-I will always love you!

Bleue eut un sursaut et le regarda plus intensemment encore. Elle sourit faiblement, son visage imprégné de pleurs s'illuminait.
Ses derniers mots étaient des paroles de chansons. Cure. Un groupe de sa jeunesse, le plus réconfortant des groupes au moment de déprime.
Le collège. Là où elle l'avait rencontré.Trop de mauvais souvenirs. Lui et la musique étaient les seuls bons qu'elle avait eu.
Les mots de Robert Smith l'avait encore consolée, un peu du moins. Assez pour qu'elle lève le regard vers la ligne verte. L'horizon. Il était mort. Elle cessa de pleurer, plissa sa jupe et ses lèvres. Elle respira. Elle embrassa les lèvres mortes une dernière fois. Elle prit le temps de se regarder dans le miroir. Elle s'étonna : ses yeux rougis, sa bouche gonflée par le chagrin, ses joues roses et ses cheveux lâchés lui rapellait le collège. Négligée, rebelle. Voulait faire la révolution communiste. Maintenant, elle se tuait au travail pour la société, autrefois tant critiquée par son esprit d'adolescente. Lucien lui avait toujours reproché de ne pas conserver ses idéaux de jeunesse. Elle n'avait même pas vingt-cinq ans! Elle se promit soudain de mourir négligée, nihiliste, en hommage à lui.
Elle s'allongea près de Lucien, décoiffa un peu plus sa chevelure brune. Elle voulut prendre le couteau et, tout en tenant la main de son bien-aimé, se faire seppuku (ou arakiri, comme il aurait préféré qu'elle dise). Le sang chaud coulerait sur les dallages impeccables, sur les murs trop blancs. Le sourire de l'éternité aux lèvres, elle espérerait le rejoindre, là bas ou là haut.
Mais le suicide ferait plaisir aux japonais, à sa famille, qu'elle haïssait et lui empêcherait d'accrocher les photos de Lucien au Louvre. La France, elle aimait tant ce pays. Pays de liberté, de l'Art. Elle eut un sourire, encore. Quand elle avait dit ça à Lucien au collège, il l'avait prise pour une folle: «Quoi? La France? Un pays plein de flics, de moutons effrayés par la liberté qui s'en vont voter par million pour l'ordre et la sécurité!». Elle aimait quand il reprenait les mots de Renaud pour lui parler. Elle aimait la musique et, surtout, elle l'aimait, lui. Mais il ne connaissait pas le Japon. Le pays où tout vaut mieux que le déshonneur, le pays où les grévistes ne sont pas considérés comme des héros mais comme des traîtres à leur sang et à leur pseudo-patrie... «Mais la France devient comme ça, mon ange, la France aime les lois, les villes calmes pleines de riches qui s'empressent de s'acheter le nouveau parfum Dior ou Channel à 100 euros le millilitre, tandis que leurs enfants lançent des regards de dégoût aux clochards environnant. Et quand l'un d'eux demande «Mais maman, pourquoi le monsieur il peut pas manger et il a les habits tout sale?» «Parce qu'il a eut des mauvaise notes à l'école et qu'il est certainement trop fainéant pour chercher un travail convenable comme la plupart des gens. L'argent que doivent payer papa et maman chaque mois sert à garder en vie des incapables comme lui, tu comprends? Il n'a que ce qu'il mérite, tu ne trouves pas?» A quoi le petit aquieçe vigoureusement, en culpabilisant pour le 12 qu'il venait d'obtenir en mathématiques. Une pensée douloureuse lui vient à l'esprit qu'il pourrait devenir comme le monsieur plus tard, et être autant critiqué par sa maman.
Et voilà! Les gentils français traumatisent à vie leur jeunesse pour qu'elle ne fasse pas la révolution! Ah, oui, c'est terriblement beau la France! Bâtie de plus en plus sur le modèle américain, avec des fachistes à chaque coins de rue, prêt à bastonner les «sales immigrés»avant qu'ils deviennent terroristes?
Et puis... L'Art, dis-tu? Il n'y a plus d'artistes en France. Tous étouffé par notre gouvernement chéri. L'Etat censure, oui, même en France, le pays de la tolérance et de la libre pensée!
Voilà comment Lucien parlait. Il avait quatorze ans, des parents qui votaient Le pen au mois de mai. Mais il parlait comme ça, et la haine que Bleue éprouvait vis-à-vis de son pays natal était semblable à la sienne.
Mais le Japon est pire Lucien, gémissait-elle, tu ne le connais pas, le Japon est dix mille fois pire. Les gens sont des limaces, des soldats de plomb gavée de la mentalité-religion nippone, la religion qui dit «vous êtes des moins que rien, passez votre vis à bosser pour payer votre pierre tombale, dixit Trust, ne vivez que pour que l'Empire japonais demeure la deuxième puissance mondiale! Seulement si vous vous crevez au travail on pourra battre les Amerlocks!»
C'est ça le Japon.
«C'est ça mon pays, Lucien. Je suis venue en France, persuadée comme mes parents de voir le pays de la liberté et du bonheur pour tous... C'était beau comme un rêve.»
Et Bleue n'avait pas été déçue. Elle croyait en la France.
Pauvre Candide...........
(C'est de l'implicite, de l'implicite!
Love song - The Cure
rien que quand tu lis la première phrase, tu sais que ce livre va être génial...
(j'espère que tu lis les coms de tes 1ers articles^^)