Ce test est une mise à jour de notre test import effectué le 12 août 2004 par Grégory Schmitt.
Nous pensions à une trilogie, jusqu'à ce que Konami annonce officiellement ce nouvel opus : Silent Hill 4 : The Room, quatrième volet de la série Silent Hill. Les très bonnes ventes de Silent Hill 3 ont poussé les développeurs à continuer encore et encore, et cela pour notre plus grand plaisir. En espérant qu’ils ne finiront pas par tomber dans les griffes de la machine marketing… Lorsque l'on connaît le talent de la Silent Team, dirigée par Akira Yamaoka le compositeur de génie, on se dit qu'un Silent Hill ne sera jamais mauvais. Mais après trois volets tous excellents, on commence à se demander s'ils ne seront pas à court d'idées à un moment ou à un autre. C'est pour cette raison que les développeurs ont décidé de bouleverser l'ordre habituel, en nous proposant un jeu qui se déroule dans une seule pièce...
La chambre, ouverture sur l’Enfer
Afin d’entamer ce test comme il se doit, il est nécessaire de rédiger un petit paragraphe consacré à The Room, la chambre dont il est question dans
Silent Hill 4. Comme vous pouvez vous en douter, cette pièce, la chambre 302, dans laquelle Henry Townshend est coincé depuis cinq jours, constituera le centre de tous vos déplacements dans le jeu. Sans pour autant vous dévoiler une partie du scénario -ce qui serait particulièrement regrettable au vu de sa qualité-, il faut tout de même savoir que cette chambre sera en quelque sorte votre
Home Sweet Home, car vous y retournerez fréquemment pour regagner de l’énergie, et surtout pour y sauvegarder votre partie, car le seul point de sauvegarde disponible dans le jeu se trouve dans votre salon. Autant dire que les allers et retours seront assez nombreux entre les différents lieux et la chambre. Comme je vous le disais, notre cher Henry est totalement prisonnier dans sa chambre, toutes les issues étant bloquées (porte cadenassée de l’intérieur, fenêtres condamnées), et les voisins ne pouvant entendre ses cris de détresse répétés. Eileen Galvin, la voisine résidant à la chambre 303, et le concierge de l’immeuble, en arrivent à se demander si Henry n’a pas disparu. C’est après quelques hallucinations de monstres sortant des murs de la chambre, complètement repeints de la couleur sang, que le cauchemar du héros prend fin, et que le jeu commence. Un bruit venant de la salle de bain se fait entendre, et c’est alors que l’on découvre un énorme trou dans le mur, dans lequel on est plus ou moins forcé de s’infiltrer, ne serait-ce que pour voir la suite de l’aventure… C’est ainsi que l’histoire débute, d’une manière bien différente de ce à quoi la Silent Team nous avait habitués jusqu’alors, ce qui n’est pas pour nous déplaire.
Dans la lignée des Silent Hill
En ce qui concerne l’aspect technique, cet épisode se situe dans la continuité de la série, et ce sur à peu près tous les plans. Tout d’abord, graphiquement, c’est du très bon niveau.
Konami avait déjà fait ses preuves dans ce domaine, mais une fois encore, c’est impeccable : modélisation des personnages et des ennemis photo-réaliste, décors glauques à souhait, textures détaillées et variées, filtre granuleux qui accentue l’ambiance, effets lumineux convaincants, etc… Etonnamment, ce
Silent Hill 4 alterne plus qu’à l’accoutumée entre décors intérieurs sombres et environnements extérieurs plus clairs. Cela dit, l’ambiance ne s’en trouve aucunement pénalisée, puisque les chiens assoiffés de chair fraîche, les fantômes qui ne meurent jamais ou encore les monstres à deux têtes auront vite fait de vous rappeler où vous vous trouvez. Au niveau des animations, on peut encore une fois leur reprocher une certaine rigidité, notamment dans la course du héros ou lorsqu’il frappe les ennemis. La maniabilité quant à elle est plutôt bonne, malgré quelques caméras pas toujours parfaites (à défaut d’être parfaites, elles contribuent à vous foutre les jetons…) et une certaine lourdeur dans les mouvements, due aux animations un poil rigides. Toutefois, une manette s’impose ici, puisque jouer au clavier et à la souris risque fortement de rapidement vous agacer. Venons-en au dernier aspect incontournable concernant la technique, la bande-son. Que serait un
Silent Hill sans son compositeur fétiche Akira Yamaoka ? Pour ce quatrième volet, on sent que les compositions du maître sont parfaitement maîtrisées, et l’expérience acquise à travers les trois premiers jeux se ressent énormément, tellement l’ambiance sonore et les musiques sont en harmonie totale avec l’atmosphère du jeu : hurlements, bruitages glauques, cris d’effroi et autres sons venus de nulle part, jamais cette symphonie n’avait été aussi belle. Je ne vous parle même pas des quelques thèmes chantés par Mary Elizabeth McGlynn, qui se laissent écouter et réécouter à l’infini tant ils sont magnifiques.
De nouvelles idées…
The Room marque un véritable tournant dans la série, car les développeurs ont opté pour des choix nouveaux dans le
gameplay et la progression. Evidemment, ces choix ont une répercussion, et nous allons tout d’abord passer en revue les nouveautés positives avant d’attaquer le dernier paragraphe, rempli de critiques qu’on aurait aimé ne pas avoir à formuler… Parmi les nouveautés, on compte la vue à la première personne dans la chambre du héros. Cette vue, même si elle n’apporte pas grand chose puisqu’on ne peut que regarder autour de soi et interagir avec quelques objets, contribue à renforcer le sentiment de claustrophobie et d’emprisonnement, et l’on se retrouve à effectuer toujours les mêmes actions (regards par la porte, par le mur, par la fenêtre principalement) pour voir ce qui se passe à l’extérieur de ce noyau hermétique qu’est cette chambre. Pour rester dans la chambre, on peut aussi parler du coffre à objets qui s’y trouve. Il vous est possible de déposer vos objets dans le coffre afin de ne pas être surchargé, car il faut savoir que votre inventaire –accessible directement via la touche carré- est limité à dix places. Il faudra donc garder sur vous uniquement le strict nécessaire afin de ne pas avoir d’inutiles allers-retours à faire jusqu’à votre chambre (d’autant que dans la deuxième partie du jeu, les allers-retours seront suffisamment nombreux comme ça). Ce qui est regrettable, c’est qu’un petit objet (balles de pistolet) prendra autant de place dans l’inventaire qu’un gros (hache). A ce propos, il sera possible de concentrer son énergie en plein combat afin de décocher un coup puissant, ce qui aura pour effet d’anéantir les ennemis plus rapidement. Le dernier changement notable est la présence d’une barre de vie. En effet, adieu la jauge de vie approximative aux couleurs qui changent en fonction de l’état de santé, et place à une barre de santé on ne peut plus classique. Celle-ci s’affiche à l’écran lorsque vous êtes en combat, mais il est aussi possible de la laisser à l’écran pendant tout le jeu en modifiant une option dans le menu.
…qui comblent un manque d’inspiration flagrant
Silent Hill 4 : The Room est basé sur une progression très linéaire, puisque vous traverserez plusieurs « mondes », l’un après l’autre, en suivant un chemin à peu près défini. Sans vous en dévoiler trop, il faut savoir que cette division en mondes est très nette, d’autant plus qu’un événement important se produira à chaque fin de « niveau ». La durée de vie du jeu est d’une dizaine d’heures pour la première partie, ce qui est tout à fait convenable cette fois-ci –rappelez-vous que les critiques concernant la faible durée de vie de
Silent Hill 3 avaient été vives au sein des joueurs, c’est pourquoi les développeurs ont tenu à faire un jeu plus long. Et c’est là que le bât blesse. En effet, les développeurs ont doublé la durée de vie du jeu d’une manière totalement grotesque. Toute la deuxième partie du jeu consistera à retraverser tous les endroits du jeu une seconde fois. Si ce n’était que ça, ça ne serait pas un mal, mais malheureusement, plusieurs éléments font de cette seconde partie un calvaire indescriptible : non seulement vous devrez vous coltiner un personnage qui vous suivra partout, bêtement, comme le faisait Maria dans
Silent Hill 2, un boulet qui vous gênera plus qu’autre chose. Mais en plus de cela, il ne vous faudra faire que des allers-retours stupides du style : je vais chercher une clé à l’autre bout, je reviens pour ouvrir le coffre, je gagne une autre clé pour ouvrir une porte encore une fois à l’autre bout, etc… Bref, on peut sans hésiter parler de durée de vie artificielle, et le mot est faible. J’aurais encore préféré ne jouer que cinq heures et me souvenir de
Silent Hill 4 comme d’un nouveau souvenir inoubliable, trop court certes, mais d’une intensité supérieure à tout ce qui se fait dans l’horreur. Malheureusement, cette deuxième partie me reste en travers de la gorge.
Et ce n’est pas tout. Les mauvais choix de
gameplay ne s’arrêtent pas là : les énigmes, qui étaient l’un des points forts des premiers
Silent Hill, sont à présent réduites à de simples puzzles très simples que même un enfant pourrait résoudre. D’autre part, certains types d’ennemis sont particulièrement gênants (les fantômes indestructibles), puisqu’il est impossible de les anéantir définitivement même s’il existe des moyens pour les tuer provisoirement. Ils vous enlèvent de la vie dès que vous passez à proximité d’eux, ce qui vous oblige à traverser les salles en se ruant vers la porte très souvent. Ce sont des ennemis, donc ils sont faits pour gêner, me direz-vous. Oui, mais lorsque trois ou quatre fantômes se trouvent dans chaque pièce, et qu’on doit les traverser plusieurs fois, ça en devient vraiment agaçant, à tel point que le plaisir de jeu en prend un sacré coup. Pour conclure ce test en quelques mots, il faut bien avoir à l’esprit que
Silent Hill 4 se découpe clairement en deux parties distinctes : d’un côté la première, vraiment superbe, où l’on retrouve les sensations et l’atmosphère propre à la série, et de l’autre la deuxième, durant laquelle on s’ennuie car tout est mal étudié pour que le joueur reste scotché à l’ambiance. Ce qui sauve les meubles, c’est encore une fois le scénario d’une efficacité incroyable. Si l’on continue à jouer dans la deuxième partie, c’est uniquement pour voir les scènes et connaître la fin de l’histoire. Vous l’aurez compris, pour la première fois, un énorme sentiment de frustration émane d’un épisode de
Silent Hill.