Il aura fallu attendre une vingtaine de mois depuis sa sortie japonaise pour voir arriver le nouveau cru du tactical-RPG. Une attente proprement injustifiée face à l'absence de quelconque traduction. A croire que les fans du genre se doivent d'être anglophones.
Le genre T-RPG, pourtant incroyablement affluant au pays du soleil levant, n'en est encore qu'à ses balbutiements chez nous et nombreux sont ceux ayant pu découvrir les bases du système via le très controversé
Final Fantasy Tactics Advance. Un peu faible lorsqu'on compare la qualité de ce dernier avec son grand frère sorti sur Psone ou l'incroyable Bahamut
Lagoon sur Snes. Heureusement, notre culture semble s'étoffer avec le temps notamment grâce au soutien de
Nippon Ichi Software (Disgaea, Makai Kingdom…) et d'éditeurs un peu plus courageux que par le passé.
Atlus fait partie de ceux-ci, malgré le flop qu'a pu subir leur titre sur sa terre natale. Le casting était pourtant de haut niveau avec Ryô Mizuno (Chroniques de la guerre de Lodoss) au scénario, Shigeki Soejima (Persona) au
chara-design et Hitoshi Sakimoto pour l'OST, un petit gars ayant « seulement » œuvré pour des titres comme
Vagrant Story,
Radiant Silvergun ou
Final Fantasy XII. Comment expliquer alors le misérable score dans les charts ? Un trop-plein de classicisme peut-être ?
Le brouillard, c'est le mal
En paix apparente, le continent de Solum est sur le point d'être anéanti à jamais par un cataclysme mortel : le miasme, un brouillard maudit tuant quiconque s'y aventure. Face à cet ennemi invincible, le peuple a rapidement cédé à la folie avant de se réfugier dans les bras d'un groupuscule religieux nommé Aeque, qui prône la paix intérieure en prêchant que la mort n'est qu'une étape et qu'il vaut mieux l'attendre paisiblement plutôt que de la fuir sans cesse (et inutilement). Seulement, face à ce désespoir masqué, le seigneur Dignus prend possession des terres de ce monde en assouvissant ce peuple devenu décadent à ses yeux tout en tentant de trouver le moyen de faire reculer le brouillard. Vous incarnez Spero, un jeune combattant au service de l'empire depuis que son maître a été contraint d'offrir ses talents d'alchimiste à ses derniers. Indéfiniment, vous vous devez de parcourir le monde pour chasser des sortes d'esprits et d'en aspirer l'essence qui servira d'énergie pour les expériences contre le miasme. Un destin qui changera de route lorsque le héros décidera de tourner le dos à l'empire en constatant la perfidie de ses généraux et surtout en apprenant par un mystérieux shaman qu'il existe un moyen moins cruel que l'annihilation des « pauvres » esprits pour sauver le monde.
La progression via la carte du monde (un fait habituel dans le T-RPG) se fait de la plus simple manière qui soit et il vous suffit de suivre le « chemin » pour déclencher à chaque nouvelle case son lot de combats et de scènes permettant de faire avancer le scénario, ainsi que l'obtention des personnages obligatoires dans l'aventure. Car si au début, votre équipe n'est constituée que de trois mercenaires (dont vous), le groupe s'agrandira rapidement avec l'arrivée de nouvelles recrues comme la shaman Linea ou le prince Avis, tous deux souhaitant également mettre fin à l'empire. Un mot sur les différentes scènes qui manquent vraiment d'intensité, comme les cinématiques à la patte graphique cel-shadée (à l'instar de
Rogue Galaxy, en moins bien) ou les phases de blabla avec artworks fixes et uniques pour chaque personnage (hormis un petit détail comme les yeux ou la bouche). Rajoutons à cela un
chara-design certes soigné, mais faussement charismatique avec des personnages aux poses ultras caricaturales au point d'en friser le ridicule. Heureusement, les dialogues sont de qualité et on parvient à accrocher sans mal malgré la banalité certaine du synopsis.
Le plaisir éphémère
Pas ou peu d'objectifs secondaires dans les différents affrontements auxquels vous prendrez part puisqu'il vous suffira d'éliminer tous les assaillants pour passer à la mission suivante. Une fois vos personnages placés à un endroit précis du champ de bataille (souvent côte à côte et avec un maximum de six combattants), vous constaterez que, contrairement à beaucoup de ses collègues du même genre, chaque clan (héros comme ennemis) ne disposera plus d'un tour prédéfini où chacun des membres de ce même clan frappera avant de subir les attaques du camp adverse. Exit donc le principe « base-ball », place à un système proche de
Final Fantasy X dans l'âme, comme au niveau visuel, avec une barre des personnages située en haut de l'écran qui indique l'ordre d'attaque de l'ensemble des combattants, jugé en fonction de leur rapidité. Lorsque le tour d'un des vôtres est arrivé, il vous faudra calculer efficacement vos mouvements et attaques en fonction de vos AP, revenant aux nombres de 100 à chaque tour : un déplacement d'une case, selon la surface, peut en user 20 d'un coup, tout comme une puissante attaque peut la vider complètement. Si vous terminez votre tour la jauge usée, vous devrez attendre le tour de chacun des personnages des deux clans avant d'y retoucher alors que si vous stoppez vos actions avec encore 40 AP en poche, vous reprendrez le contrôle dudit combattant bien plus rapidement. Au départ laborieux, ce système se révélera fort efficace une fois pris en main.
RPG oblige, même si variante il y a, le gain d'expérience est bien entendu d'actualité et sera jaugé en fonction de la situation. Par exemple, un ennemi de niveau 6 rapportera plus d'expérience si vous le frappez avec un personnage de niveau 4 qu'avec un personnage de niveau 7. Principe également à prendre en compte : chaque action rapporte de l'expérience, même si cette dernière est mineure. Une attaque simple, un achèvement d'ennemi, se lancer une potion sur soi-même, guérir un allié du poison… Il est d'ailleurs conseillé de ne jamais rester les bras ballants au bout d'un terrain en attendant que le dernier monstre soit tué et mieux vaut, si l'occasion s'y prête, se lancer un sort de soin (même avec les HP au top) histoire de ne pas perdre son temps. Tous les cent points d'expérience, votre personnage gagnera un niveau et progressera dans ses statistiques. Le plus intéressant reste qu'à chacune des actions citées plus haut, vous gagnerez des SP. Mais qu'est-ce donc ? Tout simplement des points que vous pourrez échanger hors combats pour, au choix, augmenter de nouveau vos statistiques ou acheter de nouvelles attaques, qu'elles soient physiques (choc, éclair, soin, etc.) ou mentales (anti-dark, regain de MP, etc.)… Assurément plus puissantes, les attaques combinées se révéleront déterminantes lors des combats contre les boss et consistent à placer judicieusement 2 ou 3 personnages pour lancer un combo dévastateur. Enfin, après de nombreuses heures, il vous sera possible, une fois un certain niveau atteint et les bons objets en poche, de faire évoluer la classe de vos personnages.
Oui mais voilà, atteindre un aussi bon niveau demande du temps et la quête principale est loin de suffire à remplir cette tache vu que, de toute manière, vous ferez rapidement face à une trop grande difficulté qui mettra votre équipe au tapis. Dénué de combat aléatoire, le seul moyen de faire un peu de level-up sera de faire un petit tour dans les catacombes prévues à cet effet. Ce sont donc 100 étages que vous aurez à descendre (les monstres étant au même niveau que l'étage où ils se trouvent) en retenant que tous ne sont pas accessibles dès le début et qu'il vous faudra avancer un peu avant d'avoir accès à la totalité de ce donjon. L'ennui vient que ce passage est obligatoire au vu de la difficulté de la quête principale (le boss concluant le premier chapitre est d'ailleurs une véritable plaie qui vous demandera plus de 40 minutes si votre niveau n'est pas satisfaisant) et que chaque étage est absolument identique d'un point de vue esthétique : seuls les ennemis et leurs emplacements changent. En prenant en compte qu'il vous faudra recommencer plusieurs fois un même étage pour être sûr de ne pas voir son équipe éviscérée au prochain, la lassitude pointe rapidement le bout de son nez. Certes, entre-deux, rien ne vous empêche de vous détendre un peu à la guilde pour faire quelques missions secondaires (très proche de
Final Fantasy Tactics Advance et assurément le meilleur moyen de recruter du beau monde) ou de tenter d'user de l'alchimie pour avoir de nouvelles armes, mais rien n'y fait, au bout de quelques heures, on commence à s'ennuyer ferme et au moindre échec, la perspective de repasser par les catacombes nous fait éteindre la console pour ne la rallumer que beaucoup plus tard. Aïe.