Allons bon, encore une attaque de chien. Alors ça c’est tout de même incroyable, comme dirait notre Président. Depuis un mois on dirait qu’il y a un incident par jour, et pourtant je n’ai pas souvenir d’en avoir entendu parler pendant un bon moment, de ce problème des chiens dangereux. Certes, ça revenait régulièrement ; à peu près une fois par an on avait notre meurtre canin, avec à chaque fois la question des muselières, les maîtres qui ne s’occupent pas de leurs bestiaux, ceux qui disent qu’il faut tous les piquer et ceux qui disent qu’un chihuahua et un rottweiler c’est la même chose parce que tout est dans l’éducation, enfin les habituels discours pour/contre que relaient toujours les médias en pareille occasion, croyant ouvrir de grands débats de société. Enfin là tout de même, tout de même. Ca fait beaucoup. Alors que nos meilleurs amis n’avaient pas fait de vagues jusqu’à maintenant, on voudrait nous faire croire à une soudaine révolte de la gent canine, ça y est ils veulent tous nous tuer. Pour créer une psychose c’est le bon moyen, c’est certain ; à titre personnel je me méfie désormais des chiens qui viennent me renifler, j’ai même acheté un fusil au cas où.
C’est tout de même drôle. Nous sommes informés de la moindre agression, de la nana qui se fait bouffer la jambe à la gamine dont le visage est arraché. Au jour le jour, un compte-rendu de comment les chiens se sont comporté la veille, une sorte de météo du chien postérieure à l’événement : hier en Bretagne les labradors se sont bien tenu, tandis que les bergers allemands ont commis une incartade à Aix-en-Provence, espérons que cela ne se reproduise pas, par ailleurs signalons la tentative d’agression d’un yorkshire à Marseille, l’animal a pu être maîtrisée par une boule de pétanque dans la truffe, les cockers sont agités sur le Cotentin, des perturbations à prévoir à la fin de la semaine, et enfin comme toujours le minimum à Auriac avec autant d’incidents que de degrés, c’est-à-dire zéro, cela dit à Auriac seuls les huskys peuvent survivre et les huskys sont des chiens inoffensifs donc bon, demain nous fêterons les Médor passez une bonne soirée en notre compagnie et vive Royal Canin.
La personne qui souffre le plus dans cette histoire, c’est Michèle Alliot-Marie. Pour rappel, c’est notre Ministre de l’Intérieur. Il faut le préciser parce qu’on a l’impression que depuis l’accession de M. Sarkozy à la Présidence, il n’y a plus personne à l’Intérieur. Depuis cinq ans, on s’était tellement habitué à le voir chaque jour au 20 heures, notre ministre de la sécurité, du culte religieux et tous ces trucs, qu’avec MAM ça fait comme un choc, elle a l’air aussi morte que Chevènement en son temps. En février dernier on avait encore l’impression qu’il n’y avait que Sarkozy au gouvernement, que c’était sur ses épaules que reposait tout le programme mis en place pour la France. Aujourd’hui, on a toujours l’impression qu’il n’y a que lui au gouvernement, mais plus au même poste. Ca fait du changement.
Donc Michèle Alliot-Marie souffre. Elle souffre d’abord parce que passer après le trublion Sarkozy, c’est peu évident. Ca ne fait pas sérieux, en tant que ministre de l’Intérieur, de ne pas passer à la télé au moins une fois par jour, ça donne l’impression qu’on n’est vraiment pas à la hauteur du prédécesseur — et notez qu’ici, bien que je parle de la hauteur du prédécesseur, j’évite tout commentaire sur sa taille. Elle souffre ensuite parce qu’elle se tape des sujets plutôt merdiques. Sarkozy, lui, s’attaquait à des thèmes géants, la délinquance juvénile, les banlieues, la religion, ce genre de choses. Il écrivait même des bouquins dessus.
Les seuls sujets de MAM, ce sont 1° les plaintes de syndicats de la police mécontents de l’image que l’on donne des policiers, dans le Petit Robert de cette année, à la définition du mot rebeu (mot illustré par une citation mettant en cause un connard de flic qui fait chier un pauvre rebeu, phrase tirée d’une œuvre littéraire) même si le meilleur moyen de lutter contre cette soi-disant insulte aurait sans doute été, comme chaque fois, de ne pas l’évoquer,
et 2° les attaques de chien, qui lui permettent de se montrer une fois par semaine pour garantir, après la nouvelle agression mortelle hebdomadaire, que le gouvernement va faire des choses, des lois, prendre les mesures qui s’imposent. (A propos de mesures contre les chiens, je propose personnellement qu’on commence par en prendre pour mettre une muselière à Nadine Morano, je crois que c’est la représentante la plus dangereuse de l’espèce, elle serait capable de bouffer n’importe qui pour n’importe quelle raison.) Sarkozy, lui, proposerait du concret : des radars, des alcootests, des tests ADN, la lecture de Guy Môquet aux bergers allemands, histoire qu’ils sachent ce que leurs ancêtres — bien qu’ils fussent tenus en laisse — ont commis avec le régime nazi, la retraite des lévriers après 6 ans de cotisation (l’équivalent de 42 pour nous, si on fait le calcul), enfin des bidules qui ne seraient pas de l’ordre des idées, puisque Sarkozy adore ziber les idées qu’il abhorre.
Ca me fait penser à la sempiternelle opposition, sur laquelle reposait d’ailleurs la campagne de Sarkozy, entre les idées et l’action. C’est toujours pratique de mettre en échec son détracteur en lui disant moi j’agis et vous, que faites-vous avec vos livres ? Sauf que les mots agissent autant que les idées, et notre univers médiatique est là pour le prouver. C’est bien le mot racaille qui a provoqué des émeutes. Donc pouêt-pouêt camembert.
Et c’est ainsi qu’en tirant sur la chevillette on fait choir la bobinette.

tags :
posted the 10/24/2007 at 09:17 PM by
franz
PS: Pas mal le coup du Stainer-Famitsu de la dernière fois, j'avais pas remarqué la ressemblance