
David Gaider revient sur la chute de Bioware
Membre historique de Bioware (de 1999 à 2016), le scénariste principal David Gaider a accordé une longue interview à GamesRadar où l'on retiendra notamment son départ précipité lié à une totale mésentente avec la politique d'Electronic Arts, choix qu'il continue d'assumer pleinement.
L'homme revient d'abord sur son arrivée dans le studio à la fin des années 90, un véritable âge d'or, et son énorme travail apporté sur Baldur's Gate 2 où il fut décrit par ses collègues comme « une machine » pour son talent narratif et sa vitesse d'écriture : « C'était du D&D, ma spécialité. […] Honnêtement, je crois que j'ai écrit la moitié de BG2 moi-même. »
Seulement, la gloire ne fait pas tout et Gaider reconnaît que la boîte naviguait financièrement à vue et surtout que les périodes de crunch intense étaient trop routinières… et habituelles : « Cela faisait partie du travail, personne à l'époque pensait que l'on pouvait remettre cela en question. On travaillait jusqu'à ce que tout soit terminé, et c'était comme ça. » Il fallait donc un mécène et Electronic Arts tombait à point nommé, intéressé par une branche purement RPG et Bioware pensait pouvoir continuer de faire ce qu'ils voulaient vu leur aura grandissante, à tort : selon Gaiden, les co-fondateurs Greg Zeschuk et Ray Muzyka avaient l'intention (un peu audacieuse) de faire « changer Electronic Arts » mais c'était l'équivalent « du serpent qui veut manger l'éléphant ».
Et si au départ les choses se sont passés très correctement, d'où Dragon Age Origins, les modifications d'organigramme chez EA et de nouveaux responsables ont fait que « soudainement, tout a changé ». L'éditeur s'est mis en tête que les fans de RPG étaient l'équivalent de « nerds dans une grotte » qui seraient séduits quelle que soit la proposition, et qu'il fallait donc en profiter pour attirer simultanément « le public en dehors de la grotte ». D'où le début des tentatives multi dans Dragon Age et Mass Effect, d'où le surplus d'action dans ces deux derniers dès l'épisode 2, et le départ des deux cofondateurs, résignés… avant que tout n'empire encore davantage.
Pour EA, les mécaniques RPG étaient devenues trop « lentes et lourdes » et il fallait des « présentations pleine d'action », faisant fi des rapports à contre-sens de Gaider qui « n'étaient souvent pas bien accueillis ». Les chantiers Anthem et la version d'origine de Dragon Age 4 (un GAAS rappelons-le) fut la goutte de trop pour le scénariste qui a fait à son tour ses valises, et aucune promotion surprise n'aurait pu changer quelque chose : « Même s'il y avait eu un monde alternatif où l'on m'aurait proposé le contrat de directeur créatif pour un Dragon Age en GAAS, à moi ‘Mr. Vieilles Mécaniques du RPG', ça aurait été pour moi le contrat du diable. »
Quelques années plus tard et malgré une tentative de retour au purement solo pour Dragon Age, mais des qualités narratives sans commune mesure par rapport à la grande époque, Bioware semble avoir tout perdu : son aura, ses principaux talents, et même ses ressources financières vu les derniers retours de Jason Schreier & co, l'équipe évoluant en nombre très réduit pour tenter de proposer quelque chose de suffisamment valable pour le prochain Mass Effect. Bon courage.
publié le 25/05/2025 à 11:29 par
Gamekyo