent le scénario ne sont pas d’une beauté effarante et font même peine à voir face à la mise en scène de celles de
Metal Gear Solid 3 : Snake Eater ou le dynamisme de celles de
Resident Evil 4. L’animation des différents protagonistes est certes réussie, mais l’on regrettera tout de même un certain manque de variété chez nos adversaires et d’avoir ainsi cette fâcheuse impression de ne croiser que trop peu d’ennemis différents. Le
character design général est assez moyen et l’on regrette rapidement les très charismatiques mais non moins effrayants hommes marionnettes du premier opus. Ensuite, il est à noter que la mise en scène globale du titre est à mille lieues de ce que le premier opus avait pu nous offrir. On évolue ici avec un Dante pré-pubère qui pousse des « Wahou » et des « Youhou » à tout bout de champ. Voir Dante chevaucher un missile, un ennemi ou encore jouer de la guitare électrique (cette arme est tout bonnement ridicule cela dit en passant) en poussant de petits cris stridents devient rapidement exaspérant. Le système de visée est également assez discutable, car il arrivera souvent qu’un ennemi vous attaque sans que vous n’ayez eu le temps ou la possibilité de le
locker assez rapidement. De plus, on se voit souvent contraint de tirer sur une cible invisible tant les angles de caméra se révèlent parfois inadaptés.
Devil May Cry puise sa quintessence dans de vastes environnements et ce sont malheureusement plus souvent ici de longs couloirs qui serviront de champ de bataille. Le cheminement est quant à lui dans la même veine que les précédents opus et donc linéaire à souhait. Un peu d’originalité à ce niveau n’aurait pas été de refus.
Malgré la pauvreté graphique environnante, ce
Devil May Cry 3 : Dante’s Awakening se paie même le luxe d’offrir à nos yeux effarés des ralentissements gigantesques si tant est que la caméra soit un peu trop proche lors d’un affrontement. Enfin, on ne pourra que déplorer cette maudite musique Heavy Metal qui accompagne les joutes. Si les combats contre les boss étaient fabuleux dans le premier opus et désastreux dans le second, dans ce troisième épisode, le constat est très mitigé, allant d’un charismatique gardien de glace incarné par un chien géant à trois têtes, à une femme vampire des plus classiques et modélisée sans la moindre espèce d’attention. On ne retrouve aucunement le design fantastique des sublimes boss rencontrés dans le premier opus et on affronte de-ci de-là des ennemis sortis de nulle part et dont on ne cessera de marteler la touche Carré pour en venir à bout. Nous conclurons ce chapitre par un point important et ô combien douloureux ici que constitue la durée de vie. En effet, si finir le soft ne devrait pas poser de problèmes majeurs à qui a déjà joué à un épisode de la série, cela ne prendra également que quelques heures de votre temps. Comptez entre 5 et 8 minuscules heures pour venir à bout des vingt chapitres que compte le jeu selon que vous vous perdiez ou non dans les différents étages de la tour. Différents bonus seront à débloquer dont de nouveaux costumes, des vidéos montrant des combos dévastatrices ou encore une petite galerie d’images. Il est toutefois à noter que la mise en scène comme les environnements dans lesquels vous évoluez se bonifient considérablement au niveau des trois derniers chapitres qui proposent des décors vastes et diaboliquement enchanteurs et une mise en scène plus dynamique et intense. Ce revirement intervient malheureusement trop tard dans le jeu, sans compter que le générique de fin s’avère également très original, mais je ne vous gâcherai pas la surprise de la découverte.
En résumé, ce
Devil May Cry 3 : Dante’s Awakening épate par son action non-stop et l’impression de puissance qu’il dégage, mais pêche par un environnement graphique moyen, une mise en scène déplorable et un héros presque antipathique, voire pathétique. On aurait également aimé assister à plus d’évènements faisant directement référence aux précédents opus mais il n’en est rien.
Devil May Cry 3 : Dante’s Awakening se contente donc de constituer un sympathique jeu d’action, un cran au dessus du second opus, mais à des années lumières d’un premier opus qui, malgré un 50Hz handicapant, offrait des environnements de toute beauté, un son prodigieux, une mise en scène incroyable et un charisme encore indétrônable. En définitive,
Capcom nous propose une aventure brève et classique, jonchée de défauts en tout genre qui laisse tout de même dans la bouche un goût plus qu’amer, tant le jeu aurait pu être meilleur.