Il y a quelques semaines, le président de Square Enix Yôichi Wada surprenait tout le monde en déclarant publiquement son désintérêt pour la PlayStation 3 et la Xbox 360. « Il y a bien trop de caractétistiques, et il faut aussi posséder une télévision HD, une connexion haut débit et une très bonne connaissance du jeu vidéo. Ces consoles ne correspondent pas à la demande actuelle. D'ici un ou deux ans, elles se vendront mieux », expliquait-il au Financial Times.
Mais Dieu sait s'il a raison. Précipitée par Microsoft et sa console bâclée, la génération qui vient de commencer est clairement prématurée : la PlayStation 2, qui continue à accueillir des grands jeux encore cette année, aurait pu vivre encore au moins un an sans trop montrer de signes de vieillesse, les développeurs ayant réussi à en révéler des capacités cachées étonnantes. Ce sont ses concurrentes, mortes par K.O., qui ont été contraintes de se trouver des remplaçantes. Et Sony de s'engouffrer dans la brèche, pour ne pas laisser la concurrence s'accaparer le marché.
Nous voici donc avec trois consoles qui ne sont pas vraiment à l'aise sur ce marché : la Xbox 360, après avoir accusé de sérieux problèmes techniques en arrivant un an avant les autres, a droit à de nouveaux ajouts dont les développeurs ne pourront rien faire puisqu'ils ne sont pas sur la console d'origine ; la PlayStation 3 est beaucoup trop en avance sur son temps et accuse de ce fait un prix presque inadmissible pour une console ; et la Wii cherche à faire revivre la génération précédente dans un dernier élan qui risquera d'être coupé quand les deux autres consoles auront trouvé leurs places.
C'est bien pour cela que Square Enix se réfugie sur DS, ce qui explique en quoi il n'est finalement pas si déplacé de sortir Dragon Quest IX sur cette console portable. Mais ce n'est pas tout. Yôichi Wada se justifie : « Nous avons choisi la Nintendo DS car c'est la console sur laquelle nous pouvons toucher le plus grand nombre de personnes, y compris celles qui n'ont jamais touché à des jeux auparavant ». Dans l'optique du président de Square Enix, l'objectif est donc de séduire le plus large public possible.
« Une nouvelle catégorie de joueurs est apparue sur le marché. Nous nous devons de faire des jeux pour tout le monde », ajoute Yôichi Wada. « Il y a plusieurs années, nous ne pouvions nous concentrer que sur la PlayStation ou la GameBoy, mais depuis, l'environnement a totalement changé ». Un mode de pensée qui explique le récent intérêt porté par sa société sur les serious games, l'un des moyens les plus radicaux pour démocratiser encore plus le jeu vidéo, mais un risque clair pour le vrai jeu, qui demande souvent plus d'attention sans pour autant toucher un aussi large public.
Les développeurs tentent cependant de sauver les meubles. Il est vrai que Final Fantasy XIII était prévu sur PlayStation 2 à l'origine, preuve que ses concepteurs n'imaginaient pas la nouvelle génération les atteindre aussi rapidement. Le 13ème épisode est donc passé sur PS3, mais, contrairement aux craintes logiques du responsable financier, les développeurs semblent plus que jamais heureux de pouvoir afficher leurs ambitions. Signe qu'ils n'entendent pas sacrifier la créativité et la profondeur de leur création au profit d'impératifs financiers, un sacrifice qui avait pourtant sans doute coûté à FFXII son réalisateur.
Si les grands manitous actuellement en charge du projet Fabula Nova Crystallis ont déjà souligné l'importance jouée par la puissance de la PlayStation 3 dans leur processus créatif, ils ont visiblement envie de planter encore davantage le clou. Et c'est Tetsuya Nomura qui s'en est à nouveau occupé, dans le magazine japonais Dengeki PlayStation.
« Il n'est pas seulement question de la beauté des graphismes, mais aussi du nombre de mouvements qu'on peut intégrer en même temps et de jusqu'où va notre imagination et nos idées vont », précise ainsi le réalisateur et designer de Final Fantasy Versus XIII. « La PlayStation 3 est la machine qui nous permet d'exprimer au mieux notre imagination. »
La puissance démesurée de la console les stimule à tel point qu'ils veulent transformer la série. Nomura explique en effet : « Il y aura beaucoup d'action dans Final Fantasy Versus XIII, mais au lieu de battre des ennemis simplement du point de vue du spectateur, je veux que les joueurs aient l'impression de faire vraiment partie de ce monde. Nous cherchons à savoir s'il est possible ou non de produire un FF ayant l'intensité d'un jeu de tir à la troisième personne. En ce sens, ce jeu sera vraiment un autre type de FF ».
Mais comme construire un monde complet et immersif ne va pas sans obtenir un budget colossal et faire travailler une large équipe pendant de nombreux mois, il y a fort à penser pour que la partie financière de Square Enix ne laisse passer aucun excès. C'est la dur loi de la rentabilité. Mais il faut bien se rendre à l'évidence que l'abondance de jeux DS, telle qu'on peut la constater ces temps-ci, est aussi là pour remplir facilement les caisses de la société : des jeux au coût de développement modeste suffisent à se vendre à 500.000 voire 1 million d'exemplaires ! Il ne reste plus à Square Enix qu'à tester le succès de ses jeux sur Wii.
Source: FF World.com