« L'arrivée de Paul est la meilleure chose qui soit arrivée à Paris depuis des années... » Bernard Lama, gardien de la légende parisienne et des amitiés qui ne se dénouent pas, a toujours éprouvé une sorte d'admiration pour ce grand Breton posé, parfois inattendu sans pour autant tomber dans l'imprévisible, et tellement avare de mots. Ces mots qui lui font un peu peur et qu'il considère être à l'origine de tous les maux du football. Forcément, Paul Le Guen ne ressemble en rien à Bernard Lama, le bouillant et suffisant gardien guyanais. L'homme qui crache ses vérités à tout-va pendant que le second fuit les médias.
Le Guen providentiel ? « Si un joueur n'éprouve pas de respect face à quelqu'un qui a gagné une coupe d'Europe et un titre de champion comme joueur et trois autres en tant qu'entraîneur, c'est à désespérer. Tout le monde ne peut pas jouer au Paris SG, mais tout le monde ne peut pas non plus y entraîner ! » Lama, encore et toujours.
Depuis que Paul Le Guen a officialisé son retour dans le club de ses premières amours, le mois dernier, ses anciens coéquipiers se sont davantage exprimés que le principal intéressé. Tous ont loué son élégance, son attitude digne, quelles que soient les circonstances, ainsi que son professionnalisme.
« Il est équilibré, correct, droit », selon Ricardo, aujourd'hui patron des Girondins de Bordeaux, « calme, réfléchi, non dénué de charisme », pour Alain Roche, actuel directeur sportif du club parisien. Des mots, encore et toujours, des paillettes verbales qui saupoudrent depuis si longtemps l'image de ce garçon bien propre sur lui.
« J'ai peur, mais c'est une bonne peur »
Pourtant, il en est d'autres, comme urgence, combat, maintien, charbon, tripes, qui sont utilisés en ce moment pour définir la si peu romantique situation sportive du PSG. Un club au bord du gouffre, de la relégation. Un club tout feu tout flammes qui a surtout besoin d'un pompier. Ce que n'a jamais été Paul Le Guen. A certains moments, il faut savoir travailler dans l'improvisation. « Dans l'urgence, soutient Bernard Lacombe, conseiller du président Aulas à Lyon. Et ça, il n'aime pas. Paul préfère les choses bien préparées. »
A Paris, où chaque victoire est considérée comme un aboutissement universel et une défaite comme un drame planétaire, on ne laisse jamais de temps au temps. « Je le sais, a admis Paulo-la-Science lors de sa conférence de presse d'intronisation. J'ai peur, bien sûr, mais c'est une bonne peur. J'ai même envie que les joueurs aient peur avec moi. Cela ne m'empêche pas d'arriver au PSG bourré de motivation. »
Concernant le club de la capitale, la situation est brutale, voire sauvage. « Les joueurs ne devront pas faire preuve de leurs qualités techniques, mais plutôt de leurs ressources physiques et mentales, expliquait dans France Football Bernard Brochand, ancien dirigeant et actionnaire du PSG et actuel maire de Cannes. Ce club n'a pas la culture du maintien, les joueurs non plus ! » Et le nouvel entraîneur ? Bercé par ses certitudes, l'ancien capitaine des années Denisot va devoir trouver les mots, ces fameux mots qu'il exècre, afin de redonner une âme et un sourire à cette équipe en mal d'affection.
Gérer l'égo hypertrophié des stars
Pour cela, il sera aidé par sa garde rapprochée. Ses hommes de confiance. Ses fidèles. Ceux qu'il contrôle indirectement et qui ne se substitueront jamais à sa pensée. Yves Colleu, l'homme de l'ombre, l'homme à tout faire, son adjoint depuis les années rennaises. Joël Le Hir, kiné et ostéopathe du PSG jusqu'en 2003 et Stéphane Wierterlak, le préparateur physique. Une garde rapprochée et entièrement dévouée qui l'aide à gérer l'égo hypertrophié des stars.
Les stars, ces grands enfants capables de verser une larme à la sortie de l'entraînement pour une petite éraflure sur l'aile de leur Porsche, qui appellent quotidiennement les secrétaires du club pour remplir leurs feuilles de sécurité sociale ou le directeur sportif afin de connaître les prix les plus bas pour l'achat d'une machine à laver le linge. Ces stars, Paul Le Guen, diplômé en sciences économiques, ne les connaît pas. Pas très bien, ou fait semblant d'être à leur écoute de leurs problèmes existentiels.
Il y a quelques années, encore joueur, Paulo s'était un jour lâché avec un journaliste de L'Humanité. « Je ne recherche rien et surtout pas la notoriété. Avec la presse, j'impose des limites. J'essaie de ne rien subir. C'est mon tempérament et je ne cherche pas à tricher. La notoriété, si l'image qu'on a de cette notoriété, vous revient différente de ce que vous êtes réellement, cela ne m'intéresse pas. Mais bon, je dois l'avouer, mon image est sûrement celle que donnent les journaux. »
Bientôt, le parcours du combattant
Quelques années plus tard, alors entraîneur de l'OL, le bon samaritain, celui à qui l'on donnerait le Bon Dieu sans confession nous avait confié : « Je ne joue pas avec vous. Cela tient à mon éducation, à mon caractère. Parfois, je dis des banalités, mais c'est volontaire. Le plus souvent, je ne dis rien, c'est comme une forme de défense. D'un côté, je manque de spontanéité par rapport à la notoriété, mais en même temps, c'est ma façon de prendre du recul. Je ne suis pas froid. Vous savez, c'est tellement facile de paraître et de parader dans le foot d'aujourd'hui. »
Il y a trois mois, sur un site Internet écossais, un supporter désemparé des Glasgow Rangers avait expliqué son amertume en ces termes : « Il est aussi utile ici qu'un sandwich à la viande dans une convention pour végétariens ! »
A Paris, au sein de ce club qui se nourrit trop souvent d'illusions, Paul Le Guen va devoir emprunter le parcours du combattant. Un exercice de style qui risque, quand les supporters viendront démonter sa voiture au Camp des Loges, à Saint-Germain-en-Laye, de modifier quelques-uns un de ses critères de réflexion.
le psg......c'est david copperfield qu'ils leur faut