L’accord préliminaire signé cette nuit prévoit que l’Iran arrête d’enrichir de l’uranium au-dessus de 5% et renonce à installer de nouvelles centrifugeuses. En échange, il n’y aura pas de nouvelles sanctions au cours des six prochains mois.



Sortir de l’impasse. C’était l’objectif de la communauté internationale et, sur le papier et pour six mois, il a finalement été atteint à Genève. Après trois rounds de négociation et des mois de rencontres bilatérales secrètes, un accord a été obtenu au bout de la nuit de samedi entre les six grandes puissances (Etats-Unis, Chine, Russie, France, Royaume Uni et Allemagne) et l’Iran. En échange d’un allègement des sanctions qui étranglent l’économie iranienne, il prévoit des engagements précis et substantiels de Téhéran de nature à « l’empêcher d’acquérir l’arme nucléaire », pour reprendre les mots du président Barack Obama.

L’Iran s’est ainsi engagé à ne plus enrichir d’uranium au delà de 5% d’isotope U235, la teneur requise pour produire de l’électricité. Il devra aussi démanteler chez lui d’ici six mois son stock de 186 kg enrichi à 20%, qui préoccupait la communauté internationale puisqu’il aurait pu facilement être enrichi à 90%, la teneur permettant de produire une bombe atomique. Téhéran promet aussi de ne pas installer de nouvelles centrifugeuses, en sus des 19.000 actuellement utilisées pour enrichir l’uranium. Enfin, il a promis de suspendre les travaux sur le réacteur controversé d’Arak, qui devait produire du plutonium, filière alternative de l’uranium pour la production d’armes nucléaires, interdite par le Traité de non prolifération signé par l’Iran. Un point essentiel, puisque existait un risque réel de raids aériens israéliens sur ce réacteur avant sa mise en service, prévue initialement l’été prochain.

En contrepartie, Téhéran, a obtenu l’autorisation d’exporter pendant six mois de l’or, des produits pétroliers et des pièces automobiles d’une valeur de 5,8 milliards de dollars au total et la suspension de nouvelles sanctions qui auraient encore réduit les ventes iraniennes de pétrole. Les exportations d’or noir de Téhéran ont baissé de 60% en deux ans.

Cet accord n’est valable que six mois ; il s’agit de rétablir la confiance entre l’Iran et ses partenaires, après dix ans de crises, pressions, dissimulations, bluff et échanges de mauvaise foi de part et d’autre. Six mois pendant lesquels des inspections inopinées et « intrusives » de l’Agence internationale de l’énergie atomique, notamment sur les sites sensibles de Natanz et Fordow, permettront de vérifier que Téhéran n’a rien à cacher. La communauté internationale a, par le passé, découvert à plusieurs reprises grâce à des transfuges iraniens, que Téhéran s’activait en secret sur un programme nucléaire surdimensionné pour une activité purement civile.

« Une avancée importante »

Le ministre iranien des affaires étrangères, Mohammed Javad Zafari a salué une « opportunité pour éviter une crise », tandis que les chancelleries occidentales se réjouissaient de l’accord annoncé par Catherine Ashton, chef de la diplomatie européenne. Levant le pouce en signe de victoire, le ministre français des affaires étrangères, Laurent Fabius, a estimé qu’il s’agissait « d’une avancée importante pour la paix et la sécurité ». Le gouvernement israélien, qui s’est dit au passage déçu par Paris, a qualifié l’accord de « plus grande victoire diplomatique pour l’Iran », sans brandir de menaces toutefois. Il est vrai que le match n’est pas fini ; Barack Obama a prévenu que « d’immenses difficultés persistent » dans la perspective de l’accord définitif sur le programme nucléaire de l’Iran qu’il faudra négocier d’ici l’été. Un premier quiproquo apparaissait d’ailleurs dès dimanche matin : l’accord intérimaire ne mentionne explicitement aucun « droit à l’enrichissement » d’uranium pour Téhéran, a souligné le chef de la diplomatie américaine, John Kerry, ce que confirme une lecture attentive du communiqué final, bien que les négociateurs iraniens estiment le contraire…