Critique cinéma qui n'était pas du tout prévu au programme mais je viens d'avoir un énorme coup de cœur, il y a quelques jours, concernant le film Les Lois de l'Attraction, adapté d'un roman éponyme.
Alors que je viens de finir ce dernier, je me suis dis qu'une critique écrite du film sera pas mal vu qu'il est plutôt peu connu voir méprisé.
J'espère qu'elle vous plaira, bonne lecture !
"PERSONNE NE CONNAIT PERSONNE"
A vrai dire, je suis tombé sur ce film par le plus grand des hasards : sur Youtube traîné une vidéo, en haut de mes abonnements, portant sur le film. Deuxième vidéo d’une chaîne dont j’ai une certaine sympathie, je me lance dans la vidéo vierge ne connaissant pas le film et encore moins qu’il est adapté d’un livre.
Fin de la vidéo, je suis intrigué, intrigué par le sujet du film mais surtout par les travaux de l’auteur du livre original, Bret Easton Ellis. Je commence alors par me procurer 2 des 3 films adaptés de ces livres, bien sûr Les Lois de l’Attraction mais aussi, le bien plus connu American Psycho, mettant en scène un jeune Christian Bale dans le rôle d’un psychopathe.
Je commence par visionner ce dernier, j’en sors moyennement convaincu : tout est plat, insipide et sans ambitions mais heureusement que certaines scènes et l’interprétation de Christian Bale (en complète roue libre) sauve le film du naufrage complet.
Après cette déconvenue, j’hésite un peu de lancer le prochain film par peur d’être aussi déçu (à ce moment, la moyenne plus haute de American Psycho nourrissait aussi ce sentiment de peur) mais les arguments prônés dans la vidéo plus tôt ainsi le fait que ce soit Roger Avary derrière la caméra efface peu à peu ce doute et donc je lance le film.
« Comment ai-je pu douter ? » me suis-je dis après avoir achevé le film une 3eme fois.
Sortie en 2003 et réalisé par Roger Avary, scénariste du film Silent Hill mais surtout co-scénariste du Pulp Fiction de Tarantino, aussi réalisateur de Killing Zoe, Les lois de l’attraction est tout d’abord une adaptation du roman éponyme de Bret Easton Ellis, sortie quant à lui en 1987. Le film raconte les errances d’un groupe de riches étudiants plongés dans la drogue, l’alcool et la superficialité.
Pour rendre à l’image cette jeunesse sans repère s’enfonçant dans la superficialité, Roger Avary prit l’excellente décision de reprendre à la lettre tout les codes du teen movie à l’image de la séquence suivant l’introduction (tout simplement grandiose où les personnages sont présentés sous un désespoir des plus total, en proie a leurs désillusions), celle-ci est ensoleillé, avec une musique douce en fond et un campus plein de vie et d’étudiants, pour mieux les détourner sans vergogne créant ainsi un univers fermé, décadent voir autiste où tout sentiments sont bannis et où la luxure règne en maître.
Pour rendre cet univers décadent encore plus pertinent, Avary joue, avec malice, avec son casting angélique tout droit des sitcoms en vogue à l’époque, on reconnaîtra James Van Der Beek (Dawson) ou encore Jessica Biel (7 à la maison). (L’utilisation d’un tel casting a déjà été opéré par Paul Verhoven dans son excellent Starship Troopers, gros pamphlet sur l’endoctrinement et la propagande militaire américaine.)
Il va en effet de servir de leur image, représentant sous une certaine forme le rêve américain, pour construire des personnages sans émotions, rongé par un vide qu’ils essayent de comblé avec la drogue, l’alcool, le sexe et la superficialité.
Comme exemple nous avons le personnage de Sean Bateman, une coquille vide sans émotions et sans repères, à l’image de sa boîte au lettre vide qui encadre sa tête. (Représentant ainsi le vide intérieur du personnage). Sean tombe amoureux de Lauren par construction mentale, parce qu’il croit que c’est elle qui lui envoie des mots d’amours qu’il s’intéresse à elle, il est plus fasciné par l’image qu’elle lui renvoie de lui que sa véritable personnalité.
C’est là aussi qu’intervient tout un pan du film, les liens sociaux entre les protagonistes : Le film décrit tout un monde où un groupe d’étudiants n’arrive pas à communiquer entre eux, chaque interaction dans le film est superficielle, mécanique : Chaque dialogue n’est jamais sincère, remplis de non-dit et de faux-semblant.
Une structure est assez récurrente est ainsi décelable : Une personne approche une autre personne par rapport à la vision préconçu qu’il a d’elle, celle-ci aborde la personne, l’interlocuteur ne correspond pas à celle qu’il avait et ce dernier lui fait comprendre.
C’est très abstrait ce que j’essaye d’énoncer mais les personnages ne connaissent personne réellement, leurs problèmes ou autres, ils s’en tiennent à la surface et ne s’intéresse pas à ce qui se cache en dessous. Une phrase du film résume parfaitement cela « Personne ne connait personne, alors tu ne me connaîtras jamais. » Cette impossibilité les isole de plus en plus, on pourrait faire un lien avec les voix off qui expriment leurs différents ressentiments face à leur situation, ces ressentiments qu’ils n’avouent jamais aux autres personnages, seulement aux spectateurs.
Concernant le terme d’errances, Avary a eu l’habilité d’effacer tous les marqueurs temporels du film, mettant l’univers où ils évoluent hors du temps, comme un piège, une boucle infernale où les situations se répètent à l’infini, enferment définitivement les personnages dans un quotidien de débauches de sexes, d’alcools et de drogues, les condamnent à errer et devenir « le fantôme d’un inconnu ».
On peut associer à cela les différents retours en arrière au début du film, qui peuvent illustrer le fait que les personnages sont condamnés dans cette boucle à vivre de leurs excès et souffrir intérieurement de cela. Le motif du temps est assez récurent : notamment un personnage défoncé au début, expliquant difficilement a Sean (en gros) qu’il n’utilise plus d’horloge pour ainsi ne plus « devenir l’esclave du temps », ceci rejoint et appuie le fait que ces personnages vivent hors du temps, succombant à leurs pulsions pour un temps indéterminé. Ensuite on peut aussi remarquer cet enferment par exemple avec le fait la plupart des interactions entre les personnages sont faites dans l’enceinte des dortoirs ou alors des fêtes organisées, jamais en dehors à l’exception de certaines scènes.
Pour finir, à la fin, on peut dire que Sean casse cette boucle car il ne revit pas ce qu’on a vu au début du film, comprenant la futilité de son mode de vie et de la superficialité des relations. Ce qui mène à sa fuite finale vers l’inconnu.
Dans tout ce pessimisme se dégage 2 grands instants, représentant 2 extrêmes du film : le premier est le suicide insoutenable d’une fille faible et idéaliste, véritable anomalie de cet univers morbide et le deuxième est la séquence en split screen sur la rencontre de Sean et Lauren, isoler pendant tout leur parcours jusqu’à figurer dans un seul même cadre qui représente l’un des seuls moments sincères du film, leur coup de foudre.
Pour conclure, à travers une mise en scène ingénieuse, un casting impeccable et une bande son envoutante signé Tomandandy, Avary accouche d’une œuvre percutante, critiquant une jeunesse dorées américaine perdu dans le matérialisme et la superficialité, dans l’impossibilité de communiquer entre elle.

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posted the 09/17/2016 at 04:39 PM by
coopper
spyro50 Je confirme ! Un sacré complément car les deux restent pas mal différents sur certains aspects.