Jacques Chirac risque des auditions, voire des poursuites judiciaires dans plusieurs dossiers, à partir de samedi à minuit, quand l'immunité dont il a bénéficié pendant douze ans à l'Elysée arrivera à son terme légal.
L'ancien chef de l'Etat a engagé l'avocat Jean Veil pour défendre ses intérêts. Quelques arguments de procédure pourraient le préserver dans certains dossiers, mais pas dans les principaux, qui concernent ses fonctions de maire de Paris, de 1977 à 1995.
Jacques Chirac, qui est âgé de 74 ans, n'a trouvé aucune personnalité de la majorité de son successeur Nicolas Sarkozy pour dire publiquement qu'il devrait être épargné ou ménagé.
Il a un statut quand il est président de la République, quand il n'est plus président de la République il est un citoyen comme les autres. Je pense que c'est l'application des textes, de la loi, a déclaré le 21 mai Alain Juppé, un de ses anciens fidèles, lui-même déclaré inéligible pour un an en 2004 dans une des affaires de la mairie de Paris.
Paradoxalement, c'est la candidate socialiste Ségolène Royal, en mars dernier, qui a demandé que l'ex-locataire de l'Elysée soit ménagé.
Je ne suis pas quelqu'un, par nature, qui ait envie de s'acharner. Je pense que le respect pour la fonction présidentielle aurait mérité un certain délai, avait-elle dit.
Nicolas Sarkozy a démenti durant la campagne une information de presse qui lui prêtait l'intention de faire adopter durant l'été une amnistie déguisée pour Jacques Chirac, par le biais d'un point final mis au dossier où les faits sont vieux de plus de dix ans. Le Canard enchaîné assure cette semaine qu'un autre texte similaire est en préparation au Sénat.
PLUSIEURS JUGES D'INSTRUCTION
Ces rumeurs laissent penser que les magistrats voudront agir vite concernant l'ancien président, mais aucune information officielle n'est disponible. Les dossiers sont aux mains de juges d'instruction indépendants par leur statut, qui ne sont pas tenus d'informer les procureurs de leurs intentions.
Mercredi, le parquet de Paris a démenti l'existence d'une convocation de Jacques Chirac comme témoin pour lundi dans le dossier visant les faux listings de la société financière Clearstream, procédure annoncée par le Canard enchaîné.
L'hypothèse d'une audition reste ouverte dans ce dossier qui concerne une éventuelle machination contre Nicolas Sarkozy, dont le nom figurait sur les faux listings de comptes bancaires.
Cependant, des juristes, soutenus par le parquet de Paris, estiment dans cette affaire qu'on ne peut légalement interroger le président sur des faits liés à sa fonction de chef de l'Etat, car l'article 67 de la Constitution stipule qu'il n'en est responsable que devant la Haute cour de justice ou les juridictions internationales.
La deuxième affaire la plus pressante pour Jacques Chirac est une instruction menée à Paris sur des emplois de complaisance payés sur fonds publics à son cabinet de l'Hôtel de ville de Paris, quand il était maire, dans les années 80 et 90.
Ce dossier, qui est aux mains de la magistrate parisienne Xavière Simeoni, semble devoir sortir intact d'une bataille de procédure qui dure depuis 2003. Mardi dernier, le parquet de la Cour de cassation a requis le rejet des dernières demandes d'annulation pour vices de forme. L'arrêt de la plus haute juridiction française sera rendu le 26 juin.
Enfin, une autre affaire d'emplois fictifs à la mairie de Paris, ouverte spécifiquement depuis 2002 sur Jacques Chirac, est instruite à Nanterre par le juge Alain Philibeaux et devrait déboucher sur une audition ou une mise en examen.
En avril, juste avant l'élection présidentielle, un nouveau procureur Philippe Courroye, a été installé dans cette juridiction.
Dans son discours d'installation, il a fustigé les dossiers relatifs à des faits trop anciens. L'archéologie judiciaire ne répond pas aux attentes de nos concitoyens et participe au discrédit de la justice, a-t-il dit.
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