En 1998,
Marvel confie à
Joe Quesada et
Jimmy Palmiotti le lancement du label
Marvel Knights, censé relancer les ventes de séries en berne comme Daredevil, les Inhumains, Black Panther ou le Punisher. Tout en assurant la ligne éditoriale de la collection, le duo décide d’œuvrer sur la série Daredevil, respectivement au dessin et à l’encrage, tandis qu’il confie le scénario à leur ami
Kevin Smith, réalisateur des films
Clerks et
Dogma. Le moins que l’on puisse dire aujourd'hui de toute cette opération, c’est qu’elle fut une belle réussite, à tel point que son succès propulsa
Joe Quesada au poste de rédacteur en chef de
Marvel en 2000.
Mais revenons plus particulièrement au relaunch de l’homme sans peur avec
«Sous l’Aile du Diable» (Guardian Devil en Vo), soit les huit premiers numéros de ce Daredevil V. 2.
Largué une fois de plus par Karen Page, l’amour de sa vie, c’est à l’église et en pleine confession que nous retrouvons un Matt Murdock en proie à la dépression. Une séance bien vite écourtée cela dit puisque ses hyper-sens le poussent à s’éclipser pour voler à la rescousse d’une adolescente et d’un bébé pourchassés dans une rue voisine. Stoppant les criminels mais perdant la trace de la jeune fille, il ne lui faudra guère attendre longtemps avant qu’elle ne se présente d’elle-même à son cabinet d’avocat, accompagnée de celui qu’elle déclare être son enfant. Elle révèle également à Matt qu’elle connait sa double identité et lui tient un discours étonnant avant de lui confier sa progéniture et de disparaitre.


« L’ange m’a dit que vous étiez Daredevil. »
« Il vous arrive de lire la Bible ?
Le Rédempteur viendra sauver les bons et punir les mauvais. Cet enfant est le Rédempteur. Il jugera les hommes dans trente ans. Vous devez le protéger contre ceux qui nous traquent. »
« Aidez-nous Mr Murdock. L’ange m’a dit que vous étiez bon. »
Matt se retrouve donc bien malgré lui obligé de jouer les nounous tout en enquêtant sur cette histoire mais un vieil homme se présente alors lui aussi à son cabinet et lui donne un tout autre son de cloche.
« On vous a confié un rouage de la machination qui précipitera la fin du monde. Le nouveau-né.
Je comprends votre réticence à admettre ce que je vous dis, Matthew. Cependant, j’ai bien peur de ne pas avoir le temps de m’étendre davantage.
Pour résumer, mon organisation trouve de très mauvais goût que l’antéchrist ait été confié à un homme qui revêt parfois … un habit de diable. »
« Le mal souillant tout ce qu’il touche, vous mettez vos proches en danger. »
Il n’en fallait pas plus pour déboussoler Murdock, d’autant plus que la mise en garde du vieil homme ne tarde pas à prendre forme avec, entre autres choses, le retour d’une Karen Page effondrée qui lui annonce sa séropositivité. Complètement perdu, attaqué et plus parano que jamais, Daredevil ira même jusqu’à tenter de supprimer le nourrisson et n’hésitera pas à agresser son amie Natasha Romanoff.
C’est donc dans cette ambiance complètement folle que
Kevin Smith mène un récit des plus haletant, à la narration et aux dialogues très réussis, qui ne laissera pas l’univers du diable de Hell’s Kitchen indemne. Seul le dénouement rationnel de toute l’intrigue pourra décevoir après toutes ces envolées bibliques, le scénariste se jouant autant de son personnage que du lecteur au final. Mention spéciale pour le grand
Joe Quesada qui illustre ces huit épisodes (à une époque où l’annonce d’un numéro réalisé par ses soins devient un évènement, cela fait bizarre) avec un trait encore très cartoony qui m’a beaucoup rappelé les prestations de
Greg Capullo et
Tony S. Daniel sur la série
Spawn. Un vrai bonheur !
Vous pouvez retrouver
Daredevil Sous l’Aile du Diable en vous procurant le Marvel Select du même nom, disponible dans toutes les bonnes crémeries pour environ 16 euros. A noter que la version Marvel Deluxe (format over-size, couverture dure) se trouve elle aussi toujours dans le commerce et qu’elle est bien plus volumineuse puisqu’elle comprend également les numéros 9 à 15 qui couvrent un nouvel arc écrit par
David Mack. Un format plus grand, plus gros et plus beau mais bien évidemment plus cher puisqu’il vous en coûtera environ 28 euros.
Et enfin, bien que ce ne soit pas une obligation, je conseille vivement la lecture de
Daredevil Born Again avant de lire
Sous l’Aile du Diable étant donné les liens assez étroits que peuvent entretenir les deux œuvres.