Crimson Dragon

Le retour de Yukio Futatsugi aux commandes d'un rail shooter à dos de dragon a de quoi réjouir les anciens fans de la Saturn, surtout quand il s'entoure d'une partie de son ancienne équipe : la légendaire Team Andromeda. Après une gestation plutôt difficile et un passage de la 360 à la One, Crimson Dragon, anciennement Project Draco, est enfin sorti. Alors nouveau chef d’œuvre du maître ou pétard mouillé ?

La première chose à comprendre pour pouvoir apprécier Crimson Dragon à sa juste valeur, c'est que ce n'est pas Panzer Dragoon. Les 2 jeux ont beau se rapprocher sur bien des aspects (design, ambiance, scénario, musique, ...), ils sont pourtant très différends dans le gameplay. Alors bien sur, il s'agit d'un rail shooter, mais à la manière d'un Rez, Rogue Squadron, Starfox ou encore Child of Eden, Crimson Dragon dispose de sa propre identité et façon d'être abordé, ce que visiblement beaucoup n'ont pas compris.

Commençons par le départ : l'histoire. Crimson Dragon se déroule sur la planète Draco, ainsi nommée car peuplée de dragons. Les humains s'y sont installés en tant que colonie il y a plusieurs siècles et font donc désormais partie du paysage. En dehors de quelques créatures peu accueillantes, les humains ont du faire face à une maladie ravageuse : les écailles rouges. Pas de remède trouvé à ce jour, toute personne ou bête infectée se trouve dans un état d'agressivité accru puis finit par mourir. Seules quelques personnes sont immunisées contre cette maladie et y survivent. C'est ainsi qu'ils développent un don avec les dragons, et sont choisis pour devenir dragonniers, ces « pilotes » entrent en osmose avec leur monture. Vous incarnez donc un jeune dragonnier qui, lors d'une mission d'essai, va se retrouver face à un dragon légendaire disparu depuis plus de 10 ans, dragon supposé être à l'origine des écailles rouge. C'est ici que votre périple va commencer.

Passé cette intermède historique, nous pouvons attaquer le jeu en lui même. Dès les menus, on reconnais la patte de Manabu Kusunoki niveau design, avec une approche mixant son travail sur les Panzer Dragoon et Cry on (RPG Xbox 360 de Mistwalker qui fut annulé). Les menus sont clairs, et on sent d'entrée de jeu que Crimson Dragon ne va pas se limiter au simple shoot. Un petit tour nous permet en effet de voir que la gestion va être la première nouveauté. Achats de dragons, d'items, nourrir ses dragons, les faire évoluer, transformer, … Tout cela ne se fera plus par simple évolution (level) comme dans les anciens Panzer, mais plus par des choix que l'on va faire en dehors des combats. Ce sera à vous de trouver ou acheter les attaques des dragons, de les en équiper, de les nourrir pour les faire monter … tout cela apporte une dimension RPG plus qu'agréable en plus d'un peu de variété permettant d'éviter d'enchaîner bêtement les missions. Et ça ne s'arrête pas là.

Revenons sur les dragons, la base du gameplay pour s'en sortir repose sur les 3 éléments du jeu : le feu, l'air, et la lumière. Chacun de ces éléments possède ses aptitudes et capacités : le feu est plus puissant que le vent, lui même plus puissant que la lumière, elle même plus puissante que le feu. Si au départ ces propriétés n'ont que peu d'intérêt, vous allez vite vous rendre compte que pour réussir les missions correctement (vois les réussir tout court) il va falloir y faire très attention. Il en va de même pour les attaques. Si certaines « magies » sont propres à chaque dragon, il faut savoir que la plupart peuvent être apprises à n'importe laquelle de nos charmantes créatures. Ainsi un dragon de feu pourra se voir équipé d'une magie de vent ou de lumière. Et c'est là que l'aspect tactique prend son importance. En effet certaines missions plus corsées vont vous demander des capacités particulières. A chaque début de mission on vous indique la nature des ennemis principaux, et donc à vous d'adapter votre dragon en fonction. Seulement, pour les missions donnant des ennemis de différentes nature, on peut vite se retrouver à avoir le dessus sur certains et se faire laminer par d'autres, d'où l'intérêt d'avoir quelques attaques d'élément opposé à celui du dragon pour pallier à la variété d'éléments en mission.
Il existe cependant une 4ème catégorie élémentaire : le néant. Celle-ci à pour propriété de n'être affectée par aucune des 3 autres, et de ne pas les affecter non plus. Le néant est neutre, ce qui peut également avoir son intérêt.
Petite précision, chacun des dragons peut subir une transformation lui permettant de changer d'élément. Il y en a 6 de base dans le jeu, plus un offert si l'on achète le jeu dans le mois de sa sortie. Il y en a 2 pour chaque élément et le dernier est du néant.

Autre aspect important du titre, le leveling. Chacun des dragons va évoluer à chaque niveau passé. Arrivé au niveau 10, votre monture se verra affublée d'une évolution de son attaque principale, ainsi que de la possibilité d'être transformée. Ces transformations portent autant sur l'aspect physique que des capacités.

Autre possibilité que l'on retrouve dans les menus : les partenaires (qui ne seront accessibles qu'après quelques missions). Encore une fois, on y verra que peu d’intérêt au départ mais bien vite ils vont prendre une sacrée importance. Non seulement ils vont vous permettre d'avancer plus facilement, mais en plus ce sont surtout vos stats et votre scoring qui va pouvoir devenir plus performant. Ce système fonctionne sur les paramètres d'autres joueurs, une sorte de drivatar en plus simple. Vous allez faire une recherche, et il vous sera proposé les dragons d'autres joueurs avec leurs niveaux et capacités actuels. Bien entendu ce n'est pas gratuit puisqu'une somme vous sera demander afin de louer les services de ses dragons 3 missions durant. Vous pouvez très bien en louer 4 ou 5 et ne les utiliser qu'au besoin, selon les missions (avant chacune on vous propose de sélectionner ou pas un équipier). Là encore il est conseillé de la jouer fine et de ne pas faire n'importe comment. Par exemple prendre un équipier du même élément permettra une frappe plus forte dans les niveaux où les ennemis sont de même nature, et à l'inverse, prendre un équipier d'un autre élément permettra ce coup-ci de varier ses attaques en cas de monstres de natures différentes. Par expérience personnelle, je peux vous assurer qu'un bon choix d'équipier peut multiplier par 2 votre score, ou rendre une mission ardue assez simple. Tout dépend donc de vos choix.

Enfin dernière possibilité offerte avant de se lancer : les ampoules. On peut aussi bien en acheter que les trouver en cour de mission. Elles peuvent être de différentes natures : agilité, attaque, mental, … voire combinées, et à différends stades d'efficacité. Avant chaque niveau vous aurez la possibilité d'en activer une, ce qui aura pour conséquence de vous booster dans le domaine d’efficience de l'ampoule. Tout comme pour le choix d'équipier ou de dragon, une ampoule soigneusement utilisée peut faire des miracles en cour de mission.

Venons en au cœur du gameplay maintenant. Comme tout le monde le sait, Crimson Dragon est dans la forme un rail shooter, mais il a sa propre personnalité. En effet tout les éléments cités plus haut ne sont pas les seuls paramètres qui vont le différencier de son « ancêtre spirituel » Panzer Dragoon. Fini le déplacement d'un stick, celui qui nous faisait déplacer à la fois le viseur et le dragon. Bonjour au stick gauche permettant de déplacer le dragon, et au stick droit qui gère le viseur. Ca peut paraître anodin, mais ce simple changement rend le gameplay fondamentalement différend de celui de Panzer Dragoon, et moins évident au départ. Si les premières parties vont s'avérer plus que laborieuses (les vieux réflexes d'un Panzer Dragoon ont tendance à revenir facilement) la simple décomposition des levels devraient vous permettre de comprendre la logique du jeu. La plupart du temps vous n'aurez qu'à déplacer le viseur pour attaquer, le déplacement du dragon n'étant là que pour esquiver des tirs ou attraper les balises (je vais revenir là-dessus plus tard). Le mieux est déjà de s'habituer à gérer chaque stick quand c'est nécessaire afin de ne pas s'embrouiller et faire n'importe quoi. Vouloir jouer avec les 2 en même temps dès le départ va vous en faire voir de toutes les couleurs, mais ça viendra par la suite.
A ce gameplay a été ajouté un système d'esquives avec les boutons L et R. Une simple pression permettra à notre dragon de faire un tonneau du côté voulu. Très pratiques seuls, ils deviendront redoutables combinés au déplacement de notre créature, car une fois l'ensemble maîtrisé, il devient assez facile d'esquiver dans quasi toutes les circonstances.
Autre point qui rend Crimson Dragon bien différend de Panzer Dragon, la fin des rotations à 360° par simple pression des gâchettes. A la manière d'un Rez ou d'un Child of Eden, les rotations se font automatiquement et en temps voulu. C'était l'une des grosses particularité de Panzer Dragoon, l'un des éléments qui avait fait son succès. Ici, le jeu vous demande d'être plus incisif dans vos tirs et d'être le plus rapide possible pour nettoyer ce qui se passe devant vous car une fois l'ennemi passé, c'est mort pour l'avoir.

Qu'en est-il maintenant des stages en eux-même ? Et bien là encore on assiste à un changement assez important puisque même si on garde le système de portions avec des notes (D, C, B, A, et S), la portance et la longueur des niveaux ont été réduits de manière à favoriser leur rejouabilité. Dans un Panzer Dragoon, il y avait en général 6 à 12 stages qui demandaient en moyenne 10 à 15 minutes pour en voir le bout. Désormais ce sont plusieurs mondes divisés en sous niveaux qu'il faudra 5 à 7 minutes pour finir. Quel est l'intérêt ? Tout réside dans le système de progression du jeu. Pour atteindre certains niveaux, il vous faudra avoir les anticorps de certaines créatures, vous obligeant parfois à refaire le même niveau 3 ou 4 fois, ce qui est forcément moins rébarbatif quand le niveau est plus court. De même le côté scoring arcade pour avoir les rangs S, ou plus simplement pour améliorer nos dragons, s'en retrouve bien plus agréable et gérable. Ces rangs par ailleurs correspondent désormais à une façon d'appréhender chaque section des niveaux et à leur réalisation. Un coup il vous sera demandé de vous faire toucher le moins possible, une autre fois d'éliminer un max d'ennemis, une autre encore de faire de la virevolte pour récupérer un max de balises (objets dispersés à différends endroits des niveaux), … Bref, de quoi varier un peu les quelques heures que vont vous demander le jeu pour en voir le bout. Et c'est là que l'on va entrevoir le plus gros défaut du jeu : les phases libres.
Certains niveaux ou portions de niveaux (assez rares heureusement) quitteront l'aspect rail shooter pour vous laisser en vol libre. Si dans l'idée c'est plutôt sympa, dans les faits, le jeu ne s'avère pas prévu pour ça, surtout niveau maniabilité. Les premières fois, cela relève du calvaire pour se retrouver entre le maniement du viseur, celui du dragon, et notre spatialisation dans le ciel, si bien que l'on passe trop de temps à chercher notre cible ou à l'aborder sous le bon angle. On s'y fait un peu avec le temps mais franchement, ce n'est pas instinctif pour un sous et ça reste galère même une fois que l'on a bien le dragon en main. Vraiment dommage car ç’aurait pu être un atout, et cela devient un défaut.

Question ambiance par contre le jeu à tout pour lui. L'univers reprend pas mal de codes des anciens Panzer Dragoon, avec cet esprit totalement léché d'un bout à l'autre du jeu, des niveaux bien inspirés pour la plupart, et un environnement sonore tout bonnement dantesque. Les musiques ont toujours été une grande force dans l'ancienne saga de Futatsugi, et encore une fois, Saori Kobayashi à réalisé un travail extraordinaire. La patte est évidente, ça ne ressemble à rien d'autre (sauf Panzer Dragoon bien entendu), c'est envoutant, dépaysant, planant, énergique ... on pourrait en parler en long en large et en travers, mais rien de mieux que de prendre la manette et de se laisser transporter dans cet univers sublimé par une bande son tout juste divine. On ne peut pas dire que le jeu soit magnifique pourtant, sur une Xbox 360 il aurait été très beau ... mais pour la One ... c'est tout juste joli. Le portage n'a pas forcément été remis aux normes de la nouvelle née de Microsoft, ce qui est bien dommage car avec un tel univers, des graphismes plus poussés auraient crevé l'écran. Malgré cela, la direction artistique rattrape tout. Le monde de Draco est cohérent, il garde sa fraicheur et son mystère qui se distille au fil des niveaux. On lit souvent que c'est l'un des plus gros défauts de ce jeu, car les Panzer Dragoon ont toujours été des vitrines technologiques de leur supports respectifs (que ce soit les 3 volets Saturn ou l'épisode Xbox). Seulement ici, on est pas devant Panzer Dragoon, on est pas devant une grosse prod au format boite à 70 euros. Non on est devant un jeu Xbox Live Arcade à 20 euros qui n'a surement pas le même budget ni les mêmes ambitions techniques, mais qui remplit plus que haut la main son office. Et puis sans aller bien loin, des chefs d’œuvre comme Braid ou Castle Crashers étaient ils dignes techniquement de la 360 ? Non. Et cela ne les a pas empêché d'être de pures tueries.

N'ayant pas encore fini le jeu (j'en suis à 7 ou 8 heures de jeu je ne sais pas trop) je me permettrai de compléter ce test un peu plus tard afin de ne pas dire de conneries et de donner un avis vraiment complet. Mais grossièrement le jeu est pour moi une franche réussite, suffisamment différend de Panzer Dragoon dans son gameplay et son approche pour ne pas en être un bête clone, et à la fois suffisamment proche dans son univers pour nous faire revivre un émerveillement que l'on aurait pu croire perdu. Mais c'est aussi ce qui le perd, la comparaison avec les autres titres de son créateur. Pourquoi juger Crimson Dragon sur Panzer Dragoon ? Pourquoi ne pas le voir pour ce qu'il est ? Son gameplay à la fois plus arcade dans la conception des niveaux et plus complet dans la gestion hors zone de combat lui donne pourtant une aura particulière et pleine de charme qui ne demande qu'à être découverte. Vous voilà prévenus, Crimson Dragon est un excellent jeu, peut-être pas non plus un chef d’œuvre de par ses quelques défauts dérangeants comme les passages en vol libre, mais il reste surement l'un des meilleurs jeux de sa catégorie, voir du line up. On peut ne pas aimer, comme tout les jeux, mais il n'en est pas moins un très bon titre pour la Xbox One pour qui aura l'intelligence de ne pas chercher un Crimson Panzer Dragoon.