Plus c'est long, plus c'est bon comme on dit. Avec une attente interminable pour le dernier rejeton de Square Enix, jamais le proverbe n'a paru aussi vrai.
E3 2001. L'éditeur préféré des fans de RPG nippons était attendu au tournant vu le manque d'ambition de ce dernier sur la génération Playstation 2 qui se résumait à un
beat'em all de bas étage, un jeu de voiture vomitif, quelques productions hasardeuses et, fort heureusement, un
Final Fantasy X qui, sans être exempt de défauts, s'imposait sans surprise comme l'un des meilleurs jeux de la machine. La communauté se frottait déjà les mains à l'idée d'un retour en fanfare des plus grosses licences qui ont fait les beaux jours de la PSone telles que
Vagrant Story ou
Chrono Cross... Mais rien de tout cela, le gros projet alors mis en avant par
Squaresoft se résumait en deux mots :
Kingdom Hearts,
melting-pot improbable entre les univers de
Final Fantasy et de Disney. Personne à l'époque n'aurait pu parier sur un succès mondial au point de décider
Square Enix à en faire une série qui constituerait le troisième pilier de la firme aux côtés de
Final Fantasy et
Dragon Quest. Et pourtant ! Cinq ans plus tard, le second opus arrive enfin chez nous... et s'impose sans mal comme l'un des meilleurs A-RPG de la machine, rien que ça.
Une histoire de cœur
Bien loin de la série
Final Fantasy où sauter un épisode est sans risque pour comprendre le suivant vu que chacun possède une histoire à part entière, les différents épisodes de
Kingdom Hearts forment un tout et avoir terminé chacun d'entre eux est un gage d'assurance pour faciliter la compréhension du scénario. Pour les plus fainéants, voici un bref rappel des faits : le jeu suit l'histoire de Sora, un adolescent séparé de ses deux amis depuis qu'une brèche conduisant à des mondes parallèles s'est ouverte sur son île. Sora croisera rapidement la route de Donald et Dingo, deux serviteurs du roi Mickey à la recherche de ce dernier. Très vite, on comprendra que Sora est une sorte d'élu chargé de contrecarrer les plans d'un certain Ansem à la tête d'une armée de sans-coeurs (créatures opaques sans âme) qui souhaite trouver le fameux
Kingdom Hearts pour des raisons au départ inconnues. Chose que vous empêcherez bien entendu et qui conclura, après la nouvelle séparation de Sora et ses amis, le premier épisode. Un scénario pas vraiment épais donc, mais qui ne constituait finalement que la partie visible de l'iceberg comme le démontra
Kingdom Hearts : Chain of Memories, l'épisode intermédiaire sur GameBoy Advance, dont la compréhension du synopsis est indispensable pour la suite. Après la fin du premier opus, l'équipe se rend dans l'Oblivion Castle où ils seront confrontés au véritable ennemi de la série, un groupuscule nommé Organisation
XIII plus ou moins séparé en deux groupes : les plus jeunes sont à la recherche de puissance, les autres servent à protéger l'organisation, mais tous deux ont un objectif commun : acquérir la force issue du
Kingdom Hearts. Durant cet épisode, sur les six membres de l'organisation présents, cinq meurent et seul celui que certains appellent l''arbitre' en réchappe. L'épisode se conclut par l'enfermement de Sora dans une fleur de sommeil afin que celui-ci retrouve sa mémoire presque effacée pendant que son ami Riku rejoint le roi Mickey sous les ordres d'un mystérieux Diz, afin de lutter contre les derniers membres ennemis.
Kingdom Hearts II peut désormais commencer.
Le principe de la série, en résumé, consiste à se rendre de monde en monde, pour la plupart issus d'un film Walt Disney, afin de sceller une ou plusieurs portes pour protéger l'endroit de l'ennemi. Bonne nouvelle, si le premier opus ne prenait pas vraiment de risque avec des mondes 'simples' comme Alice au pays des merveilles, la Petite Sirène ou Aladin, cette suite se révèle immédiatement plus audacieuse, surtout d'un point de vue background et technique, avec du Tron, Pirates des Caraïbes et même Steamboat Willie qui, pour les incultes, constitue la première apparition de Mickey dans un dessin animé. Et autant dire que la stupéfaction devant la perfection de cet environnement nous laisse collés au siège : son craquelé, animation
old school, design d'un autre temps... Un véritable bol d'air frais, aussi ironique que cela puisse paraître, qui ne dure malheureusement pas plus longtemps. Un défaut qui se répercute d'ailleurs dans la plupart des niveaux qui ne proposent pas assez de tableaux différents, des tableaux relativement étroits qui plus est. Point important, les développeurs ne se sont pas contentés de ces quelques nouveaux endroits et ont incorporé la plupart des anciens, entièrement refaits à neuf et jonchés de nouveaux décors, voire d'un nouveau
gameplay comme le Colisée d'Hercule qui ne se contente plus d'être une compilation de tournois, ou mieux, celui d'Atlantica qui est devenu un gros mini-jeu musical aussi amusant que reposant, surtout après un gros méchant boss.
Une pléthore de niveaux, c'est bien. Lorsqu'ils servent à quelque chose, c'est encore mieux, si si ! Vous l'aurez deviné,
Kingdom Hearts II reprend malheureusement l'un des plus gros défauts du premier opus : le fait de passer de monde en monde aveuglément, en résolvant simplement les petits problèmes des personnages secondaires, et en mettant en
stand-by le problème de l'Organisation
XIII. Si le début démarrait plutôt bien, les personnages ennemis récurrents (membres de l'organisation, Maleficia, Pat Hibulaire) disparaissent soudainement pour ne réapparaître que beaucoup plus tard et si l'on devait résumer la situation en quelques mots, on pourrait dire que les niveaux issus du premier
Kingdom Hearts ne servent finalement qu'à alourdir quelque peu le scénario, sans véritablement l'enrichir. C'est dommage, car si l'on s'amuse pleinement grâce à un
gameplay du tonnerre, nous n'aurions pas été contre un scénario principal bien plus mis en avant que les déboires d'Aladin ou de sieur Jack. Dommage.
Sans-Cerveau, mais beaucoup d'armes !
L'un des côtés critiquables du premier opus tenait dans son
level design hautement discutable comme celui d'Alice au pays des merveilles qui se résumait à résoudre des énigmes placées dans de minuscules décors, à l'instar de la pièce à gravité multiple ou les recherches d'indices ennuyeuses. Les développeurs n'ont pas cherché à résoudre ce fâcheux problème : ils l'ont purement et simplement éliminé. Oubliez les énigmes, les décors qui ne ressemblent à rien ou les recherches d'objets pour passer le temps. Scandale pour certains, aubaine pour les autres,
Kingdom Hearts s'est quasiment transformé en
beat'em all avec des mondes linéaires au possible (avec en prime la petite carte en haut à droite de l'écran qui indique la route à suivre) et des combats à outrance. Mais dieu que c'est bon ! Exit les prises de têtes, on s'engage dans des combats survitaminés avec des combos tous plus destructeurs les uns que les autres avec une mise en avant des combats aériens et des nouvelles possibilités en QTE qui, rappelons-le, consistent à appuyer rapidement sur le bouton affiché à l'écran pour enclencher une action. Présent sous deux formes, ce système est surtout réquisitionné pendant les combats, même simples, avec le bouton triangle et dont la nature change avec l'ennemi : l'actionner contre les nobodys blancs déclenchera une esquive, un tourbillon contre les insectes volants, une attaque aérienne multiple contre d'autres... A vous de choisir selon la situation. Mais là où la chose devient réellement impressionnante, c'est bien entendu lors des combats contre les boss où le système reprend trait pour trait celui de
Shenmue ou encore
Resident Evil 4. En somme, au cours du combat, une scène se déclenche et vous devrez littéralement interagir avec un ou plusieurs boutons s'affichant à l'écran pour retourner la situation à votre avantage, ou encore lancer votre attaque ultime. Tout simplement génial !
Au final, on est tellement pris dans notre bataille qu'on en vient à oublier les autres éléments du
gameplay et, là encore, un des défauts du premier opus ressurgit : après tout, pourquoi faire attention à nos magies offensives ou nos invocations lorsqu'on voit le manque d'efficacité de celles-ci, surtout face à deux bons coups de keyblades bien placés ? Résultat, niveau magie, on ne se préoccupe plus que du sort Soin. Notons d'ailleurs que l'IA de nos collègues est nettement plus aboutie et on a enfin l'impression d'avoir quelqu'un à nos côtés lors de dangereux combats. Bien entendu, il vous sera toujours possible de paramétrer leurs réactions, mais autant dire de suite que les placer en offensif avec une bonne maîtrise des magies suffit à se sortir de n'importe quelle situation, pour peu que votre niveau suive. On vous l'a dit,
Kingdom Hearts II, c'est du grand spectacle et le jeu peut très bien se finir d'une traite sans retour en arrière en un peu moins d'une trentaine d'heures.
Néanmoins, il est fort conseillé de s'attarder aux différents à cotés vu l'intérêt de ceux-ci et la récompense qui en découle, sans parler d'une fin cachée aussi incroyable que déroutante. Une des quêtes les plus importantes consiste à battre les différents records de l'ensemble des mini-jeux que comporte le soft. Le reste tient la plupart du temps dans les combats et le Level up obligatoire avec les différents tournois du Colisée, la recherche des costumes cachés, ainsi que celle des différentes Keyblades. Sans tout dévoiler, on évoquera la possibilité de fusionner avec un membre de l'équipe pour profiter d'une puissance d'attaque accrue et bien d'autres possibilités encore. L'occasion d'observer de superbes effets graphiques à l'écran, mais également de venir à bout d'adversaires un peu trop coriaces. Bien entendu, les transformations s'estompent au bout d'un certain temps et faire un peu trop souvent appel à cette technique vous donnera un résultat qui n'est pas sans rappeler une certaine scène du premier opus. Enfin, pour terminer, les boss secondaires sont présents et autant dire que votre niveau devra obligatoirement être très élevé pour espérer vous en débarrasser, auquel cas, même à un niveau 40, vous ne tiendrez pas plus de quatre secondes contre un certain combattant aux longs cheveux blancs armé d'un katana de plusieurs mètres. Vous voilà prévenus.