Faute de Project CARS, c'est The Crew qui vient achever la trilogie des jeux de caisses de cette fin d'année 2014. Un coup d'essai attendu, mais au résultat très mitigé.
On aura beau reprocher ce que l'on veut à
Ubisoft, surtout ces derniers temps d'ailleurs, mais des trois plus gros éditeurs au niveau mondial (avec
Activision et
Electronic Arts), la firme reste celle qui tend le plus à vouloir proposer de nouvelles licences, en plus de ces habituels acquis. Ainsi, après
Child of Light,
Soldats Inconnus et
Watch Dogs, voici donc à présent
The Crew, jeu de caisse souhaitant plus que jamais se reposer sur le mixe open-world et communauté, le tout à la sauce « Fast & Furious » pour profiter de la pause d'EA sur sa licence
Need for Speed. Un dernier point qui se ressent d'entrée par la présence d'un scénario qui décidément prouve que les auteurs n'ont strictement plus la moindre idée à apposer dès que l'on parle de bagnoles : vous jouez Alex (un hipster, pour suivre la mode) qui après avoir vu son frère se faire assassiner sous ses yeux va se faire accuser à tord et écoper d'un séjour gratuit de cinq ans derrière les barreaux. A sa sortie, le barbu est contacté par le FBI pour intégrer en douce un certain gang qui, coup de bol, aime les grosses cylindrées. Ultra original... Mais ça a au moins le mérite d'être bien mis en scène grâce à des cinématiques plutôt correctes.
Premier pilier tant vanté par l'éditeur : le monde ouvert est gigantesque. Première fois qu'un jeu de courses va aussi loin dans la folie des grandeurs avec plusieurs grandes villes US sur la route et la foire à l'off-road entre deux pour plaire à tous. Du haut niveau, mais qui se paye au prix fort sur certains aspects. Sans le budget d'un GTA ni le même temps alloué, les développeurs ont dû se contenter de la moyenne sur l'aspect « vivant » de l'ensemble. Il y a certes quelques PNJ, mais aussi présents que dans une bourgade après un éventuel apocalypse et qui ont d'ailleurs le don de nous esquiver comme dans
Driver. Le premier. La météo dynamique répond aux abonnés absents et il faudra faire avec un moteur physique loin d'être toujours parfait (galérer à monter sur un pauvre rebord mais pouvoir défoncer toutes les barrières du monde en off-road...) et une IA globale de la circulation (elle suffisamment présente) qui prouve qu'en 2014, certains conducteurs gérés par l'ordinateur n'ont toujours pas bossé leur code de la route pour savoir qu'on ne s'intègre jamais comme un bourrin dans la voie de circulation d'un autre (vous donc).
C'est dommage car le terrain de jeu se montre travaillé et les villes ressemblent... à des villes, avec les endroits spécifiques et le sentiment de ne pas rouler entre de simples bâtiments posés au hasard. Il y a du travail mais le concept de
The Crew ouvre un débat : fallait-il réellement offrir un terrain de jeu d'une telle ampleur et qui fondamentalement ne sert dans sa liberté totale que pour une poignée de missions spécifiques ou aurait-il mieux fallu découpé le jeu en zones distinctes et ainsi permettre au moteur de souffler un peu, tout en offrant aux développeurs davantage de moyens pour travailler sur chaque endroit ? Chacun jugera mais dans les faits, outre les problèmes évoqués plus haut, il faut quand même avoué que le titre est tout sauf beau. Jusqu'à dire moche s'il n'était pas sauvé par quelques effets sympas. Pour le reste, c'est textures moyennes, clipping et aliasing qui est là pour nous rappeler les grands moments de la old-gen. U final, l'aspect open-world servira à jouer, mais ne motivera aucunement à visiter.
Bon quid du jeu ? Bon contrairement à
Forza Horizon 2 et
DriveClub qui s'appuyait chacun sur le mixe à la mode entre Arcade et Simulation,
The Crew lui ne cherche pas à tortiller des fesses d'un coté à l'autre : c'est de l'arcade brut. Dès les premières minutes, la prise en main ne pose aucun problème et on fonce sans sourcilier à contresens en esquivant à gogo pour taper le freinage bourrin à la dernière minute afin de tourner tranquillo avant d'enchaîner à coup de boost. C'est plaisant, ça le devient encore plus par la suite avec de meilleurs bolides, mais ça manque clairement de profondeur pour l'adepte qui risque de s'ennuyer un peu contrairement à ceux qui cherchaient enfin de quoi user le bitume sans se prendre la tête. Les équipes ont fait un choix qui comme toujours dans ce milieu divisera le public, d'autant quand le système de progression cherche surtout à récompenser le « gros joueur » plutôt que le « meilleur joueur ».
Comme chacun le sait,
The Crew se lance dans la voie du MMO. Mais forcément dénué de stratégie dans un concept arcade qui s'attarde sur les capacités de chacun, le jeu ne peut alors offrir d'équilibre censé sur la longueur. Dans
World of Warcraft, ne cherchez pas à démonter un adversaire de niveau 70 si vous êtes niveau 2 armé uniquement d'un slip. Tout le monde sait ça, et dans
The Crew, c'est exactement la même chose vu que la puissance de chacun est dû à son level. Si vous jouez peu et par petites tranches, vous allez cravacher des semaines pour devenir un dieu. Si vous jouez beaucoup, l'expérience tombera, l'argent aussi, et vous pourrez (relativement) vite vous doter de bien meilleures bagnoles armées de perks en tout genre pour filer à plus de 300km/h, perks qui serviront en passant à augmenter le niveau de votre voiture, sachant qu'elle pourra avec le temps dépasser le niveau 1000. Même chose en passant avec l'expérience propre au conducteur qui à force lui permettra d'acheter de nouvelles capacités, certaines plus utiles que d'autres, les plus intéressantes restant celles qui vous offriront des gains bonus d'xp et d'argent à chaque victoire. Évidemment, époque « New Gen » oblige, si vous êtes casuals mais bourgeois, rien ne vous empêchera de sortir votre carte bleue pour acheter des « Crew Points » afin de vous équiper plus rapidement et sans effort.
Ce concept de la course à l'expérience s'applique évidemment en solo où il n'y a aucune utilité à affronter des adversaires trop balaises qui vont vous larguer dans le rétro sans que vous ne puissiez rien faire. Pour que les épreuves deviennent donc accessibles, il faudra en quelque sorte « farmer » de l'expérience en retentant certaines épreuves pour obtenir la médaille d'or et faire tout un tas de trucs annexes : épreuve de vitesse brut, esquive, saut, devoir suivre un tracé précis... Tout cela pour grimper en puissance, ce qui aidera autant pour avancer que face aux adversaires réels. Car si le titre peut-être majoritairement pratiqué en solo de manière assez routinière (même s'il y a une tonne de choses à faire), le multi est directement intégré au jeu, ce qui est somme toute logique avec une connexion obligatoire dans tous les cas. Cœur du jeu, le « crew » consistera donc à créer sa petite team pour que chacun puisse la rejoindre à loisir avec augmentation de chacun dans les rangs et un unique boss qui va gérer l'essentiel. Plusieurs bénéfices à cela, avec tout d'abord la possibilité de lancer n'importe quelle mission du jeu à plusieurs, sachant que si n'importe lequel d'entre vous termine premier, l'épreuve est considérée comme gagnée.
Le plus intéressant reste évidemment l'affrontement entre deux crews, où les développeurs ont eu la bonne idée de placer un système qui met le niveau de chacun à la même échelle afin de laisser « enfin » parler le skill. Une bonne chose couplée au fait d'avoir droit à de belles récompenses qui aideront à progresser rapidement, en rajoutant des missions de longue haleine pour les pilotes qui n'ont pas de gosses qui risquent de les déranger lors d'un raid de 3 heures. C'est uniquement pour cela que le titre parviendra à maintenir quelques joueurs durant un certain temps, surtout avec l'arrivée de nouveaux contenus (gratuit et payant) comme souvent dans ce type de projet et pour ceux qui souhaitent progresser dans leur coin, c'est tout à fait possible en lançant automatiquement une recherche d'allié au départ d'une course. C'est loin d'être aussi sympa mais l'option a le mérite d'être là mais dans trous les cas, difficile de ressentir le concept MMO avec aussi peu de vrais joueurs dans les alentours de la map. Preuve encore que les développeurs n'ont pas su (ou pas pu) aller jusqu'au bout de leurs intentions.
Les plus | Les moins |
+ Un terrain de jeu énorme
+ Contenu très élevé
+ Personnalisation et atelier bien foutus
+ Arcade jusqu'au bout des ongles
+ Le système de Crew efficace... | - … Mais très classique
- Mode histoire d'une banalité...
- Manque cruellement de vie
- Le skill totalement en retrait
- Pas de rétroviseur
- Connexion obligatoire en solo
- C'est quand même assez moche
- Peu de joueurs dans une session |
Conclusion : The Crew n'est pas un mauvais jeu mais tout simplement un titre qui trouvera un public limité, et pas forcément chez l'élite. Aucunement même. Car en plus de miser totalement sur l'arcade, ce qui limite évidemment le feeling sur la longueur, le titre se repose trop sur les codes d'un MMO qui fonctionnent aussi bien dans un RPG que moyennement dans un jeu de caisses. Ceux qui n'aiment pas se prendre la tête et préfèrent le grind au skill y trouveront probablement leur compte, bien aidé par un système de personnalisation vraiment poussée autant dans les capacités des véhicules que le coté bling bling. Le contenu est là, de même que la promesse de nouvelles choses à venir, mais pour les autres qui préfèrent mériter à chaque fois la victoire, mieux vaut privilégier un Forza Horizon 2, bien plus carré dans son approche.