Si certains éditeurs se contentent de proposer de simples portages, Konami décide de bousculer les bases de sa série phare pour offrir à la PSP un soft de stratégie tactique basé sur l’univers Metal Gear. Dépaysement garanti.
Après un
Metal Gear Solid 3 : Snake Eater élogieux à bien des égards,
Konami décide dans la foulée d’adapter l’une de ses séries phares sur la petite portable de
Sony. Attention, ici point de remake, mais bel et bien un épisode foncièrement inédit et totalement novateur puisque l’infiltration temps réel cède sa place à un déplacement au tour par tour, basé sur un système de cartes à jouer.
Konami prend donc un risque considérable en chamboulant un gameplay solide, et en orientant sa série vers des horizons plus tactiques et moins spectaculaires, mais tout aussi prenants. Pour la deuxième fois de sa carrière, Snake s’infiltre sur console portable et le résultat reste au final plutôt mitigé. Explications.
Y a-t-il un pilote dans l’avion ?
2016. Le vol 326 vient d’être victime d’une attaque au Bromide, paralysant ainsi l’équipage tout comme 326 passagers de l’avion, dont le Sénateur Hach, aspirant à la présidence des États-Unis. Le pirate responsable du détournement exige que le mystérieux projet Pythagoras lui soit immédiatement remis sous peine d’exécution des otages. C’est sur l’île de Lobito, dirigée par le terroriste Leone qu’est dépêché l’agent Solid Snake par la CIA. Sa mission : découvrir les mystérieuses activités des laboratoires de l’île et bien sûr prendre connaissance de qui est responsable du détournement du vol 326.
Les bases sont posées, l’aventure peut alors débuter. On remarque immédiatement qu’outre le fait d’être décliné en jeu de stratégie au tour par tour, ce nouvel opus de
Metal Gear propose une approche différente, autant au niveau du scénario que de son esthétique assez singulière, bien que proche de
Metal Gear Solid 2 : Sons of Liberty pour ses teintes grisâtres assez froides. A cela une simple explication, la présence aux commandes de Hinami Masahiro en lieu et place du charismatique et non moins génial Hidéo Kojima. De plus, la quasi absence de
cut scenes dignes de ce nom (et point fort des différents opus console), couplée à une petite faiblesse scénaristique indéniable provoque une sensation de lourdeur dans la narration, et peut parfois pousser le joueur à zapper les longues phases de dialogue, au risque de perdre de précieuses informations. Un comble dans une série où l’on savoure généralement la moindre seconde de cinématique. De plus, la capacité de stockage d’un UMD étant évidemment inférieure à celle d’un DVD, les dialogues ne sont pas parlés, mais tout simplement écrits, et illustrés par des images terriblement fixes. Toutefois, croire que le scénario de ce
Metal Gear Acid est d’un ennui mortel serait faux, d’autant plus que celui-ci propose son lot de rebondissements au fil de l’aventure (quitte à embrouiller parfois le joueur) en mêlant dédoublement de personnalité, pouvoir psychiques, paranormal et enjeux politiques.
Quelque part entre Yu-Gi-Oh et Final Fantasy Tactics
En ce qui concerne le
gameplay, il est évident que les fans qui s’attendaient à une jouabilité nerveuse seront plus que déçus car
Metal Gear Acid utilise un système de tour par tour basé sur des cartes à jouer. Un croisement entre
Yu-Gi-Oh et
Final Fantasy Tactics Advance en quelque sorte. N’y voyez pas là un quelconque reproche, bien au contraire ! En effet, passée une première demie heure assez déroutante il faut l’admettre, ce
gameplay dévoile finalement une multitude de possibilités, qui s’affineront au fur et à mesure que vous récupérez des cartes dans le jeu. Ces cartes vous permettront évidemment d’effectuer des actions, mais également de vous déplacer sur l’aire de jeu. Quelques heures seront nécessaires avant de maîtriser ce système complexe et pouvoir enfin tuer (ou au contraire contourner les ennemis) en toute quiétude. Il vous faudra de la patience et de la persévérance pour parvenir à récupérer les 200 cartes disséminées dans le jeu, d’autant plus que certaines se font très très rares.
Les fans seront ravis d’apprendre que les cartes sont bien évidemment à l’effigie de la saga
Metal Gear, du premier au troisième opus, en passant par les épisodes plus anciens. Classées en divers packs, les cartes sont répertoriées selon leur utilisation. Ainsi, les cartes Personnages vous permettront de jouir des capacités spéciales de certains comme Ocelot, Naomi Hunter ou encore Sniper Wolf, viennent ensuite les cartes Objets, Armes (PSG1, Socom, Famas…) et Equipement (gilet pare balles, armes de riposte…). L’ordre des tours est pour sa part établi en fonction du Coût des cartes, les plus puissantes possédant évidemment des Coûts plus élevés. Chaque tour vous permettra d’utiliser deux actions, vous devrez alors gérer les six cartes qui se présenteront à vous et décider de vous déplacer pour vous mettre à couvert, ou bien d’opérer un déplacement tactique derrière l’adversaire pour essayer d’en venir à bout avec une rafale de Famas. Comme dans tout bon jeu de stratégie tactique, votre emplacement aura une incidence sur la portée et la puissance de vos attaques comme sur votre résistance aux attaques ennemies. Ainsi, une attaque de dos aura davantage de chances de toucher l’ennemi et d’infliger plus de dégâts qu’une attaque de face.
Les cartes sont acquises directement sur le champ de bataille par le biais de Pack (Pack Chronicle, MGS1, MGS2 ou MGS3, celui-ci propose notamment des cartes d’action CQC), mais il est également possible de les acheter à l’écran d’intermission par le biais des points qui vous seront attribués en fin de mission selon votre taux de réussite. C’est également dans ce même écran d’intermission que vous pourrez sauvegarder et organiser votre deck à votre guise. A vous donc de privilégier la force brute ou au contraire la discrétion. Le nombre de cartes embarquées dans votre deck augmentera au fur et à mesure de votre progression dans le jeu. Malheureusement, si construire son deck est capital dans l’accomplissement d’une mission, il est vraiment dommage de constater que l’ordre des cartes distribuées sur le champ de bataille est totalement aléatoire. Ainsi, il arrivera fréquemment de devoir passer son tour plusieurs fois de suite avant d’obtenir enfin la carte désirée. Malgré son orientation tactique, n’allez toutefois pas croire que l’action est absente dans
Metal Gear Acid, en effet, chaque utilisation de carte donnera lieu à une scène assez dynamique dans laquelle Snake passera à l’action en usant de son Famas pour déloger un ennemi, ou encore en posant du C4 sur un mur affaibli, voire même se cacher dans l’une des fameuses boîtes en carton pour passer inaperçu.
Techniquement réussi
D’un point de vue technique, les décors proposés dans ce
Metal Gear Acid sont assez similaires à ceux présents dans les deux premiers opus, à savoir des teintes grisâtres dans des environnements clos la plupart du temps. La liberté offerte par
Metal Gear Solid 3 : Snake Eater est ici à oublier. Toutefois, force est de constater que malgré leur froideur, les environnements proposés sont d’une incroyable beauté. Les personnages sont superbement modélisés et parfaitement animés. Les explosions sont quant à elles terriblement impressionnantes. Mais cette superbe a un prix et ainsi, les environnements trop chargés donneront lieu à d’effroyables ralentissements, assez rares dans l’ensemble, mais assez impressionnants pour être signalés. Certains environnements à l’architecture complexe poseront également quelques soucis de visibilité, et ce, bien qu’il soit possible à tout moment de changer l’angle de vue avec les touches L et R ou bien encore de varier la focale avec le stick analogique. De plus, il arrivera parfois que certains ennemis vous mitraillent à travers un mur, et tactique oblige, vous ne pourrez vous mouvoir et devrez donc encaisser une rafale de balles des plus injustes. Le déroulement des missions est également totalement chamboulé, ainsi vous choisirez à chaque fois votre mission dans le menu, et devrez inlassablement suivre le chemin préétabli pour parvenir à vos fins. Si l’ensemble n’est pas des plus insurmontables, la difficulté se corse brutalement dès lors que vous vous êtes fait repérer ; les gardes se multiplient alors et gagnent en férocité, rendant la tâche incroyablement plus ardue. La durée de vie est honorable (et grandement aidée par cette difficulté exacerbée) et atteint aisément les 20 heures de jeu. Si vous êtes du genre à collectionner les cartes, vous pouvez aisément doubler ce temps de jeu.
Malgré un scénario moyennement accrocheur, qui tend même un peu à s’embourber vers la fin,
Metal Gear Acid propose une expérience de jeu intéressante et inédite (notamment des phases durant lesquelles vous devrez évoluer en duo avec Teliko), des séquences mémorables (le combat final est tout simplement dantesque) et les fans de la série pourront y trouver leur compte, notamment grâce à la présence (sous forme de cartes) de tous les héros (et anti-héros) de la saga. Graphiquement envoutant, le soft de
Konami pêche toutefois par quelques lourdeurs, quelques bugs plus ou moins gênants, un côté aléatoire dans la distribution des cartes plutôt frustrant, des angles de vue parfois injouables et des ralentissements notoires par endroits. Des défauts de jeunesse que l’on espère donc voir disparaître dans sa suite qui s’annonce sous les meilleurs auspices.