Pour ceux qui ne le sauraient pas, Altered Beast fait partie des titres phares made in Sega, ayant fait le succès retentissant de la première Master System et de la Megadrive en son temps. A l’époque, cela se déroulait sous la forme d’une quête mythologique, dans laquelle Zeus, le tout puissant et Athéna, la déesse de la guerre, accordaient au courageux héros ressuscité des capacités bestiales. En pur Beat Them All poussiéreux, le joueur disposait alors de deux attaques poings/pieds, étoffées par la possibilité de se transformer en diverses bêtes féroces et autres monstres antiques durant la partie. Une ingéniosité remarquable en ce temps, offrant un gameplay et un storyline des plus novateurs. Sega décide donc aujourd’hui, via sa filiale Sega Ages, de remettre ce soft au goût du jour sur la console de salon de Sony. Malheureusement nous savons par expérience qu’un remake à la sauce 3D pour un soft vieux de plus d’une quinzaine d’années n’est pas une mince affaire… Et l’on se retrouve ainsi, trop souvent, en face d’un nanar vidéoludique égalant rarement son aîné tout de sprites vêtu. Alors, cet Altered Beast version PlayStation 2 est-il l’exception qui confirmera la règle ? Réponse dans les lignes qui suivent.
Qui dit nouveau cru 2005, dit aussi scénario et mise en scène complètement retravaillés pour l’occasion. Ici, point de dieux grecs à satisfaire, nous sommes dans le 21ème siècle et les développeurs semblent être décidés à trouver une explication des plus rationnelles aux mutations génétiques dont souffrira le héros dans cet opus. Ce dernier, un agent des forces spéciales de l’armée, est envoyé en mission d’investigation dans une zone mise en quarantaine, car contaminée par des composés mutagènes mortels qu’il est le seul à ne pas craindre. En effet, ce guerrier d’un genre nouveau est équipé d’une nanotechnologie reliée au système nerveux lui permettant de muer, via une transformation moléculaire totale, en différentes sortes d’animaux plus hybrides que mythiques. Seulement voilà, lors de son transport au-delà du périmètre de sécurité militaire, le convoi aérien se voit attaqué et détruit, ne laissant qu’un étrange caisson en parfait état pour seul reste. Caisson dans lequel se trouvait notre héros, se réveillant paumé et amnésique, dans une forêt des plus hostiles. Au fil de l’aventure, notre vif gaillard se verra hanté par son passé, et finira par redécouvrir la ligne de démarcation entre les restrictions humaines et l’instinct primal qui sommeille en chacun de nous.
« Manimal » se manie mal…
Vu sous cet angle simplement scénaristique, le soft semble avoir plutôt bien réussi sa conversion futuriste. Mais autant le dire tout de suite, l’idéal pour
Sega aurait été que tout cela ne voit jamais le jour autrement que sur papier, tant la réalisation s’avère boiteuse, voire même désastreuse. Dans cette apologie des déboires du pauvre «
Altered Beast nouveau », arrive (dans le désordre) un
gameplay presque aussi développé que celui de son aîné d’il y a 15 ans, et en beaucoup plus irritable. Je m’explique : même si les développeurs ont essayé de nous placer un système de combos fonctionnant comme un petit RPG, il n’en résulte pas moins que c’est tout bonnement injouable. En effet, à partir du moment où les ennemis ne peuvent être
lockés dans un univers à la profondeur douteuse (pour cause d’une gestion de la caméra apocalyptique), où la garde semble être une option inconnue à la team de développement, et où la seule possibilité d’amener une offensive est d’attaquer à l’aveuglette une horde d’ennemis bêtement puissants, c’est une horreur (le pire restant tout de même la maniabilité irascible lors de vos transformations en Triton ou autre Griffon) ! Comme si ce n’était pas suffisant, votre alter ego polygonal répond souvent avec une seconde de retard par rapport à votre directive, et vous finirez bien vite par vous demander ce que vous faites là, énervé, les yeux exorbités, et les mimines crispées sur le pad après être mort plusieurs fois sous les coups de misérables chauve-souris ou de quelques stupides poules intouchables… Qu’on se le dise, les combos c’est bien beau, sauf quand c’est un coup d’épée dans l’eau.
On continue dans le meilleur du pire avec un rendu visuel en-dessous de toutes attentes. Altered Best, ce sont des protagonistes et un bestiaire grossièrement modélisés (doté d’un des
chara designs les plus pauvres et risibles du moment), des décors insipides ressemblant plus à des maquettes en carton pâte qu’autre chose, un
aliasing qui n’aura jamais été aussi présent dans un titre PlayStation 2, et le tout orchestré par une animation saccadée particulièrement lamentable lors des
cut-scenes du soft. Seul bon point cependant, les cinématiques sont de très bonne facture, et nous éblouissent par une violence visuelle extrême lors des mutations en Loup-garou, Triton, Vendigo ou autre Dragon. D’un point de vue sonore, n’attendez pas non plus de superbes thèmes estampillés d’une qualité acoustique Dolby Pro Logic II. Ici, on sent que
Sega tient à garder une petite touche « arcade » dans ses bruitages se révélant être simples et grossiers, tel un vulgaire copier/coller tout droit sorti d’une borne d’arcade des années 1990. Ils ne sont donc pas mauvais, mais tout simplement inadaptés à ce titre ressuscité dans l’esprit du nouveau millénaire.
C’était mieux avant
Vous l’aurez sans doute compris en parcourant ces quelques lignes,
Altered Beast sur PlayStation 2 est loin d’être un hit et c’est, sans honneur particulier, qu’il ira rejoindre un vieux
Prince of Persia 3D pour tomber dans les méandres des plus mauvaises adaptations contemporaines des jeux d’antan. Les mots sont forts et font mal, mais
Sega aurait eu plus d’aisance à acquérir un public en convertissant son titre en RPG novateur, quitte à utiliser des sprites haute définition à défaut d’utiliser des polygones. Mauvaise pioche donc pour
Sega, qui n’aurait jamais dû troubler le sommeil de la légende qu’était l’Altered Beast d’autrefois.