Le football n’est plus un sport, ni un simple business. C’est une économie globalisée. C’est pourquoi tous les observateurs reconnaissent que Jean-Michel Aulas a adopté la bonne stratégie en lançant le Grand Stade en dépit de la période de vaches maigres que connaît actuellement le club.
Face aux déclinologues, Jean-Michel Aulas reste impassible.
“Ne croyez pas que nous sommes entrés dans une phase de déclin”, a averti le président de l’Olympique lyonnais. Rien en effet ne semble entamer la confiance du patron de l’OL dans la stratégie mise en place pour son club. Ni la non-participation pour la deuxième année consécutive à la très rémunératrice Ligue des champions, ni la faiblesse relative des résultats sportifs de Lyon, ni même l’incapacité de son club à financer son recrutement. Dans les colonnes du Progrès, Aulas est même allé jusqu’à déclarer que l’OL avait réalisé
“un super mercato”.
Tous les observateurs écrivent pourtant l’inverse à longueur de pages et constatent le dépérissement du statut de l’OL en club de second rang hexagonal depuis l’hégémonie naissante du PSG et de Monaco.
“On a fait le choix de garder les jeunes au club, en particulier Lacazette, Grenier, Gonalons, à qui on peut rajouter Umtiti qui était déjà signé. On les a re-signés non pas un an mais deux ans, sans clause de sortie, c’est-à-dire qu’ils sont là pour trois saisons”, a affirmé Aulas en justification de son
“super mercato”. Dans un écho lucide, Rémi Garde avait corrigé l’enthousiasme de son président après un match nul de Lyon aussi famélique qu’ennuyeux face à Rennes :
“Il faut arrêter de nous voir plus beaux que ce qu’on est. Ce ne sont pas des joueurs qui ont dix matchs de CFA qui vont faire rêver la Ligue 1.” Alors, de deux choses l’une. Soit Jean-Michel Aulas a sombré dans un déni de réalité porté par une méthode Coué et un optimisme ingénu. Soit la réalisation du futur Grand Stade de l’OL suffit, à elle seule, à alimenter sa foi dans l’avenir proche.
Martingale ?
L’OL Land apparaît comme un accélérateur de croissance pour l’OL, une martingale générant recettes et retombées financières directes. En Europe, seuls 19 % des clubs sont directement propriétaires de leur stade, et les 12 clubs européens qui ont obtenu les recettes les plus élevées jouent tous dans un stade dont ils sont les propriétaires directs. Les recettes d’Arsenal ont doublé lorsque le club londonien a abandonné son vieux stade de Highbury pour jouer à l’Emirates Stadium, passant de 63,8 millions d’euros à 117 millions d’euros. À titre de comparaison, les recettes de billetterie de l’OL s’élevaient à 20 millions d’euros par saison sur les dix dernières années. Mais, depuis que le club n’est plus tout à fait en haut de l’affiche, l’affluence n’est plus au rendez-vous. La billetterie est tombée à 17 millions d’euros pour la saison 2011-2012 contre 19 millions un an plus tôt (-6,7 %), alors que le rival marseillais empochait 25 millions.
Devant la poursuite des résultats médiocres de l’OL, Gerland se vide d’année en année. Conséquence ? Les recettes ont littéralement plongé de 30 %, avec uniquement 12 millions d’euros de récoltés sur la saison 2012-2013. En dehors de la Juventus de Turin (11 millions d’euros de recettes de billetterie), aucun cador du foot européen n’affiche d’aussi piètres résultats. La raison de cette baisse ? L’OL l’impute
“essentiellement à la non-qualification du club en Champions League (-3 M€) et aux moindres performances en coupes (-1 M€)”. Mais ce n’est pas le seul poste qui décline. La baisse est générale : droits télé (-28 %), publicité (-12 %). Dès lors, si Lyon ne remplit pas Gerland, comment va-t-il pouvoir faire le plein dans un stade de 60 000 places à Décines ? C’est la question simple que tous les supporters se posent.
Commercialisation débutée
“À Lille, avec le nouveau stade, le nombre d’abonnés a doublé, passant de 15 000 à 30 000”, explique Thierry Sauvage, directeur général de l’OL Groupe, avant d’ajouter que,
“quelle que soit la configuration sportive, on constate que la hausse des recettes de billetterie va du simple au triple dans les nouveaux stades. Au Bayern de Munich, le championnat est vendu à 100 % avant même le premier match à l’Allianz Arena.” Si, à l’OL, les dirigeants restent si confiants, c’est probablement parce que la commercialisation du stade a déjà commencé en coulisses et donne des indices très satisfaisants.
“Les choses s’accélèrent et tout cela va pouvoir aller plus vite dans les deux ans à venir. Mais, d’ores et déjà, les contrats vont plus en profondeur”, avance M. Sauvage. En clair, certaines négociations se sont concrétisées depuis le lancement des travaux. Des loges sont déjà vendues, des discussions avec des sociétés françaises et étrangères pour le naming (en français, payer pour donner son nom au stade) ont repris.
L’OL en espère d’ailleurs un produit de 100 millions d’euros sur quinze ans. Mais le futur stade des Lumières sera l’un des rares stades européens à s’inscrire dans un projet plus global avec des infrastructures de loisirs, de bien-être, des hôtels et de nombreux autres programmes annexes. Pour Thierry Sauvage,
“le business-model du futur stade est difficilement benchmarkable. Nous avons peu de bases pour comparer en Europe. Ils serviront pour des rencontres sportives, mais l’intérêt de posséder son stade à 100 % c’est avoir la possibilité de vendre des loges à l’année pour des événements qui ne seront pas uniquement d’ordre sportif”. De plus, les investissements pour la réalisation du stade (450 millions d’euros, auxquels il faut ajouter les accès, largement payés par la puissance publique) échapperont totalement aux principes du fair-play financier, à savoir l’équilibre entre dépenses et recettes. Un club ne peut dépenser plus qu’il ne gagne.
Tout bon ?
Mais l’investissement dans des installations ou des équipements ainsi que les coûts de formation des jeunes n’entrent pas dans le décompte des dépenses couvertes par les recettes imposé par le fair-play financier.
“De surcroît, en instituant un équilibre “requalifié”, qui ne tient aucunement compte des dépenses d’investissement et en formation, l’UEFA a souhaité permettre à tous les investisseurs de miser d’abord sur les infrastructures (et les recettes de billetterie et d’hospitalité qui en découlent) ainsi que sur la formation pour accroître les ressources des clubs, avant d’envisager une progression de la masse salariale”, soulignent les auteurs du rapport d’information parlementaire sur l’application du fair-play financier aux clubs français, parmi lesquels on retrouve Thierry Braillard, député du Rhône. Selon ce rapport, l’OL aurait donc tout bon grâce au stade et à son centre de formation, l’Académie, deuxième européen derrière la prestigieuse Masia du FC Barcelone et juste devant le Real Madrid. Mais il y a un bémol pour les auteurs du rapport :
“Dans le football contemporain et à l’heure de l’immédiateté médiatique, il n’est pas sûr que cette logique, pertinente sur la durée, corresponde aux attentes des investisseurs internationaux, soucieux de notoriété et de résultats à court et moyen terme.”
L’enjeu pour l’OL est donc de gérer temps long et temps court : celui de la construction du stade et du retour sur investissement, et la période actuelle de dégraissage de la masse salariale et d’accumulation de résultats médiocres qui l’entraînent dans un cercle vicieux de baisse continue de ses recettes. Pour Frédéric Bolotny, économiste du sport, c’est principalement le retard pris par l’OL dans la réalisation du stade qui a handicapé le club de Jean-Michel Aulas :
“Le stade devait être livré initialement en 2010-2011, à un moment où le club continuait de vivre sur son apogée. Il est urgent pour Lyon d’avoir son stade pour changer totalement de dimension et de modèle économique. En attendant, il faut faire le dos rond”, explique-t-il. Si l’on veut être optimiste avec Aulas, Lyon ne serait donc pas tout à fait encore devenu un club de deuxième catégorie. La période actuelle démontre plutôt qu’il prépare son retour parmi l’élite européenne à moyen terme. Mais le stade seul n’y suffira pas et encore moins une bande de gamins issus du centre de formation avec dix matchs de CFA pour toute expérience.
La Bourse, grande inconnue
Comment va se comporter la Bourse lorsque le stade de Lyon sera livré ? Pour les dirigeants de l’OL, il est difficile d’anticiper la réaction des marchés. Manchester United pèse 3 milliards de dollars en Bourse et Arsenal a été valorisé à près de
1 milliard. Lyon fait figure de nain. Sa valorisation boursière atteint 26 millions d’euros.
Elle atteignait plus de
300 millions lors de son introduction en Bourse, en 2007. Mais, alors qu’en 2007 le club pesait 10,5 % du DJ Stoxx Football (l’indice boursier européen du football), au même niveau que la Juventus de Turin, le club lyonnais n’en représente plus que
2,63 % au 30 août 2013. À la même date, le poids de la Juventus était à
9,6 %, un point de moins seulement par rapport à 2007. Mais la Juve est propriétaire de son stade. La loi de 2007 qui autorisait la cotation des clubs de sport le leur permettait à condition de procéder à
“l’acquisition d’actifs destinés à renforcer leur stabilité et leur pérennité”. Pour l’économiste Michel Aglietta, il n’y avait
“aucune nécessité, ni urgence, à faire entrer les clubs de football en Bourse”
Pendant 3 ans, ça va être pauvre à l'OL, tant que nous n'avons pas de sous à mettre pour recruter. Mais ensuite, nous allons être une véritable machine de guerre. Même si le PSG et Monaco sont sur une autre planète.
Mais au moins, notre argent sera "propre" et proviendra d'un vrai investissement, d'une leçon économique
c'est vraiment pas le moment de lâcher votre club, ce serait un immense acte de "footixerie", d'autant que si vous jouez le jeu du soutien votre stade rapportera gros!
kaiser21