DE FEU ET DE LARMES
Par Benoît LALLEMENT, à PékinLe relais 4x100 m hommes (2e en 3'08"32), composé de Fabien Gilot, Amaury Leveaux, Frédérick Bousquet et Alain Bernard, est battu sur le fil par les Etats-Unis (3'08"24, record du monde). Et Hugues Duboscq décroche le bronze sur 100 m brasse, comme à Athènes. En revanche, Laure Manaudou lâche son titre sur 400 m en terminant dernière. Coralie Balmy finit quatrième.
Malgré un excellent chrono, les relayeurs ont dû laisser la médaille d'or aux Etats-Unis.
Les résultats du jour
Les réactions des relayeurs
Duboscq : «Ce n'est pas fini»
L'analyse de Claude Fauquet
Tout sur la natation
La journée des Français
Tout sur les JeuxC'est l'une de ces matinées qui, voilà quelques années, auraient comblé la natation française. Elle aurait même suffi à lui garantir un bon bilan olympique. Une médaille d'argent, une de bronze, c'est en effet déjà mieux qu'à bien d'autres Jeux, ceux de 2000, 1996 ou 1988 notamment. Mais il suffisait de regarder les visages bleus, ce lundi, dans les entrailles du Water Cube pour comprendre que la déception brouille le bonheur. L'équipe de France paye ainsi le prix de sa récente excellence. Elle découvre la difficulté du quotidien d'une équipe qui vit avec des rêves de grandeurs.
Tout avait pourtant si bien commencé. Avec le bronze arraché par Hugues Duboscq lors de la finale de 100 m brasse la plus rapide de l'histoire... à distance de Kitajima et son record du monde (58''91), mais tout près du Norvégien Dale Oen (59''20), le Havrais (59''37, record de France) retrouva les qualités de bagarreur égarées durant deux saisons. Une si belle résurrection au bout de longs mois de doute. Et il y avait sur Pékin des parfums de 2004 quand, à Athènes, la "Dube" avait, de son premier bronze olympique, lancé l'euphorie et notamment conforté Laure Manaudou dans ses envies et ses possibilités d'exploit sur 400 m. Mais la magie n'opère pas toujours, en tous les cas pas avec Manaudou.
Qualifiée de justesse la veille au soir (8e et dernier temps) et intrigante quelques minutes plus tôt sur 100 m dos (8e temps également des demi-finales, très loin des meilleures), la tenante du titre essaya pourtant d'emballer la course, celle de tous ses succès passées. Et de toutes ses difficultés du moment. Car après être passée en tête au 150 m, encore dans le coup avant le virage à mi-course, elle lâcha totalement prise ensuite (8e et dernière en 4'11''26). Une triste fin pour ce qui était très certainement son ultime 400 m. Un abandon sans doute plus mental que physique. Lionel Horter, son entraîneur, l'assure, elle avait pourtant les moyens d'être à la bagarre pour la gagne, jugée dans des eaux très raisonnable (4'03''22). Le problème est ailleurs. Et à régler très vite puisqu'une finale du 100 m dos âpre comme jamais l'attend demain matin contre notamment Coventry et son record du monde des demies (58''77), qu'un 200m dos également extrêmement dense se profile à partir de jeudi. Très touchée, elle quitta la piscine les yeux rougis enfouis dans sa capuche.
Maudits huit centièmes
Et c'est donc le règne d'une autre qui commence sur 400 m, celui de Rebecca Adlington, 19 ans, première Britannique sacrée sur la distance et révélation de la saison au bout d'une finale totalement inattendue. Moins rapide que prévue et surtout ratée par l'Italienne Pellegrini, la recordwoman du monde décidément très friable (5e en 4'4''56). L'Américaine Hoff, qui n'arrive pas à gagner à Pékin, termine deuxième (4'03''29) et Jackson, une autre Britannique, troisième en 4'03''52.
Il ne manque que huit centièmes à Coralie Balmy (4e en 4'03''60) pour créer la belle surprise et atténuer un peu la déception Manaudou. Mais il devait être écrit que ce 11 août serait marqué par des "maudits huit centièmes". Car c'est exactement ce qui sépara la France des Etats-Unis, l'argent de l'or du 4x100 m, une course qui restera dans l'histoire des Jeux. Par son intensité. Sa dramaturgie aussi. En tête au bout du troisième relais, après le bon boulot d'Amaury Leveaux, Fabien Gilot et Fred Bousquet, Alain Bernard s'élança avec 0''59 d'avance sur l'Américain Lezak (qui succédait à Phelps, Weber-Gale et Jones). Mais surfant parfaitement sur la vague de l'Antibois qui n'eut pas le réflexe de s'écarter de la ligne, le Californien remonta progressivement. Et, grâce au meilleur 100 m lancé de l'histoire (46''06 contre 46''73 à Bernard, son meilleur perso) vint mourir devant le Français. Pour... huit centièmes. L'Amérique avait explosé son record du monde de la veille (3'12''23) de près de quatre secondes : 3'08''24. La France celui d'Europe dans les mêmes proportions : 3'08''32. Et s'il s'agit de la première médaille olympique tricolore en relais de l'histoire, cet argent a un petit goût d'amertume, celui d'être passé si près d'un énorme exploit.
Bernard devra pourtant très vite digérer. Parce que les séries du 100 m l'attendent mardi et que Sullivan, en lui chipant le record du monde au départ du relais (47''24 contre 47''50), lui a rappelé que rien ne serait facile.