Forcément très remarqué au cœur du routinier catalogue d’
Electronic Arts,
Sea of Solitude incarne la quatrième tentative de l’éditeur pour sa gamme
EA Originals, avec ici aux commandes du navire Cornelia Geppert, auteur qui souhaite faire de son propre vécu une expérience ayant pour thème générale la dépression. Ce n’est pas la première fois qu’un jeu « indépendant » joue la carte du récit vaguement autobiographique pour mettre en avant des situations passées, et on a déjà eu de nombreuses réussites sur ce point. Il y a ceux qui privilégient le gameplay pour lâcher la narration en sous-entendus (
Binding of Isaac), ceux qui préfèrent tout miser sur l’ambiance (
Inside) ou encore ceux qui vont chercher à être plus clairs dans leurs propos tout en proposant un jeu derrière (
Hellblade). A chaque fois, une thématique importante, et la petite équipe allemande de
Jo-Mei a visiblement vogué vers cette troisième voie, malheureusement sans avoir le CV adapté.
La dépression est l’un des grands maux de notre monde, et il y a effectivement un grand intérêt à s’attarder sur cette maladie, encore plus en France où l’on fait partie des champions en la matière.
Sea of Solitude ne se présente ni comme le remède miracle, ni comme une thérapie (d’ailleurs on nous l’indique clairement au moment de lancer une partie), mais souhaite explorer les diverses causes à même de mener notre esprit vers des profondeurs où il est toujours difficile de ressortir. Et… c’est tout simplement mal foutu. C’est mal foutu car même si certains sous-thèmes sont très intéressants (particulièrement le tout premier), le joueur va être plongé dans un medley de messages qu’on nous hurle au visage avec un énorme manque de talent dans l’écriture.
Et sans oser remettre en question le passif de Mme Geppert, il aurait peut-être mieux valu éponger certaines situations pour mieux s’attarder sur d’autres plutôt que de donner une approche presque caricaturale d’une maladie qui se veut pourtant assez abstraite. Dans
Sea of Solitude, tout le monde est dépressif. Pour des raisons propres à chaque « protagoniste », qui sont pour le coup compréhensibles, le petit frère est en dépression, la mère est en dépression, le père est en dépression, votre petit copain est en dépression et bon, résultat, vous allez taper une grosse déprime. C’est trop. Beaucoup trop. On sait parfaitement que ce type de drame peut survenir n’importe où et chez n’importe qui, mais il y a tout un tas de moyens pour offrir de la justesse et un certain équilibre narratif plutôt que de nous marteler sans cesse la gueule de sous-entendus qui ne le sont pas, et de bons sentiments qui font presque tâche. Perdue dans cet océan barbant, la mise en scène ne parvient à relever le niveau qu’à deux ou trois reprises, le reste étant déjà oublié à jamais.
Et ce n’est pas le gameplay qui sauvera l’affaire. Les développeurs ont été piochés dans un sac d’idées vieilles comme le monde, oubliant de faire le tri et n’en ressortant que les trucs les plus communs, semblables à n’importe quel projet « poético-psycho » à trois sous, un temps à la mode sur le marché indé : de la marche, un peu de barque, un peu de grimpette, du platformer vite fait, des sortes d’orbes à actionner… C’est un peu tout. Pas de puzzle, pas de génie dans le level-design, pas de scène un minimum haletante (alors qu’il y avait matière à vu les gros trucs à l’écran), jamais la moindre forme de réflexion… Alors on ne sait pas si le but était de nous faire déprimer mais ce qui est sûr, c’est qu’on s’est incroyablement ennuyé à atteindre les crédits de fin, alors que ça ne prend qu’à peine plus de trois heures. Sinon pour les chasseurs de trophées, vous pourrez toujours chercher des bouteilles et des pigeons.
Bah c'est pas une daube dans le sens... "daube".
C'est jouable on va dire malgré le gameplay un peu flottant, et c'est pas moche.
Mais c'est banal.
J'ai pas d'autres mots que "banal".
Alors que les thèmes étaient censés être originaux (dans le JV).