Un article que j'ai écrit pour le magazine de mon école. C'est une revue généraliste d'où le côté un peu simpliste des explications.
C'est un fait, les jeux vidéo ne sont plus réservés aux gamers purs et durs. Avez-vous entendu parler de l'Eyetoy, de Singstar, du Programme d'Entraînement Cérébral du Dr Kawashima, ou encore de Wii Tennis ? Tous ces jeux ont en commun de pouvoir plaire à tout le monde, aussi bien aux enfants qu'aux mamies de 70 ans, grâce à leur simplicité. C'est cette nouvelle expression à la mode qui les regroupe : le casual gaming (ou jeu occasionnel).
Il y a quelques années, on pouvait diviser la société en deux catégories : les gamers, et ceux qui n'ont jamais touché à un jeu vidéo. Entre les deux : un mur d'incompréhension. Il n'y a bien que les jeux vidéo pour créer ce genre de rupture. Connaissez-vous des gens qui ne soient jamais allé au cinéma ? Qui n'aient jamais lu un livre ? Pour les jeux vidéo, il y a bel et bien cette séparation, mais elle est en train de s'estomper. Le responsable, c'est ce fameux casual gaming !
Plus qu'un simple passe-temps pour les possesseurs de mobiles, le casual gaming est devenu un véritable marché. En plein essor, ce marché attire de plus en plus d'éditeurs, séduits par la rentabilité de ce secteur. Sous sa bannière, on retrouve les jeux sur téléphones portables, les jeux de bureau PC (démineur, …), les jeux gratuits en ligne, et des titres PC ou console dans des genres divers, allant du puzzle au jeu de stratégie. Leur particularité, outre leur mécanique de jeu très accessible, c'est qu'ils se jouent par petites sessions. Le casual gaming était un phénomène marginal il y a quelques années, mais à présent, c'est un vrai phénomène de société. À tel point que la suite du fameux Programme d'Entraînement Cérébral est devenue au Japon le sixième jeu le plus vendu de l'histoire (chiffres VGChartz) !
Analysons bien le contexte. Jeu vidéo, au départ, ça signifie « activité ludique qui se joue avec un écran ». C'est vaste ! Autant dire que la vision du joueur qui dirige un guerrier avec une manette dotée d'une croix et de boutons, que cette vision-là est beaucoup plus réductrice ! Alors à l'heure des jeux aux budgets colossaux, de la PS3 et de studios constamment menacés de faillite, pourquoi ne pas s'ouvrir un nouveau marché, beaucoup plus vaste, avec des jeux originaux et plus simples, offrant un gameplay différent ? Les gens sont curieux et répondent présent, d'autant plus que la communication entre non-joueurs et joueurs aguerris se fait bien ! Si de plus on ajoute le côté multijoueurs de titres comme Wii Sports ou l'Eyetoy, le bouche-à-oreille se fait beaucoup plus vite… à condition bien sûr que le jeu soit efficace !
Impossible de parler du casual gaming sans évoquer Nintendo. Consciente du potentiel d'un tel marché, la célèbre firme a sorti sa console portable DS il y a deux ans, et plus récemment la fameuse Wii. Elles offrent au grand public un confort d'utilisation inédit, du fait de son stylet pour l'une, et de sa télécommande Wiimote pour l'autre. Si le succès est sans précédent, la raison est simple : jamais des consoles n'avaient touché un aussi large public. En Europe, un possesseur de DS sur deux a acheté la simulation canine Nintendogs, et un sur cinq exerce ses neurones avec le Programme d'Entraînement Cérébral (chiffres Joypad). Le pouvoir d'attraction de ces titres sur les femmes de 40 ans ou les personnes âgées, entre autres, est surprenant. Sur Wii, le titre Wii Sports se pratique, comme tous les jeux vidéo, entre jeunes potes de 20 ans ; mais ce qui est plus inédit, c'est qu'il se pratique aussi en famille !
Nouveau style de jeu, nouvelles exigences pour les développeurs. Les casual gamers veulent garder une certaine distance par rapport au jeu. Les parties sont donc divisées en sessions courtes de vingt minutes, et incitent à un usage quotidien. Les concepteurs cherchent à valoriser chaque minute passée à jouer, et donner l'impression de progresser chaque jour. C'est ce qu'on retrouve dans le Programme d'Entraînement Cérébral. Un aspect capital, ce sont les menus du jeu. Tout doit être simple et immédiat, mais ce n'est pas chose facile pour les développeurs, qui étonnamment y consacrent beaucoup de temps. Autre difficulté pour les éditeurs : quel type de jeu choisir ? Ce n'est pas simple de cerner ce marché, aux frontières si floues. Ce n'est pas non plus évident de deviner les attentes du public, car celui-ci n'est justement pas demandeur ! Ils n'attendent pas une suite à leur jeu. La logique est donc à l'inverse d'une licence de jeu classique, et seule la capacité à surprendre et à attirer le joueur est déterminante du succès.
Quel avenir se profile ? Le casual gaming va prendre de l'ampleur, c'est sûr, et ce sera aux éditeurs de savoir constamment raviver la flamme ! Des sociétés comme Ubisoft ou Electronic Arts y entrent de plain-pied. Peut-on s'attendre à ce que le jeu vidéo « classique » perde son importance ? On est en droit de se le demander, avec le succès très relatif de la PS3 et de la Xbox 360. Mais une chose est sûre : ce marché traditionnel ne risque pas de chuter si les gamers répondent toujours présent ! On peut s'attendre à un avenir du jeu vidéo qui ressemblerait à celui du cinéma : de grosses productions pour les plus aguerris, et d'autres titres plus originaux ou à petit budget pour que tout le monde y trouve son compte… même les joueuses de 50 ans, et même les tout petits studios de développement !