Vous vous souvenez de ce faux hall d’immeuble, installé à Chicago (banlieue chaude du Havre), dont j’avais parlé il y a de ça quelques jours. Eh bien j’apprends à l’instant que l’entreprise qui l’avait installé l’a débarrassé récemment. Mais pas en raison d’une soudaine prise de conscience éthique. En réalité les jeunes à casquette ont agressé le container.

Le jeune à casquette est pareil à la mouche toujours attirée par la première merde venue : dès qu’il voit un hall d’immeuble ou quelque chose qui s’y assimile, il ameute ses potes et vient y fumer des joints. C’est naturel, c’est l’instinct. Ce ne sont que des animaux un peu mal dressés. On avait donc compté sur un faux hall d’immeuble pour qu’ils quittassent le leur et laissassent les honnêtes gens tranquilles. On avait installé un container rouge, couleur choisie afin qu’ils ne puissent pas le manquer, et attendu qu’ils y transhument en meutes organisées. On espérait voir plein de casquettes y défiler. On nourrissait les desseins les plus fous. Ca devait marcher. Mais ça a trop bien marché.

En fait la raison pour laquelle ce container vient d’être retiré est une sorte de comble. C’est-à-dire que le faux hall d’immeuble a eu droit au même sort que tout vrai hall d’immeuble : les jeunes à casquette l’ont vandalisé. D’abord une vitre brisée, puis des dégradations à l’intérieur, et enfin un début d’incendie. Crénom.

Le meilleur là-dedans, c’est qu’Alcéane, le bailleur du bidule, a porté plainte et qu’une enquête a été ouverte. On suspecte les quelques adolescents de 12 à 14 ans qui fréquentaient le hall. C’est sûr que ça ne risque pas d’être la vieille du deuxième étage. Il n’empêche, je trouve ça très fort : on installe un machin soi-disant destiné uniquement aux adolescents zonards du quartier, on leur dit carrément faites-y ce que vous voulez mais s’ils s’avisent d’en faire vraiment ce qu’ils veulent, c’est-à-dire de foutre le bidule en l’air, on cherche à les arrêter. Je vois ce qu’on va dire : même quand on leur confie quelque chose, il faut qu’ils l’abîment, décidément ils sont intenables. Pour ma part j’inclinerais plutôt à penser que quand on se sent légèrement pris pour des cons, il est normal de le faire savoir, et que quand une entreprise décide de nous traiter comme des animaux en installant un container hideux, il est parfaitement légitime de le foutre en l’air.

Ils n’ont pas intérêt à les coffrer, les mecs qui ont foutu le feu au faux hall d’immeuble. On n’offre pas des vêtements sales à une personne dénudée pour lui reprocher ensuite de ne pas être propre sur elle. De toute façon, si vraiment leurs actions portaient préjudice à quelqu’un, ça ne serait qu’à eux-mêmes puisqu’ils sont seuls à fréquenter ce fameux container. Et puis c’est tout simplement une action citoyenne que de dégrader un objet qui déjà, par son objectif, dégradait l’image du jeune à casquette. Surtout, à quoi servirait de les mettre en prison lorsqu’il s’agissait, avec ce faux hall d’immeuble, de les parquer dans un endroit où ils se tiendraient à l’écart de la société ? Si un seul d’entre eux est condamné, j’en appelle carrément à un mouvement populaire au Havre.

Eh oui, fallait pas tirer sur la chevillette si on ne voulait pas que la bobinette chût.