''Fuck le casual gaming'' c'est ce que vient de déclarer le patron de Rockstar, Dan Houser, interviewé fraîchement par le New York Magasine, en plein batage médiatique pour le dernier blockbuster de Rockstar, GTA IV. Eh bien, je tiens à répondre à ce grand bonhomme que ''fucker'' le casual revient tout simplement à ''fucker'' le jeu vidéo tout court. Explications.
Tout d'abord, qu'est-ce que veut dire ''casual'' ? Occasionnel. Un casual gamer, c'est typiquement le collégien/lycéen qui joue à sa console ou son PC quand il s'emmerde, qu'il n'a rien d'autre à faire, autrement dit qui ne se passionne pas énormément. Désigne aussi, dans le contexte actuel, une personne issue de n'importe quelle classe de la société qui s'amuse avec des jeux comme ''Brain Training'', ''Wii Fit'', et j'en passe.
Il est également bon de préciser que les joueurs assidus, comme vous et moi, sont des core gamers. Pas hardcore, car hardcore désigne un joueur acharné, qui passe des heures sur un même jeu pour péter les records ou faire des glitchs de la mort pour finir en jeu en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Probablement par ignorance (ou par vanité ?), nous nous désignons comme étant tous des hardcore gamers, alors que nous sommes plutôt des cores, avec quelques hardcore par-ci par-là, tout de même.
Rentrons dans le vif du sujet ! Ce grand monsieur de Dan Houser prétend donc que le casual gaming est nocif au jeu vidéo, que le grand public veut
''des jeux qui déchirent'', que la Wii a des capacités intéressantes mais qui ne sont pas mises à profit. Je suis d'accord avec lui.
Je dirais même plus :
''Fuck le jeu vidéo !''
(mais qu'est-ce qui lui prend ?!?)
En effet, ce que le joueur lambda à tendance à oublier, c'est que le casual, c'est pas uniquement les
logiciels (on dira ainsi) comme Nintendo en distribue à profusion sur ses dernières machines. Le casual, d'une manière générale, c'est ce qui tend à toucher le grand public, à l'attirer. Et les derniers jeux font sans cesse en sorte d'attirer ce dernier. Et, malheureusement, dans le mauvais sens ...
Lequel, me direz-vous ? Tout simplement ces satanés parasites qui gâchent l'expérience de jeu : ces ordinateurs et scanners qui vous disent où il faut aller et qui vous préviennent même quand un ennemi va vous tirer dessus, ces niveaux linéaires où il n'y a rien d'autre à faire qu'avancer, ces prises en main tellement simplifiées que le jeu en devient creux, et surtout cette foutue difficulté qui régresse à vue d'oeil ! Qu'est-ce que ça donne, au final ? Des jeux qu'on finit en moins de deux, que n'importe qui peut finir ... bref, du casual. Faisons un petit tour des dernières sorties pour constater l'ampleur des dégâts.
Metroid Prime 3 : Corruption

Alors lui, je sais pas quelle mouche a piqué les testeurs aussi bien professionnels qu'amateurs, mais il est tout, tout ce que vous voulez ... sauf le meilleur de la série.
Pourquoi ? Car, si le jeu est joli, la maniabilité excellente, le chara design bourré de détails et d'anecdotes, le jeu varié dans son ensemble, les boss excellents ... le level design a régressé, le joueur est assisté à mort et la difficulté de base a été programmée sur ''casual'' au lieu de ''normal''.
Les niveaux sont linéaires, et on trouve trop facilement les objets. Heureusement que le jeu peut compter sur des bonnes énigmes et des bons passages en boule morphing, un bon design, car sinon, il ne vaudrait pas grand chose. Cette linéarité d'habitude bannie des Metroids est d'autant plus flagrante qu'un ordinateur de malheur, j'ai nommé l'unité Aurora, vous arrête sans cesse, ne vous laisse jamais réfléchir par vous-même, et vous dit tout sur la marche à suivre pour progresser. A peine a-t-on vaincu le boss du Bryyo Ardent pour atteindre le premier générateur, intouchable, que l'UA nous contacte sur le champ pour dire
''stop ! Il faut un upgrade qui se trouve dans cette salle'' en précisant en plus la position exacte de la pièce où l'on peut dégoter l'objet.
A ces parasites s'ajoute la difficulté dite ''normale'' qui n'est autre qu'une difficulté régressée pour l'occasion pour les novices qui décrocheraient éventuellement après s'être fait rétamés par un boss. Il faut alors prendre le mode ''vétéran'' ou ''hyper mode'' (à débloquer, en plus !) pour avoir accès à une difficulté décente et un minimum de challenge.
Bref, on sent bien que Retro Studio a fait en sorte que ce troisième Metroid Prime, censé être le bouquet final, l'apothéose de la saga, soit un jeu d'aventure pour Noobs qui découvrent le jeu vidéo avec la wii. Ce qui faisait le charme des Metroid Prime a été amoindri, à cause de quoi ce Corruption ne peut plus compter sur grand chose pour justifier son statut de meilleur de la saga. Dommage, car tout le reste avait été suffisamment soigné pour ...
Assassin's Creed

Un autre jeu surévalué, heureusement beaucoup de joueurs le jugent comme il se doit (comme quoi la presse est très, très loin d'être objective). Assassin's Creed, ou comment gâcher un gros potentiel en misant tout sur le spectaculaire. Prenez donc 3 grandes villes superbement modélisées et vastes, mettez un héros qui surfe sur la nouvelle tendance
''foutakapuche'' et katrolaklass, faites-lui faire des cascades dignes de
Cüneyt Arkin, rajoutez de la tatane molle mais belle, ne rajoutez rien d'autre pour varier, et saupoudrez le tout d'un scénario SF que n'aurait pas renié Uwe Boll avant de touiller le tout, et vous obtiendrez Assassin's Creed. Bon, inutile d'épiloguer sur ce jeu : il est magnifique, spectaculaire, semble bourré d'interactions ... mais ce ne sont que des illusions qui masquent un gameplay répétitif qui ne propose que très peu de types de missions différentes, ce qui donne un jeu assez limité, voire creux pour les plus grincheux d'entre nous, et en plus ... facile.
Bref, un gros potentiel gâché du fait qu'Ubisoft est vénale et a préféré faire un truc spectaculaire qui attire la galerie qu'un jeu excellent tout simplement, comme l'ont été ses précédentes productions (dont Prince of Persia). Et le pire, c'est que ça se vend. Bref, l'archétype du jeu qui aurait pu être génial s'il n'avait pas été taillé pour le casual.
Voilà déjà deux gros exemples, qui je pense, sont suffisants pour constater que le jeu vidéo est assez mal en point. Certains se diront ''ouf cet illuminé n'a plus de preuves'' ... et bien si ! Faut-il parler du cas Mario Galaxy, des derniers Zeldas, des derniers Rainbow Six, de Far Cry 2 où traverser une ville infestée d'ennemis sera un jeu d'enfants, et de tous les autres parasites que les développeurs inventent chaque jour, comme le FPS qui vous prévient quand on est sur le point de vous tirer dessus ?
La ''next gen'' se complaît bien trop dans le spectaculaire et en oublie de proposer un bon game-design, digne des anciens jeux. Rares, très rares sont les jeux qui sont du niveau des derniers hits PS2, des perles rares comme
Odin Sphere ... ou même, grossissons un peu plus l'affaire, des jeux portables. Par exemple
The World Ends With You sur DS, au gameplay exigeant mais complet, avec en plus une difficulté paramétrable, le prochain
Nanostray 2 toujours sur DS, qui, comme tout shmup, se doit de proposer un vrai challenge (plutôt bien noté d'ailleurs),
Castlevania : Dracula X Chronicles sur PSP, qui certes est rigide mais génial toujours grâce à son challenge et son level design bien plus fin qu'il n'y paraît, ...
Que reste-t-il comme excellents jeux exigeants et de profonds à la next gen ?
Lost Odyssey et
Ninja Gaiden 2, tous deux ayant un penchant old school. Et peut-être
GTA IV, aussi, mais je n'y ai pas encore joué moi-même ... Et c'est tout pour les très bons jeux. C'est triste, mais c'est comme ça. L'industrie veut tellement attirer du nouveau public qu'elle finit par faire régresser bien des jeux, voire même gâcher ses plus beaux projets.
Bien entendu, casual ne veut pas dire foncièrement mauvais, mais quand on vous gâche volontairement l'expérience en vous prenant par la main du début à la fin du jeu, ou en proposant des niveaux ou tâches linéaires au lieu de trucs vastes et variés qui pourraient sublimer le gameplay, tout ça pour attirer les noobs ... comment peut-on encore considérer encore ces jeux-là comme très bons ? C'est quelque chose, personnellement, qui me dépasse. Je ne comprends plus vraiment la presse, qui saque les jeux originaux qui ont des défauts de jeunesse ou qui
''ne plairont pas à tout le monde car exigeants'' et louent les vitrines technologiques pas bien reluisantes quand on brise l'os pour sucer la substantifique moelle (sic).
Merci de m'avoir lu, et j'ose espérer que certains joueurs partageront le même avis.
A bon entendeur, salut !
La cloche à fromage