Le journalisme est K.O ! Anéanti, par ses adversaires, il agonise au sol. Rien ne semble le sortir de sa léthargie. Et ce n'est pas le peu d'énergie détenue qui le rétabliront. Quant aux internautes, ils s'amusent à se substituer maladroitement à lui. La situation est critique... A la limite de la crise.
Le quatrième pouvoir, dénonciateur des injustices, n'agit plus comme tel. Gouverné, par les corporations et le profit, il est devenu insipide et consensuel jusqu'à la moelle.
TF1, chaîne aux forts audimats, s'affaire à ne pas poser des gênantes questions à ses amis-invités, au contraire ! Elle passe son temps à les lustrer. Au point qu'ils resplendissent. Et si jamais les politiciens disent de grossières erreurs, JPP (Jean Pierre Pernaut), PPDA (Patrick Poivre D'Avor) ou Claire Chazal, ces pseudo-journalistes, passent outre. Aucune polémique, aucune critique, aucune analyse mais lissage (1), complaisance et politiquement correct. Ce qui leur a valu, paradoxalement,
un retour de bâton par leur ami Sarkozy. Maintenant, le patron de TF1, Patrick Le Lay, veillera à mieux astiquer Sarkozy que ces confrères.
Mais ce phénomène ne concerne pas que cette chaîne, il s'étend à tous les médias. Des chiffres, des chiffres et encore des chiffres ! Pour survivre, c'est la condition sine qua non. Au point de remettre en cause les règles de déontologie journalistique. Comme l'atteste Yves Agnès (1) :
La liberté de la presse ne se conçoit que dans ce contexte déontologique fort d'une recherche de la vérité, d'une pratique scrupuleuse du métier. Elle n'a pas d'objet lorsqu'est bafoué le sens même du mot vérité. Les journalistes semblent l'avoir oubliée. Obnubilés par
la recherche du scoop (paragraphe 2), ils trompent leur public et renient
leur devoir.
Et ce n'est pas les amateurs qui régleront le problème. S'octroyant le droit de remplacer les journalistes, ils se considèrent meilleurs qu'eux. Sottise et diffamation... La plupart des internautes, créant sites et blogs, ne possèdent pas
d'esprit critique pour traiter l'information, comment osent-ils prétendre à ce statut ? La recherche de la véracité des propos ? Pénible, pour eux ! La réflexion ? Difficile ! La méfiance des commerciaux ? Sornette ! La pire, dans cette surabondance d'informations, est que leur pouvoir a considérablement progressé dans ce gigantesque flux contaminé. Leur avis creux, irréfléchi constitue un nouveau pouvoir. Et aide les corporations à étendre la domination de la Pensée Unique. Les couteaux sur la table, les protagonistes face à face, la lutte de pouvoir s'annonce très sanglante.
Fate
(1)
Journal télévisé : la machine à délaver, de l'ex-journal Ecrans
(2)
Ex-rédacteur en chef du journal Le Monde et France Ouest. Il a été aussi directeur du Centre de formation et de perfectionnement des journalistes. La citation est extraite de son livre Manuel de journalisme : Ecrire pour le journal, La Découverte, juin 2002.