Il était inconcevable de vous présenter le dernier rejeton de Sega sans l'avoir exploré de fond en comble. Chronique d'un chef d'œuvre.
Après la chute de l'empire
Sega et son orientation exclusive vers le software, on ne peut pas dire que la firme au hérisson bleu ait laissé une marque indélébile pour la génération de consoles 128 bits. Pourtant, venue des studios japonais de la firme, une grosse production sort son nez en cette rentrée et nous amène dans le monde mystérieux d'une des plus grandes organisations criminelles mondiales : les Yakuzas. Généralement issus des classes les plus pauvres, les Yakuzas sont des exclus de la société, qui, par dépit, s'organisaient en bande afin de survivre dans un japon médiéval des plus durs pour les petites gens. Certes, nous sommes bien loin de ces temps reculés et notre héros, Kazuma Kiryu, inspire toute la crainte d'un grand
Yakuza du vingtième siècle.
Get the F**k outta here!!
Vous incarnez donc Kazuma Kiryu, le Dragon de la famille Dojima. Un être craint par toutes les petites frappes du quartier Kamurocho, quartier le plus chaud de Tokyo inspiré des rues les plus malfamées de Shinjuku et autres coupe-gorges tokyoïtes. Malheureusement, un fait inattendu va venir chambouler le cours de votre vie et vous serez condamné à purger une peine de prison de 10 ans, pour un crime que vous n'avez pas commis. Le crime en question n'est pas mince. Afin de protéger votre meilleur ami, vous êtes accusé d'avoir tué votre propre Oyabun ! En gros, imaginez que Luca Brasi assassine Don Vito Corleone et vous aurez vite compris que même 10 ans plus tard, les rancunes ne vont pas être des plus légères. D'autant plus que votre but premier est de retrouver la trace des amis que vous aviez protégés : Yumi et Nishiki. Bien qu'au premier abord l'on pourrait croire à un pauvre scénario basique de jeux vidéo,
Yakuza est à des milliers de kilomètres d'un scénario tenant sur un ticket de métro ! En effet, avec une durée de vie dépassant la vingtaine d'heures en comptant les missions supplémentaires,
Yakuza vous transcendera littéralement dans un synopsis complet et bourré de rebondissements dignes des plus grands films de Yakusa, comme Anika Mon Frère, de Takeshi Kitano. Certes, tout cela repose sur une ambiance sombre qui, si vous n'aimez pas l'univers japonais et les films d'action au vocabulaire digne d'un Tarantino, vous passera littéralement au dessus.
On regrettera seulement que niveau ambiance sonore, les dialogues ne soient pas restés en japonais. Pour la France, nous avons toutefois droit à un doublage américain d'excellente facture. Pour ainsi dire,
Yakuza peut se targuer d'avoir l'un des meilleurs doublages videoludique jamais entendus, loin devant un Metal Gear Solid par exemple. Pour réaliser de tels doublages, Mark Hamill (Luke Skywalker !), Michael Madsen (Reservoir Dogs, Kill Bill…) et autres célébrités se sont investies dans le développement du jeu, afin de lui conférer cette ambiance si particulière. Bref, un vrai langage cru digne de
Scarface. Simplement, on a du mal à imaginer un américain s'excuser à plate couture à genoux devant son boss, la culture nipponne étant en effet très présente dans ce jeu.
Sega aurait peut-être dû opter pour les voix originales afin de coller davantage à l'ambiance.
I see…
Yakuza est donc un savant mélange de genres, à savoir une pincée de jeu d'aventure agrémenté de
leveling, tout en satisfaisant les moins cérébraux d'entre nous en leur proposant un bon beat‘em all sorti tout droit du savoir-faire de maître
Sega. En effet, beaucoup comparent
Yakuza à
Shenmue. Autant faire tomber le suspense tout de suite, nous n'avons pas un nouveau Shenmue, mais plutôt une copie relativement réussie dans un style plus libre, sans pour autant lorgner du côté de
GTA. La ville est relativement grande, et l'on ne s'y déplacera bien souvent qu'à pied. Cependant, jamais une ville ne fut autant animée : restaurants, pubs, strip-clubs, casinos, supermarchés et j'en passe feront que le quartier vous paraîtra bien réel. Côté esthétique, la ville regorge de lumière et bien que la majorité des citadins se ressemblent, ceux-ci sont plutôt bien modélisés. On atteindra la prouesse technique surtout au niveau des personnages importants du jeu, leur charisme, ainsi que leur visage, ayant été tout particulièrement soignés. Du grand art, tel un certain Shemue à sa sortie. Côté combat, bon nombre d'entre vous verront un clin d'œil à Streets of Rage, paru sur MegaDrive il y a maintenant 15 ans. Pas moins de 300 armes pourront vous aider à vous défaire de vils yakusas et autres loulous de la rue. Bon nombre de coups spéciaux seront aussi à débloquer afin de vous extirper des rixes les plus mortelles.
Cependant, le jeu est loin d'être exempt de défaut, ainsi le
gameplay pêche inexorablement par un système de lock totalement inexistant. Du coup, lorsque vous effectuez un combo, si votre adversaire évite vos coups, voilà notre héros parti pour un combo dans le vide, ce qui est fort désagréable puisque s'en suivra quasi inévitablement une attaque dans le dos. Rageant ! De plus, bien que doté d'un scénario très riche,
Yakuza souffre par certain moment du syndrome du « je t'envoie au nord pour te dire que ça se passe au sud et en fait non, c'est à l'est ». Bref, rien de bien méchant, mais tout de même un poil énervant si l'on veut avancer rapidement. Pour faire simple,
Yakuza est une sacrée surprise, un peu d'air frais avant l'avènement des consoles nouvelle génération. On prend vraiment plaisir à suivre ce scénario pour adultes, réalisé par des mains de maître, celles de maître
Sega.