Mon Dieu, que les gens sont étranges. Leur vie semble rythmée uniquement et irrémédiablement par les variations métérologiques ; j'ai eu l'occasion d le constater tout ce mois d'août en travaillant dans une banque. De quoi parle-t-on en priorité en arrivant au boulot ? Du temps : celui qui a été annoncé, celui qu'il fait, celui qu'il fera.
Une scène urbaine m'a d'ailleurs à ce titre beaucoup amusé. Une chappe de chaleur recouvrait la ville, et puis il a soudainement plu averse. Je me suis courageusement abrité sous un abri-bus, et j'ai observé ce que les politicards appellent mes compatriotes alors que je n'ai jamais, ô grand jamais, demandé à vivre sous le même drapeau qu'eux ; soit dit en passant je n'ai jamais demandé à vivre sous quelque drapeau que ce soit, hormis peut-être le fanion grolandais, ni avec quelque personne que ce soit, hormis peut-être les autres citoyens grolandais et Cameron Diaz parce que les premiers ont un corps de rêve et la seconde un humour ravageur, à moins que ce ne soit l'inverse.
Bref, j'ai donc observé ces cons pas triotes (mais trisos ; c'est certain), et qu'ai-je constaté, avec moyennement d'étonnement vu que j'ai toujours eu un mépris froid pour les gens de la rue ? Ils se comportent en temps de pluie comme en temps de guerre ; ils courent, sautent, gesticulent avec une théâtralité que ne renierait pas Jean Claude Brialy comme si les nazis revenaient, alors que ce n'est hélas pas encore le cas.
On dirait qu'il leur pleut des obus sur la gueule ; que la Terre est au bord de l'explosion, que le sol va se soulever, que les immeubles vont brûler, alors qu'en fait ces crétins finis ne subissent rien d'autre que l'humidité de quelques gouttes de ce fameux mélange qu'est H2O+O2+R2D2+6PO.
C'est aussi l'occasion de constater les vertus socialisatrices de la pluie. Car que font les gens une fois blottis à l'abri des intempéries ? Ils sourient, jouent les étonnés, comme s'ils sortaient du Space Mountain. C'est à ce moment que le dialogue intergénérationnel prend place, avec des dialogues vieux / jeunes étonnament loquaces, du genre :
La vieille : ''Ouhlàlàlàlà quelle flotte !''
Et le jeune, parce qu'il est poli, de répondre : ''Ouais, impressionnant''.
Autant dire qu'on a là quelque chose d'absolument inédit. Le plus étonnant, c'est qu'on retrouve vraiment les comportements imaginables en temps de guerre ; tout le monde se ligue contre la pluie, tout le monde partage les souffrances et douleurs de tout le monde ; on entend çà et là :''Je l'savais, ils l'avaient dit chez Pernault'', ou bien ''Si j'aurais su, j'aurais pris mon parapluie'' .
Moi-même, qui affiche volontairement dans ces cas là un air dépité par le comportement grotesque de ces imbéciles heureux, moi-même, plus impassible que jamais parce que je me fous de la pluie, je dois subir des sourires complices, signifiant une alliance plus forte que tout face à la nature de la catatrophe que nous subissons tous de plein fouet. Alors que sincèrement, cette grosse conne avec son sourire édenté, je la balancerais bien dans le caniveau.
Tout ça en se disant que le jour où les nazis reviendront pour de bon, tous ceux-là frimeront moins. Finie la rigolade sous la pluie, finie la nostalgie de l'enfance envolée, quand on se faisait engueuler par maman parce qu'on aimait à courir sous la flotte. Ca sera sérieux. Vraiment sérieux. Et alors, ceux qui croient qu'échapper à trois gouttes relève de l'exploit olympique, ceux qui se prennent soudainement pour Jean Moulin parce qu'ils ont résisté à l'envahisseur humide, tous ceux-là seront bien feintés.
Ceci dit, la pluie aura au moins eu le mérite, ne serait-ce que le temps de sa chute, de rapprocher des gens qui, en cas de grand beau temps, se seraient à peine accordés un regard, fût-il même antipathique.

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posted the 09/02/2005 at 09:16 PM by
franz
j'ai peur de comprendre........
Poste Scriptoume : S'il pouvait y avoir une palce pour moi sous ton drapeau (Groland + Cameron Diaz ) je m'y glisserais avec joie !!