SHAAANKS **voix du Némésis**
Il n'est pas chose aisée de développer un Resident Evil, ça non. Jamais. Resident Evil premier du nom fut une longue aventure mouvementée menée par l'exigeant Shinji Mikami. L'équipe derrière Resident Evil 2 a payé les frais de gésine d'un second opus ambitieux mais terriblement épuisant à concevoir, toujours sous la coupe de l'intraitable patron des environs. Resident Evil 4 a lui aussi connu son lot improbable de reboot, de mésaventures et d’écueil, au point de donner vie à un projet secondaire connu sous le doux nom de Devil May Cry, avant de terminer sa course avec quatre années de retard. Hé bien vous savez quoi ? Resident Evil 3 et Code Veronica aussi, ont été des supplices à concevoir. Le succès grandissant de la franchise aidant, Capcom ne souhaite bien évidemment pas lâcher de si-tôt sa si généreuse source de profit. Comme on l'a évoqué dans le test du second épisode, la série s'essai au cross-media, précurseur et opportuniste. Des projets de films sont doucement, mais sûrement, en cours d'élaboration, des romans (plutôt sympathiques et chroniqués sur Gamekyo par Greil93) sont aussi dans le couscoussier à produits dérivés de Capcom. Suite à Resident Evil 2, pas moins de trois projets vidéoludiques, ceux qui nous intéressent principalement, sont mis en chantier.
Le premier, c'est Resident Evil Gaiden sur Playstation. C'est un épisode très mystérieux, anecdotique et qui devait se dérouler très à part de la chronologie originale. Ce projet sera encore plus vite annulé que ne le fut Resident Evil Dash courant 1996. Le second projet n'est autre que Resident Evil 3, où on y suivrait le mercenaire Hunk, déjà présenté dans le jeu précédent, cette troisième itération est pour ainsi dire aussi secondaire que Gaiden. Mais Yoshiki Okamoto (je le rappelle encore une fois : concepteur de Street Fighter II, son statut faisait qu'il avait un droit de regard et de veto sur pas mal de jeu en développement chez Capcom à la fin des années 90) avait négocié avec Sony la parution de tous les épisodes principaux canoniques de la saga sur leur Playstation en priorité. Si bien que la firme dirigée par Ken Kutaragi fait la fine bouche et préfère ne même pas s'intéresser à Resident Evil 3, tout du moins tant qu'il gardera cette forme.

Le troisième projet n'est autre que Code Veronica, annoncé en grande pompe en septembre 1998 à destination exclusive de la nouvelle machine surpuissante de SEGA, la Dreamcast. Les premiers screenshot nous montre le retour de Claire Redfield dans des environnements semble-t-il en 3D intégrale, contrastant nettement avec la 2D des opus Playstation. Aussi, elle se confronte à un immense adversaire humanoïde très semblable au fameux monsieur X de Resident Evil 2. En coulisse, c'est un bordel sans nom car Sony est mécontent de voir filer en dehors de son territoire un projet qui semble si ambitieux. En plus de ça, Shinji Mikami, encore et toujours lui, accompagné de son mauvais caractère légendaire, commence à se quereller avec les dirigeants de Sony Computer Entertainment. En cause : le contrat que Okamoto a signé sans que Mikami n'ai possibilité de donner son avis comme quoi les épisodes principaux de Resident Evil devaient sortir sur Playstation. Mais aussi les prémices du hardware Playstation 2 n'étant à priori pas au goûts de Mikami, celui-ci se serait vu claquer la porte au nez par les ingénieurs hardware de chez Playstation. Ceci aurait dès lors causé une petite scission entre les deux parties à tel point que selon certaines rumeurs, Sony aurait envoyé très en retard des kit de développement pour Playstation 2 à Capcom alors que d'autres équipes ''fidèles'' et ''dociles'' comme Namco et Squaresoft les avaient reçus très en avance.
Le nom de Resident Evil Gaiden sera finalement conservé pour produire un spin-off de la saga sur Gameboy Color, tandis que Capcom, histoire de faire bonne figure et de ne pas trop froisser son partenaire, Sony, décide de relancer Resident Evil 3 sur Playstation 2 en parallèle de Code Veronica. Mais Mikami ne sera pas dupe, il se montre acrimonieux envers ce Resident Evil 3 qu'il décrit plutôt comme un Resident Evil 1.9 tant le projet ne démontre aucune innovation ni aucun intérêt à la hauteur du reste des épisodes centraux de sa saga. Il propose même ce titre à la direction de Capcom qui refusera immédiatement, jugeant l'idée de le nommer 1.9 comme un suicide commercial. Pourtant, cette appellation trouvera un sens quand on sait que les événements de Resident Evil 3 se déroulent chronologiquement un peu avant, pendant, et un peu après Resident Evil 2 dans un entrelacement d'actions et de conséquences incroyables. Côté Code Veronica, le développement du jeu rencontre là aussi bien des soucis et il se murmure que Capcom préfère attendre que la Dreamcast atteigne un certain seuil de vente pour vraiment lancer le projet. Le contrat liant SEGA à Capcom n'étant pas des plus sûrs, il serait facile à Capcom de tout abandonner pour se tourner vers un partenaire aux reins plus solides, qui permettrait à Code Veronica de mieux se vendre... Le projet prendra alors un incommensurable retard et de mars 1999, sa date de sortie changera en un vague automne 1999 pour finalement échoué dans les rayons de magasin en février 2000.

Shinji Mikami s'exprime alors sur un problème de business qui le chagrine à l'époque. Pour lui, l'arrivée de nouvelles consoles de jeu n'est pas une priorité. Pire, il se sent prit à la gorge par les constructeurs qui mènent la danse et décident sans tenir compte des éditeurs de quand il faut passer à la génération suivante de hardware. Il pense qu'il serait dommage d'abandonner si vite la Playstation, alors que ses équipes commencent vraiment à maîtriser ses entrailles (Dino Crisis est en cours de développement à l'époque, et en terme de modélisation 3D, on fait difficilement mieux sur la PS1). Aussi, pour des problèmes de coûts, Mikami préfèrent vraiment continuer le développement sur Playstation car la technologie est désormais moins coûteuse et le risque de bide commercial modéré grâce à une console très bien installée dans le monde entier. Alors, Mikami décide de transférer le développement de RE3 de la PS2 vers la PS1, et tant pis si Sony n'est pas content. C'est une décision logique qui permet à Capcom de faire du bénéfice facilement et supporter les gros chantiers à venir. Même si en 1998, tout n'est pas encore très clair, cette décision sera importante car elle contribuera à apporter un petit capital supplémentaire bienvenue à Capcom qui lancera quelques années plus tard de très gros travaux: Onimusha, Devil May Cry, et bien entendu Resident Evil 4...
Hideki Kamiya est occupé sur le développement d'un autre Resident Evil que Mikami lui a confié quelques semaines après la sortie de Resident Evil 2. Son jeu, longtemps connu comme étant Resident Evil 4 s'éloignera beaucoup trop des conventions de la série mais cette fois-ci, Mikami ne le forcera pas à rentrer dans les rangs et l'oeuvre se verra tout simplement métamorphosée pour répondre aux attentes de son créateur. Devil May Cry verra le jour. Si bien que Mikami donne le rôle de réalisateur de Resident Evil 3 à Kazuhiro Aoyama. Homme d'expérience en tant que programmeur et planificateur (assistant de production, en résumé), l'homme comprend que pour mener son travail à bien, il ne convient pas de faire de vague et de chercher l'innovation ou le virage à 180° à tout prix. Son Resident Evil 3 sera une suite logique du second opus.
Le 28 septembre, Jill Valentine, restée aux Etats-Unis pour enquêter sur Umbrella tandis que ses anciens compagnons Chris Redfield et Barry Burton ont mis les voiles vers l'Europe, se fait une évidence. Raccoon City est perdue. Les événements du manoir vécus en juillet dernier sont encore traumatisants. L'explosion du centre de recherche souterrain n'aura pas suffit à endiguer la contamination des environs et désormais, des zombies ont envahis la cité. Fataliste et résignée, Jill déplore le manque de réaction des habitants de Raccoon City qui ont vu Umbrella Corporation prendre peu à peu le contrôle de tous les secteurs de la ville : médical et scientifique, industriel, et pire, politique. Même le service public ainsi que la police furent sous l'emprise tentaculaire et malhonnête de cette entreprise colossale, sordide et vorace. Elle a pourtant tenté d'éveiller les consciences, de raconter son histoire, mais personne ne l'a cru ni ne l'a écouté. Umbrella est même parvenu à les faire passer pour fous, elle et ses compagnons. Chris et Barry ont rapidement vu qu'il été inutile d'essayer d'attaquer Umbrella sous cet angle et on fuit les USA à temps. La veille avant l'arrivée de Leon et Claire en ville, Jill décide de battre en retraite, elle aussi, mais il est déjà trop tard. En une nuit, la propagation du virus T a atteint des proportions terrorisantes, des milliers de cadavres et de zombies jonchent les rues en flamme de Raccoon City. Qu'importe, elle est une survivante, une guerrière, elle a résisté au manoir, alors elle résistera à la ville. Lors de son périple pour fuir Raccoon City, Jill croise la route de Brad Vickers, le pilote d'hélicoptère de l'équipe Alpha des STARS, lui aussi ayant subit l'incident du manoir. Brad fuit également, il tente de la prévenir d'un danger plus grand encore que les zombies avant de se faire atrocement massacrer par un monstre gigantesque. Une horreur mouvante innommable, un titan tout de noir vêtu, doté d'une force surnaturelle, d'une tentacule visqueuse dont il se sert pour étrangler ses victimes et d'un instinct de chasse impitoyable. Cette créature, le danger dont parlait Brad, c'est le Némésis, une arme biologique née dans les laboratoires d'Umbrella et envoyée en ville pour exterminer les STARS restant afin qu'ils ne nuisent définitivement plus à la corporation... S'engage alors une course-poursuite cauchemardesque entre le monstre, invulnérable et infatigable et Jill qui va devoir tout donner pour sauver sa vie …

Comme nous l'avions vu dans le test de Residet Evil 2, la saga devient particulièrement hétéroclite dans ses embranchements scénaristiques et ses sous intrigues. Ainsi, les mercenaires à la soldes d'Umbrella sont toujours présents mais ne prennent plus la forme d'un Hunk, on y découvre alors de nouveaux personnages nommés Carlos et Nicholaï. Le jeune bleu un peu naïf qui croit avoir été largué en ville pour aider la populace à se défendre contre les zombies, et le chef d'escouade bourru, aux allures d'espion du KGB expert en torture et qui cache bien des secrets inavouables. La petite famille parfaite pour passer une nuit ou deux dans un véritable cauchemar, en somme. Le propos de Resident Evil 3, de par le rythme de son aventure et les décors traversé, se recentre plus sur le drame humain à une échelle plus intimiste. Exit les complots, les luttes entre scientifiques paranoïaques et multinationales malhonnêtes. Ici, il s'agit du désespoir d'une femme qui tente de fuir l'apocalypse à tout prix. Une véritable fuite en avant qui détermine le rythme du jeu, ponctué par les apparitions malfaisantes d'un Némésis implacable.
L'enjeu dramatique y est selon moi décuplé car il concerne un personnage qu'on connait déjà et il est vu à travers un prisme volontairement centré sur une toute petite galerie de protagonistes. Contrairement à Resident Evil 2 où on se pose un millier de question comme savoir qui a ourdi ce terrible complot, qui est responsable de la contamination, jusqu'où ira Umbrella, etc ; dans Resident Evil 3, on pense déjà connaître la réponse et tout ce qui nous reste à songer c'est de savoir comment fuir au plus vite. La notion de survie prend dès lors un sens inédit et puissant. Le sous-titre original du jeu ne s'y trompe d'ailleurs pas, The Last Espace comme on nomme RE3 au Japon souligne bien cet aspect de volonté de vivre à tout prix qui guide les actes de Jill.
Conçu dans l'urgence, Resident Evil 3 reprend des idées d'autres projets, notamment Code Veronica. Le Némésis en est le représentant le plus parlant, puisqu'il était censé être le monstre humanoïde qu'on voyait poursuivre Claire dans les premiers screenshot du jeu Dreamcast ; celui-ci étant lui-même une extension du Tyrant-103 de Resident Evil 2. Jill Valentine endosse dans ce Resident Evil un rôle particulièrement puissant. Si les femmes n'ont presque jamais été fantasmée et transformée en objet ou en faire-valoir dans les Resident Evil, il n'empêche que dans un milieu narratif et atmosphérique aussi spécial que celui d'une invasion de zombie, les femmes de Resident Evil n'ont pas forcément toujours eu le beau rôle. Rebecca Chambers, désavouée par Shinji Mikami himself car trop dépendante et soumise aux événements représente le cliché de la femme victime de qui il faut sans cesse aller à son secours. Ada Wong, si sa représentation reste modestement sexualisée, représente tout de même quant à elle le stéréotype complet de la James Bond girl : fatale, sexy et quoiqu'il arrive traître, ou à tout le monde indigne de confiance.

Jill Valentine, si elle est, elle aussi, peut-être involontairement hyper sexualisée (bah oui, ça doit pas être super pratique de fuir une ville en ruine en se battant contre des centaines de zombies tout en se baladant en mini-jupe et bustier moulant …) casse un peu les codes. À l'instar d'une Lara Croft, découverte en 1996 avec le premier Tomb Raider, Jill Valentine devient une femme forte, débrouillarde, guerrière, survivante. Autoritaire, elle ne se laisse pas guider par les événements, et encore moins lorsqu'elle est confrontée à un groupement d'hommes (les mercenaires d'Umbrella) où elle démontre notamment ses formidables capacités de survie et de combat. Son opposition avec un des plus terrible ennemi que la saga n'ai jamais possédé, en la présence du Némésis, hisse Jill comme une des figures les plus héroïques de Resident Evil. La Ellen Ripley du jeu vidéo gagne ainsi beaucoup plus en relief et en intérêt qu'une trop lisse Claire Redfield à mon goûts.
Si avec le recul, on se rend compte que Resident Evil 2 se concentre assez peu de temps sur le cataclysme qui s'abat sur la ville, car en fin de compte on passe 60% du jeu dans le commissariat et le reste dans divers autres décors, RE3 recentre l'action sur Raccoon City. Une grosse partie du jeu se vit dès lors dans les rues malfamées et souvent jonchées de cadavres, de mobilier urbain en ruine et de détritus. Le jeu troque définitivement son aspect isolationniste terrifiant et angoissant pour une action de plus en plus frénétique. La tension et l'adrénaline remplace la frayeur, à quelque exceptions près, salvatrice, comme quand le Némésis fait son apparition. Cela n'empêche pas Resident Evil 3 de bénéficier d'une ambiance de chaos impressionnante et admirablement bien retranscrite. Pour répondre à cette nouvelle ambition de jeu d'action, le gameplay n'en finit plus de s'assouplir. Si déjà dans RE2, la fluidité des mouvements était appréciable, on gagne là encore un surplus d'agilité avec une Jill dynamique. Le demi-tour express qu'on peut enclencher avec les gâchettes de la manette Playstation offre une solution de repli très efficace lorsqu'on juge mal la distance qui nous sépare d'un zombie. Aussi, l'esquive, qui se déclenche avec le bouton d'action lorsqu'un monstre comme les chien-zombie nous bondissent dessus, ajoute un côté John Woo à la mise en scène et une facilité de maniabilité plus que bienvenue.
Sans pour autant renier complètement ses origines, il est vraiment appréciable de voir comment Resident Evil 3 s'adapte et façonne son gameplay pour nous permettre d'affronter les nouveaux dangers de Raccoon City l'esprit serein. Tel une McGyver au féminin, adepte de la bricole, Jill peut également fabriquer ses propres munitions à l'aide d'un kit de confection et de petit pot à poudre trouvés ça et là. De trois types différents, les dites poudres serviront à fabriquer des balles 9mm pour pistolet, des cartouches de fusil et, le must, des bastos de magnum. Signe qui ne ment pas sur les intentions de Resident Evil 3 de s'orienter ostensiblement vers l'action : la découverte du fusil à pompe. Si dans les deux jeux précédents, il fallait attendre quelques temps afin de le trouver, après avoir explorer un peu le décors, ici, il est trouvable très très tôt dans l'aventure. Dans une des premières salles où il est de toute façon obligatoire de se rendre pour ramasser un objet clé. Impossible à rater, donc.

La visée est désormais semi-automatique. Dès lors que vous braquez votre arme, si un adversaire se trouve à proximité, Jill se tournera seule vers lui. Elle ne le suivra pas du bout du canon, mais ça aide pour placer un premier tir de défense et éviter de perdre une précieuse cartouche. Relâchez la touche de mise en joue, puis réappuyez dessus pour de nouveau verrouiller votre cible si jamais elle a bougé entre temps. Simple, efficace. Dernier détail traduisant les intentions de Resident Evil 3 : on peut emprunter les escaliers à la volée. Auparavant, il fallait appuyer sur la touche action comme s'il s'agissait d'une porte à ouvrir, désormais, on peut gravir un escaliers comme dans n'importe quel TPS comme Syphon Filter. Une avancée qui améliore encore la prise en main et qui sera d'ailleurs étrangement absente de Code Veronica, sorti pourtant an an plus tard. Maillon essentiel dans la grande évolution des Resident Evil et incubateur de la nouvelle direction adoptée par la licence, RE3 divise les fans. Mais objectivement, il n'en reste pas moins un excellent jeu d'action, certes presque dénué de toute sa substance d'épouvante, mais très maniable, très fun à jouer et très agréable.
Si Resident Evil 2 marquait un nette évolution graphique avec son prédécesseur, on peut dire que RE3 enfonce le clou. Le gap graphique entre le 2 et le 3 est probablement moins flagrant qu'entre le 1 et le 2, mais il est réel. Resident Evil 2 pose les bases, et Resident Evil 3 affine les angles. Littéralement, c'est le cas, d'ailleurs, puisqu'on remarque une modélisation polygonale des personnage plus précise, moins anguleuse. On arrive à ce qui se fait réellement de mieux sur Playstation, alors que la console de Sony frôle ses cinq années d'existence. Un jeu de lumière dynamique, timide mais qui a le mérite d'être présent est également à signaler, avec des effets de flammes déjà vu auparavant mais là encore d'une qualité supérieure. C'est surtout la finesse de la définition des décors en 3D précalculée (pour rappel la 2D qui compose les décors et qui simule un environnement 3D) qui est épatante. Dans RE2, nous étions déjà impressionné par le nombre de détails dans les décors, les objets en vrac, les ordures dans les rues salles de la ville, et autres éléments décoratifs ; mais dans certain écrans de RE3, c'est définitivement une avalanche d'ornement qui constitue les environnements. Moins flou, moins pixelisé, bénéficiant toujours d'un sens de la composition (colorimétrie, jeu d'ombre et de lumière...) remarquable et de position de caméra sensationnelle, les décors de Resident Evil 3 sont un réel plaisir à parcourir. Le commissariat déjà amplement visité dans le second jeu est ici de nouveau présent, mais on le parcours de façon beaucoup plus brève. En lieux et place, on découvre plusieurs autres quartiers de Raccoon City composés de parc public et de restaurant, un beffroi (toujours pour insuffler une dose d'architecture gothique si chère à la série), un hôpital ou encore une usine de traitement des déchets.
La variété des lieux découverts sert aux graphistes de Capcom a déroulé toute l'étendue de l'expertise acquise au fil des ans sur la saga. Le panel de couleur froide des environnements bétonnés de Resident Evil 2 cède du terrain face à des textures plus chaudes. Des boiseries et de la tapisseries offrent de la chaleur et l'apport dans le décorum du beffroi est d'une importance cruciale dans l'équilibre visuelle de l'aventure. La variation des volumes et des espaces est encore plus probantes que dans Resident Evil 2. Artistiquement et visuellement, Resident Evil 3 s'éloigne des branches scénaristiques à base de complot scientifico-industriel pour se rapprocher de ce qui faisait la sève de son inspiration cinématographique ( Dawn of the Dead, 1978 ) en transposant l'invasion zombie dans un cadre strictement urbain. Tout en renouant avec les bâtisses anciennes surchargées de meubles d'un autre âge, âtre chaleureux de l'horreur véritable, plus viscérale. La boucle est bouclée.
Resident Evil proposait d'instaurer la peur par un climat étouffant mêlant claustrophobie et isolement du personnage. Resident Evil 2 avait opté pour une peur basée sur la tension et sur la surabondance d'ennemi à l'écran, tout en proposant de nouveaux monstres inconnus et aux capacités de combat inquiétantes. Resident Evil 3 suggère à son tour sa vision de la peur. Le titre alterne comme il le peut entre phase de pur shoot boosté à l'adrénaline, lorsqu'on s'occupe de vider un plein chargeur de fusil d'assaut sur un attroupement de zombie ; et les séquences de réflexion plus calmes avec des énigmes, toujours pas très logiques ni incroyablement intelligentes, mais qui ont le mérite de proposer un défi d'une autre nature au joueur. Tout cela entrecoupé de pur moment d'angoisse à s'en faire péter les veines de panique.

Je veux bien entendu parler des apparitions, souvent surprises, toujours stressantes, du Némésis. Géniale création maléfique de cet opus, il est la caution qui garanti définitivement à ce Resident Evil 3 le droit d'être un jeu d'anthologie. La petite astuce issue de RE1 qui consistait à faire bondir des chiens zombies à travers les vitres d'un étroit couloir a disparu au profit de l'entrée en scène du Némésis, ô combien plus remarquable et plus déterminante pour le reste de l'aventure. Perpétuellement à la poursuite de Jill, tantôt armé de son énorme bazooka, tantôt non, il n'hésitera pas à enfoncer les portes et à éclater du revers du bras un zombie qui se mettrait sur son chemin (oui, je l'ai vu de mes propres yeux dégommer un zombie en lui filant un gros coup de poing dans la face, tout ça pour pouvoir me poursuivre, dantesque...). Il n'a aucune pitié, ni pour les monstres qui lui ressemble, ni pour sa proie. Et se contenter de changer d'écran ne sera parfois pas suffisant puisqu'il est abominablement plus évolué qu'un zombie lambda, et saura ouvrir les portes pour vous courir après !
Doté d'une capacité monstrueuse de résistance à vos attaques (même en mode facile, lors de votre premier combat avec lui, il vous faudra au minimum une douzaine de cartouche de fusil à bout portant pour le mettre au sol... avant qu'il ne se relève quelques secondes plus tard ! ), ce formidable adversaire au vocabulaire aussi limitée que le sont vos moyens défense contre lui symbolise la peur à la sauce Resident Evil 3. Les simples effets de surprises et l'escalade de la tension pendant une fusillade avec des zombie côtoient une véritable explosion de peur panique. D'autant que le Némésis ne se contente pas d'être un gilet pare-balle ambulant et un monstre visuellement horrible, il est aussi une source de frayeur à entendre.
Son grondement bestial et inhumain – il se contente de grogner, de hurler et de répéter ''STAAARS'' d'une voix particulièrement lugubre et roque – s'allie à un bruit de pas lourd et lent, quand celui-ci ne se met pas à sprinter incroyablement vite vers vous. Et même lorsqu'il n'est pas sur le même écran que vous, apparaissant quelques mètres derrière, ou à l'encablure d'un angle de caméra, vous l'entendez. Votre sang se glace dans vos veines, et pour le peu que vous vous rendez compter qu'il vous barre la seule porte de sortie possible, le stress augmente de plus bel. Une innovation majeure accompagne l'essentiel des apparitions scriptées du Némésis. Il vous sera donné le choix entre deux actions. Souvent, l'une est plus sûre que l'autre, et ce sera la fuite ou l'esquive. La seconde option, l'opposition directe sera extrêmement téméraire mais le jeu saura vous récompenser si vous parvenez à affronter le colosse (pièce d'équipement pour améliorer votre arme, munitions bonus, ouverture d'un chemin caché...). Concrètement, ces alternatives servent à offrir quelques embranchements de parcours à l'aventure et vous permettront dans certains cas d'explorer quelques décors inédits sans cela inaccessibles.
Tout cela assemblé donne un rythme assurément plus dense que l'accoutumé à ce RE3, mais promet un intérêt de la découvert qui ne décroit en aucun cas. L'exploration de décors aussi variés, les apparitions légendaires du Némésis, savamment entrecoupées de scène de pur héroïsme et de séquences de réflexion aussi simples qu'efficaces donne à ce RE3 un caractère unique. On se voit happé par une curiosité maladive et difficile à contenir. À croire qu'on adore se faire peur et se retrouver à 120 de pulsation cardiaque...
Musiques discordantes, puissantes partitions à base de trompettes sinistres accompagnant le colossal Némésis et divers bruitages horrifiques donne du cœur à la bande-son. RE3 ne déroge pas à la règle instaurée par son prédécesseur et abandonne un peu les nappes de fonds simplistes et répétitives pour proposer des compositions plus travaillées, plus orchestrales et plus hollywoodiennes. Notamment pour accompagner les scènes cinématiques en image de synthèse du plus bel effet, les élans de bravoure à la Hans Zimmer (un petit compositeur de cinéma qui se faisait tout juste connaître en 1999, rien de grave

) se marient à la perfection avec des thèmes plus traditionnels. La version RE3 de la salle de sauvegarde, véritable monument de la saga, est ici particulièrement bien travaillée. Au son nettement plus affiné qu'auparavant, enrichissant sa composition de plusieurs subtilités sonores et d'une harmonie du plus bel effet, elle représente à elle seule l'état de minutie et de richesse qui est celui de l'OST du jeu. Les râles de zombie, qu'ils soient directs ou très lointains, drapant les ruelles de Raccoon City d'un sentiment funeste de tombeau à ciel ouvert ; la marche accablante du Némésis, les décharges de feu des fusils et autres lance-grenades, tout respire la puissance, la frayeur ou le malsain.

Resident Evil 3 sort en septembre 1999 au Japon, et en février de l'année suivante en Europe. C'est, sans surprise, un énorme succès. Tant commercial que critique, même si à l'époque, peut-être encore plus qu'aujourd'hui, les fans se montraient particulièrement divisés. En cause, l'orientation manifeste de la série vers l'action. Qu'importe, le jeu se vend à 3,5 millions d'exemplaires dans le monde, ce qui, pour un jeu ne présentant au final qu'assez peu de renouveau dans son gameplay et sa représentation graphique, demeure un excellent score. Prompt a renflouer les caisses de Capcom, celui qui devait au départ n'être qu'un spin-off avant le plat principal Code Veronica se hisse finalement au sommet de la série, aux côté de ses illustres prédécesseurs. Il n'a absolument pas à rougir face à Resident Evil 2 qui peut pourtant se targuer d'une scénarisation plus décisive pour l'avenir de la série. Élevé au rang d'incontournable notamment grâce à son méchant en gabardine de cuir noir, Resident Evil 3 poursuit l'amorce du virage entamé par RE2. Monnayant sa frayeur intime et possessive pour un rythme trépidant et une succession de scène choc plus soutenue, il est clair que RE3 renonce plus ou moins ardemment à l'ambiance morbide du premier jeu au profit d'un caractère qui lui est propre. Mais définitivement, si RE3 devient dès lors un survival-horror qui n’effraie plus tant que cela et qui met la survie au second plan, il n'en demeure pas moins un époustouflant jeu d'action. Graphiquement explosif, aux décors variés et soignés, à la bande-son solide, au gameplay amélioré sur tout les plans, d'une durée de vie convenable et surtout présentant un personnage principal fort et charismatique, Resident Evil 3 n'est à n'en point douter un très bon jeu vidéo.
Confidences sur l'oreiller de ce gros sac de Kottick
Dx: mais tellement quoi... :/
C'est quand même moins scripté je trouve, après n'oublie pas.
On te montre une petite partie du jeu qui est impressionnant mais je suis sûr que en général le jeu n'est pas si scripte(on va pas donner un extrait de 10 minutes avec un type qui zigouille du chinois dans une ruelle sans rien d'impressionnant, sa fait pas vendre et c'est assez déroutant pour une présentation d'un jeu)..
Au moins tu l'avoue tu troll, parce que 17 minutes c'est dur de jugez un jeu.
Le point positif est peut-être qu'il n'y a pas eu de QTE pendant ce passage !! (voir peut-être pendant tout le jeu).
Et pourtant je n'apprecie pas ces jeux
mis a part ca ta bien raison mec