Le gouvernement japonais craint pour la pérennité du manga sur son propre territoire… On pouvait imaginer que son inquiétude toucherait l’Occident et sa vague de « scantrads » mais non. Le problème, peut-être venu à sa conscience aussi à cause de l’envolée de ce pillage internet, serait dû au fait que les nouvelles générations de mangakas ou ceux qui rencontrent un grand succès, continuent de travailler suivant les méthodes classiques de la plume et du papier à l’heure où les outils graphiques comptent de plus en plus. Ainsi, le spécialiste Ichiya Nakamura des arts populaires nippons au gouvernement, et oui le manga est un art pour son pays, a donc jugé qu’il était urgent de lancer un programme de formation aux dessinateurs de mangas, aux animateurs et aux assistants. Même les artistes étrangers y auraient accès.
L’enjeu est plus que culturel, il est avant tout économique : la tablette et ses vecteurs mettent en péril les parutions hebdomadaires papier et le travail sur papier des mangakas n’est pas fait pour aider la commercialisation de planches que les éditeurs souhaiteraient aussi proposer en version immatérielle. Imaginez : 7 000 mangakas en activité, 25 000 assistants œuvrant à la popularité et au commerce de 400 magazines que se partagent 195 éditeurs. Un gros marché donc et qui, bien sûr, se réparti dans le monde entier.

Mais beaucoup de mangakas ont appris en autodidactes, voir dans des écoles de dessin comment travailler l’image. Les scenarii sont aussi nés de cours portant sur le comment et le pourquoi d’une histoire qui accroche. Manque de moyen financiers pour ces autodidactes ou simplement technique ancestrale basée sur le travail du noir et blanc donc de la plume, les mangakas ignorent souvent les techniques numériques et graphiques des outils informatiques. On pourrait penser que ces techniques, essentiellement vouées au travail de la couleur, ne sont pas d’une grande utilité dans l’univers manga non ? Et bien, certains grands auteurs mondialement reconnus tels que Goro Yamada sont du même avis…. « Je ne connais pas un seul mangaka qui œuvre sur ordinateur de bout en bout. L’adoption de l’outil numérique piétine, parce que beaucoup de mangakas, jugent que ça va plus vite à la main. Ils n’ont personne pour les former aux logiciels spécialisés et du coup beaucoup y renoncent. », et Jiro Taniguchi se renchérir qu’il fait tout à la main « parce que les techniques des autres » il ne les connaît pas. Sans oublier ceux qui ont leur propre manière de travailler, assumant les pertes de temps et les problèmes que cela implique pour le bouclage hebdomadaire des magazines.

S’ils acceptent qu’internet leur offre une plus large diffusion en temps réel de leurs œuvres, d’autres voient ces formations d’un mauvais œil : la porte serait ouverte au chômage pour les assistants puisqu'il y aurait moins à faire, au piratage de travaux déjà numérisés parce que créés informatiquement et une autre dérive serait l’uniformisation des mangas. Certes, il y a plusieurs styles que l’on peut rattacher à des « écoles » ou à des types graphiques car adaptés au shojo, shonen ou seinen, mais chaque auteur a encore sa propre patte scénaristique et graphique qui est parfois reconnaissable entre mille (Jiro Taniguchi, Inoue Takehiko, Tite Kubo, Ai Yazawa, Oda Eiichiro…) !

Quoi qu’on en pense, cela fait aussi partie intégrante de ce qui séduit le lectorat mondial. Balayer le talent véritable pour faire croire au premier venu qu’il peut être un créateur de manga parce qu’il a suivi une formation technique serait dommageable pour tous car « ce qui fait l’intérêt d’un manga c’est d’abord l’histoire et la façon dont elle est découpée, présentée. » (Goro Yamada). Au pays du soleil levant, lieu de naissance des hautes technologies depuis l’après-guerre, la bataille entre anti et pro numériques est ouverte !
PC only
Ils n'ont qu'a (comme ils disent si bien) sortir quelque chose qui a un véritable scenario
Des véritables scénarios, il y en a des tonnes, mais forcement avec des préjugés, on ne voit que ce que l'on veut voir.